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 L'enfant qui savait tout de la liberté [Mission N°III Rehla]

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Mer 21 Oct 2015, 11:42



Elle en avait entendu parler par Caelum, de cet enfant qu'il avait lui même consulté à une période de sa vie sur laquelle il ne s'était pas étalé mais qu'il lui avait décrite comme troublée et peut être même un de ces moments de profonde remise en question existentielle. En tant que rehla, elle comprenait fort bien, elle même arrivant à un stade ou sa conscience du monde commençait à évoluer. Ses rêves, les murmures des astres, ses intuitions qu'elle considérait comme tel à défaut d'admettre qu'il s'agissait d'autre chose, tout ceci atténuait la nuance entre son monde spirituel et celui, réel, mais tellement incomplet, froid, vulgaire... Quand on avait un aperçu de de que pouvait être la connaissance des étoiles, témoins de tous les âges et de l'immensité... On hésitait à revenir à la réalité, à une vie de combat permanent, contre soi même, les autres, son destin alors que l'on pouvait juste, observer et disparaître aux yeux du monde, être un témoin immuable et invisible, ne prenant part au brouhaha de la vie qu'en cas d'extrême nécessité. Sans jamais prendre partie.

Caelum lui avait confié que là était la réelle nature des rehlas mais ne pouvait lui en dire d'avantage, que c'était à elle et aux plus grands d'entre eux de déterminer si elle était digne de continuer ce cheminement... Lorsque l'un d'eux, sans âge, s'était présenté à la boutique du blond pour faire part à la jeune femme et son professeur qu'il lui fallait rencontrer l'Enfant, le plus âgé avait simplement acquiescé avec respect. Après le départ du messager, il laissait s'exprimer toute sa surprise et sa joie incertaine. Si Mirari, inconsciente de son état encore quelques mois plus tôt pouvait désormais prétendre à connaître la vérité c'était grâce à ses enseignements ! Du moins, il s'en flattait et tentait d'influencer la jeune femme assez naïvement pour qu'elle ne réponde que par un sourire un peu moqueur. Sa propention à écouter les astres n'était-elle pas née naturellement avec sa cécité ? Bien sûr, il lui avait donné les clefs de compréhension qui lui manquait pour comprendre et maîtriser ses dons mais ses progrès n'étaient dues qu'à sa persévérance mais elle s'abstenait de gâcher son plaisir.

Cette nouvelle quête signait son départ du port et de l'enseignement de l'autre rehla, désormais, ce serait à elle de mener sa vie avec toutes les armes qu'il lui avait donné pour vivre son ascendance comme un potentiel énorme plutôt que comme une plaie encombrante dont on redoutait les élans de douleurs. Il y était parvenu mais il aurait tellement aimé que la jeune femme reste à ses côtés, trop fragile pour courir le monde selon lui et surtout en consultant la ligne de son destin, rien de précis ne se dessinait encore, comme si ses choix, tout proches, allaient déterminer toute son existence au point que même les étoiles lui en lançaient le choix... Mais désormais proche d'elle, il connaissait toute la complexité de son caractère et de son passé, par dessus tout, il craignait qu'elle ne continue sur la voie des démons et de la vengeance... Cette option de parcours lui ouvrirait de nombreuses portes mais lui attirerait tellement d'ennuis ! Sincèrement, le blond, la regardait à partir à regret, son élève ayant même refusé qu'il ne l'accompagne sur ces terres hostiles, protestant qu'elle avait voyagé pendant trois ans, seule avec Siran et qu'elle s'en était toujours sortie alors qu'auparavant ses capacités n'étaient pas aussi développées...

Il n'avait pas d'argument à opposer et en la voyant s'éloigner, il voyait son espoir d'en faire sa compagne s'éteindre avec les pas du banjee sombre.

Rejoindre la prison, c'était une étape pour rejoindre l'antre des damnés et son autre professeur un peu particulier, toujours mue par son seul objectif, devenir plus forte pour retrouver son père et ne plus jamais avoir à subir la perte d'un proche qui aurait voulu la protéger... Même si l'essence même des rehlas était pacifique et qu'il était indéniable qu'elle fasse partie de cette race, elle n'oubliait pas ceux qui l'avaient élevée alors que sa propre mère l'avait abandonnée, à peine née, aux mains de voleurs... Impossible d'oublier ça, si sa génitrice était bien une rehla comme le supputait Caelum, elle maudissait sa faiblesse et son abandon, être neutre ne voulait pas dire s'abandonner jusqu'à sa vie. Du moins c'est comme ça que le voyait celle qui avait du se battre pendant toute la sienne, refusant de se soumettre à la moindre faiblesse de caractère...

