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 [Q]Hisse toi à la force de tes bras.

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Babelda
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Babelda
Sam 22 Aoû 2020, 21:04


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Hisse-toi à la force de tes bras


Intrigue : Babelda doit exécuter les basses besognes d'un inventeur plus expérimenté qu'elle.

Babelda donna trois coups à la porte : pour toute réponse, le bruit familier des outils que sa mentore manipulait avec agilité. Le bruit de la ferraille et du four qui chauffe. Sans attendre que Rhéa ne l’invite, la Mousse entra dans la salle : l’inventrice ne répondait jamais, l’esprit bien trop occupé par ses créations. En silence, la jeune femme se dirigea vers la petite table où reposait un plateau en fer. L’assiette était encore à moitié remplie du repas de la veille. Seule la carafe de café avait été totalement vidée. La fausse magicienne avait remarqué que sa tutrice ne se nourrissait que par nécessité : ses repas étaient toujours simples, fades diraient certains, dans des quantités plus que raisonnables. Souvent, l’ingénieure y touchait à peine. Sa disciple se demandait dans quel sens allait la logique : est ce que Rhea ne mangeait pas davantage à cause du manque de goût qu’avaient les aliments, ou bien commandait-elle des aliments sans goûts à cause de son manque d’intérêt pour la nourriture ? Au fil du temps, la plus jeune avait conclut qu’il s’agissait de la deuxième hypothèse : la brune exécrait tout ce qui pouvait lui faire perdre du temps et la distraire de son travail – ou plutôt devrait-on dire de sa passion. Manger faisait partie de ces choses nécessaires mais dérangeantes. Il en allait de même pour l’hygiène. A force, Babelda s’était fait à ces petites manies. Seule exception : le café, que l'hyperactive descendait plus rapidement encore que ses réserves de cigarettes. Maintenant qu'elle était à sec, la bonniche devrait s'assurer de lui en trouver une nouvelle carafe.

Se faisant la plus discrète possible – ce n’était pas vraiment compliqué, avec l’Umbra Ora – Babelda s’empara du plateau et s’apprêta à repartir. « Eh, gamine. » La Caeli ignora l’appel : il ne s’adressait sans doute pas à elle, sans doute Camille était-elle dans les parages – c’était étonnamment calme, mais peut-être était-elle en train de dormir. « Oh, Jane. J’te cause. » héla l’inventrice. Babelda, à l’entente de son deuxième prénom, s’immobilisa, les yeux légèrement écarquillés. Comment Rhea l’avait-elle détecté ?  Ce n’était pas sensé être possible. La Mousse savait que sa patronne possédait une magie puissante, pourtant, elle ne l’avait jamais remarqué lorsqu’elle usait de son don de dissimulation… S’était-elle laissé distraire par ses pensées – les dernières visions qui avaient hanté ses nuits avaient grandement tourmenté la Caeli – au point de laisser son camouflage tomber ?

