Assise sur un bloc de granit, au sommet d'une tour réduite de moitié et lézardé, reliquat de l'ancienne Cité désormais en ruines. Penchée vers l'avant, chaque coude reposant sur un de ses genoux et son menton sur ses mains jointes, Reine observait les images qui se mouvaient au rythme de la vie de ceux dont elle se voulait être la nouvelle Protectrice. Depuis son retour, elle avait voyagé dans quelques songes et n'avait pas hésité à se renseigner, au passage, sur l'état des Terres de Sympan. Maintenant, elle retenait, plus ou moins, l'identité et les visages de ceux qui auraient un rôle dans l'Avenir.
— J'ai dit qu'il n'y aurait aucun problème à mon retour, dit-elle en redressant son buste et en relâchant ses bras. J'ai dit qu'en tant qu'invité, mes incursions seraient moindres ...
Prenant ensuite appuis sur ses membres pour se relever de son siège instable, elle croisait ensuite les bras contre sa poitrine en dévisageant l'intervenant.
— Et toi, tu te pointes.
Une Aether ne passait pas entre les mailles lorsqu'elle revenait dans un lieu où elle n'avait pas vraiment sa place, mais si elle accordait la permission de passage à un de ses puissants alliés, même dans cet espace généreusement accordé, cela risquait de créer des remous. Cet être devait être une aberration sur les Terres de Sympan, qui plus est. On ne l'aurait pas dit ainsi, si on le voyait de dos, mais sous ses vêtements et son allure squelettique, cet homme n'en était pas vraiment un. De sexe masculin, certes, sa voix ne trompait pas, mais sans que les chairs, les muscles ou le sang ne circulent sur son anatomie. C'en était réellement un, de Squelette, un vrai. Uniquement des os, du cartilage et une puissance magique propre qui illuminait ses yeux d'un bleu luminescent.
— Ça vaaaa. Qu'est-ce qu'ils vont me faire, après tout ? Les gros yeux ? Ah ! Je ne crains pas les êtres comme toi. C'est pour vous tenir tête que je suis né, Izanami. — Tu n'es pas chez nous, Níðhöggr.
Sans doute était-il surprit de la voir se servir de ce vieux nom, mais il n'en montrait rien. S'il aimait la contrariée, ce n'était pas non plus un suicidaire.
— C'est vrai, reprit-t-il. Je tâcherais de dire bonjour si quelqu'un vient nous voir, ça te va ?
Son ton restait tout de même insolent, mais pouvait-elle tout lui reprocher ? Si elle l'avait pu, sans doute aurait-elle été comme lui, dans une autre vie. Reine savait mieux que quiconque qu'il ne l'écouterait pas.
— Et puis, qui crois à ces conneries ? Tes incursions, moindres ? C'est souvent les pires ! — Ce n'est pas vrai.
Si on aurait pu croire son visage immuable, il n'en était rien. Instinctivement, elle voyait l'ombre d'un haussement d'orbite. Consciente qu'il ne la prenait pas au sérieux, elle se permit de rajouter ;
— Ne compare pas ça à ... ça.
Un sourire dévoilait les dents acérées de son interlocuteur devant son admission, mais ne dit rien de plus. La Créature pliait ensuite ses jambes, observant la vaste étendue sous leurs pieds, allant de la nature environnante, au Lac reposant dans son cratère, qu'aux structures variées présentes au centre du lieu, tout en tirant un coup sur sa cigarette. Reine eu une grimace, elle détestait cette odeur.
— Tu as recréer les ruines de la Cité pour quoi ? — Pour ne pas oublier.
Combien de morts dans ce seul endroit pour tous les sauver ? Ces quelques précieuses minutes ...
— Ils ont de quoi tenir tes Humains ? ... Si elle devait revenir, j'veux dire. — Non. — Bon. Ça explique les Précurseurs, alors.
Níðhöggr tournait la tête vers la droite, découvrant Vitharr descendant la montagne sans le moindre mal, restant visible au-dessus des arbres tout en agitant les alentours. Il était poursuivi par une multitude d'oiseaux, le suivant vers un autre coin de l'île, mais sans que leurs cris ne troublent le son lourd et millimétré de ses pas, résonnant sur des kilomètres.
— J'aimerais éviter le bordel d'une nouvelle guerre entre territoires. Seulement ... Je ne peux pas garantir qu'elle ne reviendra pas, ou ne tenteras pas de causer du tort aux endroits à sa portée. S'il advenait qu'elle tente de toucher Eyjasandr, je pourrais remettre ses Précurseurs à Sympan, pour protéger quelques endroits de ses sbires ... S'il en a besoin. — Pourquoi tu attends son autorisation ? Si tu veux créer un nouvel Avant-Poste dans cet endroit, rien ne te retiens. — ... Ce ne sera pas nécessaire. Si nous n'avons pas de Magie dans notre Univers, il n'y a pas de Point Zéro dans celui-ci.
L'Aether aurait presque juré l'avoir vu cligné des yeux, avant qu'un long silence ne s'installe entre eux, seulement interrompu par le vent glacé émanant des hauteurs.
— Cet espace est intriguant.
Se redressant suite à sa déclaration, il revint à ses côtés pour contempler les images qui ne cessaient de se mouvoir tandis que les Mortels poursuivaient leurs existences, ignorant l'existence de cet endroit, ou même la leur. Comme si cette conversation n'avait pas lieu en cet instant.
— C'est eux ? demanda-t-il en observant les concernés quelques instants. Ils ont l'air ... Intéressants. — Vaès le trouve aussi.
Tournant son buste vers l'arrière, ses yeux suivait la courbe d'une des ailes reposant sur l'amas de roche situé derrière eux. Elle était là depuis le début, mais terriblement silencieuse, au point que l'on oubliait sa présence. Posée sur ses incroyables serres, son corps de cinquante mètres ne semblait pas trouver sa position contraignante. Contrairement à ses homologues des Terres de Sympan, que Reine connaissait sous le nom de Thekēra et qui offraient une palette de couleur au niveau de leur corps, Vaès avait une paire d'oreilles, de cornes et une ligne de poils sous les yeux de couleur bordeaux, ainsi qu'un pelage noir aux reflets grisés. Déployant ses ailes aux envergures monstrueuses avant de les agités en dégageant de vent, soulevant poussière et gravas, la Précurseur approuvait d'un léger cri, caractéristique à sa race. Níðhöggr inclinait la tête pour la saluer. Elle lui répondit d'un même mouvement. Il sentait son énergie chancelante, conscient que son Souffle s'amoindrissait.
— Tu as raison. Il est temps.
Son désir n'était pas de revenir sur le devant de la scène, mais les Humains avaient besoin d'une aide extérieure. Ils avaient été une race prestigieuse, mais longtemps délaissée par les Aetheri. Seule Drëjtesi s'était battue en leur nom et Reine veillerait à entretenir son souvenir dans son coeur. Ces derniers temps, Väaramar avait redonné une volonté de natalité au sein de la race, mais elle estimait ce geste maladroit. Comment protéger des milliers de petits êtres sans une puissance adéquate ? Ce n'était pas sur des alliés versatiles qu'ils devaient compter. Non. L'Aether avait déclaré ses intentions, elle y avait travaillé durant un temps considérable et désormais, les Ira allaient retourner au sein d'un hôte. Ils étaient peu nombreux à se targuer d'avoir un puissant Ma'Ahid et sans doute qu'une matérialisation ne serait pas immédiate, dans la plupart des cas, mais ce n'était rien. Pas à pas, vers une résurrection. Tendant le bras au-dessus de la masse des visages qu'elle savait être sensible à l'aura de Fenrir, son Rituel débutait. Agité dans son être, le Roi eu un hurlement, comparable à un rire, agissant comme un Appel. C'en était fini des murmures brouillés, des appréhensions, des cauchemars douloureux et la crainte d'être désarmé devant la Magie. Les Ira seraient une arme, à bien des égards. Pour eux. Tous.
— Il est l'heure d'éveiller vos Sēnaṭīnēla, Ira. Alix. Lexa. Dahlia. Shapûr. Prenez soin d'eux. Samuel. Lancinia. Naya. Maximilien. Veillez sur eux. Horye. Asîlah. Idril. Aurel. Sjar. Ils sont vos partenaires. Hélène. Ihsan. Sharihzad ... Mancinia.
Níðhöggr manquait de s'étrangler en entendant ce dernier nom. C'était une blague, pas vrai ? ... Il observait de plus près. Non. Elles avaient la même tête. Par les Saintes Miches de la Création, encore une ! Son interlocutrice lui sourit, amusée et heureuse, tandis qu'autour de son bras glissait des masses noires qui se laissaient sombrer sur les concernés, qui ne mesuraient pas ce qui leur tombait dessus. Peu importe l'âge, le sexe ou l'avenir. Un par un. C'était une pluie salvatrice qui allait s'abattre sur la race, c'était une promesse. Ça avait été si rapide et si lent, mais sa besogne était terminée, la laissant un peu groggy. Chacun des petits étaient désormais au sein de l'esprit d'un Humain. Certains Génies seraient mécontents de son action, mais ils viendraient certainement se plaindre en tapant de leur pied invisible dans les environs.
— Et maintenant ? l'interrogea son comparse. On attends ? — Je ne souhaite pas que leur première nuit soit cauchemardesque. Offrons-leur un doux songe. J'ai aussi promis une compensation aux autres ... Je suis moins limité qu'auparavant, alors ...
Élevant ses deux bras vers les cieux, laissant sa magie débordée, Izanami étendait son aura.
Eyjasandr vous attends. Et que votre voeu soit exaucé.
1497 mots
Explications
L'Événement est ouvert aux membres suivants : Mancinia, Maximilien, Nostradamus, Astriid, Léandra, Isahya, Dhavala, Kaahl, Ezechyel, Deccio, Priam, Jun, Omos, Latone, I&I, Adam, Kitoe, Djinshee, Tamina, Daé et Lexa. Vos DC's et Compagnons inclus. Merci de votre participation au NaNoWriMo 2020 !
Pour ceux qui ont atteints certains paliers, vous avez une réduction du nombre de mots, comme ce sera expliqué un peu plus bas !
Au niveau du RP, j'introduis une nouvelle Aether. Connue sous le nom de Reine aux personnes qui l'ont croisée, elle deviendra Izanami, l'Aether des Ira [ses représentations cachent son visage, qui est similaire à celui de Mancinia]. Ces créatures sont une représentation physique du Ma'Ahid. Ils mangent votre Magie au petit dej', en somme ! Elle concerne surtout les Humains, qui vont la découvrir progressivement, mais son espace, nommé Eyjasandr, est ouvert à tous en ce qui concerne cet événement. Tandis qu'elle discute avec une entité de son propre univers, elle remet un Ira à chaque Humain, ne délaissant pas les autres races pour autant ...
Et en conséquence, vous avez plusieurs possibilités de scénario, ce qui vous permettra de varier si vous voulez participer plusieurs fois !
Mission I - votre personnage est en lévitation au-dessus du lac, il ne peut pas bouger de là, l'endroit est très brumeux et il n'y voit pas à deux mètres, c'est très confus à ses yeux. Il rencontre un ou plusieurs PNJ de votre choix, qui peuvent avoir une apparence qu'il connaît ou non [et ça peut être des PJ, avec l'accord du Joueur]. En vérité, ce ou ces PNJ, c'est vous, le Joueur. Et c'est le moment d'avoir une conversation avec cet être qui ne sait pas qui vous êtes et qui va commencer à vous reprocher certains aspects négatifs de sa vie, ou bien souligner ses aspects positifs à son égard, sans pouvoir se contenir. Peut-être fera-t-il un mélange des deux ? À moins que vous ne décidiez qu'il se taise et de lui remémorer ses réussites, comme ses échecs. Vous l'avez compris, c'est bien la version moderne des Bonnes Résolutions ! Alors, avez-vous été sage ?
Mission II - votre personnage se retrouve entre la Cité au Lac et la montagne, il peut se balader un peu à l'extérieur de cette dernière avant de se sentir observer. Si vous levez les yeux, sur le flanc de la montagne, vous verrez Vaès. C'est ce qu'on appelle une Précurseur, une créature aux dimensions ahurissantes, se dressant sur cinquante mètre de haut, avec une envergure des ailes de deux cents soixante-cinq mètres. Selon notre bestiaire, c'est un Thekēra. L'illustration vous la montre, mais son pelage est noir avec des lignes bordeaux. Elle a un énorme charisme. Comme plus haut, vous allez avoir envie de raconter votre existence, votre avenir, vos ambitions. Quel que soit votre alignement, elle ne vous jugera pas : ce n'est que de la curiosité. Elle peut vous parler par télépathie, dire qu'elle est en fin de vie et qu'observer les autres lui permet d'apaiser ses vieux jours. Si vous êtes gentil, elle vous offrira un petit vol au-dessus des nuages, jusqu'à votre réveil [attention, son envergure est énorme ... elle va très vite et il fait froid dans les hauteurs, si vous n'avez pas de bonnes statistiques, ce vol vous tuera certainement, mais vous aurez atteint le septième ciel xD /sbaff]
Mission III - Pour les enfants - on pense à eux ! - vous êtes dans un village entre vous. Il n'y a aucun adulte pour vous embêter et vous savez qu'il n'y a aucun danger pour vous ici, puisque la Reine de la Forêt qui vous entoure veille sur vous, de loin [en fait, n'ayez pas peur de dire que vous la voyez courir pour vous balancer des boules de neige, sauter dans des congères, vous faire des cookies, vous raconter une histoire, faire du patin [elle ne sait pas patiner en vrai, ça peut être drôle], que sais-je, elle adore les gosses ! /mur]. Tout vous parait simple et doux. Rien de mauvais ne peut se produire et le Mal est chassé complètement - si vous voulez rebondir sur un RP entre vous à part, vous pouvez ^o^ - et si vous êtes un adulte et que vous souhaitez redevenir un enfant ... C'est votre voeu, on l'exauce 8D
Quel que soit votre choix, votre magie est inopérante et vos paires d'ailes sont apparentes. Toutes [maximum trois, de mémoire]. C'est pour vous mettre en sécurité. Seuls les Génies sont capables d'avoir recours à la Magie, mais s'ils abusent, ils seront traqués par les créatures de l'endroit [et si votre intelligence est élevée, vous allez prendre conscience qu'il y a des trucs dangereux aux alentours, derrière la neutralité des Précurseurs]. Prudence, donc !
A contrario, pour ceux qui en ont marre des rêves mystiques et veulent poursuivre leur vie tout en ayant le plaisir d'avoir de la chance ;
Mission IV - votre personnage vaque à ses occupations habituelles et croise, soudain, un canard en plastique avec des lunettes de soleil. Oui, ça ne s'invente pas. Ce dernier vous fait Coin ! avant de disparaître. Il peut aller à contrecourant dans l'eau, se retrouver au coin de votre bureau, au-dessus de votre armoire ou que sais-je, pour vous observer. Vous pouvez le toucher, mais il ronronne et vibre avant de disparaître. Il a un puissant charisme. En vérité, ce petit Coin ! bien placé est un cadeau de l'Aether, qui a choisi de vous offrir une journée où tout se passe bien dans votre vie. Personne ne vient vous importuner, remettre en cause vos décisions, votre travail sera plus simple, les conversations agréables, on dira oui à chacune de vos volontés et on sera plus enclin à vous donner ce que vous voulez, quelle que soit la demande. Attention, ne faites pas n'importe quoi, respectez vos statistiques et, surtout, retenez bien que l'effet ne durera que vingt-quatre heures, alors prenez garde aux conséquences pour vos personnages, selon ce que vous faites ... des personnes peu contentes de retrouver leur lucidité pourraient vous en vouloir par la suite !
