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 [Q] La fillette et le renardeau | Deccio (Souvenir)

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Mar 22 Sep 2020, 21:16



La fillette et le renardeau

Thème.

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Intrigue : Calanthe est en voyage à travers la Forêt des Clochettes avec ses parents. Alors qu'elle s'éloigne pour jouer, elle fait pour la première fois la rencontre de Deccio. Ensemble, ils chercheront à défaire la terrible Sorcière des bois, réputée pour dévorer les enfants perdus.

La carriole s’ébranlait au rythme du pas des chevaux. En voyage pour affaires, la famille Firenze avait emprunté le chemin de la Forêt des Clochettes pour rallier Daletas. Il s’agissait d’une livraison de lingerie comme ils avaient l’habitude d’en faire, à une exception près ; cette fois-ci, ils avaient été contraints d’emmener Calanthe. L’enthousiasme des premiers jours évanoui, la fillette commençait sérieusement à en avoir assez. S’amuser toute seule devenait lassant. Dans le plus grand secret _ ou du moins, le croyait-elle _, elle avait dérobé des mètres de tissu dans l’une des malles de son père, et avait bâti de rien son petit royaume. Les draps s’étiraient entre des caisses de bois en un charivari superbe, et, à défaut d’oreiller moelleux où reposer sa tête blonde, elle avait eu l’ingéniosité de rassembler les étoffes en boules à des points stratégiques. Sa cabane improvisée ne suffisait cependant plus à la satisfaire : une princesse sans amis ne gardait pas longtemps le sourire. De temps en temps, son père glissait de son cheval, et la rejoignait à l’arrière. Pour son plus grand plaisir, il lui narrait des histoires invraisemblables. Les yeux grands ouverts, elle écoutait en silence la voix harmonieuse de James, et rêvait d'autres horizons. Ses prunelles s’attardaient ensuite sur le paysage, et, émerveillée, elle cherchait à distinguer parmi le feuillage les créatures fabuleuses qui peuplaient ses récits.

Après une nuit passée à camper en plein cœur d’une clairière, la Déchue s’était levée avec un objectif en tête. La veille, sa mère lui avait dit qu’il leur faudrait passer une bonne partie de la journée dans les environs ; les chevaux avaient besoin de repos. Cela lui avait donné une idée. Sa besace contenait quelques gâteaux secs pris dans une malle, et, un chapeau de paille sur les cheveux, elle s’élança vers sa mère. « Je peux aller jouer là-bas, Maman ? » Désignant un bosquet plus loin, elle attendait en sautillant l’autorisation. « Oui, mais ne t’éloigne pas trop. » S’assurant que Lisa ne pouvait pas voir son visage, Calanthe roula des yeux. Une moue exaspérée plissa ses lèvres. Quand allait-elle arrêter de la prendre pour un bébé ? « Les bois sont sûrs, Lisa. Tu devrais te détendre. » Quelle que soit la situation, James prenait toujours sa défense. La mère de famille s’approcha de lui et posa les mains contre son torse. « Mais c’est pour la forêt que je m’inquiète. » Elle lui lança un clin d’oeil complice. Les doigts de James se perdirent innocemment sur la poitrine de sa femme. « Tu as toujours eu un grand coeur. » En réponse, Lisa s’empara de ses lippes avec une ardeur indécente. Devant ce spectacle d’adultes, leur progéniture s’indigna. « Beurk ! Vous êtes dégoûtants ! J’y vais ! » Pétillante de vitalité, la fillette s’engouffra entre les arbres. Allait-elle vivre l’une de ces aventures que son père lui contait ?

Perdue dans ses pensées, Calanthe déambulait joyeusement entre les arbres. Entre les pétales des fleurs, elle cherchait des bestioles que seule son imagination pouvait voir. D’un geste insouciant, elle poussa l’audace jusqu’à soulever une écorce d’arbre tombée au sol. Dérangé dans ses activités, un insecte prit la poudre d’escampette. Devant sa silhouette peu commune, elle recula précipitamment et s’empêtra dans une fougère à proximité. En un battement de cils, son fessier rejoignit le sol. « Aïe ! » Contrariée par sa chute, elle décida de bouder l’endroit et chercha un nouveau terrain de jeu. Quelques instants plus tard, elle débarqua entre des fourrés. Une créature à la chevelure blonde y menait ses petites affaires. « T’es quoi comme chose ? Une Fae ? » Excitée par sa découverte, Calanthe le rejoignit d’un bond, et, du bout des doigts, elle effleura la membrane qui lui permettait de s’élever dans les airs. C’était rugueux. « Tes ailes sont bizarres. J’en ai moi aussi, mais elles sont plus grosses. » Et les siennes ressemblaient à celles d’une chauve-souris. Avant d'avoir eu l'occasion d'entendre sa voix, elle sauta du coq à l’âne. « Qu’est-ce que tu fais dans la forêt ? Tu t’es perdu ? » La fillette avait entendu dire que des êtres se rencontraient parfois, grâce à une grande chose qu’on appelait le destin. Etait-ce son destin de l’aider à retrouver son chemin ? Qu’est-ce que ça voulait dire, le destin, et comment ça décidait ? « Ils sont où, tes parents ? » La fillette avait l’impression d’avoir déniché un véritable trésor, et elle n’avait pas envie que des adultes les surveillent. Ayant la concentration d’un volatile, elle lui tendit la main pour qu’il se relève. Est-ce qu’il était tombé ? « Dis, tu voudrais bien jouer avec moi ? Ça serait chouette ! » Guillerette, elle lui lança un sourire lumineux.

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Sam 26 Sep 2020, 20:36

[Q] La fillette et le renardeau | Deccio (Souvenir) Ftvl
« Quand on n'a pas été un enfant, on ne devient pas un homme. »



Coupant à travers les bois, un enfant à tête blonde tapa dans une balle principalement constituée d’osier et de mousse. Fabrique de ses mains avec l’aide d’un garçon beaucoup plus talentueux, le jeune Deccio l’avait égaré au cours d’un jeu qu’ils avaient initié. L’écart de points était assez conséquent puisque le score enregistré allait de zéro contre cent. Mais malgré ce retard significatif, pas question pour lui de renoncer. Même s’il devait se faire écraser honteusement, il marquerait au moins un point. Et quand il aurait obtenu ce premier point, alors il se consacrerait au second, et ainsi de suite. Toutefois, il ne suffisait pas de vouloir quelque chose pour pouvoir le faire ; une réalité dure à laquelle il fut quotidiennement confronté. La balle ayant été expulsée par son camarade de jeu, c’est à lui qu’aurait dû revenir la responsabilité d’aller la chercher. Devant leurs désaccords, ils s’étaient alors défiés à celui qui amasserait le plus de cailloux en un temps imparti. Hélas, la défaite le poursuivait inlassablement comme son ombre. Résolu à trouver un domaine dans lequel il serait susceptible de le surclasser, le petit homme s’empressa de le rejoindre en déjouant tous les obstacles naturels qui se dressèrent sur son chemin. Et le moins que l’on puisse dire, c’est que ce ne fut pas une mince affaire pour son petit corps, presque trop frêle. En dépit des défaveurs des Dieux, Deccio ne s’était jamais plaint une seule fois des inégalités qui subsistaient entre lui et les autres garçons de son âge. Mieux encore, aucune larme n’avait pris possession de ses beaux yeux, et ce depuis sa naissance.

De faible constitution et peu prédisposé à la survie, le loupiot restait optimiste en toute circonstance. Peut-être savait-il qu’un jour, la roue finirait par tourner. En attendant ce grand jour, il recouvra le chemin de la prairie, et c’est soudain possédé par la bravoure — surement à cause de l’adrénaline secrétée à cet instant — qu’il permuta sa jambe vers l’arrière afin d’envoyer son meilleur coup de pied dans la balle. Celle-ci vacilla d’abord avant de se précipiter à pleine puissance. Très fier de son dégagement, l’enfant ne put réprimer un « OUI » extériorisé avec l’innocence et la sincérité qu’ils étaient les seuls à soumettre avec autant d’engouements. Aucune chance que son adversaire réussisse à arrêter le tir, il en était convaincu, surtout en estimant son angle et son altitude. Pourtant, il aurait dû lui faire confiance bien davantage qu’à son éjection. Il connaissait ses aptitudes mieux que personne, et quoi qu’il arrive, peu importe, comment et par quels moyens employés, il parvenait toujours à se sortir de toutes les situations. Un autre garçon à la longue chevelure mauve débarqua dans une foulée digne des plus grands athlètes. Sa course — vive et soignée — lui octroya le droit de bondir à la hauteur souhaitée pour attraper une branche et grimper dessus à une vitesse ahurissante. Il enchaina son escalade jusqu’au sommet avant de prendre appui sur la cime et augmenter sa détente jusqu’au ballon qu’il évinça avec le coude, cette dernière se tarissant au sol, son inertie étant rapiécé pour l’empêcher de circuler où bon lui semblait. Jusqu’au bout, il ne cesserait de le surprendre.

Rageant de sa dixième défaite consécutive, le compétiteur frappa son pied dans un morceau de roche émergeant de la terre. À l’évidence, il se fit plus mal qu’il ne se soulagea. Qui était donc ce garçon voué à un avenir radieux ? Et pire. Où est donc Ornicar ? Personne n’en savait rien. Pour ce qui est de son frère en revanche, il avait l’habitude de le fréquenter pour des raisons évidentes. Zane était le prodige de cette génération, là où lui en était le cancre. À croire que ses parents avaient délibérément proportionné les gênes pour expérimenter quelque chose. Quoiqu’il en soit, il avait accepté cette modalité depuis fort longtemps. « T’es vraiment naze, frangin. Je te propose une dernière épreuve. Si tu perds, tu auras un gage. » « Et si tu perds ? » « Tu feras de l’humour plus tard. Il parait qu’au bout de cette forêt se trouve un trésor enfoui. Celui qui le déterre en premier aura le droit de formuler n’importe quelle demande à l’autre. » « C’est d’accord. » « Alors, ne perdons pas une seconde de plus. » Aussitôt dit, aussitôt fait. Zane s’engouffra dans la végétation comme un loup sur son territoire. La peur et le doute ne semblèrent pas faire partie de son vocabulaire. L’assurance en moins, Deccio suivit la trace de son grand frère. Toutefois, l’enfant dénué du sens de l’orientation s’égara en à peine quelques secondes. Dans ce cas, il décida de faire surgir ses ailes pour emprunter une autre voie. C’était risqué, mais tant pis. En reculant pour prendre de l’élan, il buta contre une racine qui le fit s’effondrer sur les fesses.

C’est à ce moment qu’une jeune fille ayant probablement son âge se manifesta avec la curieuse volonté de le lui palper la membrane. Toutes proportions gardées, il voyait un peu de lui en elle. « Je suis une Fae d’abord. Elles sont fragiles et je suis fort. Et puis j’ai pas besoin d’aide. Figure-toi que je sais me débrouiller tout seul, moi. » Par vanité, le blondinet tourna les talons, s’emmêlant pour la énième fois les petons et les poignets dans des lianes qui n’étaient pas sujettes à le laisser tranquille, ces dernières le hissant à mi-hauteur entre deux arbres. Plus il se débattait, plus leurs prises s’enserrèrent. Si son frère le voyait dans cette posture, rien ne le retiendrait de se moquer de lui. « Bon, je euh… tu veux bien me sortir de là ? T’as de la chance que je sois d’excellente humeur, J’suis ok pour qu’on fasse équipe. »  Difficile d’admettre qu’on s’était trompé, surtout à l’âge où tout n’était que perpétuelle découverte. Si elle connaissait les alentours, il serait bête de ne pas s’en servir.