La Voyageuse pivota pour faire face à l’autre femme. « Oui ? » demanda-t-elle. Pendant quelques secondes, elles se toisèrent, comme si elles se voyaient pour la première fois – c’était évidemment faux : cela faisait plusieurs mois que Jane - 'était ainsi qu'elle se faisait appeler au sein de l'Empire - avait été affectée au service de Rhea. Cette dernière laissa glisser son regard sur la silhouette en face d’elle. Sa disciple était une fille menue, engoncée dans des vêtements dépareillés et trop larges pour elle. Ses cheveux ondulés avaient été rassemblés en une natte qui laissait filer plusieurs mèches rebelles, lui donnant cet air débraillé que l’on prêtait parfois aux savants fous. L’inventrice flanqua un mégot dans sa bouche et tira une grande bouffée, faisant rougeoyer les cendres. « Qu’est-ce que tu fous ? » demanda-t-elle finalement. « Je ramène votre plateau. » Comme pour justifier ses propos, l’interrogée fit un signe de tête pour désigner ce qu’elle avait entre les mains. « Oui je vois ça. Mais qu’est-ce que tu fous ici. » répéta la femme. Jane cligna des yeux. « Je ne comprends pas votre question. » s’excusa-t-elle platement d’une voix monocorde. Rhea inspira une seconde bouffée de fumée. « T’es pas comme les autres toi. » laissa échapper la fabricante en expirant son nuage grisâtre. Babelda déglutit avec difficulté. Elle avait soudainement l’impression que le regard de sa superviseure était devenu plus pointu, plus dangereux. Elle se sentait nue face à elle. Une fois de plus, la subalterne se contenta de garder le silence. « Les autres, ils piaillent sans cesse. Ils restent dans mes pattes et ils essayent d’attirer mon attention avec leurs brics et leurs brocs. Mais toi… » La créatrice chercha ses mots. « Toi, t’es plus muette qu’une carpe. Tu dis jamais rien. T’es à peine plus dérangeante qu’un courant d’air. » Nouveau silence. Cette fois-ci, ce fut la novice qui le brisa. « Vous disiez vouloir rester tranquille. Que je ne vous dérange pas. » se justifia-t-elle. « C’est vrai mais t’es censée apprendre. » Nouvelle pause. « Est-ce que vous désirez que je reste plus dans les parages ? » La remarque arracha un rire rauque à la fumeuse. « Oh ça non. Je préfère les courants d’airs aux grandes gueules. » répliqua-t-elle en secouant la tête et en écrasant son mégot. « Octavius te cherche. Va le trouver. » ordonna la femme en retournant à ses affaires. Jane fit un signe de tête poli avant de se diriger vers la porte. Avant de la franchir, elle s’arrêta un instant. « Je range votre atelier, lorsque vous dormez. C’est comme ça que j’apprends. » informa la brise avant de quitter le laboratoire. Rhea avait arrêté son mouvement quelques secondes : un sourire déformait son visage sévère.
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Babelda
Sam 22 Aoû 2020, 21:28



Hisse-toi à la force de tes bras


« Oui ? Qui est-ce ? » demanda une voix de l’autre côté de la porte. « Jane. Rhea m’envoie. » Un bruit sourd suivit la réponse, comme si un gros objet s’était écrasé au sol. Quelques jurons lui firent écho puis, enfin, la porte s’ouvrit sur Octavius. C’était un homme de petite taille, à l’air perpétuellement surpris. Son front était dégarni et ses yeux s’écarquillaient derrière une paire de lunettes en demi-lune. Il y avait quelque chose en lui qui rappela à Babelda la figure de son père. Barnabé se trouvait pourtant loin d’ici, occupé à vivre sa destinée – parfois, la Rehla regrettait de ne pas pouvoir partager ce destin et de devoir quitter cet homme qu’elle affectionnait tant. Sa place n’était cependant pas à ses côtés. Elle avait d’autres missions plus urgentes à faire ici. « Oh, c’est donc vous, la jeune gagnante de la Coupe des Nations. » La jeune femme sentit son corps se raidir. Elle n’aimait pas qu’on lui rappelle son statut d'Isemssith. Cela lui remémorait l’échec qu’elle avait dû essuyer – elle n’avait pas obtenu la place que ses Rêves lui avaient montré. C’était pour la jeune liseuse d’étoile un véritable complexe. Elle ne pouvait cependant le reprocher à voix haute : personne ne comprendrait qu’elle soit déçue d’avoir remporté la première place. On pourrait cependant lui pardonner une once de timidité voire de modestie : Jane se contenta d’acquiescer lentement. « J’étais très curieux de faire votre rencontre. Après tout, vous êtes jusqu’ici la seule vainqueur de notre Empire. Un peu décevant pour les nôtres, de ne pas avoir vu d’autres membres sur le podium. » A mesure qu’il parlait, l’inventeur scrutait son interlocutrice. Et plus il l’observait, plus il semblait désenchanté. Sans doute était-il déçu. Il avait du s’attendre à quelqu’un de grandiose et, finalement, il se retrouvait face à un individu tout à fait banal. « Ceci dit, il s’agissait de l’épreuve requérant le plus de logique, n’est-ce pas ? Quoi que l’épreuve des Sorciers semblait particulièrement prometteuse également mais… Enfin bon. Entrez donc ! »

La Mousse s’exécuta sans broncher. La laboratoire d’Octavius n’avait rien à voir avec celui de Rhea. Là où la femme évoluait dans une véritable fournaise, univers de métal et de fonte, le petit mage s’épanouissait dans un monde d’enchantement. Littéralement : ses fabrications étaient toutes ensorcelées. Ici et là, on apercevait un objet voler, d’autres crachotaient des lueurs étranges. L’atmosphère différait mais on pouvait retrouver cette touche rassurante d’effervescence cérébrale : il s’agissait indéniablement de l’antre d’un inventeur.

