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 La Providence

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Siruu Belhades
~ Sorcier ~ Niveau III ~

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◈ Parchemins usagés : 2337
◈ YinYanisé(e) le : 06/12/2015
Siruu Belhades
Mer 27 Jan 2021, 16:36


Siruu observait la pierre aux motifs bleutés. C’était magnifique, dépassant même les descriptions qu’on lui avait faites. En venant ici, sur Awaku No Hi, il savait que c’était tout ce qui compterait. Le reste de l’île — en dehors du Temple de Raanu qu’il comptait bien évidemment contempler — n’avait pas d’importance. En abordant cette terre, il en avait conclu qu’elle était laide, rêche et plus abrupte que l’endroit où les deux peuples secrets vivaient en paix. Ici, les traditions semblaient aussi être plus prononcées, puisque non diluées par ces ombres aux origines si variées. Cette nation de suicidés suscitait d’ailleurs une certaine curiosité, au sein du sorcier. Toutefois, les questions qu’il se posait étaient balayées par la connaissance que pouvaient contenir ces Akésarlha. Oui, il s’était demandé pourquoi il avait observé, sur Awaku No Hi, un lac rouge. Oui, il s’était questionné sur les mécanismes qui entouraient la tâche des ombres. Oui, il s’était interrogé sur les mystères de certaines tribus chamaniques dont il avait à peine entendu parler. Cependant, aussi intrigué soit-il par ces détails-là, ils n’avaient plus d’importance. En cet instant, il n’y avait que Raanu. L’on dit des mages noirs qu’ils sont destructeurs, mais Siruu tenait cette pierre au coin de sa paume avec une délicatesse infinie. Prenant soin de ne pas la serrer, comme si la roche allait s’effriter sous ses mains, il traitait cette Akésarlha mieux que n’importe quel être vivant.

« Vous pouvez la traduire ? La lire ? » La voix provenait de sa gauche. Elle avait surpris le sorcier, quand bien même il avait entendu cette femme venir à lui il y a quelques secondes. C’était Euphrate. Une chamane, qui l’avait accompagné jusqu’ici. Interrompu dans son expérience transcendantale, Siruu cilla. Il avait l’expression d’un benêt de village, que l’aubergiste aurait retrouvé sur le sol au petit matin, à ramper dans les rues après une nuit trop arrosée.

« Je ne suis pas traducteur. » Il déglutit. Au cas où certains se douteraient de son inutilité, l’affaire était conclue. « Mais je peux aider. Enfin, je le pense. » Euphrate acquiesça, sans poser plus de questions. Elle ne voulait ni dire un mot de travers, ni s’ingérer dans les affaires des dieux. Son rôle était celui de guide, et elle savait se retenir d’être trop curieuse. « Bien. Et que puis-je faire pour vous assister, Zeli'Ka'Ya Dasäha'lhm' o Raanu ? » Elle prenait soin de préciser son Hiwa. Il fallait qu’il s’y habitue.

« La maison que vous m’avez montrée… je vais y aller, l’espace d’une heure ou deux. » Siruu insista sur le mot « maison », tressaillant légèrement. L’architecture chamanique n’était pas entièrement au goût du sorcier, mais il avait connu pire. Il fallait garder à l’esprit que les chamans étaient des sauvages, après tout. « Aussi, je n’ai rien emporté en venant ici. Donc, pour mener à bien ce que je compte faire, je vais avoir besoin d’un couteau et d’une bougie. » Euphrate retint un rictus, à l’entente de cette requête. Les runes sorcières — puisqu’il devait s’agir de cela — n’étaient pas réellement un des domaines les plus attrayants, mais elle avait connu pire demande. Il fallait garder à l’esprit que les sorciers étaient des tarés, après tout.



La flamme brûlait, modifiant la cire sous sa force. Le mage noir savait se téléporter, mais n’était pas certain d’être en mesure de revenir à Awaku No Hi s’il la quittait par magie. Pour ainsi dire, il n’avait jamais essayé de se téléporter entre deux territoires aussi éloignés : les expériences des sorciers sur le sujet ne l’avaient pas particulièrement rassuré. La perspective de finir en six morceaux alors qu’il venait à peine d’être élu par un aether n’était pas particulièrement réjouissante. C’était drôle à envisager, ceci dit. Siruu était certain qu’une bonne partie des élus d’Hel’Dra allaient finir en grillades en moins de temps qu’il n’en faut pour le dire.

Aucune liste d'individus choisis par Raanu n'avait été divulguée, ce qui diminuait le risque d’assassinat. Cela étant, ce n’était pas une raison pour courir le risque de terminer dans un arbre sans savoir comment revenir sur l’île. Aujourd’hui plus que n’importe quel jour, il voulait faire preuve de prudence. Alors, il avait décidé de se transporter temporairement en suivant un rituel bien précis. La technique que le sorcier employait consistait à laisser la cire descendre : lorsqu’elle aurait recouvert la plupart de la rune, cette dernière se désactiverait. Là, Siruu serait automatiquement ramené à son point de départ.