Mission Spéciale - Pour les Humains, uniquement et, si vous le souhaitez, c'est le début de l'intrigue des Ira. Vous devez choisir une des missions se déroulant en rêve, obligatoirement. Peu importe votre niveau, vous allez seulement le voir. Ceux qui ont les statistiques nécessaires comprendront que n'est pas normal d'être suivi de cette manière. Si vous tentez une approche, l'Ira disparaîtra dans le sol, avant de reprendre son observation. Vous pouvez y voir un mauvais présage, puisqu'ils annoncent la Mort ... Ou essayer de comprendre ce qu'il se passe. Dans tous les cas, à partir de ce RP, tous les Humains PJ commenceront à voir leurs Ira en rêve. Dans l'éventualité où vous avez des Humains encore jeunes, mais que vous souhaitez qu'ils constatent sa présence également, l'Ira est lui aussi encore petit. Comme l'enfant ne se souviendra pas spécialement de cet événement en grandissant, l'Ira viendra jouer en sa compagnie, en fonction du rêve que vous voulez lui donner, il lui évitera tous les dangers [lui évitant de tomber, de se prendre une boule de neige, par exemple - oui, ils peuvent prendre part au scénario des enfants, juste que l'Ira sera avec lui, ça marche aussi].
Explications - Ira:
C'est au moment du passage entre le Niveau I et le Niveau II, avec dix points d'Intelligence et dix points d'Antimagie, que l'Ira commence à être visible au détour des rêves. Des statistiques plus élevées permettent à l'Humain de prendre conscience d'être observé, engendrant de la crainte, des troubles du sommeil qui eux-mêmes auront des conséquences sur sa vie diurne, comme de la fatigue, de l'irritabilité, de l'excitation, ainsi de suite. C'est une évolution à réaliser en RP, avant que l'Humain ne prenne conscience que l'Ira peut être bienveillant si lui-même l'est à son encontre. Une sorte de statu quo s'installe entre les deux.
Eyjasandr:
En arrivant sur Eyjasandr, qui peut être sous neige, sous un manteau automnal, ou sous les aurores boréales de nuit, le Rêveur se trouve souvent en lévitation, de quelques millimètres, au-dessus d'un lac, vêtu de vêtements blancs vaporeux et privé de sa magie. Ce dernier est situé au centre d'un cratère où se jettent sept vastes cascades, donnant lieu à un courant glacial qui le traverse. Il arrive que de la brume recouvre le Lac, lui donnant des allures d'infinité - cela signifie que le Rêveur est troublé et ne sait qu'elle chemin prendre. En son centre précis se trouve un bâtiment délabré, connu sous le nom de « L'Autorité » et qui est une vaste structure, haute de plusieurs étages. Les pierres constituant l'ensemble étaient autrefois de couleur blanches, mais semblent désormais ternes, voire noires. Une statue dorée, représentant un homme dont l'eau a érodé le visage, conservée, mais brisée en morceaux dans ce qui devait être un bassin. Il semble y avoir deux pontons, les drapeaux ont brûlés, les blasons ont été détruits et l'on peut observer les meubles recouverts d'une couverture poussiéreuse et humide, laissant présager de leur état actuel, ainsi que des caisses et des portes cassées.
Malgré sa dévastation, l'ensemble conserve un certain charme, mais ce n'est rien en comparaison de ce que leur vision peut distinguer à l'arrière ce dernier, un peu en surélévation, sur un piton rocheux, dévalant les courbes de toutes ses architectures. Il s'agit des ruines de ce qui ressemble à une ancienne Cité, au prestige certain. Sur un des murs reposait encore, en or, le sigle de l'organisation qui y siégeait. C'est « La Cité au Lac », celle que l'on ne nomme plus. Aux alentours, sept vastes cascades secouent l'horizon en s'échouant dans le lac dans un silence troublant. Toute la végétation aux airs sanglants invite à la prudence. La dévastation de cet endroit semble avoir été violente, mais la plénitude y règne désormais, tout semble endormi. Comme si la Mort, qui avait visiblement régner en maître pendant longtemps, s'en était allée ... Ou peut-être pas avec exactitude, car sur ce territoire domine encore des Créatures redoutables. S'il est possible de parcourir l'île, le Rêveur peut tomber sur un Précurseur, qui est, en vérité, une créature aux dimensions gigantesques. De nature neutre et observatrice, ils ne vous causeront aucun tort s'il advenait que vous tombiez sur eux. Ce sont des êtres enclins à vous observer, curieuses, sans rien dire, jusqu'à ce que vous repartiez. Elles ne réagissent qu'aux signes évidents d'agression, il est possible que vous vous mettiez à raconter votre vie. Ils ne vous jugeront pas.
À l'inverse de ces êtres apaisants, Eyjasandr est aussi parcouru et soumis aux volontés macabres des Neuf Primordiaux. Il s'agit des Ira ayant appartenus à des Humains dépositaires d'un Ma'Ahid très élevé, mais qui mû sous la magie d'un adversaire puissant durant la Mort, sont devenus des entités corrompues et indépendantes. S'ils n'émettent pas de Ma'Ahid eux-mêmes, leur désir est d'annihiler toute forme de Magie, notamment parce qu'ils s'en nourrissent pour rester en vie. Ils erraient en silence sur les Terres de Sympan, discrets, dévorant quelques voyageurs égarés sur le territoire de l'un et de l'autre, à intervalles réguliers. Devant ces êtres qui devenaient dérangeants, Izanami s'est chargée de les ramener en ce lieu, dans le but que la magie ambiante les nourrissent et les apaisent. Ils sont ainsi les défenseurs de cet habitat, raison pour laquelle la Magie extérieure y est bannie, de crainte qu'elle n'excite leur appétit, les engageant dans une chasse impitoyable contre les utilisateurs de cette dernière. Toutefois, si un voyageur imprudent tombe également sur lui, il subira un sort tout aussi peu enviable. Seuls les Humains sont immunisés de leurs agressions, les Primordiaux se contentant de les observer de loin. Ils semblent tolérés la présence des Anges et des Génies.
Il en existe un, cependant, qui broie toutes les espèces sans pitié. Il heurte avec violence tous les Rêveurs qui seront soumis à un drame arrivant dans le Temps à venir, que ce soit une dispute, une disparition, une brisure mentale ... Il est l'Avertissement, mais personne ne s'en souvient. Sa voix arrache les oreilles, sa seule vue brûle les yeux, son moindre mouvement respiratoire arrache la peau, le claquement de ses dents brise les os. Broyé par sa vision terrible, le Rêveur implose. Devant la terreur de la scène, son subconscient efface l'intégralité du songe, ne laissant comme marques éventuelles qu'une fatigue excessive, des nausées et des vomissements, un mal de tête, des douleurs abdominales, une sexualité exacerbée ou une perte d'appétit durant plusieurs jours.
Gains
Vous obtenez le Titre de La Plume de la Reine pour un seul de vos personnages. Choisissiez bien ! N'hésitez pas à lui trouver une justification RP au travers de l'événement ^^
Les gains vont au personnage avec lequel vous postez ^o^ Pour 3000 mots minimum, ou 1500 mots avec le barème ;
Pour les Races Magiques
- 1 Point de Magie - Parce que c'est Noël *O* - Création de Cookies - Création de Chamallow - Création de Chocolat Chaud - Bratchäs - synonyme de soirées conviviales et revigorantes, cette magie permet de créer un environnement autour d'une raclette, réalisant l'apparition d'une vaste tente rouge, à la décoration comparable à celle que l'on trouve sur Boraür. Il y a autant de chaises que d'invités, ainsi qu'une large table de bois regroupant d'excellents fromages et autres charcuteries, le tout avec des accompagnements et des boissons chaudes, ainsi que le nécessaire de cuisson de manière individuelle. Cet endroit est scellé magiquement pour ne pas être dérangés. Ou que personne ne puisse partir avant la conclusion du repas ?
Sinon ...:
C'était un peu la liste du troll, m'voyez ! J'avais un peu de mal à choisir vos gains, en vérité ! Je vous mets à disposition cette liste, qui inclus les gains du NaNoWriMo et du Yicaly de l'année dernière [pour ceux qui y participaient, soyez vigilants ^^], en plus de quelques nouveaux. Si un des gains de la liste principale - voire tous - ne vous convient pas, vous pouvez en prendre un de remplacement. Dans tous les cas, vous avez droit à cinq gains. Ou n'en prenez pas ! /sbaff
- Création de l'Encre - Création de la Neige
- Illustration - votre personnage détient la capacité de matérialiser des flammes, de la vapeur ou des éclairs qui illustreront ses propos. Selon l'histoire racontée et, en fonction de son niveau de magie, une musique en accord avec ce qu'il se passe subjuguera l'auditoire.
- Paroles Glacées - lorsque votre personnage ressent de l'animosité envers son interlocuteur, toutes les paroles qui sortiront de sa bouche paraîtront violentes et glaçantes. Si vous avez des statistiques hautes en magie et en charisme, elles seront accompagnées d'un souffle givré, accentuant l'effet que vous êtes dangereux et agissant sur la personne comme tel, lui donnant l'impression de geler sur place.
- Confession - capacité d'obtenir la vérité à une question posée, ou qu'une personne admettre avoir commis un péché envers une autre [utilisable une fois par RP].
- Paire d'Ailes de Verre - illustration ou illustration - ces ailes sont une composition de verre modelé avec des pièces de verre [la couleur dominante est au choix à la validation : blanc, noir, carmin, ou coloré] qui ont la capacité d'être incassables. Elles résistent aux magies élémentaires, ainsi qu'aux projectiles, agissant comme un véritable bouclier, dans les airs ou au sol. Elles se guérissent seules. Elles ont néanmoins deux déficiences, tout d'abord, elles sont amoindries au niveau de leur base et si on touche le porteur dans sa zone dorsale, elles se rétracteront automatiquement. Peu importe qu'il soit dans les airs, sans aucune autre capacité pour sauver sa vie. Ensuite, étant lourdes et complexe au niveau de la maniabilité, les détenteurs doivent avoir vingt-cinq en Force et en Agilité pour pouvoir les utiliser.
- Caméléon - pouvoir permettant de changer la couleur de ses yeux et de ses cheveux, ainsi que la longueur de ceux-ci pour mieux se dissimuler.
- Voix d'Encre - permet d'enchanter une plume qui écrira vos paroles sur un parchemin, avec une magie et une force élevées, vous pourrez écrire directement vos pensées pour éviter les oreilles indiscrètes.
- Télépathie - permet de communiquer avec des personnes sur une longue distance [seulement dans un sens, il faut que votre partenaire est également ce don pour vous répondre].
- La Harpe d'Harabella - instrument permettant de faire vivre un rêve éveillé à quiconque entend sa musique.
- Changement - permet de changer ses vêtements à volonté, peu importe où l'on se trouve et selon les limite de l'imagination.
- Le Veritaseras - il s'agit d'un coffret, en bois verni, peu encombrant et qui se glisse aisément dans un sac de voyage. Malgré son apparente petite taille, il contient l'ensemble des Jeux existants [comme le Mẹio, par exemple] et, pour les invoquer, il suffit simplement de penser à celui avec lequel on veut s'amuser. Seulement, tout ce qui est extrait de cet endroit est particulier. En effet, lorsqu'on sort un Jeu en provenance du Veritaseras, les Joueurs ne peuvent dire que la vérité, sans faux semblants.
- Le Souffle du Précurseur - il s'agit d'une Autorité de Vaès au sein de l'Eyjasandr. Elle vous permet d'avoir un caractère et une approche décelant les brèches au sein d'une race animale [au choix et à prendre à la validation]. Chaque espèce possède sa dangerosité, ses caractéristiques et ses particularités, certaines sont dociles, d'autres indomptables. Cette capacité vous permet de comprendre les règles élémentaires de cette dernière, permettant de vous adaptez à elle, de générer une confiance mutuelle. Les membres de celle-ci seront moins enclins à vous fuir, vous menacer ou vous craindre, ils deviendront des compagnons, ou des alliés en cas de danger. Attention, néanmoins, en cas d'agression envers un membre de la race avec volonté de lui nuire, le Souffle se retournera contre vous et vous deviendrez la cible de ladite race. Vous serez marqué et dès qu'un de ses membres vous croisera, il cherchera à vous nuire.
=> vous ne pouvez obtenir ce gain que de deux manières : soit en allant à la de rencontre Vaès, qui vous transmettra ce talent en remerciements, soit en réalisant la mission IRL et qui aura un rapport avec l'animal choisi. Ne marche pas sur les Animaux Divins. Comme la catégorie des Animaux Colossaux n'existe plus, vous pouvez prendre une de ses espèces, seulement, prudence : le don se base, comme toujours, sur vos statistiques, alors n'allez pas dans le nid d'une bête colossale. Autre chose, vous ne pourrez jamais être aussi proche d'un Dragon qu'un Dragonnier, vu que c'est une spécificité de l'Empire, mais disons que ça vous évitera de mourir si vous en croisez un. Ce don marche aussi pour les Humains. Vous remplacez l'un de vos gains.
Pour les Humains
- 1 Point d'Antimagie - Parce qu'on est les plus swag *O* - Kandjar - il s'agit d'un poignard à lame très large et recourbée porté à la taille. Si l'arme semble normale, elle contient dans son coeur un violent poison. Réalisé par un savant Humain et s'inspirant de quelques sorts magiques, il aura conçu cette arme avec un mécanisme secret. Dans la lame se trouve un conduit, partant du manche vers la pointe, où est contenu le poison, préalablement préparé et rechargé entre chaque utilisation. Lorsque le mécanisme, qui est une sorte de bouton dissimulé dans le talon, est actionné, le poison s'injecte dans le corps de l'ennemi. Un mal infecte le tissu et dévore la peau, pourrissant les chairs. Il existe un antipoison, mais est-il nécessaire de le donner ? - La Rose Bleue - création des mains de la Sertisseuse, en quelques exemplaires rares et exquis, il s'agit d'une bague, surmonté d'une labradorite bleue en forme de rose. Ce bijou remarquable ira bien avec une majorité de vos tenues, mais elle dissimule un secret. Un mécanisme permet d'ouvrir un compartiment entre la pierre et son socle, étant capable de contenir un médicament, un poison ou un antipoison, selon l'utilisation que vous lui destinez. - Saira Sapāṭā - il s'agit d'un legs venu d'une entreprise qui vous est inconnue, mais qui vous permet de voyager avec tout le confort nécessaire. Vous avez besoin d'un guide, d'une monture, d'une hostellerie ou d'un repas ? Peu importe, tout cela vous est offert gratuitement ! Cette acquisition vous permet de voyager dans les plus beaux lieux, seul ou accompagné, dans les endroits les plus luxueux et avec tous les avantages. - La Bénédiction de la Reine - lorsque le personnage croise une personne qu'il connaît, mais ne souhaite pas lui adresser la parole, ou être reconnu, ou encore le côtoyer, celle-ci ne la distingue pas. Selon les spécialités de chacun, elle aura l'impression de voir quelqu'un d'autre, ou de le voir sans le voir. Une assurance de discrétion.