« J’ai besoin d’une assistante pour la journée. » expliqua le mage en refermant la porte. « Je travaille sur un projet qui me prend beaucoup d’énergie et je n’ai plus le temps de m’occuper du reste. » Il régnait effectivement une pagaille sans nom qui n’était pas propre à l’endroit. « Peux-tu t’occuper du ménage ? » Jane acquiesça de nouveau, silencieuse : elle n’était pas spécialement bavarde et, à vrai dire, son caractère s’était encore introverti au contact de sa patronne. « Eh bah. T’es pas causante toi. Ça doit être pour ça que Rhea t’apprécie autant : je l’ai jamais entendu aussi peu se plaindre d'une apprentie ! Elle se souvient même de ton nom, c'est pour dire ! » La remarque fit sourire la disciple : un simple frémissement du coin de la lèvre, qui s’éclipsa aussi vite qu’il était apparu. La Mousse s’approcha d’un premier bureau, recouverts de livres et de parchemins. Babelda aimait être au service de ces inventeurs. Les tâches qu’on lui demandait étaient souvent ingrates mais parfois, elle avait l’opportunité de tomber sur ces pépites de savoir. Lire les lignes de ces carnets ou observer les croquis et les schémas qui illustraient les explications était comme entrer dans la tête de ces génies. On pouvait y décrypter leurs pensées, s’abreuver de leurs connaissances et de leur savoir. Parfois, on y voyait également leurs faiblesses : des lignes raturées, des pages arrachées et pliées en boules ou, plus rarement, des prototypes réduits en miette. Il s’agissait d’un privilège : en tant que Rehla, la Tilluiel était capable de lire l’Avenir de tous ces gens, de connaître leurs secrets, de deviner leurs plus intimes dessins… Mais pouvoir les découvrir ici avait quelque chose de plus authentique. Avec un air curieux qu’on ne lui voyait pas souvent, l’apprentie pencha légèrement la tête pour glisser un coup d’œil aux notes rédigées manuscritement. « Ah non, très chère : occupez-vous plutôt du linge sale. » l’arrêta l’inventeur.
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Babelda
Sam 22 Aoû 2020, 21:40



Hisse-toi à la force de tes bras


Babelda marchait au milieu de la foule, invisible. Elle avançait, anonyme, au travers des visages inconnus. Elle laissait ses oreilles flâner ici et là pour intercepter les conversations des badauds. Quelques discussions étaient en langue commune mais la fille aux cheveux clairs se désintéressait rapidement de ces palabres. L’érudite préférait davantage s’intéresser aux dialogues qui se déroulaient dans le patois local. C’était une activité fort divertissante. La curieuse aimait à découvrir ces nouvelles consonances, se faire happer par les sons mélodieux du Valærian ou les éraflements disgracieux du Zul’Dov. Elle ne comprenait pas la majeure partie de ce qu’elle entendait mais parvenait parfois à capter un mot familier qu’elle avait pu étudier par le passé. Le reste du temps, elle imaginait les tenants et aboutissants de ces conversations, se laissant guider par son imagination. Ce jour-là, c’était le Zarakh qui la berçait. Demain, ce serait sans doute un autre langage : les Enfants de Yanna étaient des nomades. Ils ne restaient jamais bien longtemps au même endroit, les rendant presque inatteignable. Ceux qui désiraient rejoindre l’Empire devaient se montrer persévérants. Les trouver demandait beaucoup de patience : il s’agissait d’un véritable jeu d’enquête. Les suivre à la trace était ardu, leur piste étant rendue plus difficile à cerner à cause de leur technologie. Les Navires n’accueillaient pas tant de nouvelles recrues que cela.

