Et tu disparaîtras

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Résumé : Toujours décidée d'enlever l'enfant de Maha, Aaliah met en place les dernières pièces de son plan pour s'enfuir et disparaître avec le nouveau-né.

Le lendemain matin, le Chaman n'était pas très rassuré sur le déroulement de la journée. Chaque détail avait été planifié avec soin, mais il restait convaincu qu'un imprévu mettrait à mal les plans de la jeune femme. Il craignait de ne pouvoir fuir à temps du village avec le nourrisson et la sentence qui les frapperaient tous les deux si leur subterfuge venait à être découvert. Aaliah s'était voulu rassurante en ne permettant ni à la moindre erreur, ni au moindre obstacle de lui barrer la route et de mettre à mal son projet. Une grande confiance qui trahissait une angoisse similaire à Chaman, mais qu'elle ne souhaitait pas montrer. Il fallait qu'une personne évitât de trembler et cela devait être elle. Elle serait au plus proche de sa victime et elle ne pouvait afficher le moindre doute qui éveillerait des soupçons sur ses intentions malveillantes. Aussi, le Chaman resta muet pour ne pas attiser sa colère et parce qu'il était de toute façon trop tard maintenant pour la faire changer d'avis. Il s'activa à réunir leurs affaires en préparation de leur départ précipité. La jeune femme avait déjà pris les devants en s'envoyant un parchemin rédigé de sa main où une autre femme appelait ses services. Même si cela inquiétait le chaman, il était ravi d'avoir une raison valable pour s'éloigner de ce village et pria même pour ne jamais avoir à revenir en ce lieu ou croiser l'un de ses habitants, pas même l'herboriste. Ils avaient sympathisé durant leur séjour, mais il savait que c'était mieux de ne plus le revoir afin d'éviter une phrase malheureuse qui pourrait dénoncer leur agissement. Ou pire, attiser la colère de l'Ombre s'il venait à lâcher par mégarde un mot sur leur nuit secrète.

Sans un mot, la jeune femme quitta sa tente en emportant le nécessaire médical pour apporter soins et réconfort à la future mère dont le travail allait bientôt commencer. Ils avaient discuté assez de la soirée pour connaître en détail leur rôle et leur place dans la stratégie d'enlèvement. Zachariah se contenta d'un sourire pour lui affirmer sa position d'allier tout en l'accompagnant en dehors de la tente pour préparer les montures. Toutefois, il ne put s'empêcher de la regarder s'éloigner en hochant brièvement la tête négativement. S'il s'était résolu à l'aider, il restait persuadé de la mauvaise idée et que le destin trouverait un moyen de leur mettre des bâtons dans leurs jambes. D'autant plus que la mission d'échanger le bébé contre une poupée dans le linceul lui revenait et il se sentait plutôt mal à l'aise avec cela. Et il ne voulait surtout pas être la faille qui ferait échouer le plan d'Aaliah. Sûr qu'elle ne lui pardonnerait pas cette erreur. Aussi, il inspira profondément pour se rassurer et attacha solidement leurs bagages tout en gardant le sourire devant les villageois qui passaient à proximité pour le saluer.

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Et tu disparaîtras

Aaliah préféra s'isoler rapidement sous la tente en compagnie de la jeune femme en souffrance afin d'éviter trop de contact. L'annonce de son départ avait ému quelques villageois s'étaient habitués à sa présente rassurante pour les soigner, même s'ils ignoraient qu'elle n'était absolument pas médecin de fonction. Elle s'en était plutôt bien sortie grâce aux connaissances du Chaman pour les herbes guérisseuses et à quelques savoirs glanés ci et là durant ses siècles d'errance en tant qu'Ombre. Mara n'était pas non plus des plus rassurée à l'annonce de ce départ. Elle aurait aimé partager quelques jours encore avec la jeune femme, notamment pas crainte pour la santé de son nouveau-né. La jeune femme la rassura en lui confiant qu'elle reviendrait si nécessaire et qu'elle n'était nullement inquiète pour la santé de l'enfant à venir. Mentir était une chose aisée, cela en devait presque naturel. L'Ombre ignorait si c'était bon signe d'accumuler autant de mensonges. Le Chaman lui dirait que cela lui porterait probablement préjudice un jour ou l’autre, mais il n’était pas encore là pour le lui faire remarquer et de tout façon, elle aurait refusé d’approuver ses dires. Pour le moment, elle devait se concentrer sur la jeune femme et l’aider à mettre au monde l’enfant qu’elle souhaitait tant. L’Ombre passa une main sur sa hanche et sentit la présence de la précieuse fiole cachée au fond de sa poche. Elle espérait que ses mains ne trembleraient pas au moment de la prendre et qu’elle pouvait faire assez confiance au sorcier pour que le contenu fût efficace. Finalement, tout reposait sur cet objet et elle n’avait aucun autre moyen de substitution si celui-ci venait à faillir.