La traversée du continent dévasté ne fut pas des plus simple mais sans réel problème notoire qu'ils ne purent surmonter avec Siran. Le banjee laissait sa protégée exercer ses dons, tester ses capacités mais veillait toujours à sa sécurité, la laissant juste éprouver ses limites pour mieux concevoir le chemin qui lui restait à faire pour arriver au but qu'elle s'était fixé. Bien entendu, il y eut quelques déconvenues mais aucune blessure grave, physique tout du moins et lorsqu'elle arrivait aux alentours de la prison, sa volonté n'en était que plus solidement tournée vers son amélioration.

Avec l'aide des ombres manipulées par Siran, elle y entrait de nuit, profitant du calme tout relatif pour se glisser dans les couloirs. Privée de la vue, elle n'en discernait pas moins nettement l'ambiance lourde de l'institution, moite, suppurant les horreurs de ce monde à travers les esprits malsains qu'elle recelait en son sein. Sur leur passage, certains prisonniers éveillés les observaient sans un mot, intrigués par cet étrange duo, d'autres au contraire tentaient d'attirer leur attention, promettant monts et merveilles à l'aveugle pour obtenir de l'aide afin de s'échapper. Elle fit volontairement abstraction de toutes les demandes les plus sales que ses oreilles purent entendre et de toutes les autres également bien que quelques unes d'entre elles lui promettaient de recouvrer la vue... Jamais il n'en avait été question et si parfois, elle se sentait bien départie comparée aux autres êtres de ce monde, cela restait bien exceptionnel et... Elle tenait à ses sens et à sa capacité d'écoute plus développée que la moyenne lui ayant déjà sauvé la vie à de multiples reprises. Sa cécité la rendait bien moins manipulable et moins aisée à effrayer que la moyenne, plus téméraire dans les ombres et l'obscurité, plus attentive aussi et mieux renseignée sur ce qui l'entourait, presque en permanence, un réflexe développé depuis son plus jeune âge, c'était SA vue sur ce monde qui en serait remit en question... Hors de question de céder à ces sirènes appelant à la normalité...

Lorsqu'elle arrivait devant la cellule de l'enfant, son compagnon n'eut nul besoin de l'en informer. Il marmonnait, dans cette langue que Caelum lui avait apprise et dont il était si étonné de sa maîtrise. Siran restait alors en retrait, veillant sur le couloir et à l'éventuelle arrivée de potentiels gêneurs dans l'entretien qui s'apprêtait à démarrer entre les deux rehlas.

Comme si le jeune garçon l'avait senti davantage que vue, il relevait la tête vers elle, cessant sa litanie alors que la jeune femme s'asseyait face à lui, seuls les barreaux établissant une frontière entre eux, à peine perceptible, désuète au possible quand leur monde n'était qu'une immensité de chants mélodieux et astraux. Chacun d'eux restaient silencieux pendant un long moment, Mirari sentant précisément le regard de celui qui semblait être le plus jeune s'attarder sur ses yeux opaques, comme s'il pouvait y lire quelques raisons de sa venue en ces lieux maudits.

Quand il prit la parole, dans cette langue qui leur était propre, c'était comme si une voix connue depuis longtemps mais dont on ne savait à qui elle appartenait trouvait enfin sa signification. L'aveugle avait le sentiment de toujours l'avoir entendue, depuis sa plus tendre enfance jusqu'aux plus récentes nuits de son existence. La liberté, voilà ce dont il parlait, ce qu'il chantait avec la douceur des astres elle même, comme s'il était l'une des étoiles qui lui confiait une véritable discussion, un secret, un conseil. Comme s'il la connaissait toute entière, de toute son âme à la moindre de ses pensées, il trouvait les mots, touchant au vif de son essence même alors qu'il mettait à jour les chaotiques aspirations et motivations de la protagoniste dont il contait l'histoire. Un regard extérieur, dénué du moindre reproche, un état de fait si juste que la blanche se retrouva très vite mise à nue, émue aux larmes devant la justesse de son propos. Elle ne le vit pas sourire mais l'entendit alors qu'il se levait pour poser une main frigoriffiée sur sa joue, son regard la scrutant avec une certaine paternité étrange entre deux barreaux, si proches que leurs souffles se mêlaient.

L'enfant à la sagesse de plusieurs millénaires avait sortis les doutes et les tripes de l'aveugle pour les décortiquer avec douceur et lui montrer que la vengeance n'était pas la seule solution, que ses doutes en exprimaient d'autres  qu'elle se refusait simplement d'entendre, considérant ces autres possibilités comment faisant preuves de faiblesses voir de bassesse pour certaines...

