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 Sabots | ft. Priam

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Eerah
Æther des Bergers et des Wëltpuffs

Æther des Bergers et des Wëltpuffs
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Eerah
Dim 22 Mar 2020, 15:25



Les sabots dans la vase, Khor se redressa en soupirant, essuyant la sueur sur son front d’un revers de l’avant-bras. L’eau lui montait jusqu’à mi-cuisse, et la fourrure trempée alourdissait ses pas. Un peu plus de deux décennies de labeur avaient endurci ses muscles, et chaque fois qu’elle arrachait une patte à l’emprise du lac, on les voyait rouler distinctement sous le cuir bruni de sa peau. L’Eversha cligna des yeux doucement, et ses pupilles rectangulaires suivirent le chemin de tiges qu’il lui restait à récolter. La culture s’étendait sur une dizaine de mètres en longueur, et s’enfonçait de moitié moins vers le centre du lac ; quand elle avait reçu l’autorisation de s’installer, c’était à peine si on ne lui avait pas ri au nez. Personne ne pensait que quoi que ce soit arriverai un jour à pousser dans ce genre de sol – et à raison, car avant qu’il ne s’attelle à sa création, ce n’était pas le cas. Æther était une occupation qui avait le mérite de vous laisser pas mal de temps libre : Eerah, un demi-siècle plus tôt, avait décidé de mettre au point un nouveau type de plante destinée à nourrir le bétail – une plante avec plus de goût que le fourrage que les humanoïdes imposaient depuis la naissance de l’élevage. Il avait commencé avec un champ du côté de Bouton d’Or, sous l’apparence d’un Réprouvé. L’expérience n’avait pas été concluante, et il s’était avéré plus tard qu’à défaut de nourrir les Wëltpuffs, l’herbe en question se fumait remarquablement bien. Alors il avait fait mine de mourir au combat, et l’un de ses fils avait repris l’affaire. Ici, aux Jardins, elle était née sous le nom et l’apparence de Lucrecia, une Eversha chèvre. Elle avait pris beaucoup de plaisir et d’amusement à composer les traits de son visage mutin, de son nez retroussé et des tâches de rousseur qui naissait sur le haut de ses pommettes ; ses oreilles pointues, et les cornes arquées qui partaient en arrière avant de remonter derrière sa mâchoire. Lucrecia n’existait que sous la forme hybride qui l’avait vu naitre : de son bassin à ses pieds, elle était recouverte d’une fourrure brune tachetée, qui s’éclaircissait à l’intérieur de ses cuisses et derrière ses mollets, ainsi que sous sa courte queue touffue. Au-dessus de l’aine, elle avait un corps d’humaine galbé, une poitrine relativement petite, enserrée par une longue bande de tissu pourpre, qui constituait son unique vêtement. Ses avant-bras étaient couverts de la même toison ambrée, et ses cheveux étaient noués en une longue tresse pour mettre ses cornes en évidence.

Sen enfance au sein du village n’avait pas été très compliquée ; de part son apparence, elle attirait généralement la sympathie, et ses années adolescentes n’avaient pas été plus complexes que celles de n’importe qui d’autre. Lorsque Khor se saisissait d’un personnage, il acceptait généralement de mettre de côté sa divinité pour vivre pleinement sa vie. C’était un comportement qui aurait pu paraitre oisif à d’autres divins, s’il leur avait demandé leur avis – mais il ne le demandait pas. En réalité, il n’interagissait que très peu avec les autres. Son domaine était suffisamment peu important pour que personne ne cherche à le lui prendre, et il n’était pas intéressé par une autre course au pouvoir. Lucrecia, elle, était très simple. Elle vivait sans un regard pour l’avenir ou le passé, se saisissait des bonnes choses lorsqu’elles lui passaient sous la main, fruits, hommes, indifféremment. En dehors de cela, il y avait son projet, ses plantes, et depuis qu’elle avait commencé à les cultiver, les résultats étaient probants. Quelques bergers de la région lui en achetaient sur une base régulière, et petit à petit, elle se faisait sa réputation : les bêtes qui mangeaient ses rations étaient plus apaisées, plus heureuses, et cela s’en ressentait sur ce qu’elles produisaient pour les hommes. C’était une occasion de participer à la vie des ses disciples, de s’intéresser à de petites choses ; le regard qu’ils posaient sur leur cheptel – la manière qu’ils avaient de s’adresser aux créatures qui vivaient sous leur protection. Ceux qui jouaient le jeu en respectant ses règles étaient récompensés ; l’herbe poussait grassement, elle interférait auprès de la Déesse de la Fertilité lorsqu’ils désiraient un enfant, elle donnait un coup de pouce au hasard lorsqu’ils jouaient aux cartes, parfois. Rien d’évident, rien d’extravagant, mais depuis plusieurs années, les bergers des Jardins de Jhën qui traitaient leurs bêtes avec respect avaient la belle vie.

Ce jour-là, elle allait justement rendre visite à un nouveau venu. Presqu’un an s’était écoulé depuis qu’il s’était installé, avec ses quelques bêtes, mais il n’était pas si souvent là. Ils n’avaient jamais eu l’occasion de se croiser, mais elle avait entendu parler de lui. Priam Belegad, un Ange, élevé chez les Réprouvés. En tant que Khor, il l’avait aperçu à une ou deux occasion – alors qu’il rencontrait Erza. Il possédait un cabaret, et on le disait riche, mais son comportement et sa demeure respiraient la simplicité. Probablement normal pour un Ange, mais Eerah avait toujours su apprécier ceux qui échappaient à la folie des grandeurs. Ce qu’on entendait le plus à son sujet, c’était son rôle dans la mise en place des patrouilles qui escortent les Anges à travers les territoires Réprouvés et Démon. Ce qui intéressait Lucrecia, c’était ses chèvres, et ses équidés. Le regard perdu dans le distant, elle tira une gorgée d’une gourde en peau, qui pendait à ses côtés. Sur son dos pesait un panier en osier, presque plein des petites pousses blanches et vertes qu’elle cueillait à même l’eau. Encore un peu.