« Puis-je vous aider ? » demanda un homme en avisant les bras chargés de la visiteuse. Babelda devait avoir une mine épouvantable. Le climat glacé de la cité vampirique avait forcé la Mousse à revêtir un manteau pour ne pas mourir de froid. Il était légèrement trop grand pour elle : le bas du vêtement traçait une traînée derrière elle, recouvrant les empruntes de ses bottines trempées et gorgées d’eau – c’était une sensation plutôt désagréable mais la jeune femme faisait de son mieux pour ignorer ce désagrément : elle n’avait pas terminé sa mission. En plus de sa tenue, son visage était victime des rafales de vent humide : sa peau était devenue rougissante et son nez s’était mis à couler, la forçant à renifler de façon disgracieuse. En comparaison, l’homme qui s’était adressé à elle ressemblait à un véritable prince des Neiges, avec ses cheveux diaphanes et sa peau laiteuse, ses yeux bleus perçants aux longs cils translucides. Il se fondait parfaitement au paysage immaculé. Babelda renifla une fois de plus. « Oui, merci. Sauriez-vous où je pourrais trouver un… » Babelda loucha sur le papier qu’elle avait maladroitement retiré de la poche de son manteau : ses doigts étaient engourdis par la basse température, rendant ses gestes douloureux et malhabiles. La brunette articula le drôle de nom qu’avait inscrit Octavius sur sa liste de course. « Oh, mais bien sûr ! » s’exclama l’inconnu. « Laissez-moi vous y conduire. »

Babelda fronça les sourcils mais suivit l’homme. Au bout de quelques minutes, ils quittèrent Minea, l’allée centrale, pour gagner des ruelles plus étroites. Moins bondées. L’endroit n’avait rien de rassurant. Pourtant, la Rehla se laissa guider. L’impasse où la conduisit l’homme était déjà occupée par deux autres individus : l’un était un homme, l’autre une femme. « Mmh… » laissa échapper la Voyageuse avec une moue contrariée. Des Vampires. Forcément. Agacée, elle releva son regard émeraude sur le malotru. « Je suppose que ce serait trop vous demander de m’indiquer où se trouve ce que je cherche, maintenant ? » L’homme esquissa un sourire carnassier. « Ça ne te servira plus à rien, maintenant. » lâcha-t-il. La victime soupira, lasse. Un clignement d’œil plus tard, elle avait disparu, à la consternation de ses assaillants. Elle était toujours là, devant eux, seulement, ils étaient incapables de la voir ou de la sentir : sa présence était devenue indétectable.


Babelda ouvrit la porte du laboratoire. Ses bottes produisaient un son spongieux à chacun de ses pas. Ereintée, la Mousse déposa le panier rempli des emplettes qu’elle venait de faire pour l’inventeur. Son regard était courroucé, seul éclat d’expression sur ce visage lunaire : son altercation avec les buveurs de sang l’avait mise de mauvais poils ; elle détestait cette espèce. Octavius, penché sur son bureau, ne put pas le remarquer. La colère de la larbine était pourtant dirigée contre lui : la jeune femme savait pertinemment qu’il possédait des artéfacts magiques qui lui auraient permis d’affronter les intempéries sans souffrir du froid. Il ne lui avait rien proposé pour autant. « Oh, tu es là ?! Je ne pensais pas te revoir de sitôt. A vrai dire, je ne savais pas si je te reverrais tout court. Les habitants de Merhoneän sont parfois si mesquins que… Enfin, c’est formidable. » Babelda fronça les sourcils. L’image rassurante qu’elle avait ressentit en le voyant la première fois venait de disparaître pour de bon. Octavius n’était qu’un filou trouillard qui l’avait envoyé faire sa besogne à sa place.

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Babelda
Sam 22 Aoû 2020, 22:21


