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 [Q] La vie ne tient qu'à un fil. | Solo

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Lun 01 Juin 2020, 20:46

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Intrigue : Passionnée depuis l'enfance par les vêtements, Calanthe fait appel aux contacts de son père pour devenir couturière. Elle rencontre alors un professeur aux méthodes inhabituelles, et cherche à le convaincre qu'elle sera une élève digne de son enseignement.

Soucieuse, la jeune femme tenait son poing suspendu dans les airs. Il lui fallait s’armer de courage pour la demande qu’elle s’apprêtait à formuler ; elle ne voulait pas que sa requête devienne un caprice de plus. Depuis quelques jours, elle se rendait désagréablement compte du fardeau qu’elle représentait pour les siens, et, à la manière de sa demie-sœur, elle avait décidé de se prendre en main. Considérant son caractère, la partie était loin d’être gagnée. Prenant une longue inspiration, elle frappa contre le bois et fit pivoter le battant sur ses gonds. « Je pourrais te demander une faveur ? » Sans songer une seconde qu’elle le dérangeait peut-être dans son travail, elle entra dans la pièce. Elle ignorait que pénétrer nonchalamment dans la chambre d’un Luxurieux comportait des risques. Le froissement des draps lui fit sauter aux yeux cet oubli. Les joues cramoisies, elle détourna le regard. « Pardon. Je ne voulais pas t’interrompre. » Pas le moins du monde gêné par la situation, James se redressa. Son torse se soulevait à un rythme suffisamment soutenu pour que la nature de ses activités ne fasse aucun doute. D’un geste désinvolte, il balaya son excuse. « Ce n’est rien. Tu sais que je te décrocherais la lune, si tu le demandais. Qu’est-ce que tu veux ? » Incapable de se montrer aussi spontanée, elle s’abîma dans la contemplation du tissu. Son embarras eut le mérite de chasser toute inquiétude de son esprit. « Je voudrais devenir couturière. » Ravi de l’entendre manifester un intérêt pour un métier digne de ce nom, James enfila un peignoir et se releva. La faire travailler dans son magasin pouvait malheureusement lui causer des ennuis. Il n’aurait pas aimé qu’on l’accuse de favoritisme, et les caprices de sa fille mettraient hors d’eux ses employés. Cependant, il ne manquait pas de ressources. « Hm. Je crains de ne pas avoir le temps d’être ton professeur. Mais je connais quelqu’un qui accepterait peut-être. » Soulagée de sentir que son idée lui plaisait, la Déchue esquissa un sourire. Que son père prenne les choses en main la rassurait.

Le grand jour était venu. Quelques lettres échangées entre James et un couturier dont elle ne savait pas même le nom avaient suffi à décider ce dernier. La possession d’une boutique de lingerie impliquait de nombreux contacts dans le milieu, et si son paternel n’avait pas choisi le plus délicat de ses confrères, il espérait que son caractère acariâtre dissuaderait l’aspirante de faire des siennes. Les doigts appuyés contre la fenêtre, Calanthe partageait les espoirs du Déchu. Son souffle formait sur la vitre un nuage de buée aux contours irréguliers. La nervosité électrisait sa peau. Compter sur le soutien de Serena se révélait impossible : sa demie-sœur travaillait aux champs, et elle ne devait pas rentrer avant plusieurs semaines. La solitude accentuait l’emprise angoissante de l’attente. Confier ses inquiétudes à James ne lui vint pas un instant à l’esprit. Il avait eu l’air si heureux de pouvoir lui venir en aide qu’elle n’osait pas lui dire son manque déplorable de talent. Elle espérait seulement que le professeur qu’il avait fait venir ne s’apercevrait pas instantanément de la supercherie. Dans le cas contraire, la honte la renverrait probablement vers la dépression : elle était encore fragile. La porte du salon s’ouvrit, laissant place à l’invité. « Severus, je vous présente ma fille. » Dépourvu de tout sens de la politesse, un homme au crâne luisant s’approcha d’elle, la toisant de haut en bas. Une lueur de mépris étincelait dans ses prunelles : ce n’était pas la première fois qu’on le demandait pour un tel travail, et jouer les professeurs ne lui avait jusque-là apporté que déception. « Qu’est-ce qui te plaît, dans la couture ? » Intimidée par la présence de son éventuel mentor, la jeune femme répondit bêtement. Selon toute vraisemblance, le stress lui grillait la cervelle. « J’aime les vêtements. » Son interlocuteur haussa un sourcil. Il détestait perdre son temps, et malgré l’estime qu’il éprouvait envers James, il ne tenait pas à s’encombrer d’une apprentie idiote. Cependant, il se voyait mal tourner les talons sur une mauvaise impression. La sournoiserie lui souffla une idée. D’un mouvement ample, il déchira l'un des rideaux de la pièce. « C’est loin d’être suffisant. Montre-moi donc comment tu te sers d’une aiguille. » Habitué aux méthodes de l'individu, James hocha la tête doucement. Les doigts tremblants, Calanthe s’empara du tissu. Elle s'attendait à tout, sauf à un examen : la chance n'était visiblement pas de son côté.