Quand elle eut fini, elle posa le panier sur la berge, et alla s’immerger entièrement.  L’eau fraîche lava la sueur et calma ses épaules engourdies ; la maison de l’Ange était à une bonne heure de marche, et elle avait prévu d’emmener avec elle une portion complète du produit de ses récoltes, en guise d’échantillon. De toute manière, elle ne laissait jamais vraiment le choix à ses acheteurs, et pas de manière malicieuse : ses produits étaient simplement meilleurs que tous ce qu’on avait pu leur vendre avant ça, et elle les distribuait à des prix qui défiait toute compétition. Elle n’avait pas besoin d’argent. Au fond d’une besace en toile, elle disposa plusieurs petits paquets, compactés et emballé avec de larges feuilles de nénuphar. Le bandeau qui masquait sa poitrine était trempé, elle l’attacha sur son sac. Tout ce tissu n’était bon qu’à satisfaire la morale puritaine des ailes-blanches, et elle n’arrivait pas encore à se détacher de plusieurs siècles de vie en Avalon. Voyager nue ne ferait de mal à personne si elle coupait à travers champ. Sous le soleil de plomb d’une chaude après-midi, elle prit la route de la maisonnée, le bruit de ses sabots sonnant sur les petits cailloux qui saturaient les champs fraichement labourés. Quand elle arriva en vue de la maison, l’Eversha se vêtit de nouveau, si tant est qu’on pouvait appeler ça de cette manière. L’endroit semblait bien tenu. Elle entendait des voix depuis la clôture, et un peu plus loin, elle vit les quelques bêtes qui justifiaient sa venue. Un homme s’y tenait debout. En approchant, elle ralentit pour le regarder travailler. De longs cheveux noirs, maintenus en queue de cheval, et des vêtements adaptés à la tâche. Au moins ce n’était pas un oisif de la ville venu goûter à « l’expérience rurale ».

— « Bonjour, Messire. »

Ses pupilles rectangulaires allèrent des chèvres à l’homme.

— « Elles ont l’air heureuses. Vous vous en occupez bien ! Je suis Lucrecia, du village. Je viens faire connaissance, et j’ai amené quelques surprises pour vos bêtes. »

Les mains sur les hanches, un tic nerveux la fit taper du sabot, et elle lui tendit la main, rayonnante.

1300 mots.


Sabots | ft. Priam GqzDWY

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Priam et Laëth
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Priam et Laëth
Lun 23 Mar 2020, 10:42



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Sabots

En duo avec Eerah | Lucrecia



« Mais je ne sais pas du tout comment on gère un cabaret. » - « Comme toute chose, ça s’apprend. » Priam esquissa une moue grognonne, puis haussa les épaules. « Je t’aiderai. » affirma son mentor, confiant. « Hum. » Il croisa les bras. « C’est toi qui parles toujours de nos deux cultures et du fait qu’elles peuvent se métisser, non ? » - « Oui… » - « Alors, c’est l’occasion. » - « Mais je ne vais jamais avoir le temps de tout faire, Nalim. Mes bêtes, les traductions, les patrouilles pour les enfants de Réprouvés, le cabaret… » Le diplomate leva les yeux au ciel, un sourire amusé aux lèvres. « Délègue. Les Orines sont aussi faites pour ça, d’ailleurs. Kagamiko peut s’occuper de tes animaux, tu peux finir de lui apprendre le Zul’Dov et le Naciaze pour les traductions, lui demander de t’aider pour le cabaret ou même pour tout ce qui concerne les patrouilles. » Le fils de Bipolaires lui adressa un regard dubitatif. « Bon, de toute façon, tu ne vas pas tenir le cabaret tout seul. Moi, je t’aiderai, et tous les employés restent. Ils savent comment ça fonctionne. » - « Hum. » - « De toute manière, tu ne peux pas rester cloîtré avec tes chèvres jusqu’à la fin des temps. Si je t’introduis en diplomatie, ce n’est pas pour te présenter comme le gardien de troupeau du coin. Une image, ça se travaille. Ça se soigne. Ça se cultive. C’est pareil, tu ne peux pas venir habillé comme ça le jour où nous rencontrerons les délégations magiciennes et orines. C’est absolument inenvisageable. Où est le costume qu’on avait choisi pour la réception chez Eutrope Nilsson, hum ? C’est ce genre de choses qu’il faudra porter. Tu as un certain style, je te l’accorde, mais tes bottes crottées sur les tapis à trois mille pièces d’or, ce serait assez mal venu. Je sais que je dois passer pour quelqu’un d’assez réactionnaire, à te donner de telles directives, mais j’avoue que tu n’es pas l’élève le plus discipliné de ces terres. Je devrais peut-être t’attacher à une chaise et te faire rentrer des idées dans le crâne à coup de pieu ou de marteau, mais malheureusement, j’ai des doutes quant à l’efficacité de cette méthode. Tout comme il y a des codes chez les Réprouvés, il y en a chez les Ang- » Priam ne l’écoutait plus. Il le laissa parler dans le vide et déambuler à travers son bureau. Ses yeux d’or étaient tournés vers la fenêtre. A l’extérieur, le printemps renaissait. « Oui oui, c’est bon, j’ai compris. » assura-t-il dès qu’il eût fini. « Je ne suis pas de cet avis. » - « Ouais, ben, les avis, c’est comme les trous du cul. Tout le monde en a un. » Nalim le pointa du doigt. Il était à mi-chemin entre la colère et une envie de rire terrible. « C’est exactement de ça dont je parlais. » Le brun lui sourit insolemment. Irrécupérable.

Les rayons du soleil vibraient sur la pâture. Priam, en appui sur sa houlette, scrutait la ligne d’horizon. Rutabaga jouait avec Bruniik. La petite chèvre noire et blanche, première née de son maigre élevage, avait bien grandi. Il avait appris de son père qu’Ahkrin n’était jamais arrivé chez eux. Le souci l’avait saisi, et il s’était demandé où l’animal avait été perdu. Malheureusement, il avait été incapable de retrouver sa trace. Le service de poste n’avait pas réussi à contacter l’employé qui aurait dû l’amener jusqu’à Lumnaar’Yuvon. Seul l’espoir qu’il eût trouvé des propriétaires aimants pouvait subsister. Livre à lui-même en pleine nature, il n’aurait pas survécu. Du coin de l’œil, le fils de Réprouvés vit Yuvon plaquer ses oreilles en arrière et pivoter pour montrer ses fesses à Nyellë, qui la reniflait d’un peu trop près. Il siffla. « Yuvon. » La jument de trait renâcla et s’éloigna du trouble-fête, le nez frôlant l’herbe et l’œil agressif. Elle se posta près du jeune homme, et recommença à brouter paisiblement. Bien redressé, l’étalon l’observait. Il émit un hennissement rauque, puis secoua la tête et partit d’un trot relevé. Le berger sourit, menton posé sur ses mains calées autour de son bâton. Lors des chaleurs de Yuvon, il les sortait séparément, pour éviter de voir mourir le cheval ailé. Luuna et Ebaar, couchées l’une contre l’autre, mastiquaient nonchalamment les brins qui passaient à la portée de leurs fins museaux. Il avait laissé Cassie à l’écurie. Il préférait la sortir seule, parce que ses cris stridents stressaient les chèvres et les chevaux. Sans elle, le silence n’était troublé que par les souffles, les ébrouements et la mécanique des mâchoires. C’était une après-midi tranquille. « Miaou ! » Priam se redressa et tourna la tête. Picasso arrivait en trottinant. Il se frotta aux jambes du Belegad, cognant sa tête contre ses tibias. Par moment, il songeait que Laëth aurait dû l’emmener avec elle. Il devinait qu’elle lui manquait : il passait ses journées à dormir sur son lit ou dans son placard, lové entre trois hauts imprégnés de son odeur.