L’accouchement fut long et éprouvant, autant pour les deux femmes. Aaliah parvenait parfois difficilement à masquer ses craintes, notamment lorsqu’un pan de la tente se souleva pour laisser par un membre de la famille de Mara qui s’inquiétait pour la jeune femme. Sa mère ne pouvait s’empêcher de venir et de tenir la main de sa fille pour la soutenir malgré les demandes d’Aaliah de rester seule pour éviter d’épuiser plus que de nécessaire la jeune femme en ne cessant de la questionner. La présence d’un tiers sous la tente ne lui faciliterait pas la tâche pour donner l’élixir d’endormement en toute discrétion. Il lui fallut insister à plusieurs reprises pour parvenir à éloigner la mère de la jeune femme définitivement. Aaliah put alors respirer un peu mieux tout en passant une main sur son front perlant. La couronne qui la rendait humaine la rendait migraineuse et elle plissa les yeux pour tenter de faire partir la douleur. Il lui fallait se concentrer sur l’instant présent et tenir encore quelques jours. Le temps pour le chaman de fuir avec le nouveau-né et de revenir la chercher pour un départ moins intriguant aux yeux des villageois.

472 mots

Et tu disparaîtras

Lorsque l’enfant poussa son premier cri, l’Ombre fut prise dans un tourbillon d’émotion jamais encore subi de par sa nature d’ordinaire peu encline à connaître ce type de trouble. Il y avait un mélange de bonheur d’être parvenue à accomplir le destin en aidant l’enfant à venir au monde vivant, de désarroi face à un être si fragile et d’inquiétude devant la mission qu’elle s’était fixée. En tant qu’Ombre, elle n’aurait jamais eu à faire face à ce genre de souci et ses mains n’auraient nullement tremblé. Toutefois, elle se concentra sur l’essentiel et, profitant que la jeune mère s’était brièvement endormie, pour porter aux lèvres du nourrisson le breuvage qui lui donnerait l’apparence d’un mort-né. A base de plantes, il était efficace et non toxique. L’enfant devrait rapidement se réveiller sans séquelle et il reviendrait au chaman de l’avoir remis en lieu sûr à ce moment-là.

Heureusement que les effets du liquide était rapide, car celle qui venait de se hisser au rang de grand-mère se rua sous la tente pour accueillir sa descendant et s’assurer de la santé de sa fille. Aaliah pressa l’enfant près de son corps pour s’assurer qu’il ne respirait plus et fit un pas en arrière pour la laisser se pencher sur sa fille. Il lui fallut un instant d’étonnement devant le silence qui régnait sous la tente pour relever la tête vers l’Ombre et le nourrisson qu’elle tenait dans les bras. Elle plissa les yeux, mais Aaliah ne sut vraiment déterminé le fond de ses pensées. Le nouveau-né était pourvu d’une queue de loup qui ne laissait aucun doute sur sa nature Eversha, hérité sans nul doute de son géniteur et l’absence de cri, même pour ce qui devait sembler à une abomination au regard de cette grand-mère ne pouvait signer qu’une chose. Toute vie avec quitté cet être pourtant à peine existant. L’Ombre tendit les bras pour montrer l’enfant, mais la femme tourna rapidement la tête pour ne pas poser son regard sur l’hydride. Un geste qui arrangea l’Ombre qui s’éloigna d’un pas pour laisser place à d’autres membres de la famille qui venait rendre visite à la jeune femme. Elle n’eut même pas besoin d’expliquer la situation que la mère s’empressa de la faire. Sa fille allait bien et s’était l’unique réalité qui comptait à ses yeux. L’Ombre profita de l’inattention de tous pour se faufiler vers l’arrière de la tente où l’attendait déjà le chaman. Elle connaissait ses pensées sur l’acte, mais il restait un allié fidèle. Sans un mot pour éviter toute dispute inutile, elle échangea la fillette toujours endormie dans un sommeil presque mortel pour une poupée inerte enveloppé dans un linceul.