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« Bien, maintenant mets-toi là et ne bouge plus. » ordonna l’inventeur en indiquant à sa servante un pan de mur vierge. La Mousse termina de sangler son casque sur sa tête puis se positionna à l’endroit désigné. Babelda avait un air maussade sur le visage : elle était passablement agacée, et ce depuis plusieurs jours maintenant – depuis qu’elle avait été affectée au service du vieux Mage, à vrai dire. Son humeur s’était peu à peu dégradée, jusqu’à atteindre ce stade d’énervement discret. Son grade ne lui permettait pas de se rebeller ni de ne plaindre : elle n’avait d’autre choix que d’obéir aux injonctions de son nouveau maître sans émettre la moindre protestation. De toute manière, il n’était pas réellement dans sa nature de s’emporter dans de grands fracas. La Rehla était davantage une goutte parmi la rivière, qui se laisse porter jusqu’au fleuve : son parcours est parfois tourmenté mais à force de suivre le rythme, tout rentre dans l’ordre. Son tempérament n’était pas forgé de tempêtes. Malgré tout, son mécontentement ne pouvait rester totalement dissimulé : son expression laissait filtrer cette pointe d’expression qui la trahissait. Fort heureusement, son supérieur ne semblait pas s’y intéresser – ou peut-être ne remarquait-il tout simplement pas ce subtil changement, trop absorbé par ses affaires. Ces narines gonflées et le léger froncement de sourcil lui semblait témoigner davantage de crainte que d’exaspération. « Ne t’en fais pas. Tout est sous contrôle. Tu ne risques rien. Du moins, tant que tu restes immobile. Et que tu fais ce que je te dis, quand je te le dis. Mais pas d’inquiétude à avoir, n’est-ce pas ? » Babelda se retint de soupirer. Elle avait vu. Elle savait ce qui s’apprêtait à se passer. Ce ne serait pas agréable pour elle. Ce serait un mauvais moment à passer mais elle devait le supporter. Elle se demandait vaguement pourquoi son Destin n’avait pas pu lui épargner ces quelques moments désagréablement douloureux. La Caeli se mordit l’intérieur des joues puis serra les fesses, crispée à l’idée de ce qui allait lui arriver. C’était un mal nécessaire. Sans sa souffrance, le Mage ne pourrait pas vérifier le bon fonctionnement de son invention. Et sans cela, les conséquences de son utilisation pourraient se révéler désastreuses. La fille aux cheveux châtains se plut à imaginer que quelqu’un d’autre servait de cobaye à sa place, tandis qu’elle parcourait les lignes des notes remplies d’idées révolutionnaires.


Rhea releva la tête. Un sourire moqueur habillait son visage. « Alors ? Comment c’était ? » demanda-t-elle à sa disciple. Pour toute réponse, la timide fonça directement vers l’établi, sous le regard surpris de la plus âgée. Elle avait une dégaine particulièrement déplorable, même pour elle. Ses jours de service auprès du vieil inventeur semblaient l’avoir usé plus que de raison. D’épais cernes cerclaient ses yeux vifs. Sans doute sa mauvaise mine avait à voir avec les expérimentations qu’ils avaient fait ensemble – et qui avaient débouchés sur quelques crises de nerfs internes ainsi qu’un éclat de larmes. Babelda s’empara du bidet rempli d’un liquide noir : l’odeur de café enivra son nez. D’une main tremblante, la jeune femme se servit une tasse et la but d’une traite. Ce comportement inhabituel déclencha l’hilarité de la brune. « Si terrible que ça, hein ? » lâcha-t-elle alors que la brunette entamait une seconde tournée d’excitant. « Je dois t’avouer que je pensais pas que tu t’accrocherais aussi longtemps… » Les plus faibles ne tenaient guère plus de quelques jours. La plupart atteignaient la semaine complète. Les plus effrontés s’entêtaient jusqu’à deux voire trois semaines – jamais un mois complet, ceci dit. Babelda s’était forcée à tenir bon jusqu’à ce que ses visions ne la tiennent plus à coopérer avec cet individu : une semaine et demie. C’était déjà un record, pour quelqu’un d’aussi chétif qu’elle. « Mais je pense que tu as atteins ta limite, gamine… Demain, ça ne servira à rien d’y retourner. Il se trouvera un autre larbin. » La Rehla remercia mentalement la créatrice. Jane ne put se le permettre, cela aurait sans doute été trop impoli. Elle se contenta d’acquiescer. « D’accord. » Après avoir terminé sa tasse, l’apprentie s’était éloigné de sa mentore pour regagner le centre de l’atelier.

« Bon. Avec tout ça, t’as pris du retard. Puisque t’es à nouveau là, rends-toi utile. Range-moi ce bordel. Commence par mon bureau, là-bas. » Une pile de croquis attendait la curieuse.

737mots


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