L’interpellation le sortit de ses pensées. Il pivota et posa le regard sur une Eversha. Il en avait déjà vu, sur les Terres du Lac Bleu. Le havre de paix qu’elles offraient attiraient bien des races, toutes accueillies chaleureusement pourvu qu’elles ne perturbassent pas l’ordre établi. Au début, il avait trouvé ça plutôt étrange – pour ne pas dire très, et pour ne pas évoquer le fait qu’il avait pu avoir de vieux réflexes de Réprouvé raciste. A force d’en apercevoir, voire d’en côtoyer, et à force de se faire répéter des principes de tolérance à longueur de temps, il s’y était habitué. Ni ses jambes arquées et plus poilues que celles de toutes les Bipolaires réunies, ni ses cornes recourbées, ni même ses prunelles rectangulaires ne le perturbèrent. Non, ce qui lui fit hausser les sourcils, ce fut ce « Messire » auquel il n’aurait pu s’attendre. « Bonjour, Madame. » Mademoiselle ? Madame la chèvre ? Dame Eversha chèvre ? Aucune idée. Les équidés levèrent à peine la tête, mais les biquettes réagirent avec plus d’entrain. L’une d’elles bêla à l’intention de la nouvelle arrivante. Rutabaga s’approcha même avec curiosité. Picasso sauta en l’air, courut autour d’un arbre et grimpa dedans à une allure folle – c’était probablement plus dû à son quart d’heure de folie qu’à une peur, car on l’entendait bondir entre les branches bourgeonnantes. Lucrecia. Le nom se répercuta en écho dans la mémoire de l’Ange. On lui en avait déjà parlé, dans les tavernes bondées ou au coude d’un ruisseau chantant. Elle cultivait des plantes aux vertus intrigantes tant elles étaient notables. « Ah, Lucrecia, oui. Ravi de faire ta connaissance. Moi, c’est Priam. » Un sourire enchanté aux lèvres, il lui saisit la main et la serra avec franchise. « Merci pour elles. » A tout le moins, il faisait son possible pour que ses bêtes fussent heureuses ; il se demandait, aussi, ce que l’Eversha avait ramené. Quelques produits de ses récoltes ? Il n’osa pas demander. « J’ai déjà entendu parler de toi, je crois. » Vouvoiement ? Oublié. Pas besoin de formalités, entre agriculteurs. « C’est toi qui cultives des plantes dans le lac, c’est ça ? T’as une sacrée main verte, à ce qu’il paraît. Certains disent que tu serais capable de faire pousser des orchidées dans le Désert. » Il lui sourit.



Message I – 1247 mots

Phrase à placer (défi par Mitsu) : « Les avis c’est comme les trous du cul, tout le monde en a un. » La dernière cible, Harry Callahan.




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Eerah
Mar 24 Mar 2020, 12:08


Lucrecia remua le nez en souriant : il avait la poignée de main solide, elle pouvait sentir les cals qui s’y étaient formés au fil des ans. Il la tutoyait sans ambages – on ne chasse jamais vraiment une enfance chez les Réprouvés – et cela lui convenait. Elle s’appliqua à lui rendre la politesse en s’adressant à lui comme à l’un de ses réguliers du Village.

— « C’est bien moi ! Pas sûr qu’ils aient besoin d’orchidées dans le désert, mais j’perds rien à essayer. », répliqua-t-elle avec un sourire mutin. « Je t’ai amené un nouveau genre de complément alimentaire. On a pas eu l’occasion de parler ensemble depuis qu’t’es installé, mais moi j’ai déjà expérimenté ce qui se vend au marché pour filer aux chèvres, et ça a rien de ragoûtant. Celles qui parlent pas, elles y trouvent rien à r’dire, mais c’est parce qu’entre ça et l’herbe, y a pas bien de différence. »

Elle tira de sa besace l’un de ses paquets emballés, et approcha de la barrière. L’une des chèvres – Rutabaga, pouvait-elle entendre dans l’esprit de Priam – l’observait avec intérêt. L’Eversha lui bêla quelques banalités, mais aussi ravissantes fussent-elles, les chèvres étaient assez proches du Réprouvé type en termes de conversation. Elles allaient droit au but. Sentant l’ascendance céleste de la créature, Khor lui adressa ses salutations, ainsi que les dernières nouvelles des éons éternels : divine ou pas, elle n’était que moyennement intéressée. Bien que puissantes, après que Kennocha et Haziel se soient amusés à en disperser partout, celles-ci s’étaient contentées d’arpenter les champs, qu’ils soient d’herbe ou de bataille.  Lucrecia tourna la tête vers le berger :

— « J’peux ? »

Une fois qu’elle eut obtenu confirmation, elle déballa son cadeau, et le posa au sol, devant Rutabaga. À l’intérieur, plusieurs tiges roses, d’aspect et de consistance similaires à ceux du haricot vert commun, si ce n’est un peu plus longues et épaisses. Leur peau, brillante et gonflée, luisait au soleil comme si elles venaient de sortir de l’eau. La chèvre se pencha, renifla et en attrapa une du bout des dents. La plante était croquante et abondement juteuse, si bien que le menton de la créature se trouva bientôt inondé de jus pourpre. Cela allait demander un peu de temps d’adaptation avant qu’elle et ses compères ne parviennent à en déguster sans gaspiller, mais jusqu’ici, les élevages qu’elle approvisionnait s’en était toujours sortis. Visiblement satisfaite, Rutabaga bêla d’un ton autoritaire, et les trois chèvres « normales » sous sa supervision rappliquèrent sans rechigner. La jeune femme était rayonnante en se relevant.

— « Là ! Elles sont contentes, Khor soit témoin ! Bon, ça remplacera jamais l’herbe pour leur remplir bien la bedaine, mais ça vaut mieux que le foin qu’on leur file pour l’hiver. Et en été, ça rafraichi le gosier, et le reste du temps c’est aussi concentré que la betterave ou les fruits. »

Elle replaça une mèche derrière son oreille, et bomba le torse.

