L’homme se penchait sur un ouvrage qui était posé sur son bureau. Sa tête était appuyée sur son poing tandis qu’il parcourait à nouveau les lignes du parchemin. « Tu comptes vraiment y aller, alors ? » Ses prunelles quittèrent un court instant la lettre, pour s’attarder sur son interlocutrice. « Je n’ai pas vraiment le choix. » La jeune femme fronçait les sourcils. On pouvait lire l’inquiétude sur son visage. « Tout de même, je ne pense pas qu’emmener Asra là-bas soit une bonne idée. » Le magicien se leva de sa chaise pour rejoindre son épouse. « Je préférerais aussi qu’elle reste là, mais ça la concerne aussi. On ne risque rien, ne t’en fais pas. » Doucement, il vint entourer le visage de sa bien-aimée de ses deux mains. Du bout de ses doigts il caressait lentement ses joues. « Ce ne sera pas long. On prend le portail, et une fois qu’on a terminé ce qu’on doit faire là-bas, on revient. Tu vois ? » La jeune femme ne semblait toujours pas rassurée, mais acquiesça tout de même d’un geste de la tête. Gabriel vint déposer un baiser sur son front, avant de se diriger vers la porte de son étude accompagné de sa chère et tendre.


Ils arpentaient le couloir en direction de la chambre de l’enfant. « Quand le serviteur de la Dame doit-il arriver ? » L’homme passa une main dans ses cheveux pour dégager les mèches qui tombaient sur son visage. « Il ne devrait pas tarder. J’espère qu’Asra est prête. » - « J’ai prévu une robe pour elle. Ce n’est pas tous les jours qu’elle s’éloigne autant du territoire. » Gabriel ria doucement. « Non. En dehors de Basphel c’est même la première fois. » Elina ne semblait toujours pas avoir le cœur à rire. « Je ne pensais pas que cela arriverait si tôt. » Le magicien vint saisir la main de son épouse. « Ne t’en fais pas. Elle ne sera pas toute seule. » Elle soupira. « Justement. J’aurais aimé que Jeremiah puisse vous accompagner également. » Gabriel haussa un sourcil, un rictus moqueur au visage. « Tu ne me fais pas confiance à ce point ? » La jeune femme sourit, avant d’embrasser son conjoint. « Tu sais bien que c’est faux. Je sais que tu sauras prendre soin d’elle… Mais toi ? Qui prendra soin de toi ? » L’homme l’entoura d’un bras pour la garder auprès de lui. « En temps normal tu es celle qui prend soin de moi. On va faire exception pour cette fois, et je vais prendre soin de moi. » Elina vint se blottir contre le magicien.


« Disons que je te voles ton rôle pour cette fois, mais ne t’en fais pas, j’aurais vite fait de te le rendre. » La jeune femme acquiesça à nouveau d’un signe de tête. Si ses boutades n’avaient pas entièrement chassé l’inquiétude de sa bien aimée, au moins avait-il réussi à la faire sourire. Il ne tardèrent pas à arriver sur le pas de la porte de la chambre d’Asra. Du dos de sa main, il frappa doucement contre le bois de celle-ci, avant de l’ouvrir. « Tu es prête ? » La jeune fille leva soudainement les yeux vers son oncle. « Je pensais qu’on ne mettait pas ce genre de vêtements pour voyager. » L’homme s’esclaffa, les bras croisés sur son torse. « On ne va pas vraiment voyager, ma puce. On va passer par le portail, ce sera beaucoup plus rapide. » - « Oh. » L’adolescente n’eut pas le temps de le rejoindre, qu’un domestique vint les prévenir de l’arrivée du serviteur de la Dame. Le magicien tendit son bras à la jeune fille, un grand sourire aux lèves. Sans trop tarder, ils descendaient les marches qui menaient directement au hall d’entrée. De rapides présentations s’opéraient, durant lesquelles, le serviteur expliqua à nouveau qui il servait et quel était le motif de sa venue. Ils étaient sur le point de partir. De dernières embrassades avant le grand départ, qui finalement, n’avait rien de grand puisque si tout se passait bien, ils reviendraient vite.