1000 mots | Post I
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Lun 28 Sep 2020, 17:49



La fillette et le renardeau

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Devant la réaction de son interlocuteur, l’incompréhension envahit l’esprit de la fillette. Pourquoi se vexer de la comparaison avec une créature aussi merveilleuse ? Selon les dires de ses parents, les Faes étaient un peuple fabuleux, qui, par leurs paroles, nourrissaient l’imagination des êtres vivants. Le nez plissé, elle ouvrit la bouche pour lui servir une répartie cinglante. Cependant, la situation dans laquelle le blond s’empêtra coupa court à son entreprise. N’avait-il jamais mis un pied dehors, pour ignorer qu’il faille faire attention à l’endroit où on mettait les pieds ? « T’es pas trop doué. Faut rester près de ta famille, si t’as pas l’habitude de te balader tout seul. T’aurais pu tomber sur quelque chose de dangereux. » Heureusement, les lianes ne représentaient pas un véritable problème ; du moment que l’on avait les doigts agiles, il suffisait de quelques mouvements pour s’en défaire. Habile, la Déchue n’eut aucun mal à le délivrer de sa prison végétale. Au lieu de contempler l’ambre des yeux du garçon, ce fut un autre éclat qui lui fit tourner la tête. Ses prunelles s’écarquillèrent. « Wow ! T’as un vrai couteau comme les grands ! J’ai pas le droit d’en avoir un, Papa dit que je pourrais me blesser. Je peux te l’emprunter ? » Pour le plus grand plaisir de la fillette, le bambin ne possédait pas qu’une seule lame. Impressionnée par son arsenal, elle le pressa de questions au sujet de ce dernier.

Lorsque le jeune homme parut lassé de répondre à ses interrogations, Calanthe lui proposa un exercice auquel elle ne s’était encore jamais livré. « Tu voudrais bien qu’on essaie de s’affronter ? J’aimerais devenir une grande guerrière, et botter les fesses de tous ceux qui m’embêtent ! » Incapable d’envisager la réalité d’une bataille, elle s’enthousiasmait volontiers. Sa cervelle fertile lui faisait miroiter un horizon de feu et de sang, où elle apparaîtrait comme une main tendue pour protéger les innocents ; son appétit pour les romans ne connaissait aucune limite, et sa tante s’assurait qu’elle ne désenchante pas. Combattre avec de véritables armes faisait battre la chamade à son cœur ingénu. Décidée à en découdre avec son nouvel ami, elle se campa fermement sur ses pieds, la blonde faisait fièrement bouger sa petite épée. « En garde, ma mignonne ! » Son cri de guerre joyeusement proféré, elle se lança à l’assaut de son adversaire du jour. Se précipiter de toutes ses forces présentait cependant un désavantage qui lui avait échappé : entraînée par son élan, elle chuta vers l’avant. Embarrassée, elle reprit sa position initiale et tâcha de se maîtriser davantage. À plusieurs reprises, elle abattit le plat de sa lame sur le corps de son acolyte. Cependant, il possédait indéniablement plus d’expérience qu’elle en la matière. Malgré toute sa verve, elle ne parvint pas à venir à bout de sa défense maladroite. À bout de souffle, elle choisit le chemin de la reddition. Une estafilade rougissante sur le bras, elle lui rendit sa propriété.

La fillette n’eut pas l’occasion de parler chiffons avec le renardeau. Sortie tout droit d’un bosquet, une minuscule créature les interpella. « S’il vous plaît. » Émerveillée par son apparition, la Déchue oublia la fatigue qui assaillait ses muscles et courut dans sa direction. La pauvre chose paraissait affreusement triste. « Aidez-moi, s’il vous plaît. Il y a une Sorcière dans la forêt. Elle mange les enfants perdus, et je ne trouve plus mes amis. » Devant sa détresse, le sang de Calanthe ne fit qu’un tour. D’une voix assurée, elle prit la tête des opérations. Elle ne pouvait rester les bras croisés alors qu’une méchante sévissait. « Attends-nous ici. On va la trouver et lui casser toutes les dents pour qu'elle ne mange plus personne. » S’il le fallait, elle n’hésiterait pas à employer les grands moyens. Avant que la bestiole ne puisse lui indiquer une direction, elle attrapa la main de Deccio et l’entraîna entre les arbres. « C’est fort comment une Sorcière ? Plus fort que toi ? » Quelle que soit la réponse, elle comptait bien ne pas se laisser faire et infliger à l’audacieuse une correction qu’elle n’oublierait pas de sitôt. Personne n’avait le droit de s’en prendre à d’autres personnes quand elle se trouvait dans les parages. Cela la mettait en colère. Le poing serré, ils progressèrent tant bien que mal à travers la végétation. Au bout de plusieurs minutes, la Déchue soupira, déçue de n’avoir encore rien trouvé. « Je sais pas trop où elle est, cette Sorcière, mais j’ai faim. » Un gargouillis sonore en provenance de son estomac appuya ses propos. En quête de nourriture, elle avisa un buisson qui grouillait de perles bleutées. D’un geste preste, elle en cueillit quelques-unes et les montra à son camarade. « Tu crois que ça se mange ? » Sans attendre qu’il lui donne son approbation, elle porta les baies à ses lèvres. Comment de si jolies choses auraient pu faire le moindre mal ?

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Mar 29 Sep 2020, 22:45

[Q] La fillette et le renardeau | Deccio (Souvenir) Ftvl
« Quand on n'a pas été un enfant, on ne devient pas un homme. »



« Grelotte, ça picote ! » Répondit instinctivement Deccio à l'avertissement de la jeune fille. Il comprenait son point de vue, mais pas moyen pour lui de faire machine arrière. Se conforter dans ce qu’il savait faire — par conséquent pas grand-chose — n’incluait aucune prise de risque. C’est parce qu’il décidait de sortir de sa zone de confort qu’il deviendrait un jour quelqu’un d’inspirant et vénéré. Le blondinet examina avec soin le couteau, presque surpris à son tour de l’avoir en sa possession. Les blessures avec ce dernier, il connaissait bel et bien, mais inutile d’ajouter des détails saugrenus à cette conversation qu’il préférait de toute façon éluder. Il aurait également voulu réchapper à la confrontation, mais l’énergie accablante de Calanthe allait au-delà de la raison, si bien qu’il accepta avant même de pouvoir y songer sensément. Il partait néanmoins avec l’avantage d’avoir affronté son frère des centaines et des centaines de fois, ce qui lui octroyait une prodigieuse endurance en dépit de toutes les défaites accusées. Ce qu’il put néanmoins notifier, c’est qu’elle se débrouillait à la perfection. Quelques échanges de plus, et sa fierté en aurait pris un sacré coup. À bout de souffle au terme de l’échauffourée, Deccio cadença sa respiration pour receler tout signe de faiblesse. Il tituba légèrement, son pied gauche rompant une brindille, qui de par le son qu’elle produisit lui fit recouvrer sa contenance. Une drôle de bestiole se manifesta ensuite, aidant le garçon à dévier l’attention ailleurs.

Les poings serrés contre son petit corps fluet, le renardeau pencha sa tête sur le côté, conspiré par le discours de cette chose. Une Sorcière, ici ? Il espérait de tout cœur qu’il ne parlait pas de sa propre mère. Elle était terrifiante. Bien plus que les monstres que l’on trouvait dans les contes les plus sordides. La question épineuse de savoir qui lui filait le plus les miquettes entre elle et son père demeurait irrésolue encore aujourd’hui. « Une Sorcière ? Tu es sûre de ton coup ? J’ai entendu dire qu’elles étaient vilaines. Il parait même qu’elles sont capables de transformer les êtres humains en poupées, tu te rends compte ? C'est pas jojo. » Des actes aussi horribles devaient plausiblement relever d'une légende urbaine, et dans le doute, pourvu qu'elle soit douce. Enfin non, qu’ils soient réprimandés. La petite qui le devançait progressant avec plus d’assurance, il était normal de la suivre, et ce en restant au plus proche d’elle. « Si cette Sorcière tombe sur lui avant nous, il est peu probable qu’on la trouve en un seul morceau. » Murmura l’enfant sans remarquer qu’il avait pensé à voix haute. Dans l’absolu, il n’était pas effrayé par la vieille bique. Mais par eux. Ils se trouvaient certainement dans les parages. Se faisant, il devait au moins la prévenir de ce qu’ils encouraient. « J’en sais rien. Sûrement beaucoup plus ! Mais je cours très vite. » Ces années à échapper au courroux de sa famille avaient contribué au renforcement ses jambes de manière exponentielle. « Par contre, je connais des personnes qui… » Mais il n’eut pas le temps de terminer sa phrase, ébaubi par la sensation d’une main se posant sur son épaule. Circonspect et craintif, il colla la fillette sans dire mot.

Toujours sans commentaires, il ingéra les boules violacées, le regrettant presque aussitôt après plus mûre réflexion. D’habitude, il ne portait jamais rien dans sa bouche à cause des saloperies que Zane lui glissait dans la plupart de ses repas. A l’odeur, il prit conscience que ce produit contenait une anomalie. Et ça ne manqua pas, puisque la seconde d’après, un mirage se dressa devant ses pupilles orangés. Le ciel — teinté de rouge — se scinda en deux, les nuages l’excédant adoptant la forme de crocs parés à s’abattre sur eux. Quant aux arbres, ils s'extirpèrent de leurs racines, leurs rameaux ondulant au gré de leurs rires machiavéliques. Un réflexe de recul plus tard et le petit homme se tordit la cheville en s’enlisant dans un épais bassin bourbeux. Dompté par la panique, il tenta tant bien que mal de se dégager de là en tirant de toutes ses forces sur sa jambe. Mais à mesure où le temps défilait, les ennemis de la nature atténuèrent la distance, prêts à le dépecer. Une autre silhouette difforme s’approchant, Deccio ne distinguait plus son alliée. Noyé sous ce fléau cauchemardesque, Calanthe présentait plus de similitudes avec le monstre à abattre qu’avec la princesse à qui prodiguer un câlin. De ce fait, à l’instant où il parvint à se dépêtrer de son piège vaseux, l’enfant — acculé — devint à son tour l’immondice bête qu’il valait mieux écarter à tout prix. Réussissant à plonger sur elle tel un rapace sur un rongeur, le blondinet grimpa sur ses omoplates avant de la frapper au niveau du visage. De plus en plus fort, il poursuivit son offensive, déterminé à se débarrasser du mal qui l’étreignait. Elle ne dût son salut qu’au son strident et infâme qui mortifia ses oreilles. Criant de tout son être en logeant ses deux mains contre ses cavités, ses yeux convulsèrent, suite de quoi il défaillit en chutant vers l'arrière.




