Man on the Internet - Hollow Knight - Grimm

Un éclair zébra le ciel. La foudre sembla s’abattre sur le palais. Il pleuvait des cordes. « Hum… » fit Cyrius, songeur, en interrompant sa mélodie. Il y avait quelque chose d’anormal.

Je plissai les yeux lorsque j’entendis la porte de la salle du trône s’ouvrir. Les pas qui retentirent dans le silence de la pièce manquaient très légèrement de coordination, comme si la silhouette qui se détachait à peine de la pénombre avait été mal construite. La Couronne Noire sur la tête, je demeurai silencieux. J’allais devoir le tuer pour m’avoir surpris. Je me redressai. Le trône était surélevé par rapport au reste, séparé de l’ensemble par quelques marches sur lesquelles l’épais tapis rouge continuait de s’étendre. Je dominais l’intrus par ma position. Je serais magnanime : je le laisserais parler puis, une fois qu’il me fatiguerait, je remonterais le temps pour le tuer avant même qu’il n’entrât ici. Néanmoins, là où je pensais entendre des reproches, seul le tic-tac régulier de l’horloge présente dans la pièce me répondit. Je pouvais presque entendre le son de l’air ambiant s’infiltrer dans les conduits de l’orgue. Les pas continuaient, lents, trop lents pour quelqu’un dans sa position. Il aurait dû accélérer l'allure à la seconde même où il m’avait aperçu, assis dans la chaise royale et portant un bijou qui ne m’était pas destiné. Je commettais une faute et, pour mon offense à Ethelba, la sentence serait immanquablement la mort. J’en avais conscience mais ne me souciais pas de lois qui me paraissaient de plus en plus futiles. Pendant que mon double périssait dans la dépression, je devenais plus puissant. La Déesse avait peut-être changé d’avis face à la faiblesse de Kaahl. Comment pourrait-il être digne de sa fonction ? La Lune Noire me sourirait à moi, car j’étais le véritable Élu. Le Temps me donnerait raison. Faute de pouvoir asseoir sa position sur ce trône, je l’en éjecterais pour prendre sa place.

« Je me demandais quand est-ce que vous alliez venir. Je vous attendais. » Le visage de l’inconnu apparut à la lueur d’une flamme qu’il créa au bout de son index tendu. Il était blond et semblait aussi chaotique que maladif. Il souffla sur le feu qui s’éteignit. Je plissai les yeux. Il m’avait ébloui à dessein. Cyrius Windsor. « Bouh. » souffla-t-il, à mon oreille. Un rictus agacé m’illustra deux secondes. Comment avait-il fait ? Je remarquai un vide sur mon crâne. Je compris vite mais pas assez. Il était de nouveau à quelques mètres devant moi. La flamme s’alluma de nouveau, juste le temps de me laisser admirer son port royal. Il l’avait placée sur sa tête, en parfaite violation des lois. Il émit un rire malicieux. « Que faites-vous ? » sifflai-je. Il ne répondit pas mais je devinai un mouvement répétitif de sa part. Était-il en train d’enlever sa chemise ? Il ne me fallut que très peu de temps pour me reprendre et retrouver mon calme. Je souris, en me demandant comment j’allais me débarrasser du Chancelier des Ténèbres. Je me levai, en appuyant mes mains sur les accoudoirs du trône. « Je suis celui que personne n’aime devoir attendre. » dis-je, d’une voix sensuellement macabre. « Je vais vous l’apprendre très vite. » Un rire de fouine répondit à ma réplique. La flamme réapparut, n’éclairant que ses lèvres. « Je n’aime pas votre musique. Elle a la tonalité du plagiat. » précisa-t-il, en continuant son œuvre. La lumière m’avait permis de constater qu’il était effectivement en train de défaire les boutons de sa chemise, lentement. Encore un peu. Le Temps serait son ennemi et mon allié. D’ici quelques secondes, il serait à ma merci. Malgré son assurance présente, personne ne pouvait lutter contre la fatalité, celle qui murmurait que la mort attendait derrière la porte. Il savait qui j’étais, visiblement. Encore un proche de mon double que j’éliminerais, à mon plus grand plaisir et à son immense déplaisir. Lorsque Kaahl serait fou de chagrin et de rage, peut-être deviendrait-il enfin digne d’intérêt.

Le blond s’approcha. Le tissu de sa chemise tomba sur le sol. Je souris, décidant de remonter le temps. « Adieu. » lui soufflai-je, avant d’activer ma magie. D’essayer. Je fronçai les sourcils. Plusieurs flammes apparurent en même temps dans la pièce, éclairant mon impuissance. Et je vis. Je vis ce qu’il y avait marqué dans sa chair. Un bruit d’acier fendit l’air. Je sentis une douleur atroce perforer mon ventre. Dans sa main, il y avait une sorte de hallebarde magique, noire comme les Ténèbres. Il ne souriait plus. C’était lui, maintenant, qui me fixait de haut. « Vous devriez partir. » articula-t-il, avec une voix de serpent. Je me téléportai, n’assistant pas aux minutes qui suivirent.

Tranquillement, il retira la Couronne de son crâne, la fixa d’un œil peu envieux et la reposa sur la chaise royale. Sa lance disparut et sa chemise fut replacée. L’air dans les tuyaux de l’orgue se fit plus violent. Un son à moitié étouffé fut produit alors qu’il quittait la pièce en ricanant.

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Fin