Enfin, ils pouvaient prendre la route en direction de l’Antre de la Dame. « Tu as lu le livre que tu m’a emprunté ? » Le regard de la jeune fille se perdait dans le paysage. « Non. Je savais qu’on allait partir alors j’ai préféré ne pas le commencer. » En effet, si Asra avait horreur de quelque chose, c’était bien de ne pas pouvoir terminer ce que l'on avait commencé. Cela faisait toujours sourire le magicien. « Vous aimez lire, alors ? » Lorsque le serviteur s’adressait à eux, Gabriel n’était jamais très confiant. Bien sûr, il n’allait pas imaginer le pire et se dire que sa nièce et lui ne reviendraient jamais de ce périple. Loin de là. L’adolescente acquiesça avec un enthousiasme certain. « Quel genre de livres ? » Elle haussa un sourcil. « Je les aime tous. J’aime bien savoir que dès que j’en finis un, d’autres m’attendent. » Le magicien croisa ses bras sur son torse. Il savait bien que dès lors où ils avaient appris que leur présence était requise, Asra n’attendait plus que de concrétiser ce voyage. Elle l’attendait avec impatience, et à présent que c’était imminent, elle s’en réjouissait bien plus que son oncle. « Dans ce cas, vous avez peut-être entendu parler de notre destination ? » En effet, elle en avait entendu parlé de la bouche de la même personne qui l’accompagnait aujourd’hui.


D’ailleurs, à peine avait-il épelé son nom, que la jeune fille s’était empressée d’essayer de trouver le moindre ouvrage qui puisse éclairer sa lanterne sur cette fameuse ville. Asra n’avait pas trouvé grand-chose dans l’étude de son oncle. Cela ne l’avait pourtant pas découragée pour autant. Elle avait mis à profit les ouvrages qui étaient mis à la disposition des élèves de Basphel. Le peu qu’elle avait pu lire l’avait fasciné. « J’ai lu un livre qui parlait de l’architecture de Giniyi. Si j’en crois ce qui est écrit, ce doit être une ville très étrange. » - « Étrange ? » Il est vrai que l’adolescente ne mâchait pas ses mots. Quelques minutes suffirent à ce qu’ils aient rallié le fameux portail qu’ils allaient devoir emprunter pour rejoindre l’Antre de la Dame, et plus précisément, Giniyi. Si la jeune magicienne s’était contentée de répéter bêtement les mots de l’ouvrage qu’elle avait pu parcourir, ils lui furent ôtés de la bouche lorsque devant ses mirettes argentées, se dévoilait le paysage de la ville aux toits écarlates. A maintes reprises, la jeune fille balaya les différents bâtiments du regard. Puis, elle s’attarda sur les abords de la cité. Elle n’avait qu’une envie : Explorer, et voir ce que ce lieu avait à lui offrir.


Rapidement, le serviteur de la Dame les escorta en direction de ce qui pourrait devenir leur future demeure. « On ne visite pas ? » Asra ne semblait pas se lasser des merveilles qui défilaient devant de ses mirettes. « Plus tard, ma puce. Il a quelque chose à nous montrer. » Gabriel désigna leur guide d’un geste de la tête. « Tout à fait. Libre à vous de visiter plus tard. » Il marqua une pause. « Oh, sachez juste qu’il pourrait vous arriver de croiser la Dame rouge sur l’île. Tantôt elle vit ici, tantôt elle disparaît. » Un frisson remonta le long de l’échine du magicien. « La Dame Rouge ? » L’adolescente semblait aussi surprise qu’intriguée. Visiblement, Asra ne semblait pas être autant gênée que son oncle à l’idée d’interroger le serviteur sur les informations qu’il était susceptible de leur donner. D’un geste leste, il déverrouilla la porte d’une des nombreuses maisons présentes dans la zone. « Nous y sommes. Je vous en prie, faites comme chez vous, ne vous gênez pas pour visiter les lieux. » Sans se faire prier, la jeune fille commença à faire le tour de chaque pièce. Gabriel, quant à lui était un peu plus hésitant.


« La jeunesse… Elle semble déborder d’énergie. » Le magicien soutint son interlocuteur du regard un court instant, avant de revenir à l’enfant. « En effet. Elle se faisait une joie de venir ici. » Un léger sourire flottait sur les lèvres du serviteur. « Ça m’a tout l’air d’être une charmante jeune fille. Vous avez des projets pour elle ? » L’homme arqua un sourcil. « Elle est jeune. Pour le moment elle étudie à Basphel. Ensuite, nous verrons bien. » -  « Je vois. Et vous ? Votre femme vient tout juste de mettre au monde votre fils si je ne me trompe. Quel chemin comptez-vous arpenter à partir de maintenant ? » Gabriel dégagea son visage des quelques mèches de cheveux qui y tombaient. « Je ne suis pas très pressé. Pour l’heure, je veux surtout être présent pour eux. » L’homme ne voulait surtout pas passer à côté du moindre moment aux côtés de sa famille, qu’il soit gorgé de bonheur ou non. A chaque bougies qu’Asra avait soufflé sans que sa mère ne puisse y assister, le magicien avait gagné en détermination autant qu’il avait plongé dans les ténèbres. Sans trop tarder d’ailleurs, l’adolescente rejoint ses accompagnateurs, affichant un air des plus satisfait. « La maison vous plaît ? » Elle acquiesça d’un geste de la tête, le sourire aux lèvres. « Beaucoup. » Le serviteur lui rendit ce même sourire. « Alors dis-moi, ça te plairait de fonder une famille sous ce toit ? » Asra haussa les épaules, songeuse.


« Je ne sais pas. Peut-être plus tard ? Je suis encore jeune. Il y a plein de choses que je veux faire avant. » L’homme arqua un sourcil. « Comme quoi ? » La jeune magicienne vint soutenir son menton de sa main. « Je ne sais pas trop. Je veux continuer à étudier pour le moment. Mon oncle m’a aussi parlé de voyages que je pourrais peut-être faire plus tard. Puis, si je peux apprendre plein de choses au passage, c’est pas plus mal. Oh, et il y a plein de livres que je n’ai pas lu encore. » Le serviteur fouilla soudainement dans le sac qu’il portait depuis le début du voyage, et en sorti une clef cuivrée. « Je ne crois pas qu’il y ait de bibliothèque ici, non ? » Asra arqua un sourcil. « Si, mais elle est vide. » - « Naturellement. » Doucement, il attrapa la main de la jeune fille pour y glisser la clef aux creux de celle-ci. « Qu’est-ce que tu attends pour la remplir ? » Il l’incita a refermer ses doigts, avant de lui offrir un grand sourire. « Je suis sûr que vous atteindrez vos objectifs. N’oubliez néanmoins pas que si jamais la difficulté devait vous trouver, la Dame Rouge vous tend la main. » Le serviteur les salua une dernière fois avant de se diriger d’un pas lent vers la porte par laquelle ils étaient entrés. L’adolescente n’était pas sûre de comprendre ce qu’il venait de leur arriver, ni même ce que leur guide avait voulu dire. Gabriel poussa  un long soupir. « Tu es fatigué ? » L’homme ria de bon cœur. « Je n’ai plus ton âge. » Asra haussa les épaules tandis q’un léger rictus fendait son visage. « On a fini ce qu’on devait faire, alors ? » Le magicien acquiesça avant de rabattre ses cheveux en arrière. « On va pouvoir visiter la ville alors. » L’homme la soutint du regard, estomaqué. « Tu es infatigable. » La jeune fille commença à se diriger à son tour vers la sortie. « On a pratiquement rien fait. Je ne vois pas comment tu peux être fatigué. » Gabriel s’empressa de lui attraper le bras pour la ramener vers lui. « Ah oui ? Je ne suis pas si vieux que ça pourtant. Je ne comprends pas non plus. Cela dit, tu ne devrais pas contrarier ton nouveau guide si tu veux qu’il te fasse visiter. » Un air taquin au visage, il ébouriffa les cheveux de l’adolescente avant d’y déposer un baiser.

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Merci pour l'event !   J'étais très motivée comme tu peux le voir. 8D

Thème

La jeune femme peinait encore à remettre ses idées en place, et la douleur lacérante qui tiraillait le bas de son dos n’aidait pas. Elle ne saurait dire si il y avait trop d’informations à traiter, ou si au contraire, l’ange en manquait cruellement. Là demeurait certainement la raison de sa confusion. Une voix masculine la sortit néanmoins de sa torpeur. « Venez, suivez-moi. Ne nous attardons pas en ce lieu. » L’homme plaça une main sur l’épaule de la captive, tandis qu’il tendait son autre membre dans la direction qu’il voulait prendre. D’un pas hésitant, Shanxi s’élança aux côtés de l’inconnu. Assurément, c’était ce qu’il était. La maquerelle avait escorté l’emplumée jusqu’au serviteur, sans vraiment expliquer à l’ange de quoi il retournait. Puis, elle l’avait simplement laissée là, avec lui, en échange d’une bourse bien remplie. Avait-elle été vendue alors ? C’était pour le moins étrange. Quel intérêt Ethel aurait à se faire déposséder de la sorte, moyennant somme sonnante et trébuchante ? L’argent, elle l’aurait eu de toute manière. Puis, si tel était le cas, et que cet transaction lui convenait réellement, pourquoi couvrir la jeune femme d’artifices esthétiques en lui intimant de ne les retirer sous aucun prétexte tant que ses pieds fouleraient Giniyi ?


Shanxi se remémorait les propos de l’enfant de l’œil. Personne ne devait la savoir en liberté, arpentant les rues de cette ville. En fait, pour le peu d’information qu’elle avait donné à l’emplumée, l’adolescente avait été formelle concernant son statut. En Giniyi, la vertueuse qu’elle était avait trouvé la mort pour cause d’insubordination. Tant qu’elle se trouverait dans l’Antre de la Dame, la jeune femme devrait veiller à ce que Shanxi Taiji reste dans les bras d’Ezechyel. Alors que ses talons martelaient lentement le sol, ses prunelles vinrent se perdre une nouvelle fois sur le paysage citadin de Giniyi. Elle avait déjà pu le contempler à maintes reprises, que ce soit lorsque l’ange avait foulé cette terre pour la première fois, ou lorsque son regard se perdait sur les multiples bâtiments qu’elle pouvait apercevoir derrière la fenêtre de sa chambre. « C’est une charmante ville, n’est-ce pas ? » La voix de son interlocuteur manqua de la faire sursauter. Shanxi acquiesça d’un geste de la tête, avant de répondre simplement par l’affirmative. Ils s’arrêtèrent un court instant. « J’imagine que vous ne devez pas vraiment avoir de bon souvenirs vous rattachant à ce lieu. J’espère néanmoins que vous pourrez les remplacer par des meilleurs, un jour. » Un sourire cordial ornait son visage.


D’un geste de la main, il incita la jeune femme à reprendre la marche. Quelques gouttes de sueurs perlaient le long de son faciès. Son dos la faisait toujours plus souffrir, et l’ange peinait à tenir le rythme. Si ce n’était pour le maquillage dont la maquerelle l’avait recouverte, la pâleur de son visage aurait alerté n’importe quel bougre  sur sa condition. Son supplice ne dura guère plus longtemps fort heureusement. Une charmante maison les couvrait de son ombre, tandis que l’homme s’accommodait de la serrure de sa porte. Enfin, ils allaient pouvoir entrer. Tandis que le serviteur retenait les planches d’un bras, il invita la captive à entrer. A peine avait-elle posé un pied à l’intérieur, Shanxi balaya la pièce du regard. C’était une demeure tout à fait banale, à sa grande surprise. Elle n’était pas sûre de ce à quoi elle devait s’attendre jusqu’ici, et bien que le décor ne se prête pas aux horreurs que la vertueuse avait pu voir jusqu’alors, la tension qu’elle ressentait dans ses membres ne flanchait pas. « Je vous en prie, mettez-vous à l’aise. » Il plaça ses deux mains sur les épaules de Shanxi pour la débarrasser de son manteau. L’ange se crispait quelques peu à son contact. Non pas que l’homme était repoussant, ou semblait menaçant, loin de là. Au contraire, il s’était montré très avenant avec l’emplumée.