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Mar 02 Juin 2020, 19:57

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Puisqu’elle n’avait d’autre consigne que de faire étalage de ses aptitudes inexistantes, la jeune femme prit quelques secondes pour décrocher le rideau. La déchirure s’étendait en une diagonale ravagée sur quelques centimètres. Le cerveau en ébullition, elle s’installa à la table. Par où commencer ? Hésitante, elle décida finalement qu’il valait mieux s’attaquer d’abord à l’endroit où, presque intacte, la fibre s’efficholait. James et Severus ne pipaient mot. Décidant d’oublier la surveillance dont elle était l’objet, elle saisit l’aiguille. Par chance, de vagues souvenirs lui revenaient en tête ; quelqu’un lui avait un jour appris à s’en servir. Trop imprécise pour lui servir du début à la fin, la réminiscence lui permettait néanmoins de savoir dans les grandes lignes ce qu’elle devait faire. Concentrée, elle remarqua que la bobine dont elle disposait n’était pas la bonne. « Vous vous êtes trompé. J’ai besoin d’un fil blanc. » Le professeur s’excusa, lui délivrant ce qu’elle désirait. Bien que la blonde soit affreusement longue à préparer son matériel, elle avait évité son premier piège. Cependant, il était trop tôt pour se dire qu’il pouvait faire quelque chose d’elle. Les sourcils froncés, Calanthe cherchait à passer le fil dans le chas. L’opération se révélait plus délicate que prévu : ses phalanges s’agitaient nerveusement. La peur de l’échec risquait fort de lui ôter toute chance de réussite. Le brin de coton s’obstinait à échapper à son emplacement d’origine. Il lui fallut plusieurs minutes avant de parvenir, enfin, à l’enfiler convenablement. Triomphante, elle brandit l’objet au-dessus de la table.

La joie s’évanouit sitôt que la blonde réalisa l’existence d’un nouveau problème. Il lui fallait à présent réparer la fibre sans la déchirer davantage. Craintivement, elle la transperça à quelques centimètres du bord, et manqua se piquer le doigt. À son grand soulagement, seule l’épingle ressortait de l’autre côté. Soigneuse, elle rassembla les pans du tissu et les pinça d’une main. L’épaisseur ainsi formée lui causa des tracas : elle ne parvenait pas à la perforer, et malgré ses efforts, la fibre demeurait imprenable. Au bout d’un certain temps, elle trouva une parade et replia le rideau sur lui-même, superposant les parties abîmées. Un refrain se dessinait. Élevant la prudence en vertu, elle exécuta le moindre mouvement en pensée avant de le matérialiser. Attentive à son ouvrage, elle ne vit pas le temps passer, et eut vaguement conscience que son père s’échappait de la pièce. À plusieurs reprises, elle essuya ses phalanges sur un chiffon ; une agilité aussi défaillante que la sienne impliquait quelques piqûres mineures, et bien que la chose ne fut pas douloureuse, sa maladresse l’agaçait. Lorsqu’enfin elle estima son travail achevé, elle se tourna vers le juge. Irrégulière, la couture remplissait néanmoins son office. L’air perplexe du professeur inquiéta la Déchue. « Ce n’est pas si mal. J’ai un client à aller voir, d’ici quelques jours. Venez donc avec moi. Si vous parvenez à le satisfaire, je vous engagerais. » Le coeur de Calantha rata un battement. Venait-il réellement de lui laisser une chance ? Au comble du bonheur, elle délaissa le rideau et lui prit les mains. « Merci de votre confiance. Je tâcherais d’être à la hauteur. » Tant que l’envie ne croiserait pas sa route, elle pouvait raisonnablement envisager de réussir.