- Titre - Sēnaṭīnēla [Sentinelle] => n'est accessible que si vous avez réalisé la mission des Ira, sinon, vous ne pouvez pas le prendre ^^ Il indique que vous êtes les précurseurs de la nouvelle religion, qui sera construite en RP au sein de la race, un peu comme des Élus, vous que vous serez les premiers à les posséder. Sur la durée, ce sera une grande marque de respect.
Pour les Enfants - on pense à eux <3
- Création de Cookies - Création de Chamallow - Création de Chocolat Chaud - Le Bisou d'Aellun - il s'agit d'une eau se trouvant dans une gourde que le personnage transporte, ou qui apparaît auprès de lui au besoin. Elle est toujours remplie et, lorsque son contenu est bu, l'utilisateur voit ses maux apaisés. Ses plaies ne sont plus douloureuses et guérissent plus vite, son pouvoir permet de réconcilier des amis disputés ou de calmer les chagrins. - La Reine dans la Forêt - l'on dit que lorsqu'un bébé est abandonné, la Reine de la Forêt vient le chercher et le conduit dans un village où il grandit sous son aile. Lorsqu'il atteint un âge de raison, elle lui remet un bracelet d'argent où est gravé un petit loup qui, lorsque le possesseur le porte, lui permet d'avoir une belle journée, de rêver sans cauchemarder ou d'entendre une belle histoire qu'il pourra raconter plus tard. Il s'agit aussi d'un lien entre tous les enfants, en gage d'amitié, pour que ceux-ci soient heureux d'avoir toujours des amis sur qui compter ... parce que si l'un d'entre eux se perd, les enfants à proximité le sauront et iront le chercher !
Pour les Enfants Humains
- 1 Point de Spécialité au choix - Une petite lampe de sel en forme de bonhomme de neige qui s'allume quand on souffle dessus et qui change de couleur selon le temps qu'il fait. - La Bénédiction de la Reine - lorsque le personnage croise une personne qu'il connaît, mais ne souhaite pas lui adresser la parole, ou être reconnu, ou encore le côtoyer, celle-ci ne la distingue pas. Selon les spécialités de chacun, elle aura l'impression de voir quelqu'un d'autre, ou de le voir sans le voir. Une assurance de discrétion. - Le Bisou d'Aellun - il s'agit d'une eau se trouvant dans une gourde que le personnage transporte, ou qui apparaît auprès de lui au besoin. Elle est toujours remplie et, lorsque son contenu est bu, l'utilisateur voit ses maux apaisés. Ses plaies ne sont plus douloureuses et guérissent plus vite, son pouvoir permet de réconcilier des amis disputés ou de calmer les chagrins. - La Reine dans la Forêt - l'on dit que lorsqu'un bébé est abandonné, la Reine de la Forêt vient le chercher et le conduit dans un village où il grandit sous son aile. Lorsqu'il atteint un âge de raison, elle lui remet un bracelet d'argent où est gravé un petit loup qui, lorsque le possesseur le porte, lui permet d'avoir une belle journée, de rêver sans cauchemarder ou d'entendre une belle histoire qu'il pourra raconter plus tard. Il s'agit aussi d'un lien entre tous les enfants, en gage d'amitié, pour que ceux-ci soient heureux d'avoir toujours des amis sur qui compter ... parce que si l'un d'entre eux se perd, les enfants à proximité le sauront et iront le chercher !
Pour avoir dépassé 10 000 mots, c'est la même chose, mais pour 1 500 mots pour un personnage, au choix : Omos - Ezechyel - Latone - Deccio - Kitoe - Isahya - Léandra - Priam
Pour avoir dépassé 20 000 mots, c'est la même chose, mais pour 1 500 mots sur deux personnages, au choix : Jun - I&I
Pour avoir dépassé 30 000 mots, c'est la même chose, mais pour 1 500 mots sur trois personnages, au choix : Maximilien - Astriid - Mancinia - Nostradamus - Kaahl
Suite à une décision administrative - et parce que c'est Noël - les personnes ayant voté au Top-Site N°53 s'en voient ouvrir l'accès, mais il y a également une ristourne pour nos plus grands votants !
Participants - Sól, Astriid, Isahya, Mancinia, Léandra, Maximilien, Dhavala, Deccio, Priam, Kaahl, Latone, Mephisto, Mimi, Adam et Tamina, merci à vous !
De 40 à 79 votes = 1 500 mots sur un personnage, au choix : Mancinia A partir de 80 votes = 1 500 mots sur deux personnages, au choix : Sól, Astriid, Isahya, Léandra, Deccio
Si vous avez aussi la ristourne du NaNoWriMo, c'est cumulé, tout simplement !
Bien sûr, vous pouvez le faire avec plusieurs personnages, mais le barème des 3000 mots se réinstalle ^^
Vous avez jusqu'au 31 Janvier 2021 pour poster.
Meuh:
Mancinia & Neah Aimer c'est ce qu'y a d'plus beau. Aimer c'est monter si haut. Et toucher les ailes des Anges ...
By Astriid ♫
By Shanxi ♫
Dernière édition par Mancinia Leenhardt le Jeu 21 Avr 2022, 21:45, édité 8 fois
Maximilien Eraël ~ Humain ~ Niveau III ~ ◈ Parchemins usagés : 2380 ◈ YinYanisé(e) le : 18/09/2016◈ Activité : Charpentier | rang II ; Ébéniste | rang II ; Soldat | rang II
Il y eut d'abord un moment de flottement silencieux où seul son pas qui entrât au contact de la terre se fît entendre, semblable à un léger froissement. Puis il s'arrêta et resta ainsi, immobile, le temps de quelques secondes. Sourcils froncés, son regard alla se perdre sur les différents éléments du décor pour se remémorer. C'était comme aller chercher quelque chose et, une fois arrivée sur place, oublier ce pour quoi l'on avait fait le déplacement. Il avait ce même sentiment. Toutefois, même en y réfléchissant bien, il était incapable de dire ce qu'il avait oublié. Pire ! Il ne se souvenait même plus quelle était sa provenance. Ce qui avait de quoi inquiéter en soi. Ses yeux parcoururent l'environnement plus en détail. Alors le bruissement des feuilles dans les arbres sous le vent lui parvint aux oreilles. C'était à peine si on y entendait le geignement des bêtes sauvages dans les fourrés. C'en était presque oppressant. Quel étrange endroit. Était-il à Alaitihad ? Il avait cru entendre que le lieu était cerné par la forêt et habité de créatures aussi étrange qu'elles étaient effroyables. Qui plus est, Taelora avait la réputation de ne pas être plus accueillant que le Continent Dévasté. A nouveau il balaya les environs du regard. Non. Le territoire Humain était neuf, en pleine expansion. Ici régnait la désolation. On se croirait sur les vestiges d'un champ de bataille. Dans les ruines d'une ville rongée par le temps. Un lieu que l'humanité avait abandonnée et laissée aux mains de Phoebe. Méfiant, Maximilien reprit son chemin. A chacun de ses pas, la terre humidifiée par les nombreuses cascades environnantes se marquait d'une emprunte qu'il savait temporaire, à l'image de tout, quoi qu'en pensent les plus orgueilleux des autres Races. Les Humains n'avaient pas le monopole de la Mort, les deux derniers Génocides en étaient une belle preuve. Il se retourna alors vivement. Du coin de l'œil, il lui sembla apercevoir une ombre. Il n'y trouva cependant rien. Avancer en solitaire dans l'inconnu mettait ses nerfs à vif, et les jeux d'ombres et de lumières que l'astre diurne effectuait avec la canopée carmins des arbres n'arrangeaient rien, son esprit finissant par lui jouer de mauvais tours. Le Kaahi inspira d'un long souffle qu'il expira de même. À trop être sur le qui-vive, il allait passer à côté de tout le reste, à savoir, la beauté sauvage des lieux et une éventuelle autre âme égarée comme il l'était. Peut-être était-ce pour cela qu'il était venu ? Il se le demanda. Il l'ignorait toujours. À l'évidence, ça ne lui reviendrait pas. Qu'importe finalement, car il prit conscience d'une chose à présent que son attention était totalement focalisée sur tout ce qui l'entourait. À mieux y regarder, il y avait un côté familier aux lieux. Ou nostalgique plutôt. La montagne avec les arbres à ses pieds. Cette aura pleine de mystères qui entourait l'endroit. Ces ruines, vestiges d'une civilisation disparue. Un rictus esquissa ses lèvres, mélange de mélancolie d'un passé balayé par les flammes et le sang, et de joie des souvenirs agréables de l'enfance qu'il avait eut loin du Désert et de la capitale. La chute de quelques pierres à flanc de montagne le sorti de ses songes. Il leva alors la tête pour découvrir la provenance des roches et eu un mouvement de recul.
Maximilien resta ainsi, sans bouger pendant de longues secondes, à simplement fixer l'immense créatures qui se tenait au-dessus de sa tête, celle-ci semblant le dévisager jusqu'au plus profond de son être. Pourtant, plus il détaillait la bête, moins il ressentait quelconque forme d'hostilité de sa part. Non elle semblait juste... Être là. Et patienter. Pour quelle raison ? Que pouvait-elle attendre ? Et, surtout, que pouvait-elle bien être ? Une Précurseur. La voix résonna jusque dans les tréfonds de l'âme du Kaahi qui retint un hoquet de surprise. « Qu'est-ce que... ? ». Son regard chercha alentour celle qui prononçât ces mots avant de le reporter vers l'immense animal. Et je n'attends que la Fin. Le rouquin papillonna des yeux. La Fin ? Qu'entendait-elle par là ? Toute chose n'existe que de façon temporaire. ajouta la Voix pour toute explication. Dans un même temps, l'animal se détourna de Maximilien et tourna son regard vers le chemin que formaient les empruntes de de l'Humain. Alors il comprit que ce n'était autre que la créature qui s'adressait à lui. Mon nom est Vaès. Et toi, quel est ton nom ? Maximilien ne répondit pas immédiatement, toujours sous le coup de la surprise. Pourtant les mots finirent tout de même par franchir la barrière de ses lèvres. « Maximilien Eraël. Je viens d'Utopia. Par contre pourquoi j'en viens, c'est encore une autre question. » fit-il avec un rictus avant de froncer des sourcils. Elle ne l'avait questionné que sur son identité. D'où déballait-il ses origines comme ça ? Même si elles devenaient évidentes une fois confrontée à son Ma'Ahid, certes. Ignorait-il cependant que la magie était aussi effective en ces lieux qu'elle ne l'était à Boraür, et qu'il aurait été plus aisément comparable à un Réprouvé de par ses appendices dorsaux qu'aux Enfants de Sympan auxquels il appartenait. Un court silence uniquement brisé par un souffle bruyant de la Précurseur suivi les paroles du Kaahi. Utopia. Un Rêve. commenta la créature. Pourtant il n'y avait aucunes critiques dans ses mots. Aucunes moqueries. Il ne s'agissait là que d'une simple remarque dénuée de tout jugement. « Celui des Humains. » y ajouta Maximilien sans savoir quoi en penser. On raillait ou l'on dénigrait la Race Humaine. On avait pitié d'elle ou la supportait dans son courage et ses espoirs que parfois certains considéraient comme vains. Mais jamais il n'avait vu quelqu'un en parler en toute neutralité. Sans la moindre opinion. À nouveau un court silence suivi ses paroles avant que Vaès ne reprenne la première. Les Humains sont donc pourvus d'ailes. Un rictus cynique se glissa sur le visage du Kaahi. Était-ce le premier Humain que cet être croisait ? « Non. Il n'est pas commun pour un Humain d'avoir des ailes en réalité. » répondit le concerné en croisant des bras. « Normalement les Humains n'ont pas d'ailes, c'est une particularité magique. Une chose que l'on ne possède pas. Mais des enfants aux ailes d'Ange sont apparus un jour. Nos premiers Humains ailés. » continua-t-il en s'adossant à un arbre. Puis, à nouveau, il fronça des sourcils et se plongea dans le regard de la Précurseur. Il y avait quelque chose, c'était certains. Toutefois, même en ayant conscience de cela, il eut comme le besoin d'en expliquer d'avantage sur la condition de ces Enfants des Cieux et ce qui les différencier des ailés d'Odon do Dur. « Je dois bien dire que je me sens un peu coupable de ne pas m'être montré présent pour offrir un toit à l'un de ces enfants. Ils étaient nombreux à en avoir besoin, et ce n'est pas Sharihzad qui me fera rattraper cette erreur. » ajouta-t-il avec un sourire désolé en songeant à sa Pātorī. Il marqua un temps avant de continuer. « C'est quand même ironique. Ces enfants sont apparus sous le signe de la vie. Ils ont redonné l'espoir à notre peuple. Alors que tout ceux portant les ailes des Manichéens, comme moi, les avons obtenus sous le signe de la mort, au cœur d'un champ de bataille, dans la terre, le sang et la sueur. Jusqu'à notre Fin. ». En même temps qu'il prononça ces mots, une ombre traversât sa vision périphérique. Il se redressa et chercha du regard l'objet ou l'animal ayant attiré son regard. Ses prunelles rencontrèrent une forme obscure aux allures de canidé fantomatique. Le Kaahi s'immobilisa. La bête noire également., homme et bête semblant deux chiens de faïences se faisant face. Pourtant tu es ici, et en vie. résonna de nouveau la voix de Vaès. « Quoi ? » fit le Kaahi, son attention détournée de l'imposant animal sombre, son regard se portant sur le pelage tout aussi ténébreux de la gigantesque créature qu'était la Précurseur, avant de s'en détourner à nouveau. « Ah. Oui. » répondit-il malgré tout. « Je ne sais pas trop pourquoi. Probablement n'était-ce qu'un rêve. » Commun à beaucoup de monde dans ce cas, répartis dans l'ensemble des Races. Mais qu'est-ce que ça pouvait être d'autres ? « Finalement, c'est à croire que l'ignorance apporte plus que la connaissance. J'ai couru le monde en toute ignorance de ce qui se jouait réellement sur la table. Je me suis confronté à ces hordes d'ennemis en ignorant d'où ils venaient, qui ils étaient et où je me trouvais. Je me retrouve à devoir trouver une solution pour Concilier le monde en ignorant les véritables volontés de la déesse qui m'a mit dans le lot de ses Élus, ma seule piste, totalement subjective, étant de vouloir donner tort à une personne. ». Ce n'est pas commun comme raison. En même temps que Vaès s'exprima, le chien-loup-fantôme s'assit, sans se détacher de Maximilien pour autant qui restait également le regard rivé sur les mouvements du Monstre Noir. « Peut-être. Mais je veux penser qu'on peut régner sur le monde sans devenir ni avoir l'allure d'un tyran. » répondit-il avec conviction. « Je veux penser que l'on peut trouver matière à s'entendre de façon à ce que personne ne soit ni lésée ni avantagée. Qu'il n'y ait ni dominant, ni dominé. ». Le loup s'effaça totalement de son esprit à ces mots, Aurel y prenant toute la place. Dans un soupir, il s'adossa à l'arbre qu'il avait quitté plus tôt. « Je ne veux pas qu'Aurel souffre comme j'ai pu souffrir d'un monde sans pitié. ». Alors il exhala un long souffle, puis porta un regard dur sur la bête fantomatique qui avait simplement disparu. Il la chercha du regard. Introuvable. Vaès ne fit que peu de cas de cet échange silencieux qu'avaient pût avoir le canidé et son interlocuteur. Aurel est le deuxième nom que tu prononces. reprit-elle en réponse aux derniers mots qu'avaient prononcés Maximilien. Toujours déconcerté par l'absence soudaine de la bête noire, celui-ci ne répondit pas immédiatement. « Oui. Aurel est mon fils. Sharihzad ma filleule. Ils sont ma famille, celle qui me reste. ». Il avait fini par se faire à l'idée qu'il ne la reverrai jamais, celle qu'il avait abandonné ce jour funeste où il rejoint Utopia pour la première fois. « Ils sont une bouffée d'oxygène au milieu de cette pression que je m'inflige sûrement inutilement. Mais c'est agréable. La seule chose pour laquelle se prend la tête un enfant c'est parce qu'il a faim, qu'il est fatigué, qu'il n'a pas envie d'aller se coucher ou qu'il veut jouer. Il y a presque de quoi les envier parfois. » ajouta-t-il avec un rictus amusé, le Monstre Noir ne faisant plus partie de ses préoccupations présentes. Les nourrissons avaient l'incroyable pouvoir de chasser ses idées noires.
Au final, il ne compta pas le temps passé aux côtés de Vaès. Il ne s'en soucia plus. Il se sentait étrangement plus léger à chaque confessions qu'il lui faisait plus ou moins malgré lui. Elles venaient naturellement au fil d'une conversation qu'il menait presque seul, sans même que la Précurseur ne l'interroge sur quoi que ce soit. Parfois elle commentait pour appuyer certains points, ou le questionnait sur des choses qui lui étaient, semblait-il, flous. Il n'en fallait pas plus pour que Maximilien en dise trois fois plus que nécessaire. Si c'était quelque chose qui ne lui arrivait jamais, il avait fini par s'y faire. Même, arriva un moment il ne se retint même plus. C'était inutile, il l'avait comprit. Qui plus est, il y avait quelque chose d'agréable. Agréable de pouvoir dire ce que l'on vivait, avait vécu et voulait et espérait vivre sans subir quelques avis que ce soient.
Et, comme la Précurseur l'observait et l'écoutait depuis son arrivée, le Monstre Noir l'observait également, derrière lui, à l'ombre des bosquets, attentif aux gestes et aux mots de l'Humain aux ailes bichromées.
Un regard se posa sur les bambins. Ils ne seraient pas les seuls enfants ici. Autant qu'ils en profitent pleinement. Ainsi, quelques secondes plus tard, chacun des deux avaient pris trois bonnes dizaines de centimètres supplémentaires, possédaient un bien meilleur équilibre dans la poudreuse dans laquelle ils se tenaient et avaient des traits légèrement plus mâtures qu'actuellement. « Aaaaaaaaah ! ». Avec un cri surprit, la petite Humaine trébucha en arrière, emportée par le poids de ses ailes immaculée qui avaient croîs en même temps qu'elle. Un tendre sourire se dessina sur le visage observateur. L'équilibre, ce n'était, a priori, pas tout à fait ça pour l'enfant de Varaämar. « Sha ! ». Dans une exclamation, le rouquin se précipita comme il put, peu habitué à ce genre de décors, sur sa sœur qui se trouvait les fesses au sol afin de l'aider à se relever. Saisissant fermement de ses deux mains celle de l'Humaine ailée qu'elle lui tendait, il la tira de toute ses forces pour la remettre sur pied, celle-ci l'aidant en prenant appui de son autre main libre sur le sol gelé. « Ouf ! Merci. » fit-elle une fois debout en se tenant fermement au bras de son frère pour éviter une seconde chute. « Fais attention. » répondit le garçonnet. « J'ai pas fait exprès. » rétorqua la petite avec une moue avant d'enfin lâcher le rouquin, non sans une once d'hésitation. Alors, constatant qu'elle eût enfin trouvée son équilibre, un large sourire éclaira son visage. « Viens ! On va jouer ! C'est pas souvent qu'on a de la neige à la maison ! » ajouta-t-elle en se mettant à faire de grand bond dans la neige qui craquait sous ses pieds, devant parfois se rattraper avec ses mains alors qu'elle manquât glisser à plusieurs reprise. « Il a déjà neigé à Utopia ? » s'interrogea alors le garçonnet à la dernière remarque qu'eût faite sa sœur, levant le nez vers le ciel clair d'où tombait quelques flocons léger. Puis, tandis que son regard revint au sol, il paniqua. « Sha ! ». Elle avait disparu ! « Sha, t'es où ?! » - « Par ici ! » répondit enfin la voix aiguë de Sharihzad comme il vit sa main s'élever d'une congère pour lui faire signe. Lorsque son frère la rejoint, il la trouva allongée de tout son long dans l'épais tas de neige, ailes toutes déployées. « Tu m'aides à me lever ? En plus ça commence à être froid dans la nuque. ». Un sourire moqueur se glissa sur le visage du petit Humain. « Tu crois que je vais faire que ça, t'aider à te lever ? » - « Mai-euh ! Aurel ! » le fâcha la fillette. « Oh, je rigole. » répliqua-t-il en lui tendant à nouveau la main. L'Humaine ailée se redressa alors d'un bond et fit face au dessin incrusté dans la neige. « Tadaaaaa ! Un Ange de neige ! » s'exclama-t-elle en écartant les bras avec un air enchanté. « En plus il tient celui-là. » ajouta-t-elle ravie. Parce que, si elle s'amusait à faire également des Anges de sable dans le Désert, ceux-là s'effaçaient bien trop vite sous les assauts des vents chauds, d'autant que la forme ne se dessinait que sur quelques millimètres dans les dunes malgré l'insistance qu'elle y mettait.
Un léger craquement sur le côté attira l'attention des deux enfants ainsi que celui de la vigilante, toujours présente, loin des yeux des petits Humains. Hum, ce n'était qu'eux. Alors, après un dernier regard sur les enfants, elle s'éloigna. Ils sauraient veiller sur eux autant qu'elle pouvait le faire. « Un chiot ! » se réjouit Sharihzad, les yeux brillants, en voyant le petit canidé s'allonger dans la neige à quelques mètres d'eux. « Tu crois ? » demanda Aurel en penchant la tête sur le côté. « Il a de grandes oreilles pour un chien, non ? » - « C'est quoi si c'est pas un chiot alors ? » répliqua la petite ailée comme si c'était évident à ses yeux que ce ne pouvait être rien d'autre que ce qu'elle annonçait. « Je sais pas. » admit alors le rouquin en haussant des épaules. « Ah ! Donc, c'est un chiot ! » conclut, triomphante, Sharihzad avant de s'accroupir et tendre la main devant elle. « Petit. » l'appela-t-elle sans qu'il ne réagisse plus que secouer la queue. « Il doit être timide. ». La fillette soupira, déçue. « Tant pis. ». Elle se détourna de l'animal et suivi les pas de son frère qui prenait déjà une autre direction, ne pouvant voir alors le canidé se redresser et les suivre du regard avec curiosité.
Saisissant sa sœur par la manche, Aurel tendit son index devant lui. « Regarde ! ». Devant eux se tenait un alignement de bonhommes de neige, chacun ayant son propre visage et sa propre forme. On pouvait même deviner un ou deux Elfes dans le lot. « On fait un bonhomme de neige nous aussi ? » fit-il à l'enfant ailé, les yeux pétillants. Sharihzad se tourna vers son frère et, avec un même regard, approuva d'un signe de tête avant de le devancer en courant vers les sculptures de neige déjà existantes. Là, elle commença à amasser la neige pour en faire un tas de plus en plus imposant, jusqu'à se tourner vers le rouquin pour le réprimander de son retard. « Bah aide-moi ! » - « J'arrive ! » répliqua le concerné suite à la remarque de sa sœur, manquant s'étaler dans le tapis blanc gelé dans sa précipitation. Tassant le petit monticule glacé, les enfants commencèrent à le faire rouler en une large boule épaisse dans l'objectif d'en faire une base plus importante encore que n'importe quel bonhomme de neige déjà existant. Une plus petite boule vint alors s'écraser sur l'ersatz de sculpture qu'ils avaient fait, les arrêtant net dans leur création, surpris. Le duo se tourna d'abord l'un vers l'autre, puis, dans un même mouvement, ils portèrent leur attention en direction de la provenance du projectile. Un petit groupe d'enfant avait commencé à se former plus loin et s'attaquer à coup de boule glacée. La question étant, celle qui leur était parvenue était-elle préméditée ou était-ce un accident ? Les deux Humains se jetèrent un nouveau regard connivent comme un large sourire esquissa les lèvres de chacun d'eux. En vérité, la réponse n'avait aucune importance. Enfonçant leurs mains dans l'énorme boule de ce qui aurait dû être la base de leur bonhomme de neige, sans aucun scrupules alors que la sculpture s'effondra en plusieurs gros morceaux, les deux enfants se préparèrent un petit tas de munition pour l'affrontement à venir. « Tu les tiens ! Je lance ! » - « Et pourquoi c'est toi qui les lance ? » s'indigna Aurel, déçu de ne pas pouvoir attaquer le groupe. « Et pourquoi pas ? » répondit la fillette sans argumenter plus. Le garçonnet fronça des sourcils et, tirant la langue à sa sœur, l'abandonna non sans être parti avec de quoi se défendre, laissant celle-ci avec son tas de boule de neige sans pouvoir en faire grand chose d'autres que les garder ou les porter, sinon les abandonner à son tour. « Aureeeeleuh ! » s'insurgea la petite ailée en le voyant s'éloigner en courant. Puis elle se laissa tomber au sol et croisait des bras, en colère contre le garçonnet.
Avec un rire, le rouquin rejoint le groupe d'enfant, faisant clairement entendre sa participation par l'ultime cri de guerre universel. « A L'ATTAAAAAQUE ! » cria-t-il tandis que son projectile atteignait déjà la tête de l'un de ses nouveaux camarades de jeu. Comme inconsciemment, deux groupes principaux avaient finis par se former, Aurel rejoignant sans réellement en prendre la décision l'un d'eux, se protégeant comme il le pouvait face à la pluie de boules de neige du camp ennemi tandis qu'il se rendait compte qu'il manquait clairement de maîtrise. Pourquoi il neigeait pas plus souvent dans le Désert ? C'est drôle la neige et en plus il serait plus fort aux batailles de boules de neiges puisqu'ils en feraient plus souvent. Alors qu'il comptait jusqu'à trois, le garçonnet entassait entre ses mains de quoi faire le plus gros des projectiles qu'il avait jamais fait jusqu'alors. Puis, comme il se redressa, il lança la boule en direction du premier qui passait. Pas de chance, il faisait parti de son équipe. Ça ne l'empêcha pas néanmoins de s'esclaffer en le voyant se ramasser l'énorme boule. Son regard fini enfin par tomber sur la silhouette de sa sœur qui avait continué à bouder tout ce temps. Jusqu'à maintenant du moins. Car il la vit en train de s'éloigner de la place, échappant à son regard. « Sha-Aaaaaah ! ». Alors qu'il s'apprêtait à rejoindre Sharihzad, il fut coupé dans son élan, vivement rattrapé par l'écharpe par la rouquine s'étant elle aussi ajoutée au groupe avec retard et qui n'en avait, vraisemblablement, pas fini d'en découdre avec ses assaillants. « Quoi ? » l'interrogea-t-il, surprit par cette soudaine agression. Son regard virevolta de la petite Elfe à l'un des arbres les cernant, pour rejoindre l'emplacement où se trouvait précédemment Sharihzad. « Hum. ». Elle avait disparue. Finalement il acquiesça d'un signe de tête. Ce n'était pas en se perdant lui aussi qu'il pourrait l'aider. Il suivi donc l'Elfette - quoi qu'elle ne lui laissa guère plus de choix - et, alors qu'il allait s'agenouiller pour permettre à la fillette de se servir de lui comme d'un escabeau de fortune, celle-ci décida de s'y prendre d'une toute autre manière. « Raaah ! Mais pas besoin de me pousser. » fit-il en crachant un peu de neige qu'il eût avalé dans la bousculade. « Dépêche-toi, tu m'écrases ! » continua-t-il à ronchonner tandis que la petite Sylvestre l'escaladait pour atteindre les premières branches. Lorsqu'enfin il put se remettre debout, Aurel marqua un temps en voyant le chiot de tout à l'heure de l'autre côté de la place. Ou en était-ce un autre ? Il semblait un peu plus grand. La main tendue de la rouquine le tira de sa contemplation. Levant les yeux vers cette dernière, il se saisit à pleine main de la sienne pour la rejoindre en hauteur. De leur perchoir, ils avaient vu sur la totalité de l'espace de jeu et des participants. Pourtant ce n'était pas suffisant. Après avoir retrouvé un minimum d'équilibre, le garçonnet s'affaira à escalader un peu plus le ligneux, non sans un regard vers l'Ygdraë qui semblait s'en sortir avec bien plus de dextérité que lui, ce qui n'avait rien d'étonnant en soi. « Ouf ! » s'exclama-t-il enfin au sommet. Heureusement qu'il avait quand même déjà eut l'occasion d'escalader les orangers ou aurait-il été vraiment en galère. Ainsi commença-t-il à rassembler un petit tas de munitions à proximité de lui à partir de la neige accumulée sur les branches à proximité, avisant de temps à autre ceux qui traversaient la place au pied de l'arbre et jetant à intervalles réguliers un œil en direction de l'endroit où s'était échappée Sharihzad. Puis, une œillade complice en direction de la rouquine, il se mit à bombarder les autres enfants en contre-bas, un éclat de rire finissant par lui échapper en voyant l'air ahurit qui marquât le visage de leurs cibles. Leur ascendant fut cependant de courte durée. Retrouvant le contact de la terre malgré lui, il se frotta le nez du revers de la moufle avant de lever les yeux vers ses adversaires qui l'achevèrent d'une dernière ruée de boule de neige.
Les joues gonflées, l’œil rivé sur la tignasse rousse de son frère, un jappement fini par détourner l'attention de Sharihzad qui se tourna en direction de l'animal. « Oh ! Encore toi ? » fit-elle avec un nouveau sourire en découvrant le chiot qu'ils avaient abandonnés plus tôt, Aurel et elle. Aussi elle se releva, passa un coup rapide sur ses vêtements pour se défaire de la neige gelée, et commença à s'approcher du petit canidé. « Aurel a raison. Tu ressembles pas beaucoup à un chiot en fait. » commenta-t-elle avec amusement. Le pas-chiot répondit avec un aboiement avant de tourner sur lui-même, déclenchant un petit rire aiguë chez la fillette qui chercha à l'approcher. Face à ce mouvement, le canidé se mit en alerte, avant de s'enfoncer dans l'une des rues du village. « Attends ! » lui intima la petite Humaine en commençant à le courser sans plus se soucier d'où il la mènerai et de la façon dont elle quittait sans un mot son frère. « Je voulais pas t'embêter ! » se justifia-t-elle dans sa course. Elle finit pourtant par s'arrêter, bien qu'elle n'ait pas retrouvée l'animal. Une épaisse buée se formait devant son visage au rythme de sa respiration rapide, cause de sa course effrénée. Tournant son regard à gauche, puis à droite, puis encore à gauche, l'Humaine ailée poussa un soupir déçu en constatant qu'elle avait perdue la trace du petit canidé. « Tu ne joues pas avec les autres ? ». Avec un hoquet de surprise, Sharihzad virevolta sur elle-même pour faire face à l'inconnue, trébuchant par la même occasion et la faisant chuter en arrière. « Aïe ! » lâcha-t-elle lorsque son fessier vint une nouvelle fois à la rencontre du sol. « Fais attention. » commenta l'inconnue en relevant la petite. « Aurel m'a dit pareil. » répliqua la fillette, boudeuse. « Il a peut-être raison. Elles sont fragiles. » fit l'adulte d'une voix douce en caressant du regard les plumes immaculées de la fille de Varaämar. Puis elle lui sourit. « Tu t'appelles bien Sharihzad ? J'ai fais des biscuits à la cannelle. Tu en veux ? ». La petite ailée leva des yeux brillants vers l'étrange dame. « Oh ! Oui ! » s'exclama-t-elle en se saisissant de la main qui lui fût tendue. « Et toi ? Comment tu t'appelles ? » - « Je suis la Reine de la Forêt. ». La petite dévisagea l'inconnue avec des yeux ronds. Une Reine ! Ainsi la Dame la guida dans une petite maisonnée de laquelle s'échappait la lueur et la chaleur d'une flambée, ainsi que l'agréable odeur épicée et sucrée des gâteaux pour lesquels Sharihzad était venue. Allongé devant les flammes crépitantes du foyer, la petite ailée retrouva le petit canidé qu'elle avait coursée plus tôt. « Ah ! Mais t'es là ! » s'exclama-t-elle en allant le rejoindre. Cette fois-ci, il ne s'enfuit pas. « Je crois qu'il a été attiré par l'odeur des biscuits lui aussi. » commenta la Reine en voyant la fillette commencer à offrir quelques cajoleries derrière les oreilles du petit animal. « C'est quoi ? Je pensais que c'était un chiot mais en fait Aurel avait raison. C'est pas un chiot hein ? On dirait un renard. En tout petit. Mais ça existe pas les renard noir, si ? ».
Lorsqu'il put enfin se remettre sur pied, Aurel se tourna une nouvelle fois en direction de la dernière position de Sharihzad, puis il se pinça les lèvres. Ça commençait à faire long. « Je reviens ! » fit-il au petit groupe sans savoir s'ils l'avaient entendu. Il n'avait pas l'impression que quoi que ce soit ou qui que ce fut puisse réellement nuire à sa sœur. Était-ce l'ambiance qui régnait qui lui offrait cette sensation ? C'était possible. Néanmoins, il n'était pas vraiment inquiet pour elle. Ce qui n'empêchait en rien que la savoir absente depuis tant de temps commençait à le turlupiner quelque peu. Tandis qu'il allait en la direction qu'avait prit Sharihzad, sans trop savoir non plus où la chercher exactement, il se retrouva face à l'animal qu'il avait vu plus tôt, avant d'escalader l'arbre en compagnie de la petite Ygdraë. Il s'arrêta et observa quelques secondes la bête, la tête penchée sur le côté. Par effet de mimétisme, le canidé fit exactement de même. « T'es pas le chiot de tout à l'heure. Tu ressembles un peu plus à un chiot que lui toi d'ailleurs. ». Mais c'était pas encore tout à fait ça. L'animal fit un bon à l'intérieur de la rue avant de se tourner, toujours sautillant, vers le garçonnet, la tête au sol et l'arrière-train relevé, sa queue fouettant rapidement l'air, comme une invitation à jouer. Voyant la non réaction du rouquin, il réitéra le mouvement, y ajoutant un jappement aiguë cette fois-ci. « Hum, d'accord. » fit alors le petit Humain, résigné, en attrapant un bâton qui se trouvait, par un étonnant hasard, à quelques pas de sa position. Puis, avec élan, il lança le bout de bois à travers la ruelle. Pourtant, la seule réaction qu'eût le canidé fût de suivre le morceau de bois de son regard brillant, jusqu'à ce que celui-ci ne disparaisse dans la neige dans sans un bruit. Alors l'enfant détailla la bête, étonné. « C'était pas ça ? » interrogea-t-il, sans s'attendre pour autant à une réponse de la part de la créature qui se roula sur le dos, exposant en glapissant son ventre. « Ah ! Bah fallait le dire. » répliqua avec un sourire amusé le rouquin en s'approchant de l'animal pour lui gratter le ventre, l'éventuel chiot réagissant immédiatement. « T'es tout seul ? Moi je cherche ma sœur. T'as de la famille ? C'est ton ami le tout petit chiot ? ». Aurel enchaînait les questions comme il les aurait posé à un être humanoïde alors qu'il savait pertinemment que la seule chose qu'il aurait en retour étaient des grognement et des glapissement ravi de l'animal au vu de sa situation actuelle. Pourtant, lorsque l'enfant eu fini sa tirade, le semblant de chiot s'arrêta brusquement, tournant légèrement la tête sur le côté et fixant quelques instants le garçonnet. Enfin, il se redressa, surprenant le petit au passage qui manqua chuter dans une congère, et commença à s'éloigner, interpellant de quelques aboiements aiguë Aurel lorsqu'il se fût distancé de quelques pas, comme une invitation à le suivre. Après une hésitation, le rouquin se décida à aller à la suite du petit canidé, courant après lui avec plus ou moins de difficulté, l'animal semblant bien plus à l'aise dans l'environnement que lui. Tricheur. « Attends ! Pause ! » fit le garçon après quelques minutes, essoufflés. Ce qu'il ignorait, c'est que, cette fois-ci, ce n'était pas après lui que l'animal aboyait.
À quelques pas de sa position, là où se trouvait la bête, une porte s'ouvrit. Y émergea une silhouette. Elle ressemblait à la brune qui avait voulu les déloger, l'Elfette et lui, de leur arbre d'attaque. Elle lui offrit un sourire. «Vous voilà. Rentrez vous mettre au chaud. Sharihzad est ici. » fit-elle en les invitant d'un geste du bras avant de retourner dans l'habitation. Après une seconde d'hésitation, Aurel s'approcha et, avec un regard à l'intérieur, il s'exclama en voyant sa sœur « Sha ! ». Pénétrant la bâtisse, et suivi par le canidé, il couru vers sa sœur pour se jeter dans ses bras. « Aurel ! » répondit en écho l'Humaine ailée entre surprise et ravissement. « Oh ! Un chiot ! Vraiment cette fois ! » ajouta-t-elle en voyant l'animal derrière le garçonnet qui rejoint le petit renard pour jouer avec ce dernier. « Tu veux des biscuits ? La Reine elle en a fait pleeeeins ! » continua-t-elle en écartant les bras de toute son envergure. Le rouquin se tourna vers leur hôte, l'interrogeant du regard. « Bien sûr, sers-toi. Ils sont fait pour être manger. ». Alors un large sourire se dessina sur le visage de l'enfant qui alla se saisir d'une poignée de biscuit à la cannelle. « Pourquoi t'es partie ? » demanda enfin Aurel à sa sœur entre deux gâteaux. « C'est toi qui m'a laissé ! » répliqua celle-ci, boudeuse. « Je pensais que tu viendrais. » rétorqua le garçonnet d'un même air. Puis il se tourna vers la Dame. « C'est vrai ? Vous êtes vraiment une Reine ? ». Elle en avait l'allure aux yeux du petit Humain. Ce n'est pas comme s'il avait eu l'occasion de croiser des Reines tout les jours il faut dire. L'intéressée sourit, amusée. L'interprétation de ces enfants n'était pas étonnante en soi. Leur innocence parlait pour eux. « OH ! Mais il y a tout les autres ! » s'exclama soudain Aurel en se redressant d'un bond, ne laissant pas l'occasion à la Reine de la Forêt de lui répondre. « Viens, on va leur en ramener des biscuits ! » ajouta-t-il avec entrain. « On peut ? » demanda-t-il en se tournant vers l'adulte. Un regard et il eut sa réponse. Enfournant quelques gâteaux dans la bouche - premier arrivé, premier servi comme on dit, tant pis pour les autres s'ils en ont moins - il récupéra un saladier plein de biscuits avant de se diriger vers la sortie. « Viens ! » insista le rouquin avec un signe de tête envers sa sœur encore près du feu. Celle-ci se leva alors rapidement et se saisit d'un second saladier tendu par la Reine de la Forêt, suivant son frère à l'extérieur au pas de course sous l'œil attentif de la Reine.
Lorsque le duo arriva, non sans peine et un nombre incalculable de chute évitée in extremis, à proximité du reste de la troupe enfantine, ils les interpellèrent d'une même voix. « HEEEEEEE ! » - « ON A RAMENE DES GATEAUUUUX ! » ajouta Sharihzad, guillerette, alors qu'elle avalait juste un énième biscuit qu'elle venait de chiper dans le saladier qu'elle portait.
Vulpina s’arrêta et releva la tête devant la créature qui se tenait assise sur le flanc de la montagne qu’elle parcourait. Si elle avait croisé cette gigantesque monstruosité de la nature dans la réalité, la sorcière aurait instinctivement cherché à prendre la fuite : elle aurait craint pour sa vie, et à juste titre ; elle se serait méfiée de sa taille démesurée lui conférant une force et une rapidité inégalable, se serait défié des griffes acérées pouvant la déchiqueter et de la gueule remplie de crocs risquant de la gober. Dans ce rêve néanmoins, elle ne fut aucunement agitée par ses instincts naturels. Bien au contraire, la mage noire était traversée par une paix intérieure qui la maintenait sereine, même face à ce danger. La bête n’en restait pas moins impressionnante, tant par ses proportions que par le charisme qui se dégageait d’elle : la femme la contempla en silence pendant plusieurs minutes, son regard sombre se frayant un passage sur son pelage obsidienne, remontant le long des courbes bordeaux, des cornes et des plumes. L’animal lui renvoyait son regard, ce qui la déstabilisa quelque peu : elle n’avait pas l’impression d’être épiée par une simple bête, ni même par un prédateur ; c’était davantage ce qu’elle ressentait lorsqu’elle échangeait des coups d’œil avec un humain. Ebranlée par cette constatation, la brune ne put s’empêcher de parler. « Bonjour. » commença-t-elle naturellement, avant de froncer les sourcils. Elle ne portait pas les bestioles dans son cœur. Elle n’avait jamais aimé leur compagnie, les considérant davantage comme des parasites que comme des compagnons. Leur manque d’intelligence flagrant les rendait inutiles à son égard, et ne faisait qu’ajouter une charge dont elle se passait volontiers. Seuls les reptiles échappaient à cette vision réductrice, pour une raison qui n’était pas rationnelle. Ce fauve n’aurait donc en temps normal pas su s’attirer ses faveurs : jamais l’idée de se mettre à lui parler, même pour la saluer, ne lui aurait traversé l’esprit. Malgré cela, Vulpina ressentait le besoin de continuer à s’adresser à cet interlocuteur sur quatre pattes – elle tentait d’ignorer la petite voix moqueuse qui soulignait l’appartenance au règne animal de son auditoire.
« Je ne suis jamais venue dans cette région. A vrai dire, je ne me rappelle même pas comment je suis arrivée jusqu’ici. » se confia-t-elle. « De quelle citée êtes-vous originaire ? » questionna en retour l’animal. La Raagus écarquilla les yeux, choquée d’entendre une voix raisonner dans sa tête. Pourtant, il n’y avait aucun doute à avoir : il s’agissait bien de la voix de cette bête. La surprise passée, la sorcière esquissa un rictus avant de répondre. « Je suis née sur le territoire de ma patrie, dans un petit village des terres aujourd’hui connues sous le nom de Nementa Corum. A mon époque, elles n’étaient pas aussi prestigieuses et étaient craintes du reste du monde pour l’immense prison qui y avait été bâtie. Un vestige duquel on ne peut à présent que se souvenir, à cause de cette catin de sirène à crinière rousse ! » Une once de colère traversa son visage, déformant ses traits – il s’agissait pour une fois des siens, de ceux avec lesquels elle était venue au monde, et non pas de l’apparence de son hôte ni de celles qu’elle arborait lorsque la vue de la magicienne la lassait. « J’ai cependant fuit cette région familière : j’ai dupé quelqu’un de rancunier et, pour ma sécurité, j’ai préféré fuir. » Là où la noblesse et l’honneur en aurait poussé certains à affronter le résultat de leurs agissements, la Vile n’avait aucune honte à prendre la poudre d’escampette pour sauver sa peau. Elle trouvait stupide de se heurter à plus puissant qu’elle et risquer sa vie pour quelque chose d’aussi sot que l’honneur. « Je vis désormais dans une région bien plus agréable. Le spectre de la Dame. C’est un lieu bien plus ensoleillé. » commenta-t-elle, comme s’il s’agissait de la principale importance du lieu. Comme si la mafia qui y sévissait n’était pas la raison pour laquelle elle s’était réfugiée sur ce territoire.
Prenant ses aises, la sorcière imita la bête et s’assit, prenant appuis sur une souche morte. L’animal en profita pour s’allonger, faisant presque trembler le sol à chaque mouvement. « Pourquoi avoir trompé cet homme ? » voulut savoir la bête. « Mmh je suppose qu’il s’agissait en réalité d’un caprice de ma part. » admit la brune, sans la moindre once de regret ou de culpabilité. « J’étais autre fois quelqu’un de puissant et de redouté. Peu connaissaient mon identité mais beaucoup redoutaient ma visite : ceux que je rencontrais sur mon chemin repartaient rarement indemne. J’avais fait du meurtre un véritable Art. » C’était là un aveu de son orgueil : à l’écouter, on aurait presque pu croire qu’elle avait été celle capable d’élever cette besogne à l’état d’Art. Ils étaient nombreux à s’en être chargés avant elle. A vrai dire, elle avait tout juste réussi à se faire un nom à son époque. Un sourire étira ses lèvres carmines, tandis qu’un souvenir lui revenait en mémoire. « La cartomancienne. C’est le nom qu’ils m’avaient donné. » A cause des cartes de tarot qu’elle laissait sur les cadavres qu’elle abandonnait. « Toujours est-il que j’ai perdu cette puissance. Je pensais être capable de la retrouver en côtoyant cet homme – lui aussi pratique cet art subtil auquel je m’adonnais – mais je me suis retrouvée à lui servir de bonniche. Cette situation ne m’allait aucunement. Alors je me suis contentée de partir. Bien sûr, il ne m’aurait pas permis de le quitter aussi simplement : j’ai dû prendre quelques mesures pour être certaine qu’il ne chercherait pas à me retenir ou à me tuer. Une distraction qu’il n’a pas véritablement appréciée. Il a lâché ses chiens à mes trousses. Il veut ma mort. Je suppose que c’est une conclusion à laquelle je ne pouvais pas échapper. Mais je ne compte pas me laisser faire pour autant. Ce sera amusant… Une sorte de danse, où le moindre faux pas pourra nous faire basculer dans les bras d’Ezechyel… » Son sourire s’était fait rêveur. Elle racontait ces confidences sans la moindre crainte, les paroles sortaient d’elles-mêmes : à sa propre surprise, la bête ne la sermonnait pas, ne la jugeait pas.
« L’empire qui m’accueille désormais est à même de me donner ce à quoi j’aspire. Malheureusement, des chaînes de mon passé me retiennent encore. » « Quelles chaînes ? » « Mon corps. Ou du moins, celui que j’habite. Il appartient à une magicienne qui a décidé d’épouser un Ange avant que je ne puisse l’en empêcher. A l’époque, je n’étais pas suffisamment puissante pour influencer ses décisions, ni pour prendre le contrôle de son corps : imaginez ce que cela aurait donné si, au moment fatidique, j’avais été capable de bafouer ses vœux. Ça aurait été grandiose… Haa, mais il ne sert à rien de ressasser les occasions manquées. Je suppose que Dolores aurait trouvé le moyen de m’enchaîner à un autre emplumé, d’une façon ou d’une autre. Elle sait comment je fonctionne et elle sait que j’aurai cherché, à un moment ou un autre, à reconstruire ma lignée. Cette tradition barbare que pratiquent les Vertueux m’empêche de mettre mes plans à exécution. » Une moue répugnée se dessinait désormais sur son visage, tandis qu’elle repensait à Nefraïm. « Je trouverai une autre solution. » La Raagus avait déjà quelques pistes pour contrer les manigances de sa fille. Aucune ne lui semblait néanmoins plaisante. « Une fois que ce souci aura été réglé, je n’aurai plus qu’à m’élever dans l’ombre. Je regagnerai ma puissance et, lorsque j’en aurai eu assez de jouer au chat et à la sourie, j’irai mettre un terme définitif au règne de Dolores. Je suppose qu’il s’agit du devoir d’une mère. De briser les désillusions de ses enfants. De les punir pour les bêtises commises. Je suppose que j’ai été trop tendre avec elle. J’aurais dû l’éradiquer dès l’instant où j’avais remarqué sa tare – celle d’être née imbibée de magie bleue. Néanmoins, ces quelques décennies à guerroyer avec elle ont été distrayantes. Je suppose qu’une part de moi est fière d’elle. Je ne l’ai pas éduqué totalement en vain : elle s’est révélée être une adversaire redoutable. Peut-être un peu trop. Il est temps que je mette fin à ses fantaisies. » La sorcière commencerait par tuer les petits protéger de Dolores, un à un. Ses pupilles, qu’elle éduquait afin d’en faire ses meilleurs guerriers contre son ennemie naturelle. Au passage, elle se débarrasserait également de la vermine qui l’adulait comme une AEther. « Peut-être épargnerais-je Shiva. Elle m’a été, après tout, d’une grande aide. Elle a une valeur sentimentale. Et puis, la voir désemparée a quelque chose de délicieux. » En particulier, la voir tiraillée entre l’amour éprouvé pour son époux et l’affection éprouvée envers Slen l’amusait particulièrement. Une fois, elle avait surpris dans les pensées de la magicienne qu’un cœur aussi aride se délectait de sa situation par simple jalousie : elle convoitait secrètement ce qu’elle ne pouvait obtenir. Cette pensée aurait été hilarante, si elle n’avait pas capté la pointe de pitié éprouvée par son hôte.
Vulpina continua à discuter avec la Précurseur, lui confiant ses plans afin de s’élever vers des rangs plus prestigieux. La bête lui posait des questions pertinentes qui la firent, à plusieurs reprises, réfléchir sérieusement. A la fin de leur discussion - il lui semblait qu'une nuit toute entière s'était déroulée-, elle avait de nouvelles idées en tête pour parvenir à ses fins.
Eiko releva la tête pour observer l'endroit où elle se trouvait. Elle n'avait pas la moindre idée de ce qu'était ce lieux, ni même de la façon dont elle s'y était rendue. Pourtant, elle ne se sentait pas le moins du monde inquiète. Peut-être était-ce grâce à sa témérité naturelle, ou bien l'effet apaisant de ce village. Ce dernier était très différent d'Onikareni. Son architecture était totalement dissemblable et l'atmosphère qui s'en dégageait également. C'était intriguant, pour la jeune exploratrice. Avec un sourire, elle se mit à marcher, partant à la découverte des secrets qui se cachaient ici.
L'Orine s'arrêta soudainement. Elle était face à une adulte. Sa beauté la captiva. En tant que fille du Beau et des Arts, la Hanatsu aimait contempler les œuvres d'Arts, et les personnes qu'elle trouvait belles. Cette inconnue entrait indéniablement dans cette catégorie. Alors, ne voulant pas l'importuner, la fillette resta immobile, l'observant silencieusement. Il y avait dans ses mouvements une maîtrise qui lui rappelait la grâce avec laquelle sa maman et les autres Orines se mouvaient. Elle-même était encore loin de savoir faire preuve d'une telle dextérité. Au contraire, elle était plutôt empotée et maladroite - pas plus que les autres enfants, ceci dit. En grandissant, elle apprendrait à devenir plus adroite. Plus gracieuse et sensuelle, aussi. « Qu'est ce que tu attends, Eiko ? » demanda la femme. Surprise qu'on l'ai remarqué, la fillette écarquilla les yeux et se redressa promptement. « Comment vous connaissez mon prénom ? » demanda-t-elle d'une petite voix. Avec un sourire attendrit, la femme acquiesça. « Je t'attendais. » répondit l'interrogée, mystérieuse. La brunette fronça les sourcils. Ce n'était pas exactement le genre de réponse auquel elle s'était attendue. « Est ce que tu as faim ? » proposa la dame, indiquant d'un mouvement de bras les pâtisseries et le verre de lait qui avait été disposé sur une table. « Oh oui ! C'était l'heure du goûter ! » se souvint soudainement la plus jeune, comme si c'était une évidence. Avec gourmandise, elle trottina jusqu'au buffet où elle trouva des mochis de différentes variétés - à la fraise, au thé matcha, à la vanille, un nature. Elle laissa une exclamation de joie lui échapper puis s'empara de la gourmandise, qu'elle enfourna dans sa bouche. « Mmh, ch'est drop bon ! Merchi !» commenta-t-elle en mâchonnant, un sourire ravi aux lèvres. L'enfant profita de plusieurs autres pâtisserie puis bu quelques gorgée du lait d'amande qui lui avait été servi. Lorsqu'elle eut terminé et essuyé sa moustache blanche, elle se tourna de nouveau vers l'adulte. « Qui êtes-vous ? » questionna-t-elle. « Je suis la Reine de la forêt. » répondit l'intéressée, d'un air mystérieux. « Han, pour de vrai ? » Des étoiles dans les yeux, la petite fille s'extasiait de nouveau devant l'adulte, impressionnée par cette révélation. « Est ce que vous êtes Mère Nature, alors ? » Elle faisait référence à Phoebe, sa divinité préférée. « Ici, oui. » « Ouah... »
Eiko se trouvait à l'extérieur, collée aux jambes de l'AEther. « Tu peux aller jouer avec les autres enfants, si tu en as envie. » La fillette releva les yeux vers la plus grande. De nouveau, sa beauté la percuta. Elle déglutit avant de regarder de nouveau les autres enfants, qui étaient déjà en train de s'amuser. Une moue contrariée défigura ses traits : elle était partagée entre son envie de rester cramponnée à Dame Nature et celle de rejoindre ses camarades - elle adorait jouer, comme tous les enfants de son âge. Après quelques secondes de réflexions, elle lâcha finalement la main de l'adulte. « D'accord, à tout à l'heure. » finit-elle par dire en se dirigeant vers ceux de son âge, sans se retourner - c'était l'avantage de l'insouciance, faire des choix sans plus se poser de question ensuite, pouvoir écouter ses envies sans avoir à se préoccuper des conséquences ; elle savait que la Reine de la Forêt veillerait sur elle et que si elle en avait besoin, elle reviendrait à elle.
« Bonjour. » dit-elle à un petit garçon, occupé à former une grosse boule de neige. « Je m'appelle Eiko, et toi, c'est quoi ton prénom ? » Elle attendit la réponse avant de lui sourire à pleine dent. « Dis, tu veux bien que je joue avec toi ? » Une fois qu'elle eut obtenu son autorisation, elle s'accroupit avec lui puis commença à rassembler la poudreuse blanche vers la sphère de son nouveau copain. « D'où est ce que tu viens, toi ? » Elle ne connaîtrait sans doute pas, à moins qu'il habitât dans une capitale. La petite fille commençait tout juste à étudier les cartes du monde. Ça lui donnait envie de découvrir tous ces endroits auxquels elle n'avait pas encore accès. « Moi, je vis à Onikareni. » expliqua-t-elle naturellement. Les confidences étaient plus faciles, avec le cœur léger de l'enfance. « C'est un village à côté de Lua Eyael. C'est très très joli, et puis il y a toujours des spectacles, et des gens qui chantent ou qui jouent de la musique... » Elle marqua une seconde de réflection avant de reprendre avec enthousiasme. « C'est comme Ciel-Ouvert ! Ma Masutā, elle m'a parlé de là-bas, et elle a dit qu'il y a tout le temps des musiciens et puis des chanteurs, et des danseurs aussi ! Moi, quand je serai assez grande, j'irai à Ciel-Ouvert, et puis je deviendrai la meilleure chanteuse. » C'était son rêve. Un rêve de petite fille. « Et puis, j'inspirerai les musiciens : ils trouveront tout le temps des nouvelles mélodies à composer. Et puis les chanteurs, ils inventeront plein de paroles pour aller avec ! » Elle avait levé les bras d'un air triomphant, emportée par sa passion. « Et toi, tu es déjà allé à Ciel-Ouvert ? » demanda-t-elle avec curiosité : si l'enfant lui répondait de façon positive, elle l'interrogerait des heures durant, pour en apprendre davantage. Elle était fascinée par cet endroit qui faisait vibrer son âme d'artiste. Songeuse, elle se mit à chantonner un air traditionnel de son peuple, tout en continuant à entasser de la neige. Au bout d'un moment, elle s'immobilisa. « C'est assez grand, tu penses pas ? » D'un commun accord, les deux enfants décidèrent de s'arrêter là. Usant de leurs petits muscles, ils soulevèrent la boule et la déposèrent sur une seconde, plus volumineuse. « Bien, maintenant, tu peux faire la tête. Moi, je vais aller lui chercher des bras ! » informa l'Orine.
Heureuse, elle alla chercher des brindilles dans la forêt qui entourait le village où ils se trouvaient. Elle entendait les rires des autres enfants qui jouaient à cache-cache, ou se livraient à une épique bataille de boule de neiges. Elle resta en retrait, se concentrant sur sa quête. Une fois qu'elle eut trouvé les bras, elle chercha des cailloux pour dessiner des boutons, des yeux et une bouche au Bonhomme de Neige. Elle les choisit soigneusement : il ne s'agissait pas seulement de prendre la première pierre qui lui tombait sous la main ! Une fois son trésor en main, elle trottina jusqu'à son camarade. « Tiens, regarde ! » Elle lui montra ses trouvailles, fière. Puis, avec toute la délicatesse dont elle savait faire preuve - c'est à dire pas beaucoup - elle monta les bras à la statuette de glace. Le garçon entreprit de l'aider et commença à dessiner son visage avec les petites pierres colorées qu'avait trouvé la brune. Une fois qu'ils eurent terminé, Eiko pencha la tête sur le côté. Elle analysait leur création d'un œil critique. « Mmh... Il manque quelque chose... » affirma-t-elle. Elle retira ses gants et les enfonça sur les bouts de bois pour lui donner des mains, puis enleva son bonnet qu'elle déposa sur la boule la plus haute du bonhomme de neige. Enfin, elle se tourna vers son camarade et regarda son écharpe avec insistance, jusqu'à ce qu'il comprenne qu'il doive également s'en défaire. Lorsqu'il la luit tendit, la petite Orine étira un sourire radieux. « Merci ! » s'exclama-t-elle avant d'enrouler le tissu tricoté autour du coup inexistant de leur oeuvre d'art. « Tadaaaaam ! » Elle se tourna vers son nouvel ami. « Alors, qu'est ce que tu en penses ? » demanda la fillette. Elle écouta à peine la réponse du jeune garçon avant de se retourner, cherchant quelqu'un du regard. « Ah ! » Dès qu'elle eu trouvé la personne en question, elle s'empara de la main de son partenaire et se mit à courir dans la direction de l'adulte. « Dame Nature ! » la héla-t-elle. Elle était avec d'autres bambins, leur distribuant des cookies - arrivée à sa hauteur, Eiko en chipa un de plus. Leur goût sucré lui arracha un soupir rêveur. « Regarde ce qu'on a fait ! Il est beau hein ? » dit-elle en pointant leur bonhomme de neige. « Dis, on peut aller faire du patin à glace ? Tu nous accompagnes ? »
Les bâtiments défilaient à toute allure. Les iris de la Déchue apercevaient par saccades des couleurs et des formes indistinctes. Le quartier, dont elle commençait à connaître la configuration, se déformait au rythme de ses pas. Marron et beige étalaient confusément leur suprématie. Les pavés, le bois, les tuiles ; tout se confondait en un gribouillis vertical. S’efforçant d’oublier la nausée visuelle qui la saisissait, la jeune femme se concentrait sur les sursauts de sa respiration. Loin de la maîtrise que conférait l’expérience, ses inspirations se succédaient comme le halètement d’une bête épuisée. Source de vie, le souffle s’appliquait consciencieusement à lui brûler les voies respiratoires. De la pointe de son nez aux sacs de ses bronches, il causait sur son passage une sensation presque violente. Chaque nouveau pas semblait amplifier les dégâts. Une douleur lancinante se diffusait peu à peu, remontant le long de ses tibias. Lorsque ses pieds heurtaient le sol, les impacts venaient gaiement la raviver. L’exercice n’avait rien d’agréable. Au début, elle avait seulement parcouru quelques mètres, avant de s’écouler à terre, anéantie par l’impression que ses poumons allaient imploser. Cependant, à force de régularité, elle parvenait désormais, non sans fierté, à courir une vingtaine de minutes. Malgré la douleur, elle ressentait le besoin étrange de recommencer au lever du soleil, si bien que la course s’était naturellement inscrite dans son quotidien. L’activité présentait l’immense avantage de lui permettre de prendre un bol d’air frais sans que son péché ne prît le dessus.