Seulement, le moindre mouvement semblait accentuer ses afflictions, et la jeune femme avait l’impression qu’elle allait s’évanouir si la douleur s’intensifiait. « Jolie, n’est-ce pas ? » L’ange parcourait à nouveau le petit hall d’entrée du regard. « En effet. » Le serviteur souriait. « Venez, je vais vous faire visiter. » D’un geste de la main, il invita la vertueuse à le suivre. Ils s’éloignèrent alors de la porte d’entrée pour entamer la visite des lieux. Une poignée de minutes suffirent à ce qu’ils aient fait le tour de la demeure, et aient rallié leur point de départ. « Alors, qu’en pensez-vous ? Vous n’avez pas changé d’avis, j’espère ? » Les prunelles argentées de Shanxi quittèrent les différentes décorations qui ornaient les murs pour s’attarder sur son interlocuteur. « Non. C’est une charmante demeure que vous avez là. » A nouveau il souriait. « J’imagine que vous devez être épuisée. Allons nous asseoir, ça nous fera le plus grand bien. » D’une main dans le dos, il accompagna la jeune femme dans le salon. Confortablement installé dans l’un des fauteuils qui comblaient cette pièce, l’homme joignait ses deux mains. « Je n’ai rien à vous offrir pour vous désaltérer, je suis navré. » L’ange haussa les sourcils. « Ce n’est rien, ne vous en faites pas. » Il prit une grande inspiration, reposant son dos contre le dossier de son fauteuil. « Dites-moi, je me demandais… Que comptez-vous faire, maintenant que vous êtes libre ? » Si la captive pensait avoir été vendue, son interlocuteur venait de lui confirmer le contraire. Elle peinait à y croire, vraiment. Ethel lui aurait alors rendu sa liberté, juste comme ça ? La jeune femme s’évertuait à chercher un piège là où il n’y en avait pas, du moins pas vraiment. Bien sûr, l’enfant de l’œil ne lui avait pas cédé la liberté sans raison, et encore moins sans dédommagement pour la peine qu’elle s’était donnée.


Cela dit, si vraiment elle était libre, l’ange n’avait jamais vraiment pensé à ce qu’elle ferait. L’espoir n’était pas toujours un allié entre les murs de la Terre Blanche. Si certains prenaient le risque de rêver, cela n’avait jamais été le cas pour Shanxi. Attendre quelque chose qui n’arriverait peut-être jamais était pareil à une dague dans son dos. En fait, l’une était préférable à l’autre même, au vu du manque de garanties. Et maintenant ? Maintenant qu’elle avait le droit de se tourner vers l’avenir ? La vertueuse ne savait toujours pas ce qu’elle avait le droit d’espérer ou non de celui-ci. Finalement, qu’elle se trouve entre quatre murs ou non, Shanxi avait toujours l’impression d’être dans l’obscurité la plus totale. Sauf que cette fois-ci, on lui demandait d’avancer. « Je ne sais pas trop. Je pense rejoindre les Jardins de Jhēn. » Le serviteur acquiesça d’un geste de la tête. « Je vois. C’est vrai que ça a dû être pénible pour vous, et ça doit l’être encore pour ceux qui sont toujours là-bas. J’imagine aussi que le fait de ne pas savoir si un jour vos plaies pourront se refermer doit être pesant. Oublier toutes les horreurs auxquelles vous avez pu assister ne doit pas être possible, mais j’ai bon espoir que vous vous en sortirez malgré tout. » Si encore l’ange n’y avait qu’assisté, en effet. Hélas ce n’était pas le cas. Pour les enfants de l’œil, voir un vertueux perpétrer ces horreurs était d’autant plus jouissif que si c’était leur mains qui se trouvaient être maculées de leur sang.


« J’imagine que vous devez être inquiète pour vos amis. Ne pas savoir si le jour qui se lève sera le dernier… Si vous allez les revoir un jour. » Un nœud semblait prendre forme au fond de sa gorge. Les propos de son interlocuteur étaient justes, précis, et destructeurs. Ils étaient pareils à des charbons brûlants qu’elle devrait avaler, un à un. Ils restaient coincés, et consumaient sa chair de l’intérieur. « Je suis sûr qu’ils s’en sortiront, comme vous vous en êtes sortie. Peut-être que vos frères et sœurs libres iront les aider ? Peut-être même que vous serez à leurs côtés pour les sortir de là. » Les doigts frêles de la jeune femme se refermaient lentement sur ses avant-bras. « J’aimerais vraiment. » Le serviteur de la Dame se redressa, avant de réduire l’espace qui les séparait. « J’en doute pas. » Pliant les genoux pour se mettre à son niveau, il lui tendait une main ouverte, au creux de laquelle se trouvait une petite clef. « Tenez. Elle est à vous. » Son regard remonta jusqu’au visage de l’homme. « Vous aurez toujours un toit pour vous abriter si vous en ressentez le besoin. Tout comme vous pourrez vous tourner vers ma maîtresse, si vous souhaitez un jour concrétiser ce désir que vous nourrissez, ou même tout projet qui pourrait naître dans votre esprit. Vous aurez peut-être le plaisir de la croiser, un jour. Elle séjourne parfois sur l’île, voyez vous. »

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