444 mots

Et tu disparaîtras

Le Chaman avait exécuté sa mission à lettre sans même chercher à s’y opposer d’une quelconque façon. Toutefois le temps mit pour faire l’allée retour jusqu’au village lui semblait une éternité. L’Ombre suspectait que le Chaman avait fait express d’allonger son trajet pour la punir d’une manière ou d’une autre. A moins qui ne cherchât à la faire réfléchir sur ses actes, mais l’Ombre n’avait ni l’envie, ni la capacité de se remémorer ses gestes, ni les raisons qui l’avait poussé à enlever l’enfant. Elle revenait rarement sur les décisions prises.

Fatiguée et de plus en plus malade, elle n’espérait qu’à des choses simples. Que plus personne ne la dérange sous sa tente, sauf le Chaman. Sa nature humaine était devenue oppressante et Aaliah irritable lorsque ses forces le lui permettait. Sur un parchemin froissé maintes fois sous le coup de la colère, elle fit un trait pour ajouter un jour de plus à la longue colonne de traits fins, parfois tracé si fort qu’ils avaient déchiré le manuscrit par endroit. Compter les jours n’était décidément pas une si bonne idée qu’il n’y paraissait au départ. Elle espérait à l’aide de ce calendrier basique trouver la force de patienter, mais les jours étaient devenus bien trop nombreux. Certes, le Chaman pouvait se perdre dans le désert, mais des villageois allaient et venaient assez régulièrement pour finir par croiser sa route. L’abandonner définitivement, il n’aurait pas pu. Aaliah ne lui trouvait que des défauts, mais sa fidélité était sans faille. Du moins, l’espérait-elle.

Lorsqu’elle entendit sa voix à l’extérieur, l’Ombre trouva la force de bondir de sa chaise pour se précipiter hors de la tente. D’un pas vif, elle se dirigea vers l’homme qui descendait à peine de son cheval. Il avait un sourire large et un charme fou, pas la tête donc d’un homme perdu qui aurait cherché désespérément après son chemin. Elle l’attrapa par la manche à défaut de pouvoir l’attraper par le col qui était hors de sa portée pour le forcer à se pencher vers elle. Il semblait ravi de la voir et pour faire bonne impression devant les quelques villageois due se forcer à faire de même.

« Zachariah mon ami… Tu en as mis du temps.
— Rares sont les plantes médicinales qui poussent dans le désert…
— Tu te fiches de moi ! A peine avait-elle levé le tissu de sa tente pour s’y engouffrer qu’elle s’emporta sur le jeune homme.
— J’en conclu que la patience n’est toujours pas ton point fort
— Tu as mis volontairement plus de temps pour revenir ! Maha aurait pu avoir des soupçons
— Quels soupçons ? Sa famille s’est assurée de respecter leurs rites mortuaires pour un enfant que personne, à part Maha, n’acceptait. Je doute qu’elle cherche un jour à déterrer la dépouille de son enfant pour pouvoir le contempler. Tu ne risques nullement d’éveiller des soupçons.
— Nul n’est à l’abri d’un imprévu. As-tu au moins menée ta mission à bien ? Demanda-t-elle pour s’assurer que le Chaman n’avait pas changer les points de sa mission en cours de route. Elle l’en savait capable, même si chaque changement effectué avait toujours aidé mené dans un but d’améliorer ses décisions. Cependant, dans ce cas-ci, elle acceptait peut les modifications. Le Chaman le savait car il n’essaya pas de jouer de la situation en la faisant patienter ou alors, il savait que sa patience atteignait déjà ses limites. Il hocha la tête positivement.
— J’ai fait exactement comme tu m’as demandé de faire, répondit-il en s’appliquant à bien prononcer le mot exactement. Je n’ai pas apprécié, mais je l’ai fait. Le Chaman appréciait moyennement l’entende cordiale qui existait entre l’Ombre et le sorcier, mais il se garda bien de le lui dire. Aaliah connaissait ses aprioris sur cette entente et une énième dispute n’aurait pas arrangé la situation.  
— Bien, dans ce cas, nous pouvons quitter ce village.
— Dans l’immédiat ? En es-tu sur ? »

Le Chaman joua sur la corde sensible du risque de soupçons s’ils partaient immédiatement après sa venue. Ils s’accordèrent ensemble sur le nombre de jours à rester, le temps de quelques échanges courtois pour préparer un départ non précipité. Trois semblaient être un nombre tolérable pour l’un comme l’autre.