Le voyage se révéla plus plaisant qu’elle ne l’aurait cru. Tirée par des chevaux, la carriole représentait un moyen de transport relativement confortable, et la Déchue eut l’occasion de découvrir le caractère de son futur mentor. Misanthrope, tout ce qui ne touchait pas à la couture l’exaspérait vite. Dès le début, elle prit l’habitude de ne pas le solliciter sans une bonne raison. James lui ayant fourni une bourse pour l’occasion, il ne regarda pas à la dépense, et ils passèrent fréquemment la nuit dans des auberges. Trésor de Severus, l’attelage transportait une malle. Elle contenait une quantité invraisemblable de tissus. En plongeant la main à l’intérieur, la jeune femme y dénichait tantôt de la soie, tantôt du coton. Son vocabulaire s’enrichissait d’une myriade de teintes. Matières et couleurs se succédaient sans qu’elle ne parvienne à tout retenir. Avide de connaissance, elle répétait longuement les explications, s’efforçant de garder l’essentiel en mémoire. Cependant, Severus ne se formalisait pas de la fréquence de ses oublis : causer chiffons le rendait euphorique, et il appréciait la pertinence des questions de sa potentielle apprentie. En dépit de la cordialité qu’il montrait à son égard, son instinct reprit le dessus lorsque la ville se dressa à l’horizon, et il cessa de répondre à ses questionnements. Après plusieurs semaines, ils arrivaient enfin à Amestris. La tête chargée d’informations dont elle ne savait que faire, Calanthe ne fit même pas attention à la cité.

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Sam 06 Juin 2020, 15:04

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Habitué des lieux, Severus ne prit pas la peine de lui organiser une visite. Impressionnée par la noirceur des bâtiments, la jeune femme se sentait affreusement vulnérable. Quelle mouche l’avait piquée de voyager avec un quasi inconnu ? L’inquiétude creusant son estomac, elle se camoufla sous une large capuche, dans l’espoir de ne croiser le regard de personne. Le professeur la conduisit à son atelier et la fit patienter à l’intérieur. Formellement invitée à ne pas sortir, elle suivit son conseil sans broncher. Une quantité invraisemblable de tissus dont elle ne connaissait pas même le nom se bousculaient sur des étals. Au fond de la salle, elle discerna une machine à tisser, et un foisonnement d’instruments inconnus. Elle avait envie de presser le propriétaire de questions ; il ne lui en laissa pas l’occasion. Sitôt revenu, il l’entraîna à travers les ruelles de la cité. Ils s’arrêtèrent devant une maison, que sa simplicité rendait sinistre. Réprimant un frisson, la Déchue vit Severus déposer une malle, plus petite que celle de la carriole, à ses côtés.  « Je reviendrais te chercher ce soir, j’ai à faire. Tâche de ne pas décevoir mon client. Il n’est pas connu pour sa sollicitude. » Sans s’encombrer de davantage d’explications, il la planta sur le perron. Sciemment, il oublia de lui dire que le client en question passait régulièrement commande, et qu’il avait eu l’audace de lui demander une ristourne. Elle était sans le savoir sa vengeance.