- " Que dois je faire ? "

- " La faiblesse est dans l’œil de celui qui la voit, ce n'est pas une vérité, seulement un jugement. Tu peux te libérer de ce tourment. "

Octroyer ce genre de discours à une aveugle ? En d'autres circonstances, elle aurait sans doute rit mais à l'instant, elle comprenait ce qu'il voulait dire mais n'osait encore le faire, se dédouaner de ce qu'on son éducation lui avait apprit être faiblesse et défaite... Du moindre jeu d'enfant à la mort de sa mère et de Zélus, à la fuite de son père, c'était des choix qu'ils avaient tous fait en raison de son inaptitude à se protéger... Du moins c'est ainsi qu'elle l'avait subit jusqu'à présent, l'espoir à peine avoué de pouvoir quitter cette culpabilité permanente dans la main de cet enfant qui récoltait les larmes qu'elle ne réalisait pas verser, elle n'aurait jamais cru cela possible mais elle n'y parvenait pas, se pardonner été au dessus de ses forces sans l'assurance qu'il s'agissait d'amour et pas de protection... Une subtile nuance pour différencier la culpabilité de la reconnaissance.

- " Je ne peux pas, je ne sais pas ! "

- " Alors demande. "

Derrière lui, le chant du ciel s'intensifiait, s'infiltrant dans la cellule et glissant jusqu'à elle comme un court d'eau, profond, vibrant comme en attente d'une intervention pour répondre de toute sa puissance latente, incommensurable, d'une vague qui pourrait tout balayer sur son passage au doux courant qui vous portez plus loin. Effrayant car il lui donnait l'impression d'être tout entier tourné vers elle alors que jusque là, elle ne l'avait vu que comme l'acteur indifférent à son public plongé dans l'anonymat de l'obscurité de la salle, vibrant de tout son être pour l'une de ses paroles d'une telle richesse que la comprendre était déjà une finalité en soi.

Et si, soudain, le regard de cet acteur majestueux se braquait sur elle, éclairée dans l'ombre, désormais visible à ses yeux, et qu'il lui proposait de prendre part au dialogue d'entrer en scène pour prendre part à la pièce et avoir son propre rôle à jouer ? Ce tout petit brin d'espoir que l'enfant avait fait pousser dans l'un des recoins le plus secret de son être, celui où elle gardait enfermées toutes ses blessures pour que jamais personne ne puisse les atteindre, s'en jouer ou l'en priver, ne valait-il pas la peine d'oser parler à celles qui la berçaient depuis son premier jour ? Jamais elle n'aurait cru qu'un jour, elle pourrait avoir ce privilège, se considérant toujours comme l'insecte témoin du spectacle du monde sans pouvoir y prendre part, sans se sentir assez digne pour l'accompagner.

La main fraîche du jeune garçon quittait sa joue pour se poser deux doigts salés par ses larmes sur ses lèvres. D'un murmure doux, encourageant, il lui ordonnait de chanter.

Les sons, ils l'entouraient, emplissaient sa tête, s'échappaient par ses lèvres, semblables aux chant qu'elle avait écoutés toute sa vie, pleins d'une richesse d'émotions et de vérité insoupçonnée, au point que si elle avait été en état d'analyser plus froidement la situation, elle aurait douté qu'ils ne s'extirpent réellement de sa personne tant ils s'écoulaient naturellement dans une mélopée s'accordant à merveille à celle des étoiles et de la Lune qui apparaissait désormais par la lucarne, baignant ses deux enfants d'une lumière spectrale. Pour l'aveugle, il n'y avait plus de conscience du monde extérieur, du moins, de celui qu'elle arpentait chaque jour, mais seulement cet échange puissant avec celui infiniment plus complexe, plus riche, plus... Complet que lui offrait la nuit. Et cet enfant qui ouvrait enfin la porte qu'elle avait cru close sans avoir oser enclencher la poignée, ne faisant qu'écouter à travers de celle ci, celui qui lui offrait cette chance, mêlait son chant au sien, comme deux volutes de fumée s'entremêlant et s'élevant vers le ciel, se supportant l'une et l'autre, se complétant...

L'intonation des étoiles changeait, se muant en une réponse, vivace mais pleine d'une douceur réconfortante, la portant vers un lieux qu'elles seules connaissaient et pouvaient fouler, un autre monde, celui où toute la sincérité des émotions était libérée des carcants terrestre, un monde qui lui apