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 Négociations [Niv. III]

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Ven 20 Mai 2016, 22:54


« Vous me paraissez anxieuse et tourmentée, ma Tante. » Âme encore distraite et à peine tirée de ses rêveries, la Sorcière baissa doucement ses yeux clairs sur Marius, qui se tenait à quelques pas de là, occupé à la dévisager avec prudence. Elle eut un sourire sec et froid. « Ne devrais-tu pas être dans tes bagages ? Les préparatifs se doivent de toucher à leur fin. Tu prends le prochain navire. » Quelques jours auparavant, au beau milieu du courrier, deux missives particulièrement attendues avaient retenu l’attention des époux Pandémonium. Les lettres étaient fermées par le sceau impérial. Elles étaient de la main de l’Empereur Noir. L’une s’adressait à Marius tandis que l’autre était destinée à Viviane. Elles contenaient leur première mission, celle qu’ils devaient accomplir pour la Prison. C’était un grand évènement. Cesare et sa femme ne pouvaient que se féliciter d’avoir élevé deux Mages avec autant de potentiels. Ils étaient si jeunes. Ils ignoraient encore à quel point ils étaient promis à un bel avenir. Peut-être allaient-ils bientôt en prendre la mesure ? La question rongeait l’esprit de la cruelle Nebula, inquiète de l’enchaînement à venir des révélations. L’heure était sûrement venue. Elle savait qu’elle n’avait été que la tante, supposée éduquer les enfants de son frère en entretenant un véritable mystère autour de sa personne, un secret que même les archives les plus vieilles ne mentionnait pas. Cependant, elle considérait Viviane et Marius comme sa propre descendance et un vil sentiment jaloux de possessivité emplissait son être. Elle désirait les garder auprès d’elle. C’était insensé. Il ne la laisserait pas faire. Elle ne pouvait rien contre lui. « Elles sont terminées depuis plusieurs heures déjà. » - « Bien. » - « Êtes-vous sûre que tout va bien ? » Nebula soupira, attrapant un verre dans une main, une bouteille de vin dans l’autre. Elle sirota sa coupe en se rapprochant de son neveu. « Fais en sorte de rendre ta famille fière de toi. » répondit-t-elle simplement. Elle tourna les talons, la mine pincée. « Ces immondes créatures des mers … » pesta-t-elle tout bas. « Méfie-toi de ces femmes. » Marius la contempla, surpris. « Comment savez-vous ? » Il n’avait parlé de ses objectifs à personne. « Tu serais étonnée de ma véritable position au sein du gouvernement sorcier, Marius. » Son expression était à la fois suffisante et méprisante. « Elles ont à peine payé leurs crimes. » - « Un jour, nous nous vengerons. Nous sommes patients. » Elle ne put qu’acquiescer. « Emmène Calissa avec toi. Je n’apprécie pas l’idée que tu te jettes dans la gueule de ses monstres, seul. » Marius ne partait pas seul, en réalité, mais accompagné d’une délégation entière. Aucun de ses Sorciers n’était lié, de près ou de loin, à la famille Pandémonium. C’était autant de traitre possible. Nebula était une personne sage et avisée. Calissa servait son neveu corps et âme. C’était déjà ça.

Le voyage jusqu’à Port Dirælla fut plutôt tranquille, presque paisible mais à mesure que le vaisseau se rapprochait des côtes du Nouveau Continent, les inquiétudes et les préoccupations se faisaient grandissantes ; la rage et la colère aussi. Les conflits opposant les Sirènes et les Sorciers n’étaient pas tout à fait réglés. Le départ de la Khæleesi du trône de la Cité Engloutie avait contribué à apaiser les tensions mais la Prison se remettait mal des mille et un affronts du peuple des mers, des humiliations subies. Pourtant, l’Empereur Noir tâchait de sonner le glas d’une paix relative. Les négociations commerciales devaient reprendre. Les Sirènes étaient les principaux – et meilleurs – fournisseurs de biens des produits qui intéressaient les Mages Noirs au plus haut point. Malgré la persistance de la rancune, les pourparlers devaient reprendre, pour le bien des adorateurs de la Lune Noire. Que signifiait la paix, après tout, pour un Sorcier ? Ce n’était qu’un état intermédiaire entre deux sombres desseins, et les sourires ne serviraient qu’à mieux dissimuler le poignard qui les frapperait en plein cœur. Les Sorciers auraient leur revanche, un beau jour. Ils l’auraient même cent fois. « Nous semblons être les bienvenus. » remarqua Calissa, non sans ironie, tandis que le navire traversait les Gorges de Lirislin. Des regards lourds et pesants accompagnaient en effet le passage du bâtiment, qui battait fièrement le pavillon de la Prison. « Qu’importe. » murmura Marius, accoudé contre la rambarde. « Ce ne sont que des poissons. » Après un bref arrêt auprès d’un certain Tebryn Mynceria qui délivra les autorisations nécessaires, le bateau continua sa route vers la Porte de Shar. Le Sorcier observait les décors et l’architecture, sans rien dire, ni laisser transparaitre le moindre sentiment. Il se refusait à éprouver une quelconque admiration pour ces créatures, quand bien même il visitait Port Dirælla pour la première fois et qu’il était simplement à couper le souffle. Les Sirènes avaient beau être des garces, elles avaient un certain goût et un talent pour l’élégance. « Bienvenue à Port Dirælla. » Le salut provenait d’une belle et jeune femme aux cheveux blonds, qui attendit que ses invités soient tous descendus pour se présenter. « Je suis Lady Mélusine söel Kassa, la fille de Mélyssandra. Suivez-moi, je vais vous mener à elle. » Marius entama la marche, les autres suivirent le mouvement.

« Vous êtes la pupille de Lord Pandémonium, je suppose. » souffla doucement une voix grave et mélodieuse. Tout juste arrivé dans une immense villa, la délégation avait été reléguée dans un salon tandis que la dénommée Mélusine poussa Marius dans un bureau, seul, où il fit la rencontre, à n’en pas douter, de son hôte. « Lady söel Kassa. » articula-t-il en guise de salutation, en inclinant légèrement la tête. Ces politesses et ces signes de respect manquaient de lui brûler les yeux et l’esprit. Il supportait mal de devoir plier face à une Sirène. Consciente de cela, celle-ci sourit. Elle avait de longs cheveux blonds, presque blancs, qui ondulaient autour de sa silhouette et des yeux d’un noir d’encre. Elle était étrangement captivante, envoutante. Usait-elle de magie ? Marius recula d’un pas. « La Prison envoie un adolescent négocier avec moi. Sont-ils stupides ou bien … ? » - « Ne me prenez pas pour un enfant. » Du haut de ses dix-sept ans, Marius était un homme. Il n’avait jamais réellement été un gamin normal, joueur, farceur et maladroit. C’était sûrement le sort de tous les Sorciers de haut lignage. Ils ne connaissaient pas d’enfance. Il voulut ajouter que ses supérieurs ne l’avaient pas envoyé pour rien. S’il en restait persuadé, il choisit de ne pas sortir cette carte. « Hum hum. » marmonna-t-elle, peu convaincue. « Bien. » Le sous-entendu était plutôt clair : elle souhaitait voir ce que valait son interlocuteur et, en bonne Sirène carnassière, cherchait à la dévorer, métaphoriquement ou non. « Votre gouvernement n’est qu’un nid de serpents, tout comme votre race d’ailleurs. Vous avez essuyé un lot de défaites et de hontes. Je ne pense pas que vous soyez prêts à reprendre le commerce avec qui que ce soit de mon peuple. » - « Pour ma part, j’estime qu’il n’y a pas meilleur moyen de se réconcilier que de jouer la carte financière et de s’appuyer sur des besoins commerciaux. » - « C’est là tout le problème, mon petit Marius : vous avez besoin de nous, pas le contraire. » Avant de prendre le large, Marius avait pris soin de demander plusieurs rapports et expertises concernant l’affaire qu’il était censé résoudre. Lire ce charabia avait été long et douloureux mais il ne regrettait pas, en l’instant. « Vous bluffez. » Mélyssandra arqua délicatement ses petits sourcils. Marius était plutôt satisfait de son petit effet. « Votre peuple risque la pénurie de charbon et d’acier, surtout avec la récente édification de cette Cité. Nos matières premières vous intéressent. La reprise des échanges est primordiale pour vous. Vous êtes simplement trop bornés et prétentieuses pour venir à nos portes. » - « Ou nous attendions avec impatience le moment où l’Empereur nous enverrait ses troupes, nous supplier d’accepter un marché. » Elle tira une longue cigarette, le regard hautain. « J’attends. Suppliez-moi. » - « Non. » - « Non ? » - « Non. » - « Voilà qui est embarrassant. »