Le poing serré, Calanthe frappa à la porte. Un individu aux traits tirés vint lui ouvrir, l’air vaguement surpris. S’armer de tout son courage lui fut nécessaire pour parvenir à ouvrir la bouche ; elle ne savait comment se présenter. « Bonjour. Je viens voir Monsieur Leone. » Sans lui fournir de réponse, il s’empara de son bagage et l’invita à entrer. Attentive à ne pas être indiscrète, elle garda les yeux baissés jusqu’à ce qu’ils arrivent à destination. Assis à son bureau, le client de Severus rédigeait une lettre, les sourcils froncés. À leur arrivée, il fit signe à son subordonné de disparaître et contourna le bureau pour la rejoindre. Une certaine prestance émanait de lui. Le plus naturellement du monde, il se déshabilla. La gorgée nouée, elle se mordit l’intérieur des joues pour ne pas piquer un fard. « Ne perdons pas de temps. Votre employeur commence généralement par les mesures du bas. J’imagine que vous procéderez de la même façon ? » Heureuse de le voir prendre la situation en main, elle acquiesça sans broncher. Ouvrant la malle, elle dénicha un ruban marqué au crayon et un carnet encore vierge. Par chance, elle se rappelait les points à identifier. Sagement, elle s’agenouilla devant le Sorcier. Le tissu s’enroula autour de sa cheville. Vingt-deux centimètres. D’une main, elle maintint le mètre, se saisissant de l’autre d’un stylo. Ce fut le moment que choisit sa molle cervelle pour lui rappeler qu’elle ne savait pas écrire. Embarrassée, elle envisagea d’apprendre les chiffres par coeur. Elle craignait que sa mémoire ne lui fasse défaut.

Loin d’être né de la dernière pluie, le Sorcier remarqua instantanément son manège. Exaspéré, il tendit les doigts pour récupérer la plume. « Donnez-moi le carnet, je vais m’en occuper. Je n’ai pas toute la journée devant moi. » Il avait beau s’être trouvé dans une situation similaire par le passé, il n’appréciait pas que Severus lui ait envoyé une débutante, et sa contrariété se manifestait par un agacement bien réel. De toute manière, la compassion ne comptait pas parmi ses vertus. « Je vous remercie, Monsieur. » Reconnaissante, la jeune femme lui offrit volontiers l’objet et s’attela à la tâche. Enrouler le ruban, lire le chiffre, le donner à voix haute. La répétition rendait l’ouvrage plus facile, et, parvenue à son torse, elle avait la sensation de mettre moins longtemps à déchiffrer les marques sur le mètre. Lorsqu’elle eut terminé, le blond retourna à sa rédaction. Le papier entre les doigts, il leva la tête vers elle. « Quelque chose ne va pas ? » « Nous devons encore choisir les couleurs et les tissus, Monsieur. » « Arrêtez de m’appeler comme ça. Vous m’exaspérez. » « Bien, Mons… Bien. » « Inutile de vous tracasser. Je porte toujours la même chose. » Ne sachant pas où se mettre, la blonde rangea ses affaires dans la malle. Mal à l’aise, elle envisagea de rentrer ; elle ne se remémorait rien du chemin emprunté plus tôt. « Puis-je attendre ici le retour de mon professeur ? » D’un geste qui en disait long sur son désir de communiquer avec elle, il approuva sa requête. « Faites comme bon vous semble, mais ne me dérangez plus. » S’efforçant de se faire discrète, un chatoiement dans le coffre attira son attention.

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Dim 07 Juin 2020, 10:03

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Dans l’art de devenir invisible, Calanthe faisait partie des expertes. Contrainte à l’immobilisme durant sa convalescence, elle possédait une prestance négative, et il ne fallait pas longtemps pour oublier sa présence. Concentré sur sa tâche, l’homme ne gardait d’elle qu’un souvenir terne. Silencieuse, la jeune femme s’attelait à un ouvrage futile ; elle n’avait pas su résister. L’élégance de son client lui donnait l’envie de coudre quelque chose, et bien que la teinte du tissu sous ses doigts puisse surprendre, elle imaginait clairement le résultat. Il serait superbe. Seulement, la réalité s’éloignait considérablement de sa projection. Attentive à ne pas se piquer, la trajectoire de son aiguille dévia malencontreusement. Les yeux fixés sur les points naissants, elle manqua de prendre une vue d’ensemble. Son expérience toute fraîche lui imposait des erreurs que la patience lui aurait évitées. Son apprentissage débutait à peine, et visiblement, elle avait présumé de ses forces. Sans se décourager, les épingles mordaient la soie à un rythme épouvantable. Par chance, la qualité de la fibre lui permettait de résister aux assauts maladroits de la débutante, et la couture se dessinait peu à peu, suivant des courbes peu communes. Subitement, la Déchue se rendit compte qu’elle ne savait pas adapter les mesures. Le carnet contenait des trésors qu’elle ne pouvait utiliser. Désappointée par sa découverte, elle s’interrompit. Rassembler la soie pour former une chemise n’était franchement pas à sa portée. Qu’avait-elle cru, elle qui ne connaissait de la couture que ses fantasmes ? L’une de ses aiguilles chuta au sol.

