Milo s’était réveillé, en plein nuit, dans le petit nid qu’il avait lui-même aménagé dans la chambre de Syrianne à Basphel, avec des branchages, des feuilles et quelques morceaux de tissus. Il lui avait fallu plusieurs tentative pour que son couchage tiennent assez pour soutenir son poids… L’animal, mi-moineau, mi-rongeur, que l’on nommera donc moigeur ou ronneau, comme vous préférez, n’avait alors jamais essayé cette discipline. Il était pourtant né dans un nid, il y avait de cela quelques années, mais le début de sa vie n’avait pas été très facile. Jeté dehors par sa mère un peu trop jeune, Milo avait failli ne pas passer la saison froide, si Syrianne ne l’avait pas trouvé. Il était devenu un animal apprivoisé et un lien indéfectible s’était créé entre eux.

Petit à petit, Milo avait même développé certaines capacités, lié à la Magie même de sa partenaire. Même si cela s’était révélé bien pratique, l’animal ne savait pas se comporter comme un véritable membre de son espèce. Il n’avait aucune connaissance sur le mode de vie des siens, la manière de construire un nid, comme séduire une femelle ou même comment lui faire des petits… Son instinct naturel avait été remplacé, il avait oublié ce qu’il était censé faire pour devenir l’allié d’une Magicienne. Sa nouvelle vie n’était pas pour lui déplaire… Il était en sécurité, au chaud, il avait même droit à des petites friandises sucrées, en plus des vers et des petits insectes qu’il chassait lui même. 



En parlant de nourriture… Milo avait faim. C’était son tout petit estomac grondant qui l’avait tiré de son sommeil léger. Eh oui, quand on est un animal pas plus gros que le poing d’un homme, on ne dort que rarement sur ses deux oreilles. Et même si Milo ne craignait rien à l’intérieur, avec Syrianne, il restait toujours extrêmement attentif. D’ailleurs, la jeune femme dormait, un peu en dessous de l’endroit où il était. Il percevait la lente respiration de l’adolescente endormie et quelques unes de ses pensées, alors qu’elle rêvait. Elle pensait encore à cet autre Magicien… Milo ne l’avait pas rencontré, mais Syrianne et lui avait passé une après-midi entière ensemble, à étudier. Depuis, son visage passait fréquemment dans la tête de la blonde. Est-ce qu’un moigeur/ronneau pouvait être jaloux ? Sans doute, oui. Milo avait l’impression qu’il était en train de prendre sa place, celle de compagnon le plus fidèle et qu’elle préfère ! C’était hors de question. Milo s’occuperait de remettre les choses à leur place dans la journée. Pour le moment, la lune était encore brillante dans le ciel nocturne, et l’astre solaire n’était pas prêt de se lever. 



L’animal se posa alors sur ses quatre pattes de rongeurs. Il s’aida de ses muscles puissants pour faire un saut et se jeter dans le vide, avant d’ouvrir ses ailes et de planer vers le haut pour ne pas s’écraser sur le sol. Il atterrit tranquillement sur le rebord de la fenêtre. Il passa ensuite de le petit entrebâillement que Syrianne laissait toujours ouvert, au cas où son compagnon voulait sortir se dégourdir les ailes ou avait besoin, comme ce soir, d’un petit casse-croûte. 



Dans un premier temps, Milo remit les plumes de ses ailes en place, en bataille comme les cheveux d’un être humain après une longue nuit de sommeil. Une fois toutes lisses et prête pour des vols plus prolongés, Milo s’élança. Il battait des ailes à allure régulière avec comme première objectif se trouvait un arbre entouré d’herbes pour pouvoir se dissimuler à travers les branches. C’était pratique pour la chasse, mais aussi pour éviter d’être chassé… Rapidement, l’animal repéra le parfait candidat et choisit une branche bien en hauteur. Une fois perché, le pelage et les plumes, vertes, brunes et rouges du moigeur/ronneau changèrent de couleur, s’adaptant presque automatiquement aux couleurs sombres de la nuit. À moins de regarder à la loupe, Milo était devenue invisibles aux yeux du monde.

Et il n’avait plus qu’à attendre, attendre la première proie appétissante qui passerait dans la zone que Milo surveillait. Pour cela, il utilisait non seulement les deux petits plumes pointées au-dessus de sa tête pour percevoir les sons et autres vibrations, ainsi que sa vue, tout simplement. Au loin, il perçut au bout de quelques minutes un joli petit point lumineux. Une luciole… Est-ce que c’était aussi bon que c’était beau ? En tout cas, il l’espérait croustillant. Le seul problème était la distance. La bestiole était assez loin et se dirigeait apparemment vers un abri. Est-ce qu’il arriverait à temps pour la croquer ? 



Tentant le tout pour le temps, Milo se jeta la tête en avant, battant des ailes comme s’il tentait d’échapper à un prédateur. En fait, c’était lui le prédateur. Il fonça, le bec grand ouvert sur le point lumineux qui se déplaçait et boum. Milo venait de se fracasser le crâne contre la pierre où venait de se réfugier l’insecte. Non ! C’était raté ! L’estomac vide, la tête douloureuse et les ailes fatiguées, Le moigeur/ronneau décida de rentrer. De toute façon, Syrianne lui donnerait bien quelque chose à manger… Une chose était sûr, il allait falloir qu’il améliore sa vitesse de vol.

Post I - 870 mots

Une belle matinée de fin de semaine, sans cours, sans préparation précipitée, sans petit-déjeuner avalé à la hâte… Huuum… Que c’est agréable, une grasse matinée, enroulée dans ses draps comme un petit saucisson ! C’était sans compter sur ce que Syrianne avait dit la veille ou plutôt ordonner. Elle avait demandé à Milo, son compagnon, de la forcer à se lever, quoi qu’il arrive, quoi qu’elle fasse et quoi qu’elle dise pour essayer de l’en empêcher. Quelle mauvaise idée, maintenant qu’il piaillait directement dans ses oreilles ! La Magicienne tenta de lui faire passer le message de la laisser tranquille, en pensée tout d’abord, trop enlisée dans le sommeil pour avoir envie de parler ou de faire ne serait-ce qu’un mouvement. Elle savait très bien que Milo pouvait voir dans les siennes comme au travers d’une fenêtre. Pendant plusieurs minutes, alors qu’il courait le long de son dos, picorait son crâne ou tirait sur des mèches de cheveux, Syrianne demanda gentimment, supplia et hurla mentalement qu’on la laisse dormir. Rien n’y faisait, Milo suivait les instructions que Syrianne avait elle-même donnée la vieille. L’adolescente se maudit intérieurement. Pourquoi avait-elle décidée de se lever de bonne heure un jour comme celui-là, déjà ?

Milo siffla pour le lui rappeler, ayant capter sa pensée. Comment ça, elle avait décidé de travailler beaucoup plus pour les beaux yeux du Magicien ? Qui ça ? Oh ! Oui, Aleran. Elle n’était pas encore très bien réveillé… Mais ce n’était pas tout à fait faux. Le jeune homme, que Syrianne avait rencontré à la bibliothèque il y avait de cela plusieurs semaines maintenant, peut-être deux ou trois, avait créé en elle une sorte de bouleversement. Elle avait décidé, après l’avoir vu à l’oeuvre, tout donner pour s’améliorer et travailler sans relâche jusqu’au bout de ses limites, de mettre un peu plus de coeur à son propre ouvrage. Elle s’était rendue compte du retard creusé entre eux, de tout ce qu’elle ne savait pas encore et tout ce qu’elle devrait apprendre pour devenir quelqu’un, un jour, une adulte accomplie, peut-être même, avec un peu de chance, une personne importante. Syrianne était ambitieuse et à présent, il était temps qu’elle se donne les moyens pour arriver là où elle voulait aller.



Elle soupira alors. Milo voleta jusqu’à sa table de nuit pour la laisser s’assoir. Les cheveux dans tous les sens, les yeux encore à demi fermés, Syrianne regarda son compagnon qui était lui, tout guilleret et apparemment en forme. En revanche, une petite bosse sortait d’entre ses plumes sur le haut de sa tête de piaf. Les paupières fatiguées de la Magicienne papillonnèrent, croyant avoir rêvé, avant de s’approcher très proche de lui pour vérifier. Non, il avait bien une bosse, cet imbécile !

- Mais qu’est-ce que tu as fait, cette fois ?

Cette fois, cette fois, comme si c’était fréquent qu’il se blesse ! Milo pris la mauvaise graine et tourna la tête. Puisque Syrianne avait appris à déchiffrer le langage des animaux, grâce à sa magie et sa vie entourée constamment de Nature et de faune en tout genre, elle comprit facilement le récit de piaillement de son compagnon. D’ailleurs, l’histoire la fit bien rire, ce qui renfrogna encore un peu plus le moigeur/ronneau. Piqué au vif, Milo décida cette fois de se venger en pinçant du bout du bec la peau sur la main de sa partenaire.

- Aïeuh ! D’accord, c’est bon, j’ai compris. On va manger tout les deux et ensuite on se met au travail.

Un peu plus tard dans la matinée, Syrianne et Milo se retrouvait dans un des jardins de l’île suspendu qui abritait l’école. Il n’y avait pas grand monde, sans doute que les autres profitaient, eux, de leur matinée pour se reposer… Alors qu’elle baillait, décidément pas au meilleur de sa forme, l’animal lui sauta sur l’épaule. Il se demandait comment, l’un et l’autre, pourrait s’entraîner et surtout s’entraider à le faire. La Magicienne se mit à réfléchir, caressant le dos de rongeur recouvert de poils de son compagnon.

- On le fera chacun notre tour. D’abord, je me déplace vers un autre bout de verdure, tu me localise et tu me rejoins aussi vite que possible. Je noterais tes temps dans ce petit carnet… Quant à moi, j’aimerais travailler un peu plus l’absorption. J’aurais besoin de ton Environnement Printanier pour ne pas tuer les plantes autour de nous… Je devrais aussi m’entraîner à la Création de la Nature ! Non, Milo, arrête de dire que je ne veux m’améliorer que pour lui faire plaisir ! C’est faux ! Et de toute façon, il faut bien commencer à mûrir, un jour ou l’autre. Arrête de piailler pour rien et mettons nous au travail ! Tu es prêt ?

Post II - 784 mots

Le petit animal attendait sur sa branche. Il sautillait quelques fois le long de la structure en bois, la curiosité attisait par le vol d’un moucheron ou bien par l’activité d’humains en contrebas. Syrianne avait indiqué qu’elle lui ferait parvenir un signal, lorsqu’elle serait prête. Elle avait ensuite laissé son compagnon seul et était parti créer une petite piste que le moineau devrait suivre, à l’aide d’objet qu’elle lui avait au préalable présenté, pour qu’il sache quoi chercher. L’itinéraire à suivre apparaîtrait alors à la créature ailée par son pouvoir de localisation et il n’aurait plus qu’à le suivre pour arriver au but final : trouver Syrianne. Tout ça le plus vite possible puisque le but était d’améliorer sa vitesse sans laisser de côté la moindre de ses capacités ou de ses sens.

Aux aguets, Milo regarder tantôt l’horizon, tantôt le ciel, clairsemé de nuages. Le top départ y apparut soudain très clairement pour lui, à peut-être un ou deux kilomètres de l’endroit où il se trouvait. Le signal n’avait pas été difficile à voir, même de loin. Syrianne avait lancé dans le soleil une petite orbe de lumière, de la taille d’un point et l’avait fait explosé à la manière d’un feu d’artifices. De petites étincelles de lumière pure en était retombés doucement vers le sol. L’oiseau quant à lui ne s’était pas attardé sur les détails et l’aspect poétique qu’avait donné la Magicienne à la chose. Elle était toujours créative dans ce qu’elle faisait et on ressentait toujours sa patte dans la moindre de ses oeuvres. Dans cet entraînement, Milo allait en faire les frais…

Il s’élança, en se laissant tomber dans le vide en piquée, les ailes resserraient contre son corps. On aurait pu croire à un rapace, un oiseau de chasse qui se jette sur sa proie, à sa manière de voler. Ça, il l’avait appris tout seul, puisque évidemment, sa maîtresse n’avait pas d’elle. Et il n’était pas peu fier d’y arriver… Aux prix de nombreuses chutes, la tête la première ainsi que d’une foulure à à l’aile qui avait raviver une ancienne blessure et qui avait rendue Syrianne très inquiète. Il avait même eu droits à des remontrances, ce qui était tout de même très rare de la part de l’adolescente, plus encline à l’affection qu’aux reproches. Il remonta ensuite, frôlant l’herbe et créant un appel d’air qui fit vibrer les brins comme un coup de vent avant de rejoindre une hauteur plus confortable. Il ne fallait pas se faire marcher dessus ou foncer droit dans une paire de jambes…

Il trouva le premier objet dans un buisson. Il s’agissait d’une petite cuillère, ne vous demandez pas ce qu’elle faisait là ni pourquoi Syrianne l’avait en sa possession. Milo lui avait fait remarqué que trouver ce genre d’ustensile dans une besace n’était pas normal et elle n’avait fait qu’hausser les épaules. L’organisation et l’ordre, ce n’était pas pour la jeune femme. Elle y préférait largement son bordel « organisé », du moins, de son point de vue puisqu’elle avait découvert la présence du couvert en même temps que Milo. Ça aidait à sa créativité, paraissait-il. Plutôt à sa fainéantise mais soit, chacun son avis et surtout, chacun ses excuses pour ne pas avoir ranger correctement ses affaires…

L’oiseau plongea alors dans les branches touffus de l’arbuste pour y récupérer la cuillère en argent qui y avait été caché. L’animal devait récupérer chacun d’entre eux et les échanger avec le suivant sur sa route pour prouver qu’il les avait bien tous retrouver et qu’il ne sautait pas d’étapes pour gagner du temps. Il n’était pas non plus question d’en perdre plus que ça, aussi se remit-il en route. Décoller du sol était une chose beaucoup moins aisé que de se lancer d’une certaine hauteur. Déjà, Milo ne pouvait pas se donner en spectacle en accomplissant des loopings de folie. Mais surtout, il n’avait pas l’impulsion du saut… D’ailleurs, certaines espèces de volatiles étaient incapable de décoller s’ils étaient trop bas. Heureusement pour lui, ce n’était pas son cas. Espèce hybride entre un petit moineau des villes et un rongeur, certainement un mulot, Milo pouvait se permettre un saut puissant à l’aide de ses pattes arrières pour se donner un premier élan. Il dût tout de même si reprendre à deux fois avant de maintenir un vol assez équilibre pour reprendre la suite de son parcours. Tout en cherchant à localiser le prochain objet, qu’on taira pour vous laisser la surprise, Milo se demanda ce que Syrianne avait bien pu prévoir. La cuillère avait été le niveau un, et elle avait déjà était caché de la vue pour qu’il n’utilise que son sens de la localisation, et très proche du sol pour lui donner une difficulté supplémentaire. Syrianne n’avait pas lésiné sur les obstacles… Affaire à suivre !

Post III - 801 mots