701 mots

Et tu disparaîtras

Les trois jours furent longs et éprouvants. Aussi lorsque le village disparu enfin à l’horizon, l’Ombre fut soulagé. Elle se sentait de moins en moins bien à vivre sous sa forme humaine, même si elle n’avait pas fait état de son mal être au chaman. Elle masquait ses douleurs derrière une colère quotidienne, mais cela ne lui suffisait plus. Aaliah n’espérait plus qu’une chose, s’éloigner des humains pour ôter la couronne et récupérer sa nature première. Certes, lorsque le fardeau de sa race lui reviendrait sur les épaules cela lui semblera lourd à porter, mais pour l’instant, elle enviait ceux de sa race qui ne connaissait pas la douleur.
Le Chaman avait dû remarquer que quelque chose n’allait pas car il devenait un brin trop compatissant depuis leur départ. Attentionné et inquiet, il ne cessait de proposer des pauses sous prétexte de permettre aux chevaux de se reposer.

« Les chevaux ne sont pas fatigués, ils ont l’habitude du désert et se reposer sous le soleil sans oasis à proximité, ce n’est pas un repos.
— N’empêche, un arrêt leur ferait du bien. Ils n’ont pas l’air frais
— Ce sont des chevaux, pas des poissons !
— Ils ont le teint un peu pâle, fit alors remarqué le Chaman.
— Ce sont des chevaux à la robe noire ! s’exclama l’Ombre en tirant sur les rennes pour arrêter momentanément sa monture. Je vais très bien, ce n’est pas la peine de t’inquiéter autant. Accélérons le pas, je me porterai mieux loin du désert », ajouta-t-elle toutefois pour convaincre le Chaman de continuer leur chevauchée.

Devant l’hésitation du Chaman à reprendre le chemin, Aaliah secoua la tête d’énervement. La jeune femme était lassée de son comportement bien attentionné envers elle. S’il ne voulait pas avancer, alors elle le laisserait en plan car elle ne souhaitait pas rester là plus longtemps. D’un geste vif, elle intima sa monture à reprendre la route au galop, non s’en avoir jeté un regard courroucé au Chaman. Il l’ennuyait et la fatiguait autant que la nausée qui l’envahissait et dont elle ne parvenait pas à se défaire. Zachariah jura devant l’attitude d’Aaliah qu’il jugeait risqué. Il n’était pas médecin, mais derrière les colères de la jeune femme, il avait remarqué un visage fatigué. L’épuisement et les courses de chevaux ne faisaient, d’après lui, guère bon ménage. Il appela à plusieurs reprises la jeune femme à ralentir le pas, autant pour le cheval que pour lui permettre de revenir à sa hauteur.

« Aaliah ! »

Lorsqu’il cria son nom, il était déjà trop tard pour intervenir. Impuissant, il vit la jeune femme glisser lourdement de sa monture et s’écraser sur le sable chaud du désert. Il sauta de sa selle pour s’approcher de la jeune femme, toujours inconsciente. Il l’appela sur tous les timbres de voix possibles, sans provoquer la moindre réaction. Il la hissa sur son cheval et s’empressa de reprendre la route. Il connaissait le chemin pour l’avoir déjà fait et savait où trouver un médecin non loin du désert.  

503 mots

Et tu disparaîtras

Le visage brûlé par le sable du désert et la fièvre, Aaliah n’était plus en capacité de s’opposer au choix que le Chaman lui imposait, ni même au médecin inconnu qui avait posé un diagnostic qu’elle ne parvenait toujours pas à assimiler. Comme si elle était prisonnière d’un mauvais rêve. Celui qui avait ni queue ni tête, mais dont le cerveau était incapable de raisonner. Le mal qui la rongeait n’était pas uniquement le fait à la couronne. Ses entrailles douloureuses abritait un être qui en théorie n’aurait jamais dû s’y frayer un chemin. Le coupable de cette ignominie était enchanté et à la fois rassuré. Rien de grave en somme. Il arrivait à tant de femme de donner la vie que le médecin se contenta de formuler pour seul remède un long repos avant de tourner les talons et de se glisser sous un autre rideau pour s’occuper d’autres patients à l’état de santé plus inquiétant.