Marius tira lentement la chaise qui faisait face au bureau de la Sirène et s’installa tranquillement. Doucement, il glissa ses doigts dans ses cheveux, devenus sombres à force de magie noire. « Combien de temps croyez-vous pouvoir tenir avec vos petites réserves et carrières personnelles ? Je ne donne pas chers de vos écailles, ma chère. De plus, n’êtes-vous pas une Maison économique officielle de la Royauté Ondine, censée défendre les intérêts de votre nation ? Refuser la reprise des échanges n’est pas la meilleure solution car mon offre est la dernière que proposera la Prison avant bien longtemps. » - « Des menaces voilées ? Je suis curieuse de voir comment vous allez vous débrouiller sans nos plantes. » - « Et vous, sans charbon ni acier. Je pense que le besoin se fera ressentir chez vous en premier. Mon peuple se tournera vers des substituts de venin ou multipliera les contrats avec des vendeurs plus modestes d’autres races. » La Sirène eut un léger rire. « Tout échange sera coupé, entre nous et ceux qui nous fournissent et qui traitent avec vous. » - « Je vous retourne la mise-en-garde. » Il y eut un long silence. Ils se dévisagèrent. Marius demeurait froid, distant et impassible. Mélyssandra ne quittait pas son petit sourire provoquant. « Je vois. Si vous voulez bien quitter mon bureau un instant. » Le Sorcier, après une légère hésitation, obtempéra. Elle devait vouloir discuter avec d’autres Ondins. Soit son petit discours avait fait mouche soit elle planifiait sa mise à mort. Il devait être prêt aux deux éventualités. Il n’eut pas à aller bien loin pour retrouver le reste de la délégation, à qui il fit un rapide résumé de la discussion. Calissa, qui se tenait à l’écart puisqu’elle n’était qu’une servante au service d’un autre, contemplait son protégé, souriante. Lady söel Kassa ne tarda pas à réapparaitre, en compagnie de trois autres individus. Ils se remirent à parler. Marius dissimula sa satisfaction sous son habituel masque flegmatique. Les Sirènes évoquaient la possibilité de la reprise des échanges commerciaux. Ce n’était rien de vraiment grandiose mais tout allait pouvoir recommencer, lentement. C’était une très bonne chose. Les Sorciers venaient à manquer de plantes vénéneuses et médicinales, les réserves ayant été dilapidées pendant la guerre et emportées par l’immense vague.

« Marius, où allez-vous ? » - « Je n’en ai pas fini avec cette Cité. Son peuple possède bien des ressources et des produits. Lady söel Kassa est infiniment respectée pour être une femme d’affaire reconnue. Son acceptation fera suivre les autres. Allons voir d’autres Maisons. » Il songeait notamment aux algues et leurs multiples vertus qui pouvaient se révéler utiles à bien des égards ou au chocolat, qui était en pénurie dans le Royaume depuis bien longtemps. Au-delà des nécessités objectives, il y avait une part subjective, de gourmandise et de coquetterie. Le peuple des Sorciers n’était pas rustre. Pas en apparence.

Un dernier regard pour les femmes de la famille söel Kassa. Marius les scruta avant de se retourner et de murmurer, en songeant à la fille de Mélyssandra qui abordait un petit ventre rond, signe discret d’une grossesse encore récente. « Elle tombera du haut d’un escalier et perdra son bébé. »  

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Négociations [Niv. III]

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