870 mots | Post II
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Sam 03 Oct 2020, 10:09



La fillette et le renardeau

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Ravie de sa trouvaille, la fillette ne comprit pas tout de suite l’origine du manège de son acolyte. Manifestement en proie à la panique, il agitait sa jambe dans tous les sens, arrachant de ses mains des liens invisibles. Perplexe, elle s’approcha de lui pour le délivrer du mal qui le rongeait. « Qu’est-ce qui t’arrive ? T’as pas l’air en forme. » Devant son regard trouble, elle comprit. De toute évidence, il subissait les effets secondaires de leur déjeuner improvisé. Avant d’avoir eu le temps de trouver une solution, elle se retrouva plaquée au sol. Des poings maladroits s’abattirent sur son visage. Sous le choc, elle mit quelques instants à réagir. Mécontente, elle se tortilla pour se dégager de son étreinte : il avait beau avoir la force d’un moucheron, elle allait finir par se salir, et elle n’aimait pas quand ses vêtements étaient plein de terre. Le calme revint lorsque, après une dernière fantaisie, le garçon tomba dans les pommes. Un peu surprise, Calanthe se releva. L’inquiétude glissa sur son cœur : était-il mort ? Avec précipitation, elle dégagea sa toison d’or et posa deux doigts contre son cou, comme James le lui avait appris. Par chance, l’enfant paraissait seulement sonné. Soulagée, elle releva la tête. La surprise dilata ses pupilles. Entre les bosquets se tenait un cheval. Fascinée par son allure majestueuse, elle en oublia qu’il s’agissait sans doute d’un symptôme lié à l’ingestion des baies et courut dans sa direction. Elle trouvait chouette de rencontrer un nouvel ami.

L’animal avait fière allure. De sa haute stature, il dominait largement la Déchue. Admirative, elle regarda en silence la fumée qui s’évadait de ses naseaux. Frangés de cils vacillants, ses yeux semblaient emplis d’une mystérieuse sagesse. Pendant quelques secondes, elle laissa leur obscurité envahir son horizon. Impressionnée par son élégance, elle fit le tour pour l’observer sous toutes les coutures. D’une blancheur de neige _ elle avait découvert la neige, quelques semaines plus tôt, et avait trouvé ça très froid _, sa robe tenait de la féerie. Vigoureuse, la queue de l’équidé chassait des insectes qu’elle ne pouvait voir. Audacieuse, la fillette se décida à grimper sur la bête. L’exercice se révéla plus difficile que prévu. Quelque chose lui écorcha la main, et elle entendit le froissement caractéristique du tissu qui se déchire. Pour autant, elle ne s’en formalisa pas, et donna un léger cou sur son épaule. Ce dernier s’accompagna d’un cri plein d’enthousiasme. « Hue, Cannabis ! » L’imagination en effervescence, elle se voyait déjà voyager à travers le monde, à dos de cheval, et défendre les opprimés, le garçon à ses côtés. Ils feraient une sacrée équipe, et ensemble, ils pourraient défaire n’importe quel monstre. Toute à sa joie, la petite ne se rendit compte que tardivement qu’elle ne progressait pas d’un pouce. « Tu n’avances pas du tout, Cannabis. » Une moue contrariée déforma ses lèvres. Le bambin saurait sans doute s’y prendre mieux qu’elle. D’un geste vif, elle descendit de son perchoir et retourna vers l’inconscient.

Malheureusement, ce dernier n’avait toujours pas retrouvé le chemin de la réalité. Dépitée, la blonde se tourna vers le cheval pour lui présenter ses excuses. Avec stupeur, elle constata que l’animal avait disparu. À sa place se trouvait un bosquet passablement amoché. Baissant les yeux vers sa tenue, elle constata que des feuilles et des morceaux de branches s’étaient empêtrés dans ses vêtements. Contrariée d’avoir à son tour été bernée par une hallucination, elle envoya valser un caillou dans les fourrés. Il lui fallait maintenant réveiller le garçon ; elle commençait à s’ennuyer, et elle n’allait pas le veiller éternellement. Un éclair de génie traversa son esprit ingénu. Parmi les histoires que racontait son père, elle se souvenait vaguement d’un récit au sujet d’une princesse endormie, que son ami avait réveillé d’un simple baiser. Peut-être était-ce pour cette raison que ses parents passaient leur temps à se bécoter : il devait y avoir là-dedans une forme de magie qui lui échappait totalement. La fillette trouvait la chose dégoûtante, mais elle n’avait pas toute la journée. Le nez plissé, elle se pencha sur le corps du blond. Doucement, elle écarta les mèches blondes et posa ses lèvres sur les siennes. En dépit des poils qui se hérissaient sur ses bras, elle trouva ce contact presque réconfortant. Cela la surprit Avant d’avoir eu le temps de vérifier sa théorie, elle sentit une main l’attraper par le col. Effrayée, elle poussa un cri. « Lâche-moi, ou je t’arrache la tête ! » Sans se douter un instant de l’identité de l’indésirable, la fillette se débattit en lançant poings et pieds dans les airs, complètement au hasard.

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Dim 04 Oct 2020, 19:06

[Q] La fillette et le renardeau | Deccio (Souvenir) Ftvl
« Quand on n'a pas été un enfant, on ne devient pas un homme. »



Inconscient durant à peine vingt minutes, le garçonnet endurait les affres de ce que l’on appelait une putain de migraine. Chavirant dans une dimension parallèle sans vie, seule la présence des ténèbres était là pour le réconforter, ces derniers emmitouflant son corps entier de telle sorte qu’il s’y sentit presque bien. À titre de comparaison, le lit de sa chambre pourtant très confortable manquait de cette substance revigorante, qui sur certains aspects était plus maternelle que sa propre mère. Dans cet espace clos, plusieurs visages défilaient. Parfois familiers, tantôt inconnus, mais tous sans exception étaient connectés à une situation bien définie. Aussi, pour une raison incongrue, tous les intervenants eurent quelques années de plus. Que ce soit son grand frère en place sur un siège plutôt impérial ou la jeune femme aux cheveux d’ébène à ses côtés, les canines proéminentes. Mais le plus étonnant, c’est qu’en évoluant en apesanteur dans le monde, il se retrouva face à lui-même. Le garçon alors frêle avait radicalement changé sur cette séquence. Il était fort. Plus fort que n’importe qui. Il dirigeait une armada entière, mais dans quel but ? À quoi étaient destinées ces visions ? Était-il en train de percevoir un futur hypothétique, ou était-ce seulement le produit d’un rêve enfoui ? Sa petite tête n’arrivait pas à trouver le lien qui annexait les images, et pour son propre bien, il n’eut pas besoin d’aller si loin. Son organisme fut soudainement extrait de la noirceur vagabonde afin de retrouver la vraie vie, celle qui méritait qu’on y profite pleinement. Toutefois, un contact embarrassant brûla ses lèvres, quelque chose qui allait contre sa volonté, qui n’était pas consenti. De retour sur terre, Deccio écarquilla les yeux, ceux-ci se posant immédiatement sur la fille qu’il avait rencontrée un instant plus tôt. Il n’eut ni le temps ni la force de se retirer malgré une intention affirmée de couper court à ce cirque.

À la place, c’est un autre garçon à la peau mate qui inhiba Calanthe dans son élan. À sa dégaine nonchalante ainsi qu’à sa coupe unique taillée à l’emporte-pièce, aucun doute possible concernant son identité ; Lorenzo Rosati. Un très cher ami de lui et son frère, célèbre pour ses frasques humoristiques et son comportement parfois très versatile. Pas méchant, mais imprévisible, toutes les personnes qu’il avait tuées et démembrées jusqu’alors étaient accidentelles. « Qu’est-ce que tu fais à Dédé, sale guenon mal peignée ? Tu t’en prends aux plus faibles, j’aime pas trop beaucoup ça. » Sans être excessivement vigoureux, l’individu était le détenteur d’un pouvoir d’attirance et de répulsion. Son fonctionnement était plus instinctif que découlant d’une volonté propre. Du coup, l’effet aimanté qui émanait entre les deux enfants s’effectuait contre son gré. Il la repoussa néanmoins après qu’il ait reniflé sa nuque — une méthode de marquage dont il vantait l’intérêt. Recouvrant sa mobilité ainsi que ses esprits affectés par le phénomène précédent, Deccio appuya sur ses membres pour se redresser.

Il épousseta ses vêtements avant de faire front au déjanté. « C’est pas ce que tu crois d’abord. J’me suis juste laissé surprendre par un loup géant d’au moins… six mètres. Il était ultra trop fort, tu ne peux pas t’imaginer. Même qu’il savait parler. Hein, c’est vrai Pocahontas ? » C’était le premier nom qui lui était venu en tête. Et le premier mensonge aussi. Quoiqu’il en soit, il devait garder la tête haute devant lui. « OK. OK. Je te crois. Mais apprends à mentir un peu mieux, j’ai l’oreille qui siffle. » Lorenzo observa distinctement les deux zouaves, puis s’adressa directement à la fillette, par principe. Il en aurait bien fait son quatre heures s’il n’avait pas prêté serment de ne jamais toucher aux femmes plus âgées. « Sinon qu’est-ce que vous faites dans le coin ? » « On cherche une Sorcière pour lui casser les jambes et lui voler son dentier magique qui fais pousser du chocolat. Si ma mémoire me fais pas défaut. » « C’est pas gentil de vouloir du mal à ta mère. À moins que tu parles de cette Sorcière-là. » Il pointa Calanthe du doigt. Elle avait toutes les particularités qu’on prêtait à leurs descriptions franchement dénigrantes. Sûrement qu’elle déguisait son nez crochu sous un masque d’envoûtement. « Bon d’accord. Je n’ai jamais pu refuser quoi que ce soit à une brune aux yeux marrons. »« Elle a les cheveux blancs et les yeux marrons. » « Personne ne se soucie des détails. Contentez-vous de pas me lâcher d’une semelle. » S’autodésignant en tant que meneur, Lorenzo en savait probablement plus qu’eux, et pour cause, il vivait ici depuis sa plus tendre enfance ; c’est-à-dire pendant au moins deux jours. Le fait qu’il soit toujours en un seul morceau suffisait à crédibiliser son discours, c’est pourquoi le blondinet ne se posa aucune question. Du moins, jusqu’à ce que le groupe de trois chenapans soit encerclé par une dizaine de bêtes de la famille des suidés, autrement dit des sangliers. « Oups. Je me suis planté de chemin. Un volontaire pour servir de leurre ? » Son regard perçant s’accentua sur la loupiotte. Les Dieux appréciaient davantage les offrandes avec une belle frimousse.  



859 mots | Post III
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Dim 04 Oct 2020, 21:43



La fillette et le renardeau

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Outrée de l’accusation de son agresseur, la fillette cessa de se débattre, lui adressant un regard noir. Se défendre face à de telles inepties lui paraissait superflu : son ami savait ce qu’il en était, et elle ne devait d’explication à personne. Son intrusion la mit de mauvaise humeur, et lorsqu’il la relâcha, elle envisagea sérieusement de lui mettre son poing dans les côtes. Cependant, le blond semblait bien connaître l’hurluberlu, et la proximité entre eux lui valut sa clémence. Devant le mensonge qu’il lui servit, elle s’abstint de répondre. « Je m’appelle pas Pocahontas. » Ce fut la seule protestation qu’elle s’autorisa. Quand le nouveau venu reporta son attention sur la blonde, elle tourna la tête. Par chance, sa brusque apparition rendait le troisième protagoniste de l’histoire incroyablement bavard, et elle s’appuya sur sa logorrhée pour garder le silence. Sans chercher à comprendre une conversation qui n’avait ni queue ni tête, elle s’amusait à gonfler ses joues le plus possible pour chasser son exaspération. Comme le lui avait appris James, elle s’imaginait que le souffle qui s’échappait de ses lèvres emportait sa colère. Néanmoins, la comparaison avec une Magicienne ayant mal tourné manqua lui faire perdre son calme. Qu’il prenne la tête des opérations ne lui plaisait pas du tout ; elle souhaitait qu’il retourne d’où il était venu, et qu’il les laisse tranquille. La tentative du blond pour prendre sa défense lui réchauffa le cœur. Au moins avait-il conscience que Machin racontait n’importe quoi. Ils allaient devoir trouver un moyen de se débarrasser de lui ; elle soupçonnait être la seule à échafauder une stratégie à ce sujet. Elle refusait de laisser la journée tourner au vinaigre.