« Quand mes forces reviendront, je t’étrangle ! Parvint-elle à murmurer entre les dents en essayant de se redresser.
— Il a dit du repos, reste couchée ! lui ordonna le chaman en appuyant sur ses épaules pour l’obliger à se recoucher. Un geste que l’Ombre apprécia moyennement, mais ses faiblesses actuelles l’empêcha de résister. Elle dû se contenter de grimacer, de douleur et de colère.
— Sans la couronne, tout redeviendra… normal, expliqua-t-elle, même si le mot « normal » ne lui semblait pas le plus adapté. Sans l’objet qui ornait sa tête, elle récupérerait sa nature, son fardeau et surtout perdrait toute humanité. Sûr que l’enfant qu’elle porterait disparaitrait aussitôt puisque son corps n’aurait plus d’intérêt à conserver cette vie, comme il n’avait pas plus besoin de se nourrir. L’Ombre n’eut pas d’explication supplémentaire à fournir au Chaman pour qu’il comprenne le sous-entendu derrière sa phrase. Comme la jeune femme comprit immédiatement à sa tête qu’il ne partageait pas cette option pourtant relativement simple.
— Explique-moi pourquoi tu forces le destin et risque ta santé en intervenant dans un village humain sous l’identité d’un médecin pour enlever un enfant qui n’est pas le tien et qui – je te rappelle - n’est même pas la complète réincarnation de ta louve… mais que tu refuserais de garder un enfant que le destin te permet d’engendrer ?
— Je… L’Ombre plissa les yeux, assimilant progressivement les mots du Chaman pour mieux les contrer. Toutefois, elle devait bien se l’avouer qu’elle était à court d’argument pour défendre son choix. Il n’avait pas tort sur le fond, mais la comparaison lui semblait bien légère. Il semblait plus aisé pour la jeune femme d’enlever un enfant que de le mettre au monde. D’autant plus que cela signifiait rester une humaine jusqu’au terme. En somme, rester un être bien fragile dans un monde grandement hostile. Tu me demandes de rester humaine… et enceinte ? résuma-t-elle. Oublierai-tu que ce monde est loin d’être amical ?
— Il suffit de trouver un endroit isolé, loin de tout chaos.
— C’est la définition même d’un endroit isolé ! Et ils sont rares à trouver.
— J’en connais justement un
— Ben tiens… A croire qu’il avait déjà tout étudié et tout prévu. Un peu trop d’ailleurs. L’Ombre fronça les sourcils, sceptique. Le médecin t’avait déjà annoncé mon état avant mon réveil, n’est-ce pas ? Et tu en as profité pour préparer cette naissance sans même penser que je pourrais m’y opposer !
— On ne s’oppose pas au destin ! C’est peut-être la volonté d’un Aether. » Ajouta le Chaman, en sachant qu’en y mêlant un phénomène divin l’Ombre ne pourrait trouver une ligne de défense. Les Dieux avaient parfois de drôle d’idée dont Eux seuls connaissaient le véritable but final. La jeune femme ne pouvait prendre le risque de s’opposer au désir d’un Aether, toutefois, il lui semblait que ce destin-là, elle ne l’avait guère vu dans un futur, même très lointain. De toute façon, elle était lassée et pratiquement résignée. Du repos, loin de tout lui procurerait certainement un peu de bien. Disparaître aux yeux de tous était probablement la meilleure alternative pour survivre dans son état. Du moins, elle n’en voyait pas d’autre dans l’immédiat. Peut-être que si le chaman avait su la finalité de choix, aurait-il prit un peu plus le temps de réfléchir à une autre possibilité…

De disputes en reproches, la patience du Chaman s’étiolera et il n’aura d’autre choix que d’abandonner l’Ombre en emportant dans son sillage les enfants engendrés. Un abandon qui n'affectera pas l'Ombre devenue apathique. Loin des gens, loin du monde; oubliée de tous, elle disparaitras et c'était très bien ainsi...

750mots