À bout de forces, elle s’arrêta. Assoiffée par ses efforts, elle se traîna jusqu’à une fontaine. Sur le côté de celle-ci, un robinet de cuivre permettait de s’hydrater. Goulûment, elle se désaltéra, tâchant d’ignorer les tambours qui, à l’intérieur, continuaient à s’affoler. Puis, mollement, elle s’affaissa sur le rebord de l’infrastructure. La fatigue s’abattait tout à coup sur elle, crispant des muscles heureux d’avoir ainsi été sollicités. En dépit de la fraîcheur de la matinée, de grosses gouttes de sueur perlaient sur son front. Dénouant la serviette qu’elle avait préventivement noué autour de sa taille, elle les épongea en silence. Autour d’elle, la cité commençait à s’éveiller, et des habitations, quelques individus sortaient, s’envolant vers le confort de leur travail ou la fureur des Halles. À les voir s’élancer joyeusement dans les airs, une pointe de jalousie lui pinça le cœur ; elle maudissait la faiblesse de ses membres. Envieuse de leur liberté, elle regardait les silhouettes s’élever, jusqu’à ce qu’ils ne fussent plus que des points noirs entre les passerelles. Que n’aurait-elle pas donné pour posséder la vigueur de leurs ailes ! Se mordant la lèvre inférieure, elle songeait à toutes ces fabuleuses aventures qu’ils devaient vivre, là-haut, et, que, seule sur son banc de pierre, elle ne connaîtrait pas. Une aigreur coutumière envahissait son esprit. Combien de moments de joie ponctuaient leur journée, et pourquoi ne pouvait profiter, elle aussi, de l’allégresse qu’ils portaient au visage ? Sa mâchoire se contracta. Allait-elle gâcher sa vie à contempler incessamment le bonheur des autres ?
Le clapotis de l’eau la tira de sa rêverie avide. Une sorte d’animal flottait dans la fontaine. D’abord, elle crut qu’il s’agissait que d’un jouet. Peut-être venait-il de glisser du sac de l’un des envolés. Un instant, elle s’imagina parcourir les rues d’Avalon, à la recherche de son propriétaire. Toutefois, elle remarqua que des pattes s’agitaient sous la surface, formant des vaguelettes. Incrédule, elle se pencha pour l’observer de plus près. Au mépris de toute logique, il arborait des lunettes d'une teinte sombre. Dépourvu de plumes, il s’enorgueillissait d’une peau jaune canari, que les projections du liquide faisaient luire. Fouillant dans les recoins de sa mémoire, elle tâcha d’identifier son espèce ; son père lui avait récemment envoyé un ouvrage fascinant, au sujet des diverses créatures peuplant les Côtes de Maübee. Découvrir leurs caractéristiques au fil des pages lui avait plu, et elle avait même envisagé de demander à Joliel un voyage dans les environs pour mettre sa lecture en pratique. À première vue, sa silhouette s’apparentait à celle d’un canard, mais certaines informations discordaient. La cervelle en ébullition, la Déchue détaillait la bestiole. Il ne lui vint pas une seconde à l’esprit que le plastique ait pu être animé par la magie. Parfaitement lisse, son bec ne présentait pas les nervures que, petite, elle aimait gratter au bord de la rivière. Attendrie par le souvenir, elle tendit la main pour le caresser. « Coin ! » Sans crier gare, la bestiole disparut, lui faisant froncer les sourcils. Ses cellules privées d’oxygène subissaient-elles la visite imprévue d’une hallucination ?
Sur le chemin du retour, la jeune femme eut la surprise de découvrir une bourse de cuir. Cette dernière traînait dans la poussière, au détour d’une ruelle. À l’intérieur, des pièces d’argent reposaient sagement, attendant qu’une main vienne chaleureusement les dépenser. Jetant un coup d’œil alentour, elle remarqua que personne ne paraissait y prêter attention. Ramassant l’objet, elle se dirigea vers l’individu le plus proche. « Est-ce que vous avez perdu quelque chose, récemment ? » Dubitatif, l’homme se gratta le menton, fouillant distraitement ses poches, et secoua la tête. Craignant que le propriétaire se trouvât dans une situation délicate sans sa monnaie, la blonde remonta la rue. Consciencieusement, elle s’arrêtait auprès de tous les passants. Néanmoins, ses recherches se révélèrent infructueuses, et, à déambuler ainsi dans le quartier, la jalousie assombrissait son humeur. Ne pouvait-elle garder sa trouvaille secrète, et s’en servir pour quelques achats ? Le larcin lui tendait les bras. Qui s’apercevrait de son crime ? Alors que la tentation pressait ses tempes, une vision l’en délivra. Une soldate patrouillait dans le secteur. Sans réfléchir, elle courut dans sa direction pour lui faire part du problème. Visiblement de bonne humeur, elle la remercia pour sa prévenance. « Si tous les citoyens d’Avalon avaient votre honnêteté, je n’aurais plus de travail. » Le rouge monta aux joues de la Déchue. Loin d’être mérité, le compliment ne faisait que souligner l’indécence de ses pensées. La culpabilité l’empêcha de répondre. « Je viens de finir mon service, mais je connais bien les environs. Je vais vous aider. »
Elles passèrent une bonne partie de la matinée à battre le pavé, sans succès. En dernier recours, la militaire prit son adresse, lui promettant qu’elle la transmettrait au malheureux, si d’aventure elle le trouvait. Rassurée par cette promesse, Calanthe rentra à l’atelier. Joliel venant à peine de se lever, elle procéda à quelques ablutions. Exceptionnellement tiède, l’eau lui procura un profond bien-être. À sa sortie de la petite pièce qui tenait lieu de salle de bains, son confident lui servit le petit-déjeuner. Dégustant avec plaisir les viennoiseries encore chaudes, ils discutèrent de tout et de rien. Comme à leur habitude, ils se séparèrent ensuite. Pendant que le brun s’attelait à la confection d’un nouveau collier, la blonde monta à l’étage. Joyeusement, elle commença ses travaux de couture. Le fonctionnement des patrons lui échappant, elle avait décidé de se focaliser sur des exercices à sa portée. En l’occurrence, elle sortit de la malle une large pièce de soie. La taie d’oreiller de son meilleur ami ayant grand besoin d’être changée, elle avait entrepris de la remplacer. Lamentable échec, sa précédente tentative l’avait conduite à de chaudes larmes. Tranquillement, elle s’assit sur le sol, plaçant le tissu devant elle. Après avoir longuement réfléchi, elle le replia sur lui-même. Satisfaite de l’épaisseur, elle enfila l’aiguille sur le côté qui lui était opposé. La patience lui servant de compagne, elle cousit toute la longueur, et réitéra l’opération sur la partie la plus proche. Ôtant le coussin de son enveloppe, elle le passa à l’intérieur. Pinçant les bords, elle s’employa à les refermer. Estimant son ouvrage achevé, ses ciseaux découpèrent attentivement le surplus de soie.
Folle de joie d’avoir réussi, la jeune femme dévala les marches pour offrir à Joliel le fruit de ses efforts. À la manière de bambins réjouis d’un rien, ils sautèrent sur place, se prenant dans les bras l’un de l’autre. Touché par son attention, il finit par lui planter un baiser sur le front. Affirmant que la bonne humeur provoquait des miracles, il lui proposa de s’exercer à l’écriture. Le cœur léger, elle s’installa à son pupitre. « Tandis que les paletots se cambraient davantage sur les mannequins qui prenaient une âme, » Davantage que la joie, la régularité produisait son effet. Tracer des lettres devenait presque naturel, et ses extrémités se crispaient moins sur la plume. « Et que le grand manteau de velours se gonflait, souple et tiède, comme sur des épaules de chair, » Se mordant la lèvre inférieure, elle écrivait sa dictée, attentive à ne pas faire baver la mine. « Avec les battements de la gorge et le frémissement des reins. » Alors qu’elle venait de mettre le point final, le carillon de la boutique résonna. Il s’agissait du propriétaire de la bourse, qui, le visage enchanté, venait récupérer son dû. S’empressant de lui rendre, elle eut la surprise de se retrouver avec la moitié des pièces au creux de sa paume. « La soldate qui m’a donné votre adresse m’a dit que vous aviez passé la matinée à me chercher. Acceptez donc cette modeste récompense. Considérez que c’est votre jour de chance. » Lui adressant un clin d’œil complice, le vieillard s’éclipsa avant qu’elle ne puisse refuser. N’osant croire à sa chance, elle resta interdite, sur le seuil de la porte. « Je ne sais pas ce que tu as aujourd’hui, mais tu n’as pas fait la moindre faute. » Un franc sourire illuminant ses traits, Joliel lui tendit le parchemin. Après qu'elle eut vérifié, non sans s'être frotté les yeux pour s'assurer qu'elle ne rêvait pas, il la prit par la main. « Et si nous allions au restaurant ? » Elle l’avait bien mérité.
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Invité Invité
Sam 23 Jan 2021, 21:55
« Rêver, c'est plus fort que tout. Même contre les pigeons. »
C’est pas vrai, encore une tentative infructueuse ! Je commençais à en avoir ras la collerette de pas être foutu à chasser correctement du gros gibier. J’avais beau me rappeler de la procédure d’agression comportementale en milieu rural et forestier, ni l’une ni l’autre ne fonctionnaient comme je m’y attendais. Je ne pouvais pas éternellement me contenter de lapinous ou de pangolins. J’avais beau ne pas être très difficile en termes d’alimentations, mais de là à ne consommer que des cochonneries de ce genre, ça allait finir par me donner des crampes d’estomac. Si je continuais, j’avais peur de choper une maladie exclusive aux Vampires, comme le tétanos ou la COVIDence. Ma Créatrice évoquait beaucoup celle-ci ces derniers temps, comme quoi ils infectaient les papilles gustatives et donnaient au sang le goût de pisse. Non pas que je buvais fréquemment mon urine, mais pour avoir une meilleure idée de ce qu’elle voulait dire par là, j’ai tenté d’en siffler une petite coupelle. Bilan : c’est vraiment dégueulasse, je le déconseille fortement aux aspirants. Ne reproduisez pas ça chez vous messieurs-dames, et laissez faire les professionnels. Enfin bref, tout ça pour dire la lune m’avait dans le collimateur. Pourquoi diantre refusait-elle de s’aligner en faveur de ma destinée ? Juste une fois, juste une nuit. A croire que je n’étais pas fait pour la vie de Vampire… quelle drôle d’idée ! Bien sûr que je l’étais, et j’allais le prouver. Il me suffisait de dégoter une grosse prise et de la faire mienne, de séduire une femme, vierge et complètement nue. Pourquoi nue ? Pourquoi pas ? Personne ne les corrompait dans leur plus simple appareil, donc c’était une manière pour moi de me démarquer. Fier de cette trouvaille qui m’avait pris toute la matinée à élaborer, je me déplaçais discrètement de nuit pour subvenir à mes besoins les plus primaires.
Dissimulé derrière le tronc d’un arbre plus mince que mon buste, je focalisais toute mon attention sur les sons ambiants pour discerner la présence de ma prochaine cible. Les animaux étaient nombreux à vaquer à leurs occupations, que ce soit les écureuils qui s’échangeaient leurs meilleurs plans noisette ou les porcinets qui se roulaient dans les flaques marécageuses. Je me détournais immédiatement d’eux lorsqu’un « pouet » me fit sursauter. Aux aguets, je me préparais à déchirer la gorge de ce malandrin qui avait l’audace de me défier dans le royaume de la nuit. Un « Grrrr » plus tard, et mes yeux se portèrent sur une étrange bestiole : un petit canard jaune qui produisait de drôles de bruits. Alors certes, je n’étais pas le mieux placé pour identifier tous les tenants et les aboutissants de la faune et de la flore, mais j’étais presque certain de ne jamais avoir croisé le chemin de cette créature auparavant. D’après ce que j’avais entendu dire, la rareté amenait le caractère unique d’une chose, donc si je suivais cette logique, son goût devait dépasser l’entendement. Il ne sentait pas grand-chose, mais qu’importe, je fus comme subitement porté par mon instinct ainsi que par le charisme contrariant de ce truc qui me narguait. Mes yeux se convulsèrent, l’appétit me titillant les crocs comme jamais auparavant. Rapidement, je me tins sur le qui-vive pour ne pas la perdre des yeux, mes grandes jambes s’empressant de réduire la distance qui me tenait loin d’elle. Surgissant par le dessus, j’élançais ma main pour lui trancher les artères fémorales, ou n’importe quoi du moment que ses tripes s’étalaient à mes pieds. Raté. Elle passa outre ma prise en sautant au moment le plus propice, se servant de ses papates pour s’enfuir. J’aurais sans doute renoncé en temps normal, mais pas cette fois. Mon sang bouillait tellement de l’intérieur qu’il était presque en éruption, c’est pourquoi je la pourchassais encore et encore, inlassablement sans recourir à rien d’autre que ma volonté pour enfin porter mes doigts sur lui. Je le tenais ! C’est du moins ce que je croyais, mais le canard disparut aussitôt après s’être moqué de moi d’un « coin » offensant. Nani ? C’est donc de cette façon que se terminait notre duel datant d’un millénaire ? Mon ennemi juré, le capitaine Couak-Couak, troisième du nom, qui avait tant de fois interrompu mes conspirations ? Bon, d’accord, j’allais beaucoup trop loin pour une espèce dont je ne connaissais rien, sinon un style plutôt sympa avec cette paire de lunettes sur le bec. Moi aussi j’en portais ; un signe particulier commun à tous les grands hommes.
Malheureusement, j’avais perdu beaucoup de mon temps à essayer de le pourchasser. La lune n’étant pas très aimable, elle avait continué son petit bonhomme de chemin sans se préoccuper de mes attentes. Il me restait assez peu de marge pour me nourrir et recouvrer mes forces, quel idiot ! Désespéré de m’être laissé distraire une fois de plus, j’eus la brillante idée de grimper sur la cime d’un arbre pour me repérer. D’habitude, je n’étais clairement pas assez habile pour entreprendre pareille ascension, mais cette fois, une force inconnue me porta assez facilement jusqu’en haut. Je ne savais ni comment ni pourquoi, mais c’était le pied. D’ici, je pouvais apercevoir une bicoque esseulée aux abords de la forêt ; une chance inouïe de tomber — peut-être — sur une personne sans défense qui se ferait une joie de se laisser sucer. Et même si elle s’y opposât, je me ferais une joie de la contraindre. D’une certaine façon, je trouverais même cela plus excitant, comme si le désir de chasser l’emportait sur ma soif insatiable. Glissant ma langue sur la pointe de mes canines, je me laissai choir de mon point d’accroche, mes pieds s’enfonçant dans la vase pour amortir ma chute. Et puis soudainement, ma course fut immédiatement engrenée par la contraction de mes muscles, stimulés par un je ne sais quoi qui me pourvut d’un regain de confiance. Sans me vanter, je me débrouillais à merveille, à tel point que je me demandais si une abeille ne m’avait pas piqué en m’injectant des stéroïdes ou n’importe quoi dans le sang. Si c’était le cas, je passerais sous silence mes prières à Lubuska pour les porter à la protectrice des ruches et du miel. Je me ferais aussi appeler Uliel Pops et me dégoterais une tenue toute rayée pour lui faire savoir toute ma reconnaissance. Mais avant de démêler le vrai du faux, je m’introduisis discrètement dans la demeure éclairée en chevauchant les Ombres.