Bon gré mal gré, Calanthe suivit sagement le meneur de fortune. En sa compagnie, progresser à travers les arbres se révélait plus complexe. De toute évidence, il n’était pas taillé pour les escapades en milieu forestier. La grande concentration de conifères semblait lui poser problème. Ravie de ses difficultés, la fillette déchanta lorsqu’ils parvinrent devant une meute prête à charger. Devant l’aveu de son erreur, et le coup d’œil qu’il lui lança, elle se fendit d’un commentaire désapprobateur. « Quelle indignité. » Le mépris au visage, elle détailla de haut en bas la silhouette du citadin. À mesure qu’elle le dévisageait, son animosité grandissait. Même son étrange coupe de cheveux la dégoûtait. « T’as des ailes et tu ne penses même pas à t’en servir. Être obligé d’appeler une fillette à son secours, c’est pas glorieux. » Pas le moins du monde inquiète à propos des bestioles qui fulminaient à quelques mètres, une idée sournoise fleurit sous sa tête blonde. Son objectif en vue, elle annonça son plan de but en blanc. « Puisque tu ne sais pas te débrouiller, tu vas me servir d’appât. » Sa déclaration achevée, elle poussa un cri strident. En réponse à la provocation, les animaux grommelèrent bruyamment. L’air interloqué que prit le garçon ne l’empêcha pas de prendre la poudre d’escampette. En apparence, du moins. Avec une dextérité surprenante, la Déchue sauta sur l’une des bêtes. Des volutes pourpre couvrirent sa main lorsqu’elle la posa sur ses yeux pour le priver de la vue. « Pointez contre cavalerie ! » Signal de la débandade, son hurlement accompagna la ruade du sanglier.

Devant la charge de leur camarade, un vent de panique s’abattit sur les phacochères. Ils se lancèrent dans une charge désorganisée, s’attaquant aux quatre coins de la clairière. Véritable amazone, Calanthe menait le sien d’une main de maître, ses doigts fermement accrochés à l’épaisse crinière. Lorsqu’elle parvint à hauteur des deux garçons, elle fit mine de foncer sur Machin, et, au dernier moment, le contourna. D’un geste agile, elle récupéra son acolyte d’origine et le planta en selle. Durant quelques instants, elle crut que la course se déroulerait à merveille : ils s’éloignaient de l’autre à vive allure, et elle riait aux éclats du tour qu’elle venait de lui jouer. Peu habituée aux passagers, la bête s’agita bientôt furieusement. Dépossédée de son sens primaire, elle fonça en direction d’un tronc d’arbre. Devant le sort qui les attendait, la fillette attrapa la main du Démon et sauta sans réfléchir. La chute fut rude. Ils roulèrent pêle-mêle sur plusieurs mètres. Lorsque, sonnée, la fillette se redressa enfin, elle rit de bon coeur. « C’était chouette ! Si je n’avais pas aussi mal, je recommencerais bien ! J'avais encore jamais fait la course à dos de sanglier. » L’adrénaline courrait encore dans ses veines, et, d’humeur à manger un lion, elle se réjouissait de leurs péripéties. L’absence du fauteur de trouble, en particulier, améliorait considérablement son humeur. Le souvenir de ses traits stupéfaits provoquait son hilarité. « Tu aurais vu sa tête quand la bête lui a foncé dessus ! » Rieuses, les prunelles de la Déchue se posèrent finalement sur une structure inhabituelle. En total désaccord avec les lois de la nature, une maison se trouvait là. Au lieu des pierres ou du bois, une sorte de pain d’épice composait les murs. Soudain méfiante, la fillette baissa la voix. « Tu crois que c’est le repaire de la Sorcière ? » Comme un avertissement, un chat noir avait été peint sur la porte. Sur le côté, une lucarne laissait apparaître une silhouette chevelue debout face à un chaudron. La fillette s'accroupit dans les hautes herbes. À la réflexion, elle n'était plus très sûre de vouloir lui faire sa fête.

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Lun 05 Oct 2020, 22:40

[Q] La fillette et le renardeau | Deccio (Souvenir) Ftvl
« Quand on n'a pas été un enfant, on ne devient pas un homme. »


Deccio ne s’attendait pas à un tel retournement de situation en un délai aussi court. Que Lorenzo fasse étalage de ses pulsions burlesques c’était une chose, mais que Calanthe parvienne à tout chambouler de par son mépris du danger, s’en était une autre. Complètement dépassé par la tournure des événements, Deccio se laissait simplement aller aux agissements tempétueux des deux olibrius sans savoir comment réagir ou quoi faire. Quel camp devait-il encourager ? Son ami ou une parfaite inconnue ? Devant cette question foutrement délicate, il choisit de ne pas s’impliquer et de laisser couler. Qu’importe où le mènerait cette décision de pleutre, il en assumerait toutes les conséquences. Comme un homme. Il serait plus puissant que les ouragans, plus ardent que le feu des volcans. Voire même secret, comme les nuits de lune de… Non. À ce stade, cette métaphore n’avait plus le moindre sens. À l’image de ce qui se produisit sous ses yeux, avec la zizanie semée par la jeune fille et les phacochères, qui en se ruant dans toutes les directions répandirent le chaos au travers de la forêt. Effrayé à l’idée de se prendre leurs défenses dans les fesses, Deccio claqua ses paumes contre ses joues en hurlant tel… un enfant, finalement. Au milieu de ces dénicheurs de problèmes, il était celui qui réagissait le plus normalement. Il ne tenait pas à mourir si bêtement. Seuls les idiots perdaient la vie à cause de marcassins si repoussants. S’armant hâtivement d’un caillou qui trainait à ses pieds, le garçon le projeta devant lui dans l’espoir d’atteindre l’un des frénétiques et de — peut-être éventuellement pourquoi pas — l’étourdir.

Au lieu de ça, il provoqua le décuplement de sa furie, de quoi le pousser à un énième hurlement, presque plus bruyant que le grommellement des agresseurs à quatre pattes. Il fut cependant sauvé in extremis par l’intervention miracle de la principale responsable de ce fiasco. À tous les coups, elle avait magistralement orchestré l’attentat du début à la fin. Ça ne l’étonnerait guère avec sa longue toison blanche ; sursis probable d’une peine prononcée contre ses crimes. Il avait lu une histoire similaire dans un vieil ouvrage, avec un détective, un renard et un gros type barbu qui s’abreuvait essentiellement d’alcool. Même pour son âge, le scénario était tiré par les cheveux. En attendant, il devait bien reconnaitre qu’elle l’avait sorti du mauvais pas alors qu’elle aurait pu l’abandonner à son triste sort, comme elle l’avait fait pour Lorenzo. Elle n’avait sûrement pas eu le temps de lui prêter main forte. De toute façon, il ne s’inquiétait pas une seconde pour ce dernier. Inutile aussi de se soucier d’une éventuelle pénurie de nourriture pour la semaine à venir. Devant son ton enjoué, il répondit avec un large sourire, ceci afin de la remercier. « Tu es complètement cinglée. Vous êtes toutes comme ça, les filles ? » Certes, une forme de gratitude un peu timide, mais l’intention était là. Si l’intrépidité et l’autorité ne qualifiaient que très peu le blondinet, la franchise prenait en revanche une grande part du marché. Quant à son enjouement concernant les déboires supputés de Lolo, il n’y prêta que peu d’attention.

Si ça se trouve, elle découvrait sa sexualité en l’évoquant et… beurk. Il ferma les yeux et répéta « Inutile, inutile, inutile, inutile. » Afin de chasser cette vision de son esprit. Il changea d’ailleurs rapidement de sujet. « Dis, dis. Tu sais jouer de la musique, toi ? Mes parents sont des maîtres du violon. Je les entends souvent dire “Violons-là, violons-les. Je viole, comme un aigle royal. Je viole au-dessus des lois. Je viole quand j’ai faim, c’est bien normal.” Puis mon frère est le meilleur joueur de pipeau que je connaisse. Il accorde parfois du violon, mais la mélodie est plus courte. Bref, de bons musiciens dans ma famille. » Et quand on parle du loup, et bien ça fait plaisir. Ce n’est pas un loup qui se présenta à eux, ni deux loups, mais bien un autre protagoniste. De dos, il ne l’avait pas reconnu tout de suite. Toutefois, les boucles présentes sur l’extrémité de ses cheveux annihilaient ses incertitudes. Les yeux pétillants, l’enfant courut droit sur la personne. « Virginioooooo ! » Hurla-t-il avant de lui sauter dans les bras alors qu’il faisait à peine une tête de plus que lui. Un autre de ses amis. Décidément. Cette forêt en était plus bondés que d’insectes. À croire que la Sorcière ne trempait dans aucune magouille, mais dans cette marmite. Curieux, le blondinet jeta un œil au bouillon en se penchant par-dessus. « Qu’est-ce que c’est ? C’est la Mégère ? » « Des restes d’Humains, quelle question. » Avec une banane affichée — et il n’est fait aucune mention de sa teub — le second garçonnet tapota la tête de Deccio de la même manière que s’il était son frangin.

Puis soudain, ses prunelles se posèrent sur la fille qui l’accompagnait. À cet instant, son sang ne fit qu’un tour. Sa main sur la poitrine et la bouche en cœur, il repoussa brusquement son copain qui manqua de trébucher en se heurtant à une souche. Il recouvra l’équilibre en se rattrapant grâce à l’intervention d’une chaine fixée à une branche. Élégamment, le nouveau personnage s’approcha de Calanthe. D’un geste stylisé, il fit naitre une rose dans le creux de sa paume, s’adressant à elle avec un accent prononcé. « Je n’aime pas le sable, il est grossier, agressif, irritant et s’insinue partout. Pas comme toi. Toi tu es douce et tendre. » En tant que Don Juan de la troupe, Virginio avait les mots pour faire tomber accro. Portant la tige épineuse à ses lèvres, il entremêla ses doigts dans les siens. « J’ai cru comprendre que vous cherchiez une Sorcière. Suivez-moi. Je traverserais les dimensions pour vous. » Il tira Calanthe à l’intérieur de la maison d’épices, refermant la porte au nez de Deccio qui le mit en sang. Il entra tout de même, vraiment pas content, le visage serré. « Qu’est-ce que tu crois fai… » Ce n’est pas l’envie de pousser la gueulante qui le retint. Toutefois, ses yeux se posèrent sur une minuscule cage d’oiseau dans laquelle était enfermée une petite femme ailée en pleurs. Elle ne ressemblait pas à cet odieux portrait qu’on lui avait dépeint.


1060 mots | Post IV
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Sam 10 Oct 2020, 12:37



La fillette et le renardeau

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Effrayée par la présence de la maisonnée _ et par celle de la créature sordide qui devait y vivre _ , la fillette serait volontiers restée dans les hautes herbes, à épier les alentours jusqu’à ce qu’une stratégie lui vienne en tête _ ou que l’ombre qui leur parvenait ne lui fasse suffisamment peur pour qu’elle prenne ses jambes à son cou. Devant les élucubrations de son acolyte, elle fronça les sourcils. Cette histoire de violon ne lui disait rien. La mélodie, en revanche, lui paraissait entraînante. Les yeux écarquillés, elle tâcha de graver les paroles dans sa mémoire : elle aimait apprendre toutes sortes de choses. « C’est une comptine de chez toi ? J’ai pas tout compris à l’histoire, mais ça a l’air chouette ! » Avant d’avoir eu le temps de lui demander s’il voulait bien qu’elle rencontre les siens, un nouvel individu chamboula leur programme. Manifestement ravi de la présence de l’inconnu, le blond se jeta dans ses bras. Quelque peu déconcertée par sa surprenante réaction, elle demeura muette. En silence, la Déchue fit le tour des deux compères. Désormais à découvert, elle remarqua avec surprise un chaudron d’où s’échappait des effluves peu ragoûtants. Quoi que le chevelu puisse mijoter, ce n’était sûrement pas un cuisinier de génie, et elle espérait sincèrement qu’il ne les inviterait pas pour le goûter. Elle s’attendait presque à voir des tentacules surgir de la marmite pour les engloutir. Le nez plissé avec dégoût, elle tâcha de ne pas se montrer impolie et préféra garder le silence. Loin de la rassurer, son explication ne fit que renforcer la déformation de sa bouche. Le blondinet avait de toute évidence des amis particuliers.

Le plus gros de la surprise restait à venir. Non content de capter tout le champ de vision du garçon, le bambin aux cheveux bouclés s’aperçut soudain de sa présence. Tous les signaux envoyés éveillaient sa méfiance : elle préférait nettement l’indifférence insouciante de Deccio. Quand un être lui prêtait d’emblée toute son attention, elle n’appréciait généralement pas d’en être le centre. Il était beaucoup plus amusant de se battre pour la conserver. « C’est bizarre. Ma maman fait la même tête que toi quand elle veut amadouer le chat du village pour lui faire des caresses. » Sans réagir à la comparaison, il l’entraîna à l’intérieur de la masure. Davantage que sa tentative de kidnapping, ce furent ses paroles qui inquiétèrent la fillette. Devant ses minauderies, elle enleva précipitamment sa main de la sienne et courut se réfugier derrière le Démon. « Il me fait peur, lui. On dirait qu’il veut me manger. » Véritablement terrorisée par cette perspective, elle tâcha de se dissimuler au mieux, dans l’espoir d’échapper aux yeux transis de Virginio. Il n’y avait pas grand-chose sur terre qui lui fasse peur ; l’enfance la prémunissait de bien des frayeurs. Cependant, son protecteur ne parut pas le moins du monde soucieux de son état. Tout occupé à observer le contenu d’une cage, il paraissait plongé en pleine réflexion. Lorsque la Déchue aperçut la créature à l’intérieur, ses pupilles s’agrandirent. « Mais… Diable de zouave ! Tonnerre de Brest ! » Soudainement généreuse en imprécations, la fillette posa les poings sur ses hanches, indignée. Elle n’avait pas la moindre idée de ce qu’était un Brest ; néanmoins, elle avait déjà entendu son père lancer de pareils cris, et elle avait plus ou moins compris qu’ils signifiaient une vive désapprobation.

À leur arrivée aux abords de la Forêt, ses parents lui avaient fait comprendre que toucher aux Faes provoquait immanquablement des catastrophes, et, dans la naïveté de ses jeunes années, elle les avait crus. D’un geste vif, elle approcha sa main du loquet pour libérer la pauvre créature. Malheureusement, la brutalité de son mouvement ne fut pas interprétée de la bonne manière. Sans comprendre, Calanthe sentit quelque chose l’attraper par la cheville. Rendu monstrueux par la capture de sa mère, un végétal anodin au fond de la pièce venait d’achever sa métamorphose. Désormais pourvu de lianes d’une robustesse impressionnante et d’une bouche garnie de crocs, il s’agitait furieusement. Sa première victime avait beau se débattre de toutes ses forces, elle s’approchait inexorablement de sa gueule béante, et à la vue de ses profondeurs, elle poussa un cri suraigu. « Au secours ! » Sans avoir l’opportunité de jouer les preux chevaliers, les bambins connurent un sort similaire. Immobilisés dans les airs, la joyeuse compagnie jetait des coups dans le vide. Pendant un instant, la blonde s’imagina dévorée, lentement digérée par les sucs gastriques du rhododendron. La délivrance vint lorsque, enfin libre, la Fae s’éleva à leur niveau. Manifestement en colère, elle désigna la porte. Ses cheveux voletaient autour de sa tête, lui donnant une allure effrayante. « Disparaissez de mes terres ! Périssez, êtres inférieurs ! » Proclamé d’une voix menaçante, son ordre vit les enfants être projetés à l’extérieur de la maisonnée. La porte de cette dernière se referma avec fracas.

Infiniment reconnaissante d’être toujours en vie, la blonde retint un sanglot dans sa gorge. Les fesses sur le sol, elle se frotta les yeux pour s’assurer qu’elle ne rêvait pas survie. Légèrement sonnée par la chute, elle resta un instant sans bouger. L’un des garçons lui tendit une main qu’elle saisit de bon cœur, ressentant toutefois le besoin de se défendre. « Merci. Je suis pas une trouillarde, d’abord. » Chamboulée par l’aventure, il lui fallait quelques minutes pour s’en remettre ; elle aurait volontiers réclamé James. Son jeune âge empêchait la Déchue d’imaginer que la propriétaire de la maisonnée ne cherchait qu’à les rendre craintifs pour les éloigner de chez elle, et qu’en dépit de l’attitude odieuse de celui qui l’avait capturée, elle ne leur aurait pas fait le moindre mal. Cependant, la Fae décida que la distance qui les séparait ne suffisait pas. Avec horreur, Calanthe vit des formes oblongues se détacher du jardin. Vindicatifs, les légumes gonflèrent comme des ballons et se mirent à rouler dans leur direction. Grossière et décousue, la scène aurait fait rire n’importe quel adulte. Toutefois, le sang de la fillette ne fit qu’un tour. Prestement, elle s’empara d’une deuxième main pour ne laisser personne et se mit à courir à toutes jambes. « On va tous mûrir ! » À grands renforts de cris et de maladresses, les enfants détalèrent comme des lapins. Le souffle court, la blonde les guida tant bien que mal entre les arbres, jusqu’à ce qu’elle estimât qu’ils avaient échappé à leurs assaillants. Lorsque ce fut le cas, elle lâcha enfin les mains qu'elle avait fermement tenues. « Est-ce que ça va ? J'arrive pas à croire qu'on soit encore en un seul morceau. J'aime plus la forêt. » Devant le visage rougi du garçon, elle s'approcha pour l'examiner sous toutes les coutures. Provoquer le courroux des végétaux, même par erreur, n’était vraiment pas très drôle.

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Lun 12 Oct 2020, 21:17

[Q] La fillette et le renardeau | Deccio (Souvenir) Ftvl
« Quand on n'a pas été un enfant, on ne devient pas un homme. »


Provoquer mère nature revenait à insulter sa propre maman. C’est du moins la conclusion à laquelle déboucha Deccio qui s’en était pris des vertes et des pas mures de la part de sa maternelle. Sur le cul — dans tous les sens du terme — par ce qu’ils avaient enduré, le blondinet ne réalisait toujours pas. Ce déferlement fut presque trop soudain, d’autant plus qu’il n’avait absolument rien à se reprocher pour une fois. Seul Virginio qu’ils venaient à peine de rencontrer avait initié cette rafle à l’improviste. En tant que gentil petit garçon, jamais il n’aurait osé pratiquer pareille torture. Déjà, car il était assez superstitieux concernant les risques qu’il prenait si jamais l’idée lui trottait dans la tête, mais aussi parce qu’il en était carrément incapable. Après tout, il perdait même contre une rose inoffensive si celle-ci avait l’audace de posséder trop d'épines. Toutefois, il était bien trop tard pour implorer sa miséricorde, d’autant plus qu’elle était particulièrement furax au point de ne pas leur laisser une seule seconde de répit. Deccio courut de tous les côtés dans l’espoir d’échapper à la végétation luxuriante qu’elle abattait sur eux tels de féroces fouets. La déconvenue se joignit rapidement à la partie, puisqu’il se cassa la figure à plusieurs reprises, ne devant son sursis qu’à l’intervention des deux autres qui coordonnèrent des actions bien plus probantes que les siennes.

Sans le savoir, Calanthe bénéficiait de la capacité passive du bouclé qui consistait à accroitre plus ou moins considérablement les aptitudes de ses alliés. C’était un peu particulier dans son cas étant donné qu’il n’était doté d’aucun don en particulier. Il avait bien essayé de manipuler la magie, mais tout ce qu’il en ressortait ne se traduisit que par de ridicules étincelles. Leur seule utilité se limitant davantage à faire rire la galerie. Quoiqu’il en soit, le trio s’employa à remuer ciel et terre pour s’abstraire de cette vile emprise. A bout de souffle malgré son absence de contribution de bout en bout, la jeune fille vint s’assurer qu’il était en bonne santé. Ses blessures avaient beau être superficielles, psychologiquement, le plus fragile des garçons accusait le coup. Il avait pourtant l’habitude de se confronter à ce genre de situations, mais il n’avait jamais été séparé de son grand frère ; sûrement l’unique personne à pouvoir le réconforter sans rien faire de particulier. Froissé par la vanité, il refusa qu’on lui vienne en aide. Repoussant la main qui lui était tendue, il se redressa par lui-même, une quinte de toux s’empressant de prendre le relais. « Pfff, c’était de la rigolade tout ça, même que. Si vous n’aviez pas été là, je lui aurais certainement fait bouffer ses pissenlits par la racine. » Pas question d’être toujours le seul à subir la pitié des autres. De plus, il ne serait pas constamment accompagné de quelqu’un pour lui sauver les miches. Et ça, il le comprenait mieux que quiconque. « Ne fais pas l’idiot, Dudule. Même celui que tu admires tant en aurait bavé à lui faire manger ses morts. Inutile de passer par quatre chemins, je l’ai sous-estimé. » Figurant comme le moins touché de la bande, Virginio conservait un certain peps qui manquait peut-être aux deux autres. Si sur le coup il remerciait les Dieux de l’avoir préservé, il le prenait malgré tout à la rigolade.

Se séparant de la distance qui les scindait, il s’aventura aux côtés de Calanthe. L’effleurant du coude pour attirer son attention, il lui adressa un clin d’œil bien prononcé. « En revanche tu t’es bien défendue. J’avoue avoir été quelque peu surpris, et en bien. C’est une qualité digne de ma future fiancée. » Elle aurait beau faire la sourde oreille, il n’était pas prêt de renoncer. Il en avait enfermé dans son cabanon pour moins que ça. Néanmoins, si la jeune fille échappait pour le moment à ce traitement, ce n’est pas pour autant qu’il suspendrait son opération de séduction. Quant à Deccio qui venait de finir de se recoiffer en atténuant les quelques plaies qui figuraient sur son avant-bras, ce dernier prit une grande décision. « J’vais la retrouver et la ramener, vous aller voir. Elle va payer pour les sévices qu’on a subis. » Tandis qu’il traçait sa route, son ami s’interposa afin que celle qui succombait fréquemment au syndrome du sauvetage reste à sa place. Les bras croisés, il jeta un rapide coup d’œil derrière son épaule. « Tu ne ferais que le peiner davantage. S’il tient à faire ses preuves, tu dois respecter son choix. » Rarement il déblatérait d’aussi sages paroles. Malgré le sarcasme et la médisance qui pouvaient parfois conduire la relation de tous ces bambins, ils demeuraient une véritable famille qui savait se protéger mutuellement.

[Q] La fillette et le renardeau | Deccio (Souvenir) B415bb10

En jonchant les traces imprimées sur le sentier fangeux et en se volatilisant derrière d’énormes plantes, Deccio pénétra dans ce qui ressemblait à s’y méprendre à une arène. De longs arbres effilés délimitèrent le terrain, en plus de quoi de monumentaux rochers étaient prédisposés d’une drôle de façon. Et alors qu’il sentit le coup fourré à plein nez, celui-ci n’eut pas l’opportunité de rebrousser chemin qu’il se fit immédiatement accueillir par une pluie de cailloux qu’il esquiva tant bien que mal avant de se faire enlever par des branches flexibles et ondoyantes qui le rivèrent contre l’écorce. Il eut tout juste le temps de propager son meilleur hurlement avant de se faire étreindre la bouche par une feuille dont la densité avait été renforcée. Incapable de faire le moindre mouvement, il comprit qu’il ne s’agissait pas de la Fae. Au vu de sa puissance, ce devait être elle. De l’autre côté, ceux qui étaient restés en retrait perçurent parfaitement le SOS de détresse. Alarmé par ce signal qu’il reconnut sans délai, Virginio se leva de sa couchette à la hâte, se précipitant vers Calanthe qu’il secoua par les épaules. « Écoute-moi, il faut absolument que tu ailles à sa rescousse. Du moins, faites tout votre possible pour temporiser. Je reviens avec du renfort. » Il n’en dit pas plus, choisissant de prendre cet appel au sérieux. Il craignait le pire, et c’est pourquoi il n’y avait pas une seconde à perdre.



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Mar 13 Oct 2020, 22:22



La fillette et le renardeau

Thème.

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Ce dont la fillette avait la certitude, c’était que vivre une pareille mésaventure changeait sa perception des choses. En dépit de la beauté de la Forêt, mieux valait ne pas avoir d’intentions malveillantes. Rassurée sur l’état du blondinet qui montrait à présent les crocs, décidé à mener à bien sa vengeance, elle fut néanmoins empêchée de le retenir. Inquiète pour sa sécurité, elle se conforma à contrecœur aux paroles de l’autre. « J’espère juste qu’on le retrouvera en un seul morceau. » Sans doute le troisième protagoniste de l’histoire connaissait-il mieux qu’elle le diablotin. Un jour, elle avait découvert un livre couvert de poussière, dans la bibliothèque de son père, où l’auteur divaguait à propos de la dignité des faibles. Elle n’avait pas compris grand-chose aux explications de l’ouvrage, mais sa jeune cervelle associait naturellement ce souvenir à la situation présente.  En proie à une réflexion trop grande pour sa tête blonde, elle finit par reporter son attention sur un autre sujet. En l’occurrence, elle frôla du bout des doigts les mèches du garçon à ses côtés. Loin de faire partie de ses points forts, la coquetterie surgissait parfois en elle, et il fallait reconnaître que le bambin paraissait porter un soin particulier à son apparence. Distraite, la Déchue enroula ses phalanges entre les boucles soignées de son interlocuteur. « Dis, Virginio. Comment tu fais pour avoir des cheveux aussi soyeux ? » À ses yeux, il ne s’agissait ni plus ni moins que d’un phénomène magique.

Lorsque le cri de Deccio se fit entendre, la fillette se redressa d’un bond. Les yeux encore embués de sommeil, elle porta ses poings à ses paupières pour les chasser. Interrompu par l’intervention brusque de Virginio, son geste resta en suspens. Sitôt qu’elle eut déchiffré ses propos, elle s’élança à travers les bois. Rechercher une trace susceptible de la mettre sur la piste de son camarade en territoire inconnu se révéla rapidement impossible. Craignant d’arriver trop tard, elle décida de se fier à ses appels à l’aide pour progresser au plus vite. À chaque hurlement, Calanthe sentait son rythme cardiaque s’accélérer. Pressée par les sursauts de son palpitant, elle serra plus fort le petit couteau dans sa main. L’inquiétude au fond des yeux, elle surgit finalement dans la clairière. Devant le spectacle du blondinet qui manquait de se faire engloutir par des végétaux particulièrement coriaces, elle se jeta avec colère sur les mauvaises herbes. « Laisse mon copain tranquille, liane dégénérée ! » En mouvements saccadés, elle abattit vigoureusement sa lame en plusieurs points. Manifestement mécontente de son traitement, la plante relâcha son étreinte, non sans avoir au passage laissé son empreinte sur les mollets de son assaillante. Retenant une grimace de douleur, la blonde aida le rescapé à s’extraire de son carcan. Lorsqu’il fut sauf, elle le prit affectueusement dans ses bras. « Personne a le droit de te faire du mal. Je te protégerai toujours. » Préoccupée par l’état du bambin, elle ne remarqua pas la ligne, qui, l'espace d'une seconde, cercla son poignet.

Les sourcils froncés, Calanthe se remémora les sages conseils de Virginio, et, gênée, rendit doucement sa liberté au bambin. À la manière d’un insecte invasif, elle avait tendance à s’accrocher aux êtres qui l’avaient touchée. Tâchant de se montrer plus mesurée, elle recula et lui adressa un sourire sincère. « Enfin, quand tu auras besoin de moi. » Le sifflement d’une branche qui filait à toute allure vers eux la détourna de son indélicatesse. De justesse, ils évitèrent le choc. Réfléchir à une stratégie pour venir à bout de la silhouette invisible lui étant impossible, elle proposa l’option la moins risquée. « Si on travaille ensemble, je suis sûre qu’on peut s’en sortir. » Il fallait savoir mettre son orgueil de côté pour survivre, et elle ne tenait pas à finir en petits morceaux. La mécréante, en revanche, n’avait rien à faire dans la Forêt, et elle s’imaginait déjà la reconduire à l’orée des bois et lui ordonner de ne jamais revenir. Peut-être pourraient-ils devenir les gardiens de l’endroit, et chasser ensemble les indésirables ? Pour l’heure, ils avaient un problème sensiblement plus urgent. Devant eux, la clairière se tenait tranquille. Calme avant la tempête. « Mettons-nous dos à dos. On va devoir veiller l'un sur l'autre. Sinon, on risque de passer un sale quart d’heure. » Méfiante, la Déchue décida d’adopter une position défensive, et brandit vaillamment le couteau face à elle. Que les Faes ne se soient pas débarrassés du problème en disait long sur la dangerosité de la créature qui sévissait dans les parages. C'était terrifiant.

De mauvaise humeur face à la tournure des évènements, la fillette décida de passer aux provocations. Dans l’espoir que celle-ci suffirait à faire sortir la Sorcière de son repaire, elle s’efforça de parler d’un ton plein d’assurance. « Sors de là, si tu oses ! On va te refaire le portrait ! Ça t’apprendra à manger les enfants ! » Pour accompagner sa menace, elle envoya valser un caillou au hasard. Contre toute attente, le minéral revint à toute vitesse vers elle, lui heurtant le front. « Aïe ! »  Incapable d’en déduire quoi que ce soit, elle sentit une vague d’angoisse monter en elle. Pour se rassurer, elle s’empara de la main libre de son partenaire d’infortune et la serra doucement. Le vent se mit à tourner furieusement entre les feuilles. Arrachées de leur berceau, certaines vinrent danser follement devant eux, masquant leur visibilité. Surgies de nulle part, des lianes cherchèrent à briser leur entente. La blonde se servait tant bien que mal de sa lame pour les tenir à distance. En un ballet parfaitement désordonné _ et au prix de quelques griffures occasionnées par des épines qui traînaient là _, ils parvinrent par miracle à repousser les assauts verts. Cependant, l’attaque ne constituait rien de plus qu’un subterfuge. Un craquement sinistre couvrit le brouhaha de la brise. « Attention ! Baisse-toi ! » Dirigée par une poigne de fer, une branche venait de céder. Prise au piège, la fillette déploya au dernier moment sa magie. Hésitant, le bois s’immobilisa un instant, tiraillé entre les volutes qui cherchaient à le soumettre. Finalement, repoussé par une volonté que le désespoir amplifiait, il alla s'écraser plus loin. Un danger de moins. « Je crois que je vais tomber dans les pommes. » À bout de forces, la Déchue tomba à genoux. Jamais elle n'avait connu pareille épreuve.

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Sam 17 Oct 2020, 21:38

[Q] La fillette et le renardeau | Deccio (Souvenir) Ftvl
« Quand on n'a pas été un enfant, on ne devient pas un homme. »




Comment ça son copain ? La question en suspens, Deccio s’empressa de scruter l’environnement en quête d’un éventuel support qu’il serait susceptible d’utiliser pour sortir de cette impasse. Pendant ce temps, Calanthe lui en fit gagner en provoquant la nébuleuse créature. Elle se débrouillait plutôt bien, mais cela ne pouvait durer à perpétuité. La magie qui stimulait la forêt répondait avec une vivacité sans précédent ; allant des lianes super réactives aux racines opportunistes, l’agresseur cherchait manifestement à amortir l’endurance de sa proie. Une technique populaire qui refit surface dans les réminiscences du jeune garçon. La première fois qu’il était parti à la chasse avec son père, ce dernier s’était retrouvé dans une situation délicate. Il revit brusquement la horde de sangliers géants les cerner ; leurs narines exhalant un jet de vapeur corrosif ainsi que leurs énormes sabots pulvérisant la roche. Ce jour-là, il se rappelait à la perfection du sentiment de peur qui l’eut envahi. Pas à cause de la menace que les bêtes insufflaient, mais bien de ce que Drogon eut personnifié au cours de cette nuit. Bien qu’en surnombre, il avait intellectuellement pris le dessus en contraignant les suidés à tout donner, notamment en les coinçant dans un marais, dérobant leur vitalité par l’esprit. À cette époque, l’homme ne possédait pas l’immense puissance que lui ont ensuite connue ses homologues. En revanche, il avait toujours détenu ce que l’on appelait un discernement réactif très impressionnant. Autrement dit, il savait exploiter sa force à son paroxysme tout en cultivant la faiblesse de ses adversaires.

S’il pensait subitement à ça, c’est que la situation en cours présentait des similarités, notamment sur la durée que cherchait à assigner leur assaillant. « Ne te laisse pas épuiser bêtement ! Protège tes flancs et ne fais pas de mouvements inutiles ! » Fournir des conseils alors qu’il avait échoué le premier, c’était certes orgueilleux, mais c’est toutefois le moins qu’il pût faire. De toute façon, elle vint rapidement à son secours afin de le dissocier de cet arbre qui l’eut bien trop longtemps maintenu auprès de lui. La hauteur suscitant la chute, il s’égratigna malencontreusement les mains sur une ronce. Le renardeau les agita tout en conservant la douleur pour lui. S’il perdait ses membres supérieurs, il lui restait toujours ses jambes. Si son corps n’aidait probablement pas à se débarrasser de celui ou celle qui les outrageait, sa persévérance pouvait potentiellement les mener à la victoire d’une façon ou d’une autre. Hélas, c’était plus facile à dire qu’à faire, car les deux garnements furent promptement acculés contre les assauts répétés de la nature qui ne leur laissa aucune chance. D’une certaine façon, il admirait l’entêtement de sa partenaire qui parvenait continuellement à déjouer la mort tout en le prévenant d’éventuels dangers. Parfois, il lui arrivait à son tour de la protéger en jouant sciemment le rôle de pâture. Peut-être ne s’en rendait-elle pas compte et lui non plus, mais Deccio disposait d’une particularité qui était propre à sa famille.

Depuis l’enfance, il attirait les ennemis, qu’ils soient sous forme humanoïde ou non. Cela était dû à son tatouage, commun non seulement avec son frère, mais aussi à ses deux parents. L’origine de ce dernier était voilée de mystère, à tel point qu’il n’avait jamais pris conscience qu’il en était la cause directe. Quoiqu’il en soit, le couperet s’apprêtait à tomber sur les deux jeunes gens. Jusqu’à ce que la cavalerie arrive. Comme n’importe quels héros qui se respectaient, ils débarquèrent pile à l’heure. Le terme cavalerie n’était d’ailleurs pas usurpé — tout comme leur réputation — puisque les sept enfants, du moins pour la plupart, se tenaient bel et bien sur des chevaux. Au nombre de trois canassons, ils étaient arrangés par paire, hormis un gamin un peu plus perturbé que les autres qui n’avait visiblement pas réussi à trouver sa place. Agrippé à la queue de l’un d’entre eux, son visage rubicond symbolisait la pénible tâche de ne pas lâcher prise. Le plus maladroit de tous — Pipicado de son nom — fut congédié dans les fourrés lorsque les chevaux s’immobilisèrent subitement. Zane en première ligne, il découpa les végétaux menaçants d’un seul coup, ces derniers s’affaissant juste avant l’impact. « Qu’est-ce que tu deviendrais sans moi, petit frère ? Bon. Mais tu t’es quand même bien démerdé pour un dégonflé. » « Grand… grand frère, tu es venu pour moi… » Une reconnaissance de sa part équivalait au moins à deux Coupes des Nations remportés. Peu étaient honorés à recevoir cette bénédiction. « Et encore, si Servius n’avait pas insisté pour prendre cette foutue barque, on serait arrivé bien plus vite. » « C’est même pas vrai d’abord ! Si on est à la bourre, c’est à cause de Xenos. Ce con a pissé dans la fiole de célérité ! » « Peu importe qui a fait quoi. Que tout le monde se mette en formation Hamster. » « Quelle version ? » « La “X” » Une exclamation d'étonnement concomitante de la part des garnements fit écho dans la forêt.

Quoiqu’il en soit, la suite se passa de manière très fluide et synergique. Les responsabilités ayant préalablement étés attribués, les unités opérèrent de concert comme une véritable armée entrainée. En binôme, ils prêtèrent renfort à Calanthe et Deccio pendant que le corps de l’infanterie le plus offensif mit un terme aux tumultes de la flore. Au terme de plusieurs minutes, le chaos s’interrompit, la responsable du remue-ménage se manifestant de la pénombre. « Mettez-vous en garde. » Zane ploya légèrement son genou droit, enfonçant la plante de ses pieds dans le sol. Il situa son poignard à proximité de son buste. Les six autres se rangèrent selon leur bon vouloir alors que le dernier répondait toujours aux abonnés absents. La Sorcière — manifestement mécontente — balança une bourrasque en qualité d’intimidation. « Comment osez-vous vous confronter à moi ? Vous allez le payer. Et très cher. » Deccio se dirigea auprès de Calanthe. Il esquissa un sourire.  « Ensemble nous ne pouvons pas perdre. Je vais te faire confiance comme tu m’as fait confiance. Tu es prête ? Prends ma main » Lui confia t-il en la lui tendant.. Il combattrait en unisson avec elle. Pour la remercier de son dévouement, mais aussi parce qu’il avait l’intime conviction que c’était la meilleure chose à faire.



1058 mots | Post VI
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Mer 21 Oct 2020, 09:23



La fillette et le renardeau

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De son œil sinistre, l’épuisement guettait la fillette. Il lui semblait que ses muscles, perclus par une force invisible, refusaient de lui obéir. En proie à la colère contre ce corps qui la trahissait, elle serra vigoureusement le poing. Qu’adviendrait-il de son ami, si elle ne parvenait pas à se jeter dans la bataille ? L’inquiétude envahissant son esprit, elle regarda avec horreur une branche se lever devant eux, prête à frapper. Alors, un miracle se produisit. Constituée d’une bande de gamins tapageurs mais étrangement organisés, la cavalerie pointa le bout de son nez. Bien qu’elle ne comprît pas grand-chose à leurs élucubrations, leur intervention se révéla diablement efficace, et, avec panache, ils les tirèrent de ce mauvais pas. Profondément soulagée, la blonde les laissa se charger des végétaux furibonds. Les paupières closes, elle tâcha de faire abstraction du monde autour d’elle. Quelques semaines auparavant, James lui avait appris un sortilège précieux. Des spirales pourpre s’élevèrent de ses doigts. Malheureusement, elles retombèrent bien vite. La magie n’avait jamais été son point fort, et elle regretta de ne pas avoir écouté davantage les explications de son père. Sa fatigue, néanmoins, avait suffisamment diminué pour qu’elle envisage de prêter main forte aux autres. En partie rétablie, elle eut tout juste le temps de se redresser, avant d’entendre les menaces de la Sorcière. Cependant, ce fut la silhouette de son acolyte qui retint son attention. De ses paroles lumineuses, il lui accordait sa confiance. Malgré les nuages qui s’accumulaient au-dessus de la clairière, son horizon s’éclaira.

D’humeur à dévorer un lion, la fillette agrippa fièrement les phalanges de son interlocuteur. Joyeuse de pouvoir lutter avec son approbation, elle n’eut pas l’occasion de se réjouir outre mesure. Agités par une brise infernale, ses cheveux vinrent fouetter son visage. Digne des plus grandes histoires d’horreur, une créature faite de boue et de feuilles poussa un effroyable rugissement. Les oiseaux des environs s’envolèrent. Derrière elle, la Sorcière bougeait les doigts à la manière d’une marionnettiste. Ragaillardie par le contact de Deccio, Calanthe prit la tête des opérations et avança jusqu’au groupe, qui, en position de défense, paraissait débattre d’une stratégie. D’une voix ferme, elle imposa sa décision. « Distrayez-le. J’ai une idée. On va traiter le problème à la source. » Sans attendre l’approbation de sa requête, elle s’empara du sac de l’un des bambins et y dénicha une corde. Grossièrement, elle la jeta sur son épaule. De son côté, le monstre n’avait pas chômé. Doté d’une force surhumaine, il venait d’arracher un tronc d’arbre, et, férocement, s’apprêtait à le lancer sur les petits. Loin de se douter que la Sorcière n’en était pas une _ et qu’elle ne leur ferait jamais le moindre mal _, ils s’éparpillèrent comme des quilles pour éviter son assaut. Depuis toujours, sa maîtrise des illusions lui servait à éprouver les cœurs, et s’ils se montraient forts, elle les bénissait avec bonheur. Se faire passer pour la méchante de l’histoire lui plaisait ; elle s’assurait cependant de ne jamais aller trop loin. En l’occurrence, considérant les caractères en face, elle s'amusait beaucoup.

Profitant du bazar ambiant, la fillette se pencha à l’oreille du blond pour lui livrer les grandes lignes de son stratagème. « Au prochain passage, on saute. Il va falloir être rapides. » Devant son air ébahi, elle esquissa un sourire chaleureux. Voler aurait été bien trop risqué ; le vent constituait à lui seul un frein, et ils ne connaissaient pas la portée du monstre. Sa taille lui imposait néanmoins le désavantage de la lenteur. « Pour défaire l’ennemi, il faut commencer par l’atteindre. » Lorsque le tronc s’abattit à nouveau sur la troupe, la blonde s’élança. Par miracle, ils atterrirent sur le bois. Ignorant les échardes qui perforaient leurs doigts, ils se servirent du redressement de ce dernier pour rallier l’adversaire. Des éclats de rire accompagnèrent leur glissade. La réception, en revanche, fut quelque peu chaotique. Se redressant tant bien que mal, ils évitèrent les pieds gluants que le monstre levait pour les écraser. Vive comme un reptile, Calanthe bondit, sortant le couteau avec lequel ils s’étaient entraînés un peu plus tôt. D’un geste brusque, elle l’approcha de la gorge de l’assaillante. « Il ne fallait pas toucher à mon copain, vilaine Sorcière. » Elle était d’autant plus contrariée que pour la battre, elle avait dû lui lâcher la main. Depuis la clairière, des exclamations de joie leur parvinrent. Encore méfiante, la fillette désigna la corde à son camarade. En sa compagnie, elle se sentait plus forte qu’elle ne l’avait jamais été, et quand bien même la nature du phénomène lui échappait, elle s’en réjouissait. Impossible de savoir en revanche si le bambin ressentait des effets similaires. « Ligote-la, mais fais attention à ses mains. » Malgré sa bonne volonté, elle n’osait appuyer sa lame contre la chair de la Sorcière. Incapable de distinguer l'illusion de la réalité, elle redoutait de la blesser. Tout ce qu'elle désirait se résumait à la tranquillité. Elle restait une enfant.

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Lun 26 Oct 2020, 23:42

[Q] La fillette et le renardeau | Deccio (Souvenir) Ftvl
« Quand on n'a pas été un enfant, on ne devient pas un homme. »



Suivre le plan d’un autre enfant n’appartenant pas à leur bande ? Et une fille qui plus est. Et puis quoi encore ? C’est l’une des remarques que se fit l’un des membres du groupe. Seto était certainement le moins conciliant de la meute, et ce même en excluant sa misogynie. D’une certaine façon, il correspondait au yang de Virginio ; sa facette opposée. Quand bien même les autres furent en accord avec la procédure adoptée par cette greluche, l’homme aux cheveux blonds bigarrés de blancs usa de sa fourberie naturelle pour lui mettre des bâtons dans les roues, et cela de manière assez discrète pour ne pas se faire incriminer par ses camarades. Toutefois, avec la participation de la grande majorité des garnements, le plan se déroula sans accroc ou presque. La zizanie fut telle qu’il n’eut même pas besoin de bouger le petit doigt. Dans son arrogance, il eut ainsi le loisir de poser tranquillement ses fesses sur un rocher. Sa main appuyée contre sa joue, il bâilla en observant  les interventions de ses confrères. Un gamin traversa l’entièreté de la zone délimitée par la Sorcière pour lui livrer un coup de pied magistral dans l’abdomen. Un autre garçon plaqua ses paumes contre la terre endurcie pour déclencher des secousses, déstabilisant principalement la veuve noire — ses amis s’étant élevés dans les airs en prévision de celles-ci. Le troisième — porté par l’élan du quatrième — virevolta à une hauteur vertigineuse, accablant la nuque de l’ennemie avec son coude lors de sa retombée. Enfin, Zane manipula son épaisse chevelure à l’instar d’une nuée de serpents qui fondirent à l’unisson sur le corps dorénavant tétanisé de la vieille femme.

Les chevilles appréhendées, le chef des enfants les rappela à lui afin de la faire trébucher vers l'avant. Le plan de Calanthe avait fonctionné en partie grâce à la coopération des sept diablotins. Non, des six. Le dernier d’entre eux se présentant une fois la guerre terminée. Timide et couard, il se cacha instinctivement derrière l’un de ses amis. « Vous êtes sûrs qu’elle est inoffensive ? Donnons-lui plein de coups de pied pour s’en assurer. » Déloyal et cruel, en plus de ça. Virginio l’interrompit au moyen d’un croche-pied prémédité. « Calme-toi. C’est pas toi qui décides du sort de nos ennemis. » Effectivement, ni Deccio ni aucun d’entre eux n’avaient le pouvoir de statuer du choix de la sentence. Le serment qu’ils avaient prêté stipulait que le plus valeureux de la bande pouvait laisser libre cours à son imagination ; autrement dit, cette place revenait à leur chef incontesté. Le garçon à la chevelure la plus fournie garda le silence avant de postillonner dans ses mains, grimper sur un arbre et y attraper une liane qu’il noua fervemment en une boucle. « Pendons là. La mort la plus honorable pour une Sorcière des bois est de succomber dans sa forêt. Avoir de la pitié ne nous mènera nulle part. » Le blondinet n’émit aucune objection, car il savait que son grand frère avait raison. Accorder du répit aux méchants, c’était leur octroyer une chance de se venger. Pour se débarrasser du mal, il était parfois nécessaire de se salir les mains.

Seto se réveilla à ce moment, s’impliquant plus sérieusement lorsqu’il vit que la jeune fille n’était pas forcément en accord avec cette décision. Entre ses doigts, il fit tourner une longue chaine à laquelle était relié un crochet. Alerte spoiler : il n’était pas destiné aux gros poissons. « Ferme-là, la blanche colombe. Tu pensais quand même pas avoir un droit de véto sur notre groupe ? Si t’es pas contente, tu peux aussi bien prendre sa place. » Le visage crispé par la haine, il s’apprêta à jeter son arme sur elle lorsque Deccio eut le courage de s’interposer devant lui. Les autres enfants se cantonnèrent à le regarder du coin de l’œil sans rien dire. « C’est pas le moment, Seto. Et puis t’as rien fait du tout pendant qu’on galérait comme des chiens pour l’immobiliser ! » Décrochant une moue sur les lèvres de l’accusé, il n’en perdit pas son toupet pour autant. Faisant une tête de plus que lui, il s’abaissa à son niveau pour agglutiner son front au sien. « T’as un problème, moustique ? Depuis quand t’as des couilles ? Hmm ? » N'étant pas dissuadé, le renardeau maintenait son regard. « Excuse-toi. » « Des excuses ? » L’index sous le menton, les pupilles dans le vide, il fit mine de cogiter. « D'accord. Je te prie de m’excuser… pour ça ! » Appuyant sur les épaules de son camarade pour le contraindre à la gravité, le sournois appliqua un puissant coup de genou dans son estomac. Deccio se tordit aussitôt de douleur, ses jambes repliées vers son visage. « Faites donc ce que vous voulez avec elle. Je m’en contrefous. » Si personne ne souleva d'objection avant et pendant son départ, c’est, car Seto était sans conteste le seul individu à pouvoir faire jeu égal avec Zane quand il prenait les choses à cœur.

La différence, c’est qu’il brillait constamment d’une aura sinistre. Lorsqu’il disparut derrière la lande, le meneur prit l’initiative d’appliquer la liane autour du cou de la Sorcière. Du moins, avant qu’un éclair ne jaillisse à ses pieds, le contraignant à se retirer d’un bond machinal en arrière. La fumée occasionnée laissa penser que cette peste avait réussi à prendre le large. « C’est pas possible ! Mais comment ? Mais pourquoi ?! Ô, cruel fatum qui se joue de nos félicités. Par la Sainte Dée.. » « Mets là en sourdine, Virgin. Elle a pas pu aller bien loin avec ses fractures. On va la traquer et en finir. » Désireux d’achever cette besogne une fois pour toutes, il convia ses amis à se regrouper. En passant auprès de Deccio, il dévia la trajectoire de ses iris jusqu’à Calanthe. « Vous en avez assez fait pour aujourd’hui. On se charge du reste. » Une façon de dire qu’il préférait se délester de boulets trop encombrants. Ces recommandations émises, le chef et ses scélérats disparurent de leur champ de vision en quelques secondes. Peu de temps après leur départ, le blondinet se releva, son bras serré contre la blessure que lui eût infligé son « compagnon ».



1060 mots | Post VII
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Dim 01 Nov 2020, 10:48



La fillette et le renardeau

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L’inconvénient de travailler en groupe est que les décisions ne se prennent jamais individuellement. Face à l’agressivité des bambins envers la Sorcière, Calanthe protesta de tous ses poumons. Comment pouvaient-ils sincèrement envisager de pendre quelqu’un ? Lui donner une correction digne de ce nom _ et la remettre aux autorités, à supposer qu’il y en ait, dans les parages _, voilà ce qu’elle-même aurait choisi. Son père lui avait appris que faire justice soi-même n’était pas une bonne idée, et, dans sa naïveté de petite fille, elle avait fait de cet adage une conviction. Encore jeunes, ses neurones n’arrivaient pas à comprendre qu’un individu puisse vouloir du mal à un autre ; à ses yeux, les méchants étaient simplement égarés. Voir des enfants à peine plus âgés qu’elle envisager de provoquer la mort de quelqu’un la mettait dans tous ses états. Un des membres du groupe prit ombrage de sa manière de contester la proposition du leader. Alors que le rouge lui montait aux joues, elle avisa l’arme entre ses doigts. Allait-il vraiment oser ? Contre toute attente, elle n’eut pas le temps de lui lancer une réplique cinglante. Le Démon de la bande, qui jusque-là ne brillait pas par son courage, fit une intervention magistrale. Impressionnée qu’il vienne ainsi la défendre, la blonde demeura silencieuse. L’émotion s’invita en elle sous une forme tendre et chaleureuse. Une lueur d’admiration passa dans son regard. Malgré la fragilité qui le retenait, elle ne s’était pas trompée sur son compte. Lorsque l’agresseur donna un coup à Deccio, seule sa disparition entre les bosquets l’empêcha de lui en coller une. L’envie de le voir disparaître pour de bon se glissa insidieusement entre ses neurones : ses sourcils se froncèrent. Fréquenter la cavalerie des diablotins ne lui réussissait pas.

Inquiète pour la santé du bambin, la Déchue se retint cependant de se précipiter à son secours. Tant bien que mal, elle avait compris qu’il lui fallait conserver la face _ sinon devant les autres, au moins devant lui-même. Une distraction imprévue détourna son attention. La vile créature, profitant de la discorde ambiante, était parvenue à se libérer et à s’évanouir dans la nature. Exaspérée par leur échec, elle se frappa la cuisse du plat de la main. « Mais dites-moi pas que c’est pas vrai ! » Comment avaient-ils pu relâcher leur vigilance de la sorte ? Lorsque le chef s’approcha d’eux pour leur signifier qu’ils se chargeaient de la retrouver, elle le remercia d’un hochement de tête poli. En un sens, les voir déguerpir la réjouissait. Sans s’encombrer de salutations futiles, elle attendit qu’ils aient levé le camp pour s’approcher de son acolyte d’origine. « Merci de m’avoir défendue. » Reconnaissante, elle tendit les mains vers son ventre blessé pour soulager sa douleur. Quand il s’agissait d’aider quelqu’un, elle parvenait mieux à déployer sa magie. Néanmoins, elle n’eut pas l’occasion d’y recourir. Autour d’eux, le paysage s’effaça. Comme si un Aether remontait le temps, la clairière retrouvait de sa superbe. Le monstre défait retournait à la terre, les branches brisés s’élevaient vers leurs parents, et les couleurs revenaient chatouiller le tableau. Au loin, Calanthe aperçut même un faon qui gambadait joyeusement dans l’herbe. Une vision enchanteresse. Une main se posa sur son épaule. Surprise, elle vit avec horreur le visage de la mécréante au-dessus d’elle. « N’ayez crainte. Je ne suis pas une Sorcière, et je ne vous ferais aucun mal. Je vous ai simplement fait passer une épreuve. » Le sourire sur ses traits invita la fillette à croire en ses propos : elle dégageait une aura apaisante, sensiblement différente du cauchemar quelques instants plus tôt. Avec délicatesse, l’adulte soigna la blessure de Deccio.

D’une excellente humeur, la Magicienne frappa fièrement dans ses mains. D’habitude, elle n’apparaissait pas à ses victimes, et les laissait croire qu’ils avaient vaincu un immense danger. En l’occurrence, elle avait été conquise par la performance des deux bambins, et par l’amitié naissante qu’ils avaient nouée. « Vous avez été extraordinaires, les enfants. En récompense, pour votre courage et votre gentillesse, je mets ma magie à votre service. » D’abord pensive, Calanthe se tourna vers son camarade. Elle ne savait que penser de toute cette histoire ; elle comprenait qu’ils avaient été les héros d’une supercherie, mais les détails lui échappaient. Finalement, elle formula sa demande, le poing serré par la détermination. « Je voudrais quelque chose qui me permette de défendre ceux qui sont en danger. » Un geste du menton approbateur plus tard, la Magicienne fit apparaître une paire de bracelets dans la main libre de la fillette. Brièvement, elle lui expliqua le fonctionnement de ces derniers. Le plus naturellement du monde, la Déchue offrit le second exemplaire au Démon. Elle avait une promesse à tenir. Devant le visage renfrogné du diablotin, leur bienfaitrice s’agenouilla à ses côtés, et posa une main contre son cœur. « Tu es plus fort que tu ne le penses. Qu’est-ce qui te ferait plaisir ? » Si elle n’avait le pouvoir d’exaucer les souhaits, elle jouait des bénédictions pour arriver à des effets similaires. Lorsqu’elle eut accompli sa mission, elle disparut en une brume étincelante. Quelque peu décontenancée par son manège, la blonde battit des cils, examinant le bijou qu’elle portait désormais. C’était invraisemblable. Sa joie de vivre reprit rapidement le dessus, et, d’une voix guillerette, elle invita le Démon. « Viens avec moi. On pourrait bien s’amuser, tous les deux. Mes parents vont à Daletas pour le travail, mais ils ne me surveillent pas beaucoup. J’aimerais bien explorer la ville avec toi. Et puis, Maman a préparé une tarte aux fraises. » Une vie d'aventure les attendait ; sans se l'expliquer, elle voulait la passer auprès de lui. Il suffisait d'un mot pour que le miracle se produise.

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[Q] La fillette et le renardeau | Deccio (Souvenir)

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