Le sorcier ouvrait son secrétaire. Il avait investi dans ce meuble il y a quelques mois. Sculpté dans le bois, verni et capable de contenir une immensité de documents : c’était une affaire, et sans doute l’objet le plus cher de son humble propriété. Cependant, le mage noir n’avait pas de temps à perdre en contemplations. Son séjour ici ne pouvait durer qu’une poignée d’heures. Le sort n’avait pas été perfectionné comme il le souhaitait, mais ce serait largement suffisant pour pouvoir récupérer ce dont il avait besoin.

« Sirh Judah ! Déjà de retour ? » Endora montait les escaliers menant à la cave. Elle avait changé la décoration de la maison : tout apparaissait nettement plus festif. « Je vois que vous vous êtes réapproprié les lieux. » Voilà des semaines qu’il n’avait pas mis les pieds ici. Il ouvrit son secrétaire, mais n’y trouva pas ce qu’il souhaitait. « Dites, vous sauriez où est mon certificat d’accès à la section quatre de la bibliothèque ? »« Ah, ils ont une carte ? » La mine de la magicienne se déconfit. Le journaliste, lui, serrait les dents. Il n’avait pas le temps d’écouter les divagations d’une vieille folle. « Bon, faites vite, dites-moi où est la carte. Je vous avais expressément dit de ne pas toucher mes affaires, pourtant. » Il ne la payait pas et se contentait de lui offrir ce logement vacant. La qualité des services s’en ressentait.

« Monsieur Be- enfin, Sirh Jugurta… je n’ai rien touché. C’est vous qui l’avez prise il y a trente minutes. » Le mage noir ne prononça pas le moindre mot. Cependant, la surprise transparaissait de son expression. « Bon, peut-être pas trente minutes. Une heure. Ou deux. Ou trois, grand maximum ! Vous auriez pas des problèmes de mémoire ? C’est que vous devez vous faire vieux. » C’était drôle à entendre, puisqu’il semblait plus juvénile qu’elle. Cependant, Siruu ne l’écoutait plus. Il réfléchissait. Pour ne pas tirer de conclusions trop hâtivement, il n’y avait qu’une seule méthode.



« Donc, qu’est-ce que vous avez vu ? » La préparation du philtre n’avait pas pris longtemps, mais cela repoussait déjà à plus tard son excursion à la bibliothèque. « Vous êtes venu, je vous ai fait remarquer que vous aviez de nouveaux vêtements. Vous avez dit quelques mots, avant de monter en haut pour faire je ne sais quoi. Vous aviez un carnet à dessin, je crois. Puis vous êtes descendu, vous avez cherché dans le secrétaire, vous avez pris le papier et voilà, paf, en trois pas vous étiez dehors en claquant la porte ! » Souvent, les potions de vérité altéraient le flot de pensée et la manière de parler. Cependant, rien ne changeait avec Endora. Elle était trop habituée à parler authentiquement, sans filtrer ou déformer ce qui lui venait à l’esprit en premier lieu.

« Ce n’était pas moi, dans ce cas. » Siruu marchait inlassablement dans sa cave, pivotant sur ses talons quand un obstacle l’empêchait de continuer de se déplacer. « Vous avez un frère jumeau secret ? Ne vous inquiétez pas, je connais ce genre d’histoires. Je ne vais pas juger. »« Non. Ce doit être quelqu’un d’autre. « Ce devait être un concurrent qui, repérant son apparence, avait décidé de prendre sa place. Ce genre d’histoires n’était pas nouveau : à vrai dire, beaucoup de sorciers craignaient que cela leur arrive.

Le blond hurlait de rage à l’intérieur. Ces derniers mois, les chamans lui avaient appris à tout justifier par la providence. Il avait presque fait la paix avec cette idée ; presque accepté que les choses pouvaient arriver sans raison. Maintenant, il pensait tout l’opposé. Ici, il n’était pas dans la Terre d’Edel. À Amestris, rien n’était l’œuvre des aetheri : tout était manigances, manufactures et autres produits d’émotions humaines négatives. Les habitants de Nementa Corum avaient une conscience collective souillée, infusée dans le marais de leur propre morale putride. Ils sacrifiaient tout pour plus de pouvoir et d’influence. Ils s'imprégnaient des histoires de misères et de vendettas, pour faire proliférer la vermine chez leurs voisins. Même au sein des temples d’Ethelba, il n’y avait que peu de place pour la bonne étoile, le hasard ou l’intervention divine.

« Prends un carnet, et note chaque jour et chaque heure où tu me vois ici. » Un camarade sorcier devait avoir remarqué son absence, et cherchait à lui jouer un tour. Peut-être était-ce Morgana Tolshem : après tout, elle était au courant de son départ. Il faudrait agir en conséquence. Endora acquiesçait, puis haussa les épaules. Elle ne comprenait toujours pas très bien, mais au final cela ne la dérangeait pas tant que ça. Tant qu’elle pouvait continuer à vivre ici, et à apprendre des choses à Jorderunn, les affaires de Siruu ne la concernaient pas. D’ailleurs, ce dernier savait qu’il ne pourrait rester encore bien longtemps ici. La bougie devait être à moitié fondue. Carte de bibliothèque ou non, il copierait le passage qui l’intéressait dans le livre. Une fois apprêté, le journaliste ouvrit sa porte.

…et tomba nez à nez avec un clone de sa propre personne. Il y eut quelques secondes de silence. Les deux blonds se jaugeaient du regard, sans savoir comment réagir. Ils semblaient converser paisiblement, sans prononcer le moindre mot. « Est-ce qu’il sait ? Est-ce qu’il sait que je sais ? » Puis, comme s’il avait été frappé par un éclair, les yeux de l’imposteur s’ouvrirent en grand. Il cilla, sa respiration s’arrêtant. C’était le moment de vérité. Dès que sa conscience le lui permit, l’alfar déguisé tourna les talons et se sauva. Siruu restait pantois quelques instants, avant de se lancer à la poursuite de son double.

N’imaginez pas un grand moment d’anthologie : la course ne dura pas plus d’une minute. Les rues d’Amestris étaient étroites et sinueuses, entrecoupées par des places ouvertes. La Milice n’était jamais loin, mais n’agissait jamais lorsqu’il s’agissait simplement de deux doubles se courant l’un après l’autre. Ce pouvait être un étudiant ayant raté sa potion de clonage, tout simplement. Siruu se sentait impuissant : lui et sa proie couraient à la même vitesse. Restait alors une solution : la magie. En créant du verglas sous les pieds du clone, il réussit à faire tomber ce dernier. On entendit le choc de son corps contre le sol.

Le sorcier tenait fermement son double contre les pavés, mais était perplexe quant à la démarche à suivre. Que dire à celui qui essaye d’usurper votre identité ? Devait-il le saluer ? L’insulter ? Lui demander son vrai nom ? Faire les trois à la fois ? Pour faire bonne impression, « Bonjour connard comment tu t’appelles » était rarement son choix de prédilection.  Siruu ne pouvait qu’être mal à l’aise face à une situation. Lui, un journaliste ayant toujours essayé de conserver un paraître courtois et raffiné, se retrouvait à plaquer un sosie gigotant.

Ce dernier semblait terrorisé. Il respirait péniblement, son regard tremblotant à l’affût de la moindre solution. Aucune possibilité ne se présentait à lui : il allait peut-être être capturé là, en cet instant. À moins que… il y avait bien ce pouvoir de téléportation, qu’il avait involontairement utilisé une fois. Reproduire cette prouesse à ce moment précis relèverait du miracle, mais l’adrénaline pourrait peut-être l’aider. L’alfar essaya de contrôler sa respiration, fermant ses paupières. Sa magie canalisée, il souhaita du plus profond de son être se trouver ailleurs.

Siruu sentit son emprise sur l’usurpateur se dérober. Il tomba sur le sol, ses mains empoignant toujours des vêtements. Le double avait disparu, laissant derrière lui toutes ses affaires. S’il avait atterri quelque part à Nementa Corum, c’en était fini de lui. Autrement, il devrait justifier son exhibitionnisme à la garde d’Amestris. Et, dans l’hypothèse peu probable où il se soit téléporté plus loin encore – par exemple dans les bois de Garah, il aurait aussi du souci à se faire. Siruu s’imaginait ces scénarii afin de se rassurer : en vérité, savoir qu’une personne malveillante était potentiellement en train de rôder l’effrayait. Même si celui qu’il pensait être un sorcier ne semblait pas extrêmement talentueux, il pouvait tout de même poser une menace ou, au moins, gâcher sa tranquillité.

2071 mots. Chronologiquement, ce rp se déroule un certain temps dans le passé parce que je rattrape tout. Mon prochain RP se fera dans l'ère de la tyrannie de l'impartiale =) /sbam.


La Providence 3v8q
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Siruu Belhades
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Siruu Belhades
Mer 27 Jan 2021, 18:33


Le vent glacé houlait, empêchant quiconque de sortir. Valera Morguis était abritée par des cavernes, mais parfois, les tempêtes étaient si puissantes qu’elles affectaient la ville secrète. Lysium méditait depuis plusieurs jours sur ce que lui avait dit son ancien employé. Hel’dra… le nom de cette fameuse déesse naissante ne lui inspirait rien. Le domaine qu’elle couvrait semblait s’opposer à celui de son peuple. L’héritier des Fortas-Petraliphas n’avait jamais douté de son appartenance à la race des sorciers, jusqu’ici. Il avait été cruel. Mesquin. Froid. Orgueilleux. Vicieux. Manipulateur. Sadique. Malfaisant, dans tous les sens du terme. Son cœur était moisi et amer. Alors, pourquoi avait-il des hésitations ? Pourquoi croyait-il Siruu ? Après tout, le journaliste lui mentait peut-être. Au fond, Lysium espérait que ce soit le cas. La Conciliation n’était pas le signe sous lequel il était né, et Hel’dra n’était pas la déesse qu’il voulait servir.