Le foyer n’étant pas très spacieux, je me plaçais devant la porte, usant de mon sang pour former un loquet et ainsi neutraliser toute tentative d’évasion. Le plus étonnant dans cette histoire, c’est qu’une jeune femme se tenait sereinement sur son fauteuil à bouquiner un ouvrage, complètement nue. Je ne maitrisais pas très bien les vraisemblances, mais j’étais presque certain que la chance de me trouver dans une telle situation frôlait le néant. Le ciel avait surement décidé de me donner un coup de main, c’est pourquoi j’aurais été le pire des idiots de ne pas la saisir. « Écoutez-moi attentivement. » Ma voix devenue paisible et enchanteresse se fit également plus suave. Plus nuancé qu’avant, je me sentis tout de suite plus captivant. Pour la première fois depuis que j’opérais sous la bannière des Vampire, j’avais l’impression d’être pleinement à ma place. J’avais à disposition tous les instruments qui me permettaient de m’élever plus haut que je ne l’étais actuellement. « Ne criez pas. Ne faites aucun bruit. Contentez-vous de vous imprégner de ma voix et de suivre mes instructions sans faire d’histoires. Je n’ai pas envie de vous blesser. » L’aliénation fut instantanément effective. Je n’avais guère besoin de réitérer le renforcement de ma capacité pour la contraindre à m’écouter. Lorsque son regard se porta sur moi, son attitude ne trahissait aucune intention de me nuire, expression caractéristique du succès de l’hypnose.
Je retirais ensuite ma cape pour la déposer à l’entrée, de manière à me mettre le plus à l’aise possible. « Qu’attendez-vous de moi ? Que puis-je faire pour vous ? Vou… vous êtes égarés ? » Je m’approchais d’elle, un rictus au bout des lèvres. « C’est tout le contraire. Je crois que je me suis trouvé. J’ai longtemps été égaré en allant à contresens de mes instincts, peut-être parce que j’avais peur. » « De quoi aviez-vous peur ? » « De moi. De quoi d’autre pourrais-je avoir peur ? Regardez-moi, l’évidence ne pourrait être plus frappante. » « Ah bon ? Je vous trouve plutôt séduisant, moi. Approchez. Ne faites pas votre timide. » Sans me faire prier, je passais derrière elle, mes doigts s’imprégnant de la douceur de ses cheveux. L’odeur de son parfum flattait mes narines d’une légère euphorie. « Ne vous en faites pas. J’ai pris conscience de mes erreurs passées. Je ne prétends pas que je ferais tout à la perfection à partir de maintenant, mais je ferais des efforts pour ne pas être laissé sur le carreau par mes semblables. J’ai trop longtemps été sous-estimé. Il est temps que je grandisse. Je comprends enfin ce qu’elle essayait de m’inculquer depuis le début. » « Dans ce cas, servez-vous de moi pour vous élever. » « Avec plaisir. » Subitement, je plantai mes canines dans sa chair fraiche. Les yeux révulsés, le plaisir éprouvé était détonnant de jouissance. Voici donc ce que les autres appelaient un orgasme ? Magnifique. Je ne voulais plus la lâcher, pas avant que je ne l’ai vidé de tout son sang. Je devais pourtant résister, pour faire de ce corps le mien. Non. J’en trouverais d’autres, car je n’avais aucune envie d’être raisonnable. Pas cette nuit.
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Andrea ~ Orine ~ Niveau I ~ ◈ Parchemins usagés : 157 ◈ YinYanisé(e) le : 31/10/2020◈ Activité : Andrea : Harpe & Tatouages | Natsu : Danse des épées
Le bout du nez plissé, Natsumura observait son œuf de si près qu'elle en louchait presque. L'objet avait beaucoup excité la curiosité de ses sœurs mais voyant qu'il ne se passait rien, il était retombé dans l'oubli général. Toutefois, la jeune fille passait de nombreuses minutes chaque matin à le regarder quand le soleil promenait ses premiers rayons dans sa chambre. De la même manière que ses séances de méditation, ce rituel l'apaisait bien qu'elle éprouvât une vive impatience à découvrir son timide habitant. «Quand montreras-tu le bout de ton nez, mon Xīnzàng ?» (= coeur) Murmura la Hanatsu sans attendre de réponse. Elle sourit. Il était comme elle, il voulait prendre son temps avant de sortir. Qui pouvait lui en vouloir de préférer rester dans un cocon de chaleur ? Après une dernière caresse dans les longs poils de l'oeuf, la Hanatsu se redressa et commença à effectuer les étirements que sa Masutā (= mère) lui avait inculqués pour toujours commencer une journée du bon pied. Assise avec les jambes écartées de chaque côté, Natsu essayait tant bien que mal de coller son buste au sol. Elle grimaça quand elle sentit sa souplesse lui faire défaut. S'efforçant de rester plusieurs secondes dans cette position, elle poussa un soupir de soulagement quand elle se redressa, passant ses doigts sur ses cuisses pour consoler ses muscles fourmillants. L'Orine allait enchaîner sur la prochaine position quand un mouvement sur son lit attira son regard. Surprise, elle laissa un petit cri de surprise lui échapper. C'était un petit oiseau, un de ceux qu'elle n'avait jamais vus, que ce soit à Maëlith, dans les livres ou même lorsqu'elle était partie en voyage. D'un jaune anormal tant il réfléchissait la lumière, le plus étonnant était certainement la paire de lunettes teintées de noir qui semblait fixer son regard énigmatique sur elle. Par réflexe, elle regarda son œuf avec appréhension, mais fut rassurée de le voir intact. Elle en avait honte mais elle était contente que l'animal qui se logeait dans son œuf n'était pas cet étrange canard. Il y avait bien de ces animaux près de l'étang dans un des nombreux parcs de Maëlith mais ces derniers arboraient de multiples couleurs et surtout, ils avaient des plumes. Curieuse, elle s'approcha et tendit les doigts vers le canard en le rassurant à mi-voix même s'il n'avait pas du tout l'air effrayé. La Hanatsu était sur le point de le toucher quand il bondit en l'air dans un «COIN !» sonore. Et il disparut comme il était venu. Eberluée, Natsu se gratta la tempe mais aucune explication logique autre qu'une hallucination ne lui vint en tête. Serait-ce un signe des divinités ? Mais qui aurait quelle signification ? Peut-être ne priait-elle pas assez Hahanaru Shizen et cette dernière montrait son mécontentement avec cet étrange oiseau ? Non ça n'avait pas de sens. Elle haussa les épaules et décida d'oublier l'incident. Elle était presque en retard pour sa leçon de toute manière. Elle prierait Mère Nature avant de se coucher quand elle aurait terminé sa journée bien chargée. Les neuf Orines s'étaient retrouvées dans la pièce rectangulaire au plancher laqué qui leur était allouée. Le fond de la salle était recouvert d'un miroir sur la longueur et sur le côté, une large porte-fenêtre donnait sur une cour. Pour le moment, comme il était encore tôt, seul un couple d'Orines y étaient installées, accordant leurs instruments pour s'exercer mais dans la journée, elle était pleine de vie, traversée par des nuées de petites Hanatsu jouant ou d'autres Orines perfectionnant leur Art. Natsu discutait gaiement avec Iseul tout en s'entraidant pour échauffer leurs muscles. Assises face à face, leurs pieds se touchant, elles avaient relié leurs mains et se tiraient l'une l'autre pour réveiller leurs muscles dorsaux. Toutes deux étaient vêtues de la même manière. Comme tous les groupes qui se formaient à partir d'un certain âge, les jeunes Orines avaient un uniforme pour leur donner un sentiment d'appartenance. Ces groupes aidaient à la cohésion des jeunes Orines entre elles et formaient souvent des amitiés qui duraient sur le long terme. Lorsque plusieurs groupes pratiquaient la même discipline, ce qui arrivait fréquemment, les Orines se réunissaient pour organiser des compétitions amicales. Cela permettait aussi aux jeunes Hanatsu de voyager et d'aller visiter les différents lieux de vie de leur peuple. En plus de créer du lien, ces voyages leur faisait également découvrir d'autres activités et les amener à trouver l'Art Divin qui leur conviendrait. Natsumura faisait partie du Rairakku Sagi, soit le Héron Lilas en référence en long bec pointu de l'oiseau qui rappelait leurs épées et le lilas pour la couleur de leur uniforme. Celui-ci était composé d'un haut court dont les longues manches étaient larges et transparentes et d'un large pantalon indigo en soie qui montait jusqu'au nombril et serrait leurs hanches avant de s'évaser sur les jambes. La matière arachnéenne du tissu donnait l'impression de voir une envolée de papillons maladroits lorsque les Hanatsu exécutaient leur chorégraphies. Iseul leva un visage tourmenté sur son amie et Natsu relâcha aussitôt la pression qu'elle lui imposait. «Pardon !» «Non, ce n'est pas ça. Tu crois que Fuyuko Sau va nous faire un examen surprise ?» Il était vrai que lorsque la Niseira et son fils Nao arrivaient avec du retard, c'était en général car elle leur avait concocté une évaluation. Les deux Orines partageaient avec le groupe leur savoir et leur expérience. Ayant fait de Geommu son principal Art Divin, Fuyuko était une des mieux placées pour l'enseigner aux jeunes filles qui envisageaient de suivre sa Voie. Son fils était un talentueux danseur qui n'était pas encore parti à la recherche de son Aisuru. Il aidait souvent sa Masutā en prodiguant ses conseils aux jeunes Orines. Natsu haussa les épaules et feignit l'indifférence. «Ça ne fait rien, tu es douée et on travaille dur.» En réalité, la Hanatsu craignait ces évaluations. Sa peur de l'échec était si grande qu'elle la paralysait parfois, lui faisant perdre l'équilibre dans des mouvements pourtant répétés des centaines de fois. C'était uniquement la satisfaction de voir les regards admiratifs ou appréciateurs de ses sœurs lorsqu'elle parvenait à effectuer une chorégraphie sans faire d'erreurs qui l'empêchait de partir en courant. L'arrivée de Fuyuko, suivie par Nao, fit augmenter d'un cran la tension des deux amies. Dans les mains de la Niseira, des petites feuilles carrées réduisirent en cendre les espoirs des deux filles. Les Hanatsu cessèrent leurs échauffements et saluèrent leurs professeurs de manière synchronisée. Assise en Zazen pour favoriser sa réflexion, Natsumura fronçait les sourcils en fermant les yeux, ses doigts serrant avec fermeté son papier. Les caractères en Niseis inscrits dessus dansaient derrière ses paupières closes. «Celui qui vit sans folie n'est pas si sage qu'il croit.» Comme à son habitude, Fuyuko leur avait donné un thème et les jeunes Hanatsu devaient s'en inspirer pour inventer une chorégraphie. L'Orine était une enseignante rigoureuse, elle exigeait une technique irréprochable mais cherchait également à éveiller l'âme des jeunes Orines. Si ses leçons étaient beaucoup axées sur l'angle précis que le bras devait avoir lors de telle position car les Hanatsu ne maîtrisaient pas encore bien Geommu, la perfection n'était atteinte selon elle que lorsque l'Orine vivait sa danse et invitait ses spectateurs à surprendre quelques secondes de leur grâce. C'était seulement là que l'Orine pouvait parler non plus de danse, mais de véritable Art Divin. La Niseira préparait alors de temps en temps ces petites évaluations où elle leur laissait peu de temps pour préparer leur passage afin de ne pas trop réfléchir et de laisser leur corps suivre le cheminement de leur esprit sans la contrainte de devoir mémoriser une chorégraphie donnée. Natsumura adorait ces exercices d'improvisation basés sur des proverbes ou de simples mots bien qu'ils soient aussi une source d'angoisse car Fuyuko se basait sur ces exercices pour déterminer si oui ou non, l'Orine était réellement faite pour cet Art. Natsumura était toutefois rassurée car elle avait eu de la chance pour une fois. Les proverbes des Orines étaient parfois aussi mystérieux que leurs énigmes et Natsumura se cassait la tête à essayer de les comprendre. Mais aujourd'hui, l'interprétation n'était pas compliquée, restait à savoir comment elle allait exprimer ça avec ses dan geom. En appui sur ses orteils et ses genoux, Natsumura tentait de maîtriser les palpitations erratiques de son coeur alors même qu'elle n'avait pas commencé à danser. Les jointures de ses doigts blanchissaient autour des manches usés des courtes épées et elle se força à les détendre un à un. La Hanatsu voyait son reflet dans la glace, légèrement pâle. Elle se força à inspirer doucement. Qu'importait si elle faisait des faux-pas, son sujet lui donnait une liberté peu commune dans cette discipline. Nao prit son janggu, un tambour en forme de sablier et entama un rythme lent avec son bâton en bois. L'Orine adapterait sa mélodie à la chorégraphie de la Hanatsu et Natsu fit le vide dans sa tête. Elle dressa ses bras au dessus de sa tête en cambrant le dos pour avoir le buste presque en face à face avec le plafond. Une fine couche de sueur luisait déjà sur son front mais la jeune fille se força à tenir la position bien que les muscles de ses jambes criaient déjà grâce. Elle ignora leurs plaintes et fit tourner d'un geste vif, reproduit déjà des milliers de fois, les dan geom. Aussitôt, les anneaux accrochés à la base des lames produisirent leurs sonorités cristallines quand ils claquaient entre eux et tranchantes quand ils heurtaient le métal. Natsumura ferma les yeux pour s'isoler dans son univers et ne pas se laisser distraire. Elle ne se risquait pas beaucoup à faire ça car cela terminait en général par une chute directement sur ses camarades mais elle sentait qu'aujourd'hui, elle pouvait prendre ce risque. Elle reprit confiance en elle et exécuta les mouvements appris de manière aussi aléatoire qu'une feuille entraînée dans les remous d'une rivière. Ses mouvements s'enchaînaient de plus en plus vite et l'Orine accumulait les erreurs mais elle ne s'en formalisait pas. N'était-ce pas ça la folie ? Parfois commençant une pirouette puis changeant d'avis en plein milieu, son numéro était un tourbillon de non-sens et sa tête tournait, tournait, tournait aux sons désordonnés des anneaux. Le janggu laissa résonner une note ultime et Natsu s'effondra sur le sol, à bout de souffle, les joues écarlates d'avoir fourni un tel effort. Toutefois, ses yeux brillaient et elle les releva pour regarder la réaction de Fuyuko. La Niseira se fendit d'un sourire et prit le temps de terminer d'écrire ses notes sur son carnet avant de donner son verdict. «On ne peut pas dire que les mouvements étaient parfaits, c'était brouillon mais c'était l'intention n'est-ce pas ? Oui, cette interprétation était inévitable pour ton niveau. Cependant, tu étais vraiment dedans et je te félicite. Tu t'es emparé de ton thème et tu l'as retranscrit comme je l'espérais. Maintenant, imagine refaire ce que tu as fait mais en respectant tes tenues de position ? Essaie d'aller jusqu'au bout de tes mouvements, de leur donner la même netteté que lorsque tu écris. Ce sera ton devoir pour la semaine prochaine. Moon, c'est à toi.» Les membres encore tremblants, Natsu rejoignit Iseul, les yeux brillants. L'exercice l'avait exaltée et recevoir les compliments de Fuyuko, bien qu'elle n'en soit jamais avare, semblait lui donner des ailes. Elle n'avait qu'une hâte, s'entraîner sans relâche pour récolter de nouveaux éloges.
Fin | 2005 mots sans le proverbe
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