— « J’veux pas me vanter, mais je vends ça moins cher que la mauvaise herbe qu’on distribue au Village, et les bêtes elles préfèrent. Sûr, pour le moment, t’as que ma parole pour en attester, mais attends quelques semaines avec ce régime et tu verras qu’elles auront le poil qui reluit et l’œil qui brille. Le seul hic, c’est qu’pour l’instant, y a que moi qui en produit, alors forcément le stock est pas énorme. Mais pour les petits élevages comme le tien, ça fait bien l’affaire. »

Tout en parlant, elle fouilla davantage dans son sac, et en sorti une paire de fruits ronds et granuleux. Elle en tendit un au berger.

— « Et pis ça, c’est un autre petit projet, j’appelle ça des fraises d’eau, c’est pas mauvais, mais les animaux ils en veulent pas. Enfin les chevaux ils aiment bien, mais parce qu’ils mangeraient n’importe quoi de sucré ces ch’napans. »

Comme pour donner l’exemple, elle croqua à pleine dents dans la peau douce du fruit. C’était de la taille d’une pomme, mais bien plus léger, et couvert d’aspérité qui n’étaient pas sans rappeler le fruit rouge dont il tirait son nom. À l’extérieur, la peau était verte-orangée, mais à l’intérieur, la pulpe était d’un jaune vif qui flamboyait au soleil. En bouche, c’était fondant, et – là encore – extrêmement juteux. L’Eversha s’essuya les lèvres du pouce avec attention, et fit un signe de main engageant en direction de Priam ; tout en avalant sa bouchée.

— « Tu m’en diras des nouvelles, cette dernière récolte c’est la meilleure que j’ai faite. »

758 mots.


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Priam et Laëth
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Priam et Laëth
Mer 25 Mar 2020, 22:36



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Sabots

En duo avec Eerah | Lucrecia



Priam lui rendit son sourire. C’était vrai. L’exagération qui devait viser à prouver son talent ne trouvait pas ses fondements dans une logique implacable. Il n’était jamais allé dans le Désert. Tout ce qu’il en savait, il le détenait de ses recherches sur le Continent Naturel – toutes celles-ci l’avaient aidé dans son travail au sujet des enfants de Réprouvés. Territoire humain, de sable et de poussière, l’aridité y régnait en maîtresse presqu’absolue. Peut-être s’y rendrait-il, un jour ? Après tout, si sa vie lui avait bien prouvé quelque chose jusqu’ici, c’était qu’elle menait souvent là où l’on ne s’y attendait pas. Cela expliquait en partie qu’il n’eût jamais croisé l’Eversha et ses fameuses denrées. L’Ange l’écoutait avec attention. Une chose était certaine : elle savait vendre son produit. Elle avait dans sa manche – inexistante, certes – un atout de taille : la nature l’avait gâtée d’une condition semi-humanoïde. Elle parlait chèvre. Cela lui fit d’abord hausser les sourcils d’étonnement, puis il revint à la raison. N’était-ce pas logique, après tout ? Un peu incongru pour qui n’avait jamais vu personne procéder de la sorte, mais logique. Rutabaga lui répondit. Le fils de Réprouvés observait les deux créatures, un peu circonspect, un peu gêné, souriant tout de même. Il avait la sensation d’assister à quelque chose qui ne le concernait pas et qu’il ne pouvait pas comprendre – il n’avait seulement pas idée à quel point cette impression baignait dans la vérité. C’était à la fois troublant et amusant. Comme il baissait les yeux sur le paquet qu’elle tenait entre ses doigts, il acquiesça : « Bien sûr, vas-y. » Curieux, l’homme s’approcha pour profiter d’un meilleur angle de vue. La petite chèvre paraissait fort intéressée par le contenu : des végétaux rosés, longs et assez fins, qui paraissaient imprégnés de jus. Le grignotement rythmé de Rutabaga ne tarda pas à s’accompagner d’une abondante coulée qui vint tacher son pelage immaculé. Le berger s’accroupit et attrapa l’une des tiges. Il la porta plus près de ses yeux afin de mieux l’observer et la fit tourner entre son pouce et son index, tandis que les autres caprins se rameutaient afin de profiter à leur tour du festin. Le propriétaire les regarda avec un sourire, avant de tourner la tête vers Lucrecia. « Tu sais vendre ton truc. » lui concéda-t-il, plutôt amusé. Elle faisait preuve d’un entrain et d’une joie de vivre qui ne pouvait que ravir des sourires. Même l’évocation de Khor ne parvint pas à renfrogner l’enfant de Bipolaires, qui pourtant tenait en horreur tous les faux Dieux. Vraiment, elle avait un discours rôdé, que sa personnalité rendait d’autant plus efficient.

L’Ailé attrapa le fruit qu’elle tendait en sa direction. Il fit courir son pouce sur la sphère afin d’en apprécier les aspérités. La douceur de la peau le surprit. Il arqua un sourcil intrigué. « Des fraises d’eau, hein. » Le nom ne découlait pas du hasard : sous la pulpe de ses doigts, il expérimentait effectivement la même sensation que pouvait susciter le toucher des fruits rouges. Il jeta un regard en biais à Yuvon, qui ne restait guère loin de lui, puis à Nyellë, dont le panache s’était apaisé au profit de la nonchalance dont pouvait faire preuve les herbivores – lorsqu’ils se sentaient préservés de tout danger immédiat. Il reporta ses yeux d’or sur l’agricultrice et, tandis qu’elle l’incitait à manger, la pensée fugace – mais pas moins prégnante – qu’elle pût vouloir l’empoisonner le traversa. La méfiance naturelle des Réprouvés pour les étrangers se manifestait de manière abrupte ; elle était couplée à cette paranoïa que Nalim instillait en lui dès qu’il parlait des Elus d’Hel’dra, quoiqu’il le fît sans le vouloir. Fais attention, on ne sait jamais, c’est sécurisé sur les Terres du Lac Bleu mais ce n’est pas infaillible, il faut que tu restes sur tes gardes, tu dois apprendre à te battre pour pouvoir te défendre seul. Il n’y croyait même pas, à toute cette histoire. Ce n’étaient que les élucubrations de quelques illuminés. Pourtant… chacun était parvenu à la même conclusion : dès l’instant où quelqu’un croyait à cette prophétie, les autres devaient agir en conséquence.

Dans la tentative de chasser ces pensées, le brun se racla la gorge. Elle n’avait pas l’air menaçante, Lucrecia. Il en avait déjà entendu parler. Non. Il devenait juste irrationnel. Avec une moue agacée – il manqua de claquer sa langue contre son palais –, il porta le fruit à ses lèvres et croqua dedans. Ses papilles absorbèrent aussitôt un goût sucré, qui les ravit. « Ah mais c’est bon ! » s’exclama-t-il, après avoir avalé, comme s’il s’était attendu à quelque chose d’absolument infâme en bouche. « Et tu fais pousser tout ça dans le lac ? » La méfiance passée, sa curiosité intrinsèque pour les mystères de la nature et les secrets de l’agriculture reprit le dessus. « C’est assez fou, quand même. Enfin, je n’aurais pas imaginé pouvoir faire pousser des trucs dans l’eau. A part le riz… » Lorsqu’il avait commencé à regarder autour de lui, il avait été sidéré par ces grandes étendues immergées au sein desquelles une plante réussissait à s’épanouir, à Haute-Terre notamment. « A Lumnaar’Yuvon, tout est question de dosage. Sans eau, les cultures meurent, mais avec trop d’eau, c’est la même chose. » L’Ange considéra le fruit qu’il tenait dans sa main. « Comment tu as eu l’idée de faire ça ? Ils poussaient déjà dans le coin, ces fruits ? Et les herbes ? » Tandis qu’il la questionnait, Nyellë s’était rapproché. Le cou tendu, ses lèvres frôlèrent la besace de l’Eversha, puis happèrent le vide. Priam le siffla, et le cheval ailé se redressa aussitôt. Il s’écarta un peu et souffla, mécontent. « Désolé, il est un peu intrusif sur les bords, celui-là. Ça doit effectivement être l’odeur du sucre. » Le fils de Réprouvés eut un sourire. « Si je comprends bien, je vais être obligé de t’en prendre une cargaison complète. »



Message II – 994 mots




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Eerah
Jeu 02 Avr 2020, 22:48

Alors qu’elle lui tendait le fruit, Eerah suivait avec intérêt le cheminement de pensée de l’Ange. Il était méfiant – davantage méfiant pour sa personne que pour ses bêtes, d’ailleurs. D’un autre côté, il était plus probable que quelqu’un tente de l’empoisonner lui plutôt que ses chèvres. Il sut cependant mettre de côté ses inquiétudes, et rapidement, il déborda de questions à l’intention de la jeune Eversha. Celle-ci sourit largement, ravie d’avoir su convaincre son public. Les fraises étaient toujours un coup d’estoc fatal pour qui savait les apprécier. Avec un engouement non feint, elle répondit aux questions du berger en sortant un épais volume relié sur lequel elle prenait ses notes.

— « Sur les bords du lac, en fait – le tout c’est qu’elles puissent respirer et voir le soleil, j’veux pas faire des algues ! Pourtant si on touche un peu sa bille en jardinage, ce trop-plein d’eau ça semble contre-intuitif : normalement les végétaux c’est comme nous, faut bien qu’on boive, mais pas qu’on se noie. Là où moi j’essaye des trucs, c’est en croisant des espèces. Suffit d’avoir le temps, mais à force de générations, on aboutit à ça ! »

Elle se lécha l’index et tourna rapidement quelques pages, jusqu’à tomber sur une suite de schémas et de croquis représentant des plants entiers, des racines aux feuilles. Elle s’approcha pour lui montrer.

— « Là, c’était au début, et là, après deux ans. Tu vois comme la racine s’est allongée par rapport à la tige ? Elle apprend à se ficher plus bas dans la vase, pis elle récupère les nutriments du lac avec ces filaments, là. C’est les grandes feuilles à la surface qui lui apportent le soleil qu’elle a besoin. Les fruits, eux, ils poussent dessous. C’est à peine s’ils effleurent l’eau. Pis sont légers. Moi j’crois que c’est parce qu’ils veulent pas couler, comme ça si ça vente ou qu’le lac s’agite, bein les cosses elles iront flotter ailleurs pour se reproduire. Bon, j’en ai pas vu ailleurs pour le moment mais j’désespère point. »

À l’évocation du nom Zul’Dov de Bouton d’Or, elle fit mine de hausser les sourcils. Contrairement à Khor, Lucrecia ne parlait que le commun et le Grimwyn. Mais ce n’était pas la première fois qu’elle entendait parler de la ville sous cette appellation.

— « C’est Bouton d’Or, c’est ça ? J’y suis allé quand j’étais gamine, c’est là que j’ai eu l’idée ! »

Ce n’était pas exactement vrai, puisque l’Eversha n’y avait jamais mis les sabots, mais lors de sa précédente vie, c’était bel et bien les fruits de son dernier échec qui l’avaient mis sur la voie d’une nouvelle espèce végétale à façonner.

— « Un fermier de là-bas faisait des tentatives pour rendre son foin plus digeste, et il a fini par inonder son champ parce que ses herbes étaient toutes sèches. Les plantes sont mortes, z’avaient trop bu. Je me suis dit que si on pouvait avoir du blé qui pousse comme du riz, ça serait quand même pratique. Quand j’ai appris le métier, on m’a montré comment faire se croiser des espèces, alors j’ai commencé à en créer plein. Eh ben tu sauras que la plupart du temps, les choses se croisent pas. Mais des fois, j’arrive à faire pousser quelque chose ! Mes haricots roses, c’est ma plus grande réussite. Mais les fraises d’eau c’était une bonne surprise. Ça fait cinq ans que je les fais muter. Là-dedans, y a de la fraise, du riz, du nénuphar et du melon jaune. Tu vois une fraise ? Tu vois un nénuphar ? L’en faut de la patience pour que ces machins là acceptent de se croiser. »

Lorsqu’on la lançait sur son sujet de prédilection, elle n’arrivait plus à s’arrêter. De temps à autre, elle lançait un coup d’œil inquiet à son interlocuteur, s’assurant qu’elle ne l’ennuyait pas. Mais chaque fois, elle était rassurée par un regard vif d’intérêt. C’est le Pégase qui fini par l’interrompre en cherchant la source de l’odeur sucrée qui avait empli l’air. Elle lui sourit, et tira la langue avec impertinence. Les grands chevaux ailés avaient toujours un petit côté prétentieux qu’elle prenait un malin plaisir à contrarier. Pourtant, elle tira une autre fraise de sa besace, et la désigna du menton au berger.

— « J’lui en donne ? »

Le troupeau de Priam tenait de l’exceptionnel ; entre le chat, la chèvre et le pégase, un tiers de son cheptel était fermement ancré dans le surnaturel. Même la jument noire irradiait de magies de toutes sortes. Elle s’apprêtait à ajouter qu’un tel élevage ne méritait que le meilleur, quand la conclusion du Réprouvé vint la faire douter de son esprit commercial. Elle agita les mains, gênée :

— « Ah mince, j’veux pas paraitre plus pour une vendeuse que pour une paysanne ! C’est mon prof de commerce qui nous disait toujours d’utiliser ce genre d’accroches, c’est devenu réflexe. Moi, ce qui m’intéresse surtout, c’est que tu sois convaincu par le produit, pas par moi ! Je suis sûre que ça peut qu’aider, mais faut que tu le sois aussi ! S’il faut, je te laisse des échantillons et je repasse plus tard dans le mois. »

Malgré le mépris qu’il avait décelé dans l’esprit du Réprouvé à l’évocation de son nom d’Æther – c’était culturel après tout – Khor ne pouvait que constater l’amour que lui portaient ses bêtes. Il s’éloignerait certainement petit à petit des prés et des animaux, mais pour l’instant, c’était un bon berger. Eerah s’assura que chacun de ses protégés étaient en parfaite santé, en soignant un bassin un peu bas par-ci, en solidifiant un sabot par-là. Ça lui faisait tout de même envisager d’aller s’inscrire quelque part dans l’histoire Réprouvée en tant que Zaahin ; ne serait-ce que pour que son nom soit craint et respecté même parmi les mangeurs de saucisson.

Lucrecia, elle, s’étira le dos en observant le fils de Réprouvé. Même selon les standards Angélique, il était bien bâti et attirant. Quelque part en elle, la conscience amusée d’un ancien roi Déchu voulait titiller ses convictions. Elle réajusta le linge qui couvrait sa poitrine en tournant les yeux vers le pré ; subtilement, son aura gagna en intensité, et ses seins en volume.

— « Et, euh… Tu vis tout seul, ici ? », demanda-t-elle, avec un sourire timide.

1054 mots.


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Mar 21 Avr 2020, 12:34



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En duo avec Eerah | Lucrecia



Penché par-dessus l’épaule de l’Eversha, l’Ange observait les croquis des végétaux et différentes espèces qu’elle avait pris le soin de croiser. Les traits, quoique vifs et légers, étaient soignés. Chaque dessin comportait une date, et quelques annotations accompagnaient le tout. « C’est pas pire, tes schémas. » fit-il, pensif. A travers eux, il était aisé de sentir qu’elle mettait du sien dans ce projet, et qu’il lui tenait à cœur. Il sourit doucement. « Oui, pardon, c’est ça, Bouton d’Or. » Il avait encore du mal à prendre le pli, de ce côté-ci. Même en parlant le langage commun, le nom de sa terre natale lui venait plus aisément dans sa langue de naissance. Une habitude rodée par les années. Il était d’autant moins évident de s’en détacher que tous les Anges comprenaient cette appellation, depuis que leurs effectifs nationaux provenaient d’avantage des territoires réprouvés que d’ailleurs. Il fut surpris d’apprendre que Lucrecia s’y était rendue – les Bipolaires n’étant pas connus pour leur hospitalité –, et encore plus lorsqu’elle prétendit qu’elle avait tiré son idée de son séjour là-bas. Il écouta son histoire avec attention. Il se figurait parfaitement un agriculteur qui, dépassé par la situation, s’était énervé jusqu’à noyer ses propres cultures. Ce n’était pas arrivé de son vivant, mais cela aurait pu. On en avait déjà surpris certains prêts à mettre le feu à leurs propres bêtes. Heureusement, l’esprit communautaire qui régnait à Lumnaar’Yuvon savait gérer les tempéraments de chacun et, surtout, les excès de fureur.

Priam jeta un coup d’œil à Nyellë, paré de toute la préciosité dont il savait faire preuve. Il sourit. « Vas-y, tu peux. » Le cheval ailé ne se fit pas prier pour attraper la fraise d’eau qu’elle lui tendit. Il la prit entre ses épaisses lèvres amovibles, jusqu’à la ramener dans sa bouche pour la mastiquer. Le jus du fruit coula d’entre ses dents et forma une mousse brillante autour de sa bouche. L’animal, l’œil curieux, sortit plusieurs fois sa langue, comme s’il cherchait à se lécher les babines à la manière d’un chat. C’était assez drôle à regarder, suffisamment pour que le fils de Réprouvés taquinât la jeune femme sur ses aptitudes de vendeuses. Sa réaction l’amusa, quoiqu’il se sentît contraint de préciser : « Je plaisantais. » Réflexe angélique, sans doute. Putain d’Ange tout mou, comme le lui avait inlassablement répété Za, jusqu’à ce que… Il interrompit le cours de sa pensée, troublé. « C’est plutôt elles, tes clientes. » ajouta-t-il en se reconcentrant sur ses bêtes. « Elles ont l’air assez convaincues. » Il glissa sa main sur le chanfrein de Nyellë pour aller le gratter sous le toupet. Le cheval baissa la tête en soufflant. Rutabaga passa sous son ventre – sans aucune conscience des risques potentiels – puis vint se caler entre les mollets de Priam. Elle plongea son museau dans l’herbe grasse du début de printemps et recommença à brouter. L’Ange sourit, heureux. C’étaient de petits instants comme celui-ci qui parsemaient de bonheur le quotidien.

Lorsque l’agricultrice reprit la parole, il tourna la tête vers elle. Il capta son regard et crut comprendre qu’elle n’était plus seulement motivée par l’idée de vendre ses plantes. Il lui rendit un sourire troublé, qu’il aurait voulu plus tranquille. Avant cela, lui-même n’avait pas songé à… Mais il était vrai que, malgré sa physionomie qui tenait à moitié de la chèvre, elle pouvait se vanter d’un certain charme. Depuis quand était-il attiré par des… des semi-humains ? L’Ange cligna des yeux. Non. « Non. Je vis avec Kagamiko, mon Orine, et en temps normal, il y a aussi ma sœur, mais elle est partie. Les explorations angéliques, tu sais. Enfin, elle est là-bas, quelque part à des centaines de kilomètres d’ici. » Tout en parlant, il déployait le Sanctuaire d’Ahena, tant pour vivifier les Vertus dont il était censé être fait que pour apaiser la jeune femme. Il avait fauté une fois – bien qu’il n’eût pas été dans son état normal, certes – et n’avait pas l’intention de recommencer – même s’il lui semblait parfois qu’il était d’autant plus difficile de résister à l’appel de ces sensations après y avoir goûté. Toutefois, impossible de revenir en arrière ; et s’il voulait pouvoir mener ses projets à bien, il était dans son intérêt de conserver la blancheur de ses ailes. « Et toi ? Personne qui t’attend à la maison ? » demanda-t-il en réunissant quelques-unes de ses affaires – une gourde et une veste posées dans l’herbe, ainsi que deux licols. « Je vais les rentrer. L’après-midi est bien avancée et j’ai encore du travail. Tu peux venir, bien sûr. » Il noua les licols autour de la tête des deux chevaux et fit signe à Rutabaga. La petite chèvre exerçait vraisemblablement une ascendance sur le reste du groupe, qui la suivait où qu’elle allât. Le cortège quitta la prairie et prit les grands chemins pour retourner vers l’écurie.

Assez vaste, toute en longueur, elle accueillait bien d’autres animaux – majoritairement des chevaux et poneys. Il y avait deux cochons, au fond, qu’on entendait grouiner. Priam louait plusieurs boxes afin que chacune de ses bêtes eût un espace confortable. Seuls les caprins dormaient ensemble – exception faite de Rutabaga –, dans un espace assez grand pour qu’ils ne se gênassent pas. Depuis longtemps, il songeait à acheter un terrain pour construire sa propre structure, mais il ne cessait de repousser le moment, soit que le destin s’amusât à ralentir ses projets, soit qu’il en privilégiât d’autres. Il lui faudrait véritablement s’y atteler, un jour. Les chèvres rentrèrent d’elles-mêmes dans leur box, puis il plaça chacun des équidés et les défit de leur harnachement. Il ferma le portique des chèvres et attacha la corde qui fermait les stalles des chevaux, puis se tourna vers Lucrecia. Elle dégageait toujours cette aura magnétique, qui le troublait malgré lui, si bien qu’il resta quelques fractions de seconde la bouche entrouverte, sans rien dire. Lorsqu’il parvint à se reprendre, il demanda : « Tu fais du cheval ? » Une pause, avant de poursuivre : « Il faut que je sorte Yuvon et Nyellë. Tu peux monter la jument, si tu veux. Lui, il apprend encore… » Il coula un regard vers l’étalon, dont il avait débuté le débourrage quelques temps auparavant, avant de reporter son attention sur la brune. Est-ce qu’elle pouvait monter avec ses pattes et ses sabots ? Est-ce que les Evershas montaient d’autres animaux ? Peut-être quand ils se reproduisaient, à la limite… Cette pensée le fit vaguement sourire. Il n’en avait strictement aucune idée.



Message III – 1088 mots

Précisions : Je suis partie du principe qu'elle le suivait mais si ça t'embête, tu me dis nastae Et comme je sais que tu adores faire des descriptions, voilà pour toi : clique. C'est pas grave si ça te sert pas, moi ça me sera utile pour faire les lieux et tout. Je le referai peut-être en mieux mais ça donne une idée. Et tout est construit en bois. Les chèvres et les cochons t'as un vrai petit portail pour fermer/ouvrir, les chevaux c'est juste une grosse corde qui ferme le box. Chaque box a une fenêtre, et il y en a aussi une au bout de l'allée.




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Mar 28 Avr 2020, 23:55


Sans protester, Khor se laissa embrasser par le Sanctuaire d’Ahena. La magie gonflait autour du berger comme un nuage étouffant de justice, de pureté, d’honneur et d’autres illusions. Devenir une déité changeait beaucoup de choses ; ça remettait en perspective le concept du temps, de l’existence elle-même. Déchirer le voile et se tenir là, à constater la petitesse de ce qu’on considérait comme « tout », il y avait de quoi vous écarter entièrement du genre humain. Ça n’avait rien d’étonnant de voir certains Ætheri se tenir dans l’ombre des cieux éternels, loin des préoccupations de leurs fidèles : ils éprouvaient la même difficulté à comprendre les mortels que ceux-ci avaient à faire de l’empathie pour les microbes ou les virus. Mais comme beaucoup, Eerah avait pris le parti de conserver une part de lui-même lors de ce transfert. Il avait remisé la connaissance absolue dans un recoin de son être, pour conserver un peu de ce qui donnait son piment à la vie : les surprises, l’inattendu, l’aléatoire. Avec ce morceau d’humanité, ses motivations profondes lui collaient encore à la peau : les Déchus, la vie artificielle, l’envie de repousser encore un peu plus loin les limites de la technologie et du savoir. Et au sein de tout ça, la même idée et la même certitude profonde : les vœux et les lois angéliques étaient de bien belles conneries.

Il ne comprenait pas la volonté d’un homme à s’infliger un tel fardeau au nom de « l’honneur » et de la blancheur de ses ailes. Fallait-il s’estimer à ce point supérieur pour tenter à tout prix de conserver le statut d’Ange ? Priam était né de parents Réprouvés, il savait pertinemment tout ce qu’il ratait, il avait vu de ses yeux les joies d’une vie de « péché ». Manger à outrance, baiser, hurler, être jaloux, procrastiner, c’était tout ce qui faisait le mordant de la vie. Sans ça, c’était un fruit neutre, sans goût, comme les fourrages condensés avec lesquels on nourrissait le bétail. Bien sûr, Lucrecia, elle, n’avait pas de raison d’insister : il avait été très clair, et il n’était pas là pour le forcer contre sa volonté. Il laissa le corps de l’Eversha réagir au Sanctuaire. Elle se calma, focalisa son attention sur l’Ange et ses dires, plutôt que sur tout ce qui faisait sa masculinité. Il n’empêche qu’un peu de sexe à l’ancienne n’aurait pas été de refus. Alors qu’il lui parlait de sa sœur et de son Orine, Khor étendit sa conscience à celles-ci. Kagamiko, elle, n’aurait certainement pas craché sur la proposition de Lucrecia, mais elle devait avant tout obéissance à son maitre. Quant à Laëth, elle avait bien d’autres problèmes autrement plus urgents. Son futur proche risquait de mettre à l’épreuve beaucoup de ses convictions. Alors qu’il regardait son frère rentrer ses bêtes dans l’ignorance la plus complète du sort de sa sœur, le pacte qui le contraignait à ne pas agir directement sur la vie des mortels lui sembla bien cruel. Il se laissa retomber dans l’ignorance, et répondit sur le ton de la conversation, ramenant sa conscience à Lucrecia.

— « Non, personne. J’aime bien vivre seule, je peux faire ce que j’veux, inviter qui j’veux pour la nuit. Et puis tout le monde est pas intéressé par quelqu’un qui passe son temps les pieds dans la boue à tripoter des plantes. »

Elle lui emboîta le pas en rangeant son sac, sans cesser de discuter.

— « Mes parents s’en sont retournés à la forêt, et on avait pas de famille proche dans le coin, donc c’est juste moi. Mais au final je passe pas mal de temps au Village, donc c’est un peu comme une deuxième famille. »

Ils se dirigèrent vers l’écurie, un long bâtiment en bois, agencé avec soin. Ils passèrent devant le stock de nourriture, foin, paille et granulés classiques, qu’elle espérait voir un jour au moins augmentés avec ses propres composés. La majorité de l’endroit était occupé par des équidés divers, et un box plus large était réservé à Rutabaga et son clan. Elle l’observa travailler avec soin, sans chercher à l’impressionner ou à faire vite. Il remplissait son rôle avec efficacité et simplicité. Quand il lui proposa de monter à cheval, elle le regarda un court instant, sans comprendre, avant d’agiter les mains devant elle en signe de dénégation :

— « Ah, euh, non ! On se connait pas vraiment, ça ne s’fait point. Mais je peux suivre à côté sans problème ! »

Lucrecia appréciait qu’il n’ait pas essayé de prendre congé d’elle ; il lui faisait découvrir une partie de sa vie sans qu’elle n’ait à le solliciter, et cela lui venait naturellement. On pouvait peut-être céder au moins ça aux Anges, ils avaient un certain sens de l’hospitalité. Quand ils n’étaient pas occupés à réprimer violemment toute infraction à leurs lois absolues. Khor, lui, avait eu ce qu’il voulait, il laissa son alter-ego Eversha s’occuper du reste. Elle posa son sac à côté du matériel d’entretien, et étira une jambe dans son dos. Un sourire mutin aux lèvres, elle lança au berger :

— « On peut aller jusqu’au lac, si tu veux. Ils savent bien galoper ? »

867 mots.


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Dim 03 Mai 2020, 10:24



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En duo avec Eerah | Lucrecia



Priam sourit. Vivre seul comportait sans doute ses avantages, oui. Il l’ignorait. Il n’avait jamais vécu dans une maison où le silence régnait. A Lumnaar’Yuvon, ils avaient presque toujours été quatre. Parfois, la ferme était vide parce que les champs requéraient leur présence, mais dès que l’un d’eux posait un pied à l’intérieur, elle s’animait de la vie qu’ils lui insufflaient sans même y penser. On riait, on criait, on chantait, on discutait, on courait, on se battait ; et toutes ces autres actions qui font le quotidien des Réprouvés. En y repensant, un pincement ceignit son cœur. Cette existence n’avait pas été parfaite, loin de là. Par moments, il en avait souffert. Il avait détesté la nature bipolaire et pleuré une stabilité qui ne peut pas s’épanouir. Néanmoins, cela lui paraissait un moindre mal en comparaison de tous les merveilleux souvenirs qu’il en gardait. La chaleur, les sourires, les bras aimants, l’animation. Habiter aux Jardins était une expérience bien différente, même si, là encore, il n’avait jamais été seul. A son arrivée, il s’était d’abord installé dans une caserne, celle où Laëth cohabitait déjà avec plusieurs enfants de Bipolaires, et quelques Anges rescapés des Démons. Désormais, ils avaient leur propre maison. Elle était partie pour les explorations, mais Kagami avait emménagé entre temps. Parfois, il lui semblait que sa bonne humeur quasi continuelle égayait même les murs. Sa sœur et toutes ses manies plus ou moins bruyantes lui manquaient, mais l’Orine apaisait sans mal sa solitude. Vivre seul, il ne savait ni vraiment ce que c’était, ni s’il aurait su l’apprécier. Sans doute pas. Pas après toutes ces années. Pas même en passant une grande part de son temps avec d’autres personnes, comme le faisait Lucrecia. Il avait besoin de nouer des liens qui pouvaient s’apparenter à ceux que l’on retrouvait au sein d’une famille ou entre des amis d’enfance. Des contacts profonds, durables et aimants.

La réponse de l’Eversha l’amusa. Il ne pourrait jamais satisfaire sa curiosité et savoir comment monter à cheval avec des pattes de chèvres et des sabots, mais n’insista pas. Toutefois, elle avait l’air un peu gêné, si bien qu’il regrettât presque de le lui avoir demandé – peut-être était-ce terriblement mal venu ? Il n’avait aucune idée des rapports qu’entretenait son peuple avec les animaux, finalement. Il avait peut-être commis un impair. Il s’apprêtait à s’excuser, mais la proposition de la jeune femme l’interrompit. « Bien sûr, ce sont de fiers coursiers ! » ironisa-t-il. L’une était une jument de trait et l’autre un étalon plus soucieux de se comporter comme un poulain que comme un cheval. Ils ne payaient pas de mine. Toutefois, Yuvon possédait un don qui la rendait extrêmement rapide. Quant à Nyellë, il n’avait pas encore révélé tout son potentiel à Priam. Ce qu’il avait appris avec lui, c’était qu’il fallait être patient. Très patient. Trop patient. « Je vais prendre Yuvon, elle nous embêtera moins que ce gros gourmand. » Il gratta affectueusement le chanfrein du concerné, puis prit la direction de la sellerie. « Je reviens, je vais chercher ses affaires ! »

Revenu avec l’équipement, il entreprit de panser la jument, puis de la harnacher, sans cesser de parler avec l’agricultrice. Elle était bavarde et il était donc facile de lui faire la conversation. Même pour lui, qui n’avait pourtant pas l’habitude de se répandre en babillages – quoique plus le temps passât, plus il se découvrait des aptitudes à converser sur tout et rien. Lorsque Yuvon fut prête, le trio sortit, Rutabaga sur les talons. Priam avait indiqué à Lucrecia qu’elle pouvait laisser sans crainte ses affaires à l’intérieur de l’écurie. Les voleurs étaient rares, pour ne pas dire inexistants. Il se hissa sur l’animal, et ils prirent la direction du lac.

Sous le soleil des jours de printemps, sa surface brillait d’un éclat tendre. L’herbe connaissait à nouveau des jours prospères et ondulait gaiement sous une brise légère. L’air chargé des parfums du renouveau charmait les narines et poussait même jusqu’aux éternuements. L’Ange lança la jument au trot, et effectivement, l’Eversha suivit sans peine. Une fois au galop, elle démontra ses aptitudes, sous l’œil surpris du brun. La petite chèvre divine ne courut pas longtemps avec eux : elle finit par bondir sur une souche. Assise, elle les observa faire plusieurs courses. Avant qu’ils ne se quittassent, Priam conclut un accord avec la brune : elle reviendrait lui livrer ses plantes. Quand il rentra chez lui, il avait l’âme sereine. Il appréciait ces moments de paix durant lesquels seul le présent comptait. Il n’avait pas à penser à l’absence de sa sœur, aux dérapages avec Za, à ses ailes mutilées, à l’ombre de la mort, au manque de Lumnaar’Yuvon, aux projets qui n’aboutiraient peut-être jamais ; à tous ces tracas plus ou moins fracassants, qui donnaient à la vie des allures d’épreuve, et rehaussaient par la même son charme incomparable.

FIN



Message IV – 814 mots




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