Alerté par le bruit, l’homme releva la tête. Perplexe, il observa son manège un instant, avant de hausser un sourcil. « Que faites-vous ? » Les joues en feu, Calanthe sentit la honte envahir son visage. Elle n’avait pas pensé une seule seconde à montrer le fruit de son travail à celui auquel elle le destinait. Gâché par son inefficacité, le tissu pendait entre ses doigts. Que penserait Severus de son insolence ? Son père paierait sans doute les pots cassés ; elle ignorait si elle parviendrait à affronter son regard lorsqu’il serait informé de son échec. Piteuse, elle tendit la chemise déformée devant elle. « J’ai voulu préparer quelque chose pour vous, mais ce n’est pas présentable. » Intrigué par le rose qu’elle avait choisi, le Sorcier ne lui rit pas de suite au nez. Quand bien même elle ne possédait pas le moindre talent, son volontarisme ne faisait aucun doute. Avec nonchalance, il déboutonna son haut pour la seconde fois, et enfila tant bien que mal son ouvrage inachevé. Incontestablement, elle ignorait comment tailler les vêtements. « Vous n’avez pas exactement un don pour les travaux manuels. J’ose espérer que ma commande ne sera pas dans le même état. » L’image que lui renvoyait le miroir le troublait. La teinte illuminait son visage avec subtilité. Pensif, il garda le silence quelques instants. « Je suis désolée. Je vous promets de ne pas y toucher. » Les yeux obstinément baissés, Calanthe retenait le sanglot qui effleurait sa gorge. Ses iris se couvrirent de larmes. Elle avait été pitoyable du début à la fin. Jamais elle ne serait couturière, elle en avait à présent la certitude.

Les mains tendues pour récupérer la source de son désarroi, elle n’eut pas droit au charme de la soie contre ses phalanges. Le client lui adressa un regard dont elle ne discerna pas la signification. Son commentaire lui parut plus obscur encore. « Je garde ça. » Il rangea son désastre dans un tiroir du bureau et prit place en face d’elle. S’efforçant d’oublier sa déception, elle rangea précipitamment le reste du tissu dans la malle, et la ferma pour de bon. Pantoise, elle se servit du coffre comme d’un siège. Le temps lui paraissait soudain affreusement long. « Je suis curieux. Depuis combien de temps exercez-vous ? » « Je n’ai pas encore été engagée. Vous êtes mon test. » La franchise innocente de son interlocutrice confirmait l’intuition du Sorcier. Severus paierait. Pour l’heure, il ne pouvait jouer les fines bouches, mais les affaires reprendraient vite, et il trouverait le moyen de lui faire regretter son geste. D'humeur bavarde, il discuta de tout et de rien avec l'apprentie. Lorsque la porte de la maison s’ouvrit enfin,. Severus lui offrit une raillerie à peine dissimulée. « Tiens donc. Tu n’as pas été mise à la porte. Je ne m’attendais pas à ça. » Pour autant, elle ne pouvait dire que son travail avait été un succès. Muette, elle espérait que le client ne mentionnerait pas sa prise d’initiative : elle savait que le professeur serait furieux qu’elle ait ainsi gaspillé un tissu si précieux. « Votre apprentie s’est montrée… Capable. » Le blond hésita sur le dernier mot. Il ne pouvait décemment pas lui faire un compliment. Circonspect, le couturier darda ses yeux de fouine sur sa future élève. « Formidable. Je vous ferais parvenir votre commande lors de mon prochain voyage. » N’ayant visiblement ni le temps ni l’envie de prolonger la conversation, il s’empara du coffre avec empressement et tourna les talons. Sur le perron, la voix de Monsieur Leone lui fit marquer une pause. « Severus ? Laissez-la choisir les couleurs. » Le visage de Calanthe s’éclaira : son premier client venait d'approuver son ouvrage. Elle travaillerait d'arrache-pied pour le satisfaire.

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