Comme une hermine dans l'eau.

Nyshka m'emmenait régulièrement au Lac de la transparence afin de pêcher notre repas du soir. Elle adorait rester là, la canne tendue à attendre qu'un pauvre poisson vienne mordre à l’appât.
Au départ, ça ne m'intéressait pas vraiment, après tout, je ne savais pas ce qu'elle faisait. Je l'entendais chanter en elfique lorsqu'elle préparait sa ligne. Je me sentais plus dans mon élément en foret pour être honnête. Tâter le poisson avait un avantage, ceci-dit, la plaine entourant le lac était libre de tout arbre. De ce fait, je pouvais, à ma guise, me transformer en hermine et courir librement prêt de la berge, sous l’œil attentif de Nyshka. Ça ne lui plaisait pas vraiment car j'avais tendance à aller trop loin. Elle devait venir me chercher pour m'attraper par la peau du dos avant de me ramener prêt du campement.

On passait plusieurs jours au bord du lac dans un abris de fortune qui nous donnais protection contre le soleil et la fraîcheur de l'ombre. Quand j'en avais assez de courir partout je faisais un somme, raccourcissant ainsi les journées, contre mon ennui. Un jour, je demandai à ma mère elfe si elle voulait bien m'apprendre les rudiments de la pêche. Je savais que pour elle, ça devait être un challenge de taille, sachant que je n'y voyais rien. Mais à quoi bon me le refuser, je devais bien apprendre un jour ou l'autre. Elle commença par m'initier à la canne en elle même.

- On va commencer par la canne que tu peux laisser dans un support au bord de l'eau. Elle est assez rudimentaire. J'ai utilisé du bois de chêne afin de faire le corps de la canne. Tu sens comment elle est solide ? Même si elle sert aux petits poissons qui se trouvent au bord de l'eau, on est jamais à l'abris qu'un plus imposant puisse se prendre dans le piège, de ce fait, il faut de la résistance pour tirer le poisson hors de l'eau.

Pendant son explication, elle déplaçait mes mains avec les siennes pour que je puisse garder en mémoire les courbures des objets. C'était le genre de moment que j'appréciait passer avec elle.

- Tu vois cette corde qui va te servir de ligne ? Je l'ai tressée moi même dans les branches d'un bois Canon, je te montrerai comment faire. Si tu descend le long de la ligne, tu arrives sur l’hameçon, c'est à cet endroit que le poisson va être prit au piège quand il croquera l'appât. Touche ma petite. Tu sens cette pointe là ? Elle va empêcher le poisson de s’échapper par la suite. J'ai taillé celui-ci dans le bois d'un cerf, que j'ai chassé, tu peux utiliser les os également, mais c'est un peu plus difficile car plus résistant.  

Elle me montra ensuite la canne pour pêcher plus loin dans le lac. C'était plus ou moins pareil, on utilisait une corde tressée plus fine et plus longue, donc, plus résistante. La canne était munie d'une poulie comme elle appelait ça. Nyshka donnait ce nom car son principe était basé sur les poulies des puits pour pouvoir remonter l'eau avec le moindre effort. J'hochais la tête au fur et à mesure de son cours. C'était bien plus technique que ce que je pensais, cela commençait à me passionner de plus en plus.

Je l'ai laissé pêcher le reste du temps, me remémorant avec concentration les différentes parties des objets qu'elle m'a proposé. Le soir, nous avons pu savourer deux barbeau d'une taille certes raisonnable, mais qui a bien remplit nos estomacs. Le lendemain, afin de lui apporter mon aide, elle m'apprit à vider le poisson, une partie importante, mais que je n'ai pas spécialement apprécié. Cependant, ça n'était pas pire que de vider un chevreuil ou un sanglier.

- Une chose importante à savoir quand on veut se faciliter le travail, pour facilement écailler le poisson, il est préférable qu'il soit encore humide. Le faire dés sa sortie de l'eau, c'est encore mieux. Pour l'écailler, tu prends ton couteau et tu viens frotter le poisson de long en large, attention à ne pas donner trop de pression, tu vas entailler l'animal et ça compliquera la tâche par après. Tien, prend mon couteau et essaye.

Après avoir attrapé un poisson, elle plaça un grand carré de tissu sur le sol afin de ne pas laisser des écailles partout. J'entrepris ensuite d'écailler la carpe qui s'offrait à moi. C'était plus difficile que ça en avait l'air. Je me suis régulièrement blessée sur les écailles lorsque je voulais savoir si elles étaient bien toutes partie, sans compter le couteau qui me glissait des mains pour venir m'entailler. Je persévérerai voulant donner le meilleur de moi même. Après avoir pensé mes blessures, Nyshka me dit en rigolant:

- Aussi douée  avec tes mains qu'un âne qui tricote! On verra la suite demain, profites-en pour te reposer.

Elle caressa le haut de mon crâne laissant apparaître un fier sourire sur mon visage.

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Comme une hermine dans l'eau.

Je me réveillai avec une sensation de chaleur sur ma fourrure. L'odeur de la rosée du matin venait me chatouiller les narines, j'en ai donc déduit que c'était encore le matin. Je savais que je devais me lever, mais j'étais tellement bien ! Je me redressais, prête à conquérir ce lac. Je repris forme humaine avant d'enfiler ma robe. Nyshka n'était pas là, je l'attendais donc patiemment. Elle revint au campement avec du pain acheté à Ethernoir, il était encore chaud. En fin de matinée, elle me montra la suite de son cours sur le vidage de poisson. Elle attrapa mes mains afin de me diriger dans cet accomplissement.

- Après avoir écaillé le poisson, il faut le rincer correctement pour ne rien laisser. Le manger alors qu'il reste des écailles pourrait te blesser, viens et observe. J'ai ici à côté de moi un pot que j'ai fabriqué avec l'écorce d'un chêne, tu le sens ? Bien. Tu as le poisson ici, on prend le couteau. Tu places la pointe de la lame ici, proche de la queue, bien au centre. Enfonce encore un peu plus... Et nous y voilà. Tien, prend ton autre main, repère les branchies. Voilà, prêt de la tête. Maintenant, tu coupes sur la longueur, tu dois t’arrêter juste avant les branchies. C'est ça ... Continue ... Attention, tu dérapes !

Je sentis mon couteau se planter dans la terre meuble, je grimaçais alors que Nyshka rigolait de bon cœur. Je souriais à mon tour, elle prenait tellement plaisir, il était hors de question que je fasse la tête.

- Ce n'est pas grave, on va rectifier le tir... Voilà, parfait ! Maintenant, utilise ton index pour ouvrir la cavité abdominale, je sais, c'est dégoûtant. Voilà, maintenant tout ce qui a là, il faut l'enlever, ce sont les boyaux du poisson.

J'avais l'impression que j'allais vomir, c'était horrible au toucher. C'était chaud et visqueux. Mon estomac se serra le temps de "l'opération".

- Et tu places tout ça dans le sceau de tout à l'heure. Ils ne sont pas utiles pour le moment, plus tard, on pourra en faire des filets, mais autant bien commencer dans les bases avant de passer à la grande complexité qu'est la pêche ! Tu te débrouilles bien. Rince le poisson, maintenant.

J'étais fière de ma prouesse malgré mon handicap. Je ne suis pas à me plaindre, la vie n'est pas à jeté. Mais souvent, c'est difficile. Même avec de l'aide, ce genre d'accomplissement pouvait égailler notre journée. Après avoir rincé l'animal, je me replaçai sur la berge pour placer la bête sur le morceau de tissu. Nyshka guidait à nouveau mes mains pour reprendre le couteau et tenir le flanc de notre proie.

- Maintenant, tu places la lame juste ici, en dessous des branchies, tu le sens ? Et tu coupes la tête, vas-y doucement pour ne pas te blesser.

Ma découpe était irrégulière mais relativement propre.

- Maintenant, il est bon à cuir. Mais avant, j'ai à te parler, va te laver les mains et revient.

Quand Nyshka devait me parler, c'était souvent important, d'autant plus que le ton qu'elle a employé était grave. J'ai donc exécuté ses ordres sans poser de question. Je l'entendais au loin préparer les ustensiles. Probablement, un ragoût de poisson. Je retournais m’installer prêt d'elle, m'agenouillant dans l'herbe.

- Sais-tu pourquoi la pêche est importante ? Je secouais la tête en guise de réponse négative. - Je t'ai appris à chasser, mais tu ne pourras pas toujours utiliser la chasse pour te nourrir. Par exemple, les animaux qui sont en chaleur défendront leur territoire avec une grande force, cela pourrait être un danger pour toi! L'hiver, certaines de tes proies se cachent dans des terriers pour y dormir toute la saison. Je pourrais te citer un grand nombre de raisons. Mais ce que tu dois retenir, c'est que la pêche, tu peux la pratiquer en toute heure, à tout instant, il y aura toujours du poisson. Un jour, je ne serais plus là et tu devras te débrouiller seule, mon enfant.

Je n'aimais pas lorsqu'elle parlait comme ça, mais elle avait malheureusement raison. Je devais apprendre à me débrouiller seule car un jour ou l'autre, je le serais. Je ne lui ai pas répondu. Un sentiment de tristesse s'était emparé de moi. Si je parlais, cela me trahirait, même si je sentais qu'elle avait connaissance de cette tristesse. Sans un mot, donc, je me transformai en hermine pour me lover sur ses jambes. Le feu crépitait tandis que Nyshka me caressait lentement le dos, glissant ses doigts dans ma fourrure.

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