« Monsieur ? » Une servante lui parlait. Son regard, ses traits ou le timbre de sa voix importent peu : le mage noir n’y prêtait pas attention. Il faisait semblant de réviser, et imita une moue agacée dès lors qu’il l’entendit. En vérité, le roux était déjà déconcentré depuis longtemps. « Qu’y a-t-il, encore ? »« C’est que Monsieur Vonaguis ne peut pas sortir par ce temps. Il demande à rester cette nuit. »« Et pourquoi ne peut-il pas simplement partir se réfugier dans une auberge, au lieu de profiter de nous ? Qui est-il ? » Il y eut un silence, qui irrita particulièrement Lysium. Cette employée devait partir du principe qu’il savait qui entrait dans sa demeure : elle avait tort. C’était le travail des maîtres de maison, et non celui des nobles.

« C’est le décorateur que vous avez invité. Il est venu avec énormément de peintures, et craint qu’elles ne soient endommagées. » L’étudiant prit une pause pour réfléchir. Il aimait prendre des décisions, mais préférait éviter en l’état. « Consultez ma grand-mère. »« Je suis au regret de vous informer que madame Irène n’est pas ici. Elle est partie à l’aube. Vous n’avez pas reçu le message ? » Le roux se retourna, pour détailler son interlocutrice. Parler de dos avait ses limites, et ce n’est pas comme s’il pouvait réellement réviser en tenant une conversation. Elle avait l’air inoffensive, des cheveux châtains tombant sur ses yeux. C’était un manquement à l’étiquette et au code vestimentaire des lieux. Cependant, un irrespect aussi mineur trahissait une certaine incompétence. Ils embauchaient toujours ceux qui ne semblaient pas assez intelligents pour tirer leur épingle du jeu. Juger par le faciès amenait son lot de troubles, mais les Fortas-Petraliphas n’étaient pas prêts de changer de méthode.

« Manifestement, non. Je n’ai pas été prévenu. » Lysium se levait, soupirant exagérément pour montrer sa consternation. « Je ferais un rapport à Zalnonikhen à ce sujet. » Elle déglutit. « Et… votre décision ? »« Consultez mon grand-père. » La servante inspira une bouffée d’air, avant de se faire interrompre. « Il n’est pas là non plus, c’est ça ? » Elle acquiesça. « Et ma sœur, est-elle présente ? »« Oui, madame Thekla doit être en train de lire dans le boudoir d’Hiver. Mais… je lui ai demandé, et elle m’a explicitement dit… enfin, elle a écrit qu’il fallait se référer à vous, puisque c’est vous qui aviez demandé à ce que monsieur Vonaguis soit là. » Le jeune homme ne se retint pas de hausser les yeux face à l’irrévérence de son aînée. C’était tout à fait dans son caractère.

« Bon, et bien je l’autorise à dormir ici. » Lysium se retourna, mimant de s’intéresser de nouveau au manuel d’économie qui se trouvait sur le bureau. En vérité, bien qu’il n’oserait l’admettre, il était sur cette page depuis près de deux heures. « Monsieur… puis-je me permettre une suggestion ? » La servante était encore là. « Qu’y a-t-il ? » L’élu d’Hel’dra parlait entre ses dents. « Monsieur Vonaguis serait certainement ravi si vous le conduisiez à sa chambre. De plus, je ne connais pas encore les plans de la maison par cœur, j’ai débuté cette semaine et votre demeure est… grande. » L’héritier se leva brusquement, se rapprochant de l’employée. « Ton incompétence est plus grande encore, je ne sais pas si elle ne se sent pas à l’étroit entre ces murs. » Une menace à peine dissimulée. Il avait emprunté cette phrase à quelqu’un de plus éloquent que lui, mais la prononcer lui donnait l’impression d’être roi. En vérité, Lysium était ravi de pouvoir se dégourdir les jambes. Cependant, on lui avait appris qu’il était nécessaire et sain d’intimider ses sous-fifres. Il suivait cette règle avait plaisir et, tant qu’à faire, cela lui permettait de se débarrasser du vouvoiement avec cette nouvelle. C’était si bien, d’avoir des servants à martyriser.



« Monsieur Vonaguis ! Ravi de vous rencontrer. » Les deux hommes se saluèrent. Le décorateur paraissait très grand. « J’ai insisté pour vous emmener à votre chambre. » Légère hyperbole. « Oh, ce n’était pas nécessaire, mais je vous remercie. Vous aimez les œuvres que Mademoiselle Palerito a ajoutées à l’escalier principal ? » L’invité indiquait le mur adjacent d’un geste de la main. « Oh. Oui, bien sûr ! »  Lysium mentait, et son ton le trahissait. Autant jouer la carte de la franchise. « Bon, pour être tout à fait honnête avec vous… je ne les ai pas vues en détail. Vous voulez me les montrer ? » Le décorateur acquiesça. « Oh, il n’y a pas de mal à ça, vous êtes certainement très occupé par vos études. » Les deux firent quelques pas dans l’escalier, détaillant les peintures du regard. Même dans une nation remplie d’académiciens, il restait frustrant d’être considéré comme un simple étudiant.

« Celle-ci est un portrait de votre feue mère, dans sa prime jeunesse. » Sedna Petraliphas était une femme immature, dépensière, instable. Ou, en tout cas, c’était la description qu’en faisait sa belle-famille. Lysium préférait rejoindre l’avis de ses grands-parents en toute circonstance, mais, parfois, il devait bien avouer que le regard joueur de sa génitrice lui manquait. Elle n’était pas la plus venimeuse des sorcières, mais avait donné à ses trois enfants ce dont ils avaient toujours eu besoin : une poigne ferme, parfois prise de spasmes de douceur. Malheureusement, elle avait été en désaccord avec Irène et Dareios. Avec le reste de sa famille, par extension. Sans surprise, cette histoire s’était terminée dans le sang. Les mages noirs luttaient constamment pour le pouvoir et le contrôle. Ils se vengeaient, emportant avec eux les innocents comme les coupables.

Lysium voyait bien qu’il fixait le portrait depuis un peu trop longtemps pour ressembler à un simple amateur d’art. Néanmoins, il n’était pas prêt d’admettre que voir sa mère plus jeune déclenchait en son esprit des envolées lyriques et des réflexions sur la mort. « Pourquoi le tableau n’était pas chez nous ? C’était bien elle qui l’avait commandé ? » Le décorateur eut l’air gêné. « Non, c’était sa propre mère. Elle voulait certainement garder une trace de son enfant, avant qu’elle ne se marie. »« Je vois, c’est compréhensible. » Il y eut quelques secondes de flottement.

« Et cette peinture, vous l’aurez compris, représente… »« Ma grand-mère. » C’était ironique, de placer l’assassin à côté de la victime. Cette histoire n’était pas exactement un secret de famille, mais, si le décorateur l’avait entendue, il ne se serait certainement pas permis cette indélicatesse. « Oui, madame Irène a posé pour ce tableau il y a quelques mois. Il vient de Garibald Posprim. Si vous connaissez réputation du monsieur, vous savez que ça n’a pas dû être un travail facile. »« Pourquoi donc ? »« Il est très exigeant. Pénible, parfois. »« Il a rencontré sa paire, alors. » Les deux hommes eurent un rire forcé. Leur conversation était mécanique : c’était courant, chez les coincés que sont les sorciers.

« Et ce visage-là me dit quelque chose… » Le troisième portrait était celui d’une jeune femme, au regard sage. « Ce n’est pourtant pas quelqu’un de votre famille. » L’impression de familiarité n’était pas une illusion, cette fois-ci. Lysium était certain d’avoir croisé cette personne quelque part. « Il sera déplacé à un autre endroit de la demeure, par souci de cohérence. Nous n’avions pas reçu toutes les œuvres. » Lysium acquiesçait, l’air passif. Ce faciès lui inspirait quelque chose de négatif. Il réveillait en lui une douleur, brûlant sa joue. « Qui est-ce, au juste ? » Cette femme. Elle l’avait giflé. « Aliénor Vaughan. Une noble magicienne. » L’héritier des Fortas-Petraliphas tressaillit. Ce nom ne lui était pas étranger : il était apparu discrètement dans certains articles de presse. C’était une Dame Noire. Savoir qu’elle était l’épouse de son souverain ajoutait à l’offense. Vous connaissez beaucoup de gens pouvant se targuer d’avoir été giflés par un membre de la famille royale ?

Il ne sentit pas sa jambe lui faire défaut. La vision de son invité devint trouble et s’éloignait : alors, Lysium comprit qu’il tombait. Son corps dévala les marches de l’escalier, jusqu’à ce qu’il se trouve en bas. Il n’avait pas perdu connaissance, mais n’osait pas prononcer le moindre mot. Il n’arrivait pas encore à évaluer à quel point cette chute était embarrassante, ce qui lui permettait d’éviter la panique. D’ici quelques heures, il se rendrait compte que toute cette histoire était sacrément ridicule, et qu’il avait l’air d’un imbécile. Rapidement, un attroupement se forma bientôt de son corps blessé et, plus par dépit que par douleur, il ferma les yeux.



Le journaliste venait de céder un livre d’une valeur trop importante. La tâche qu’on lui avait donnée était simple : une fois l’objet reçu, il devrait le donner à un groupe d’individus à un certain moment. C’est donc ce qu’il avait fait. Il n’avait pas pu s’empêcher de feuilleter le carnet au passage. Ce qu’il y avait lu l’avait laissé indécis, mais il avait jugé bon de ne pas se mêler de cette histoire. Les scientifiques de Valera Morguis recevaient des instructions très précises et détaillées de la part d’Elias Salvatore. Cependant, ça ne semblait pas être un simple complot — les ordres étaient différents —. Beaucoup de possibilités semblaient avoir été étudiées, de la plus optimiste à la plus pessimiste. Cependant, les phrases étaient évasives, semblant construites d’une manière à laisser un doute quant à l’opération et l’enjeu qui y étaient associés. Siruu n’était pas certain de vouloir savoir de quoi il en retournait.

« Qu’est-ce que tu fais ici ? » La voix de Lysium. Le jeune homme avait encore énormément grandi avec les années, allant jusqu’à le dépasser en taille. Cependant, ce n’est pas ce que l’on remarquait en premier, en ce jour. En effet, il utilisait des béquilles. « Je devais faire une livraison. »« Journaliste et maintenant postier ? Dire qu’à une époque tu aspirais à être scientifique… » Le noble était doté d’une capacité innée parfois destructrice : il savait rabaisser autrui en toutes circonstances. Pourtant, il ne manquait pas de défauts. Lysium était faible, en retard scolairement et — en dehors de sa fortune — manquait cruellement de ressources qui le démarqueraient de la foule.

« Comment tu t’es fait mal aux jambes ? » L’étudiant hésitait, préférant ne pas trop en dire. « Un accident d’escalier. »« Tu as fait interroger tous tes domestiques ? » Siruu se doutait que les tentatives de meurtre à son égard devaient être nombreuses. « Non, ce n’est pas eux. »« Tu es sûr ? L’un d’eux a pu t’empoisonner. »« Tu t’inquiètes pour ma santé ? Je t’assure que ce n’est ni eux ni ma sœur. Elle est plus en colère contre toi, à l’heure actuelle. » Le journaliste était toujours endetté auprès d’elle, et ce n’est pas son métier qui lui offrirait les revenus nécessaires. « Soit. Je te conseille simplement d’être prudent. Tu comprends pourquoi. » Siruu faisait bien évidemment allusion aux élus d’Hel’dra. « Peut-être, oui. Je ne m’attendais pas à ce que la nouvelle soit très bien reçue, mais je ne pensais pas que… » Il y eut un instant de silence. « D’ailleurs, à ce propos… je ferais peut-être appel à tes services, si tu les proposes toujours. » Ils échangèrent un sourire entendu.

1970 mots. Lysium VS Le Sombre Recensement II : Le Retour.


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Siruu Belhades
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Siruu Belhades
Dim 31 Jan 2021, 19:50


Ils étaient au domicile de la famille Fortas-Petraliphas, à Valera Morguis. Lysium semblait bien plus à l’aise dans le fauteuil roulant sur lequel il était installé. Il devait n’utiliser les béquilles que lors de ses sorties, mais cela devait nécessiter un certain effort. L’étudiant prit un petit gâteau et le contemplait du regard, incapable de savoir s’il devait manger avant ou après avoir révélé ce qu’il comptait faire. « Tu as raison de suspecter que quelqu’un cherche à me nuire. Je ne voulais pas paraître trop paranoïaque, mais… oui, ta théorie est peut-être vraie. » Il essayait de lire une réponse dans les yeux de son interlocuteur, sans succès. « Je me sentais anormalement fatigué, le soir de la chute. Et mon état empire. Je vais donc partir un temps, pour voir comment les choses se profilent. »

« Et où comptes-tu aller ? » – « Une maison isolée dans un hameau de Nementa Corum. Je prendrais l’air. » Il commença à manger, pour dissimuler son mensonge. Le goût était intéressant. Bien assaisonné, mais sans doute un peu trop amer. « En tout cas, entre ça et cette histoire d’élus… tu n’as pas beaucoup d’options. Que comptes-tu faire ? » – « Je verrais bien. Ce n’est pas pour discuter de ça que je t’ai invité ici. » Il fit une pause, pensant que l’apôtre obscur chercherait à ajouter une remarque. « J’aimerais que tu te débarrasses de Marie Arsacide. »

Le journaliste chercha la permission dans le regard du noble, avant de se servir à son tour un gâteau. Il provenait d’un panier-repas, que le nobliau avait reçu récemment. « Combien de temps me donnerais-tu pour m’y prendre ? » – « Huit mois au maximum. Je te conseille de t’y prendre tôt, mais intelligemment. » – « Je vois. » Au vu de ses disponibilités actuelles, Siruu n’aurait de toute façon pas pu se permettre d’exécuter cette tâche immédiatement. « Aussi… j’aimerais soulever une autre question. » Lysium se leva, fixant son aîné du regard.

« C’est à propos de ma sœur. Tu lui dois beaucoup. J’ai dû négocier avec elle pour qu’elle ne te traîne pas en justice directement. Elle ne sait pas que je compte louer tes services, mais je saurai lui apprendre que tu as eu une rentrée d’argent, en temps voulu. Je suppose que tu es conscient que la paie que je te donnerai devra forcément terminer sa route dans son coffre-fort. » Siruu fit un faible sourire, l’air entendu. Ce jeune homme le tenait au piège grâce à ses finances, et il n’y avait rien qu’il puisse faire pour se défaire de son emprise à l’heure actuelle. Siruu possédait quelques titres de propriété, mais il n’était pas prêt à les céder.

Toutefois, le journaliste n’était pas du genre à respecter l’intimité d’autrui. Alors, durant toute leur conversation, il s’était amusé à sonder l’esprit de Lysium, à la recherche de pensées confirmant sa théorie. Sa quête fut fructueuse : sans surprise, le nobliau avait peur des conséquences qui viendraient avec son statut d’élu d’Hel’Dra. S’il employait Siruu plus qu’un autre empoisonneur ayant pratiqué récemment, c’était avant tout pour ne pas le perdre de vue : après tout, c’était lui qui lui avait appris cette information en avance. Le garder à proximité permettait à Lysium d’entretenir un sentiment de sécurité. L’apprenti chaman savait qu’il pourrait obtenir des renseignements auprès des esprits et que, par la force du hasard et de la volonté divine, certains des secrets plairaient tout particulièrement à Lysium. Il faudrait les lui donner à petites doses, en promettant de ramener plus d’informations la prochaine fois. Ainsi, le nobliau serait contraint de maintenir la paie de Siruu.



L’Isemssith marchait dans les rues d’Amestris. Fût une époque, il lui arrivait de flâner. Désormais, chaque mouvement était planifié. Il fallait être le plus rapide possible. Il fallait s’organiser, hausser la barre toujours plus, optimiser chaque geste. Le temps était compté. S’il ne se dépêchait pas, il allait finir par mourir, de vieillesse ou de meurtre. La magie lui permettait de gagner un délai inespéré, mais viendrait un moment où les runes de jouvence ne suffiraient plus. Là, il faudrait recourir à des moyens différents. Raanu ne l’avait pas rendu éternel. Il saurait se montrer digne d’elle en l’arrachant des mains du destin. Discuter avec un scientifique l’avait justement inspiré, à ce sujet. Récemment, le sorcier avait effectué un entretien auprès de Lans Shantsor.

« Bonjour, Madame Tolshem est ici ? » La tenancière du bar haussait un sourcil avant de se retourner, guidant Siruu jusqu’à la noble. « Restez ici le temps qu’il vous faudra, tant que vous payez. » La sorcière était déjà assise, devant un verre encore plein. « Bien entendu. » Quand elle et le journaliste furent seuls, elle le fixa du regard en laissant le silence s’installer. Puis, elle tourna la tête vers la vitre la plus proche. « Je me suis renseignée sur ton patrimoine. Il est varié, pour quelqu’un qui n’est pas membre de la noblesse. Pourtant, tu as des problèmes financiers, n’est-ce pas ? »

Siruu savait qu’il ne pouvait pas cacher la réalité éternellement. « Ils… ne seront bientôt plus d’actualité. » En tout cas, il l’espérait. « Peut-être que ça sera le cas quand tu m’auras dit ce que tu as appris sur mon frère. » L’apôtre obscur fit une moue indescriptible, entre la fatigue et le soulagement. « Oui. Je possède déjà suffisamment d’informations. » Il tendit une enveloppe. Elle contenait un nombre aberrant de notes sur la vie de Lans Shantsor. « C’est très formel. Tu aurais pu simplement me le raconter. » La dame dépliait le papier, survolant les lignes du regard. « C’est long. Tu ne l’as pourtant rencontré que quelques fois. » Il préférait ne pas lui révéler les détails du pouvoir qu’il avait employé. Cela pourrait augmenter sa méfiance. « J’ai fait en sorte de savoir, c’est tout. Je préfère ne pas donner de détails sur ma méthode. » Morgana esquissa un sourire. Elle aurait voulu lire dans son esprit, mais avait directement remarqué qu’il portait une bague similaire à la sienne. Plus encore, elle se doutait qu’il possédait une forme de protection. Les mages noirs sont rarement associés aux Vertus, mais certains d’entre eux vivaient tant sous le signe de la Prudence que les anges pourraient en devenir jaloux.

« Je lirais les détails. Racontez-moi l’essentiel. » Il était plus difficile de mentir à l’écrit qu’à l’oral : c’était une manière de vérifier la qualité des informations. « Ce sera long à expliquer, mais je ferais de mon mieux. » Par où commencer ? Les souvenirs volés se bousculaient. « Il a été magicien et s’est marié. » – « On s’en doutait. Il a dû utiliser un autre nom, c’est pour ça que l’on n’a pas pu retrouver sa trace dans les registres de Cael. » — « Oui. Il se faisait appeler Allenz et vivait une vie assez lambda. Sa femme était une Taiji. Pas une célèbre, vous vous en doutez. » Son prénom était Shanxi.  « Si elle est encore dans les parages, cela pourrait expliquer son comportement évitant. Il faut qu’il l’oublie, sinon notre famille sera déshonorée. » – « C’est là que les choses deviennent complexes. Elle ne peut plus être dans le coin puisque… eh bien, elle est morte. Lans l’a tuée. » Morgana semblait perplexe. « Ah, tant mieux. Pourquoi est-il perturbé, dans ce cas ? » – « Il n’était pas dans tous ses états lorsqu’il l’a fait. Il regrette. » – « Je vois. Je t’avais dit qu’il était faible, j’aurais dû préciser qu’il est aussi instable. » La sorcière décolla son dos de la chaise. « Il semble persuadé que c’est un Pershélgon qui est responsable de sa folie meurtrière. C’est pour cette raison qu’il s’est intéressé au domaine des races parasites. » – « C’est possible. Il me parle rarement, mais ces bestioles-là sont mentionnées dans ses livres. Est-on au moins certains de l’amplitude de leurs effets ? » – « Je crois bien. Ils sont invisibles, mais il reste possible de les étudier. Ceci dit, rien ne nous prouve que c’est bien ça qui l’a poussé à tuer sa femme. » La sorcière se leva brusquement. Si un petit malin s’était amusé à écouter leur conversation, il serait sans doute effrayé et pourrait mieux être repéré. Ces informations n’étaient pas entièrement compromettantes dans son cas, mais elles méritaient de rester confidentielles. « Bon, la situation est plus simple que ce à quoi je pensais, alors. Il faut qu’il oublie entièrement sa vie précédente, et il lui sera possible d’être un membre de la société efficace. »

« Je vous fais confiance pour trouver une solution de votre côté, mais… et bien, il y a un détail dérangeant dont je dois vous faire part. » Siruu se tut. Morgana détestait les silences rhétoriques. « Un enfant ? » — « Oui. Asra Taiji. Lans ne sait pas grand-chose de ce qui lui est arrivé après la mort de sa mère, mais il a récemment appris que… » – « Asra Taiji ? Son nom revient parmi les élus d’Hel’Dra, oui. J’ai participé à la rediffusion officielle des listes. » La sorcière prit un certain temps pour réfléchir. « Il compte agir ? Il voudra peut-être la retrouver. » – « Je n’en sais rien. Il ne s’est pas décidé, je crois. » Morgana fixa le journaliste, ne prenant pas la peine de dissimuler sa suspicion. Elle souhaitait l’intimider. « Quel dommage que votre connaissance s’arrête là. Pourtant, vous en savez beaucoup. Je doute même qu’il se soit révélé à vous aussi facilement. » – « Vous avez bien dit qu’il était faible, non ? » – « Faible d’esprit, oui, mais pas stupide. Soit vous complotez avec lui, ce qui serait malavisé… » Siruu sentit sa respiration être coupée. Il ne voulait pas se faire d’ennemis. « Soit vous employez une méthode plus directe contre laquelle il ne s’est pas protégé. Ce ne peut être des philtres de vérité, puisqu’il ingère un antidote. Je doute qu’il s’agisse de lecture de pensée : il le sent, je peux en attester. Je suspecte donc qu’il s’agisse d’autre chose. » Son raisonnement était juste, mais il ne voulait pas lui donner raison. « Le marché reste valide ? » – « Oui, j’ai eu ce que je voulais. Je vais sans doute employer vos services à nouveau, si cela ne vous dérange pas. » Elle savait qu’il ne refuserait pas. Se renseigner sur sa situation financière lui avait donné cette certitude. Encore une fois, Siruu était pris en tenailles par sa dette.



Qui aurait cru qu’apprendre l’alphabet Armalien serait si pénible ? Pourtant, il aimait être ici, dans une propriété douteuse, au milieu de nulle part. C’était une sensation étrange que de se sentir à la maison dans un endroit comme l’île maudite. Ça n’aurait probablement pas été le cas si les gens à Amestris le traitaient comme autre chose qu’un fruit à presser pour en tirer des intrigues politiques et relationnelles. Bien entendu, il était aussi responsable : il aimait le chaos autant que le sorcier moyen. Néanmoins, de temps en temps, il avait envie que le flot incessant de complots, de machinations et de spectacles cesse. Les chamans n’avaient pas un rapport à la religion classique ; en vérité, il était parfois bien plus utilitariste que celui des mages noirs. Cependant, on ne pouvait pas leur enlever qu’au moins, ils pouvaient s’en remettre à quelque chose d’autre qu’une succession de plans tordus. Pire encore : le clergé n’était pas une escapade, puisque la seule différence entre les rats des Cités et les membres des Assemblées était leurs vêtements. Siruu pensait que ce ne pouvait pas être qu’une simple question de nature : ce devait être un choix délibéré de la part des gouvernements successifs que de ne laisser aucun endroit à l’abri des manipulations et de la cruauté. Cela encourageait la paranoïa, et poussait à être plus cruel par prévention. Moins de magiciens, au prix de plus de névroses. L’échange lui semblait équitable. Toutefois, ces temps-ci, Siruu sentait qu’il bénéficiait du temps qu’il passait loin des crocs de la Vorace. Chaque heure à s’affairer ailleurs l’aidait à se renforcer pour affronter le torrent d’intrigues qui le submergeait dès lors qu’il posait les pieds sur le sol pavé d’Amestris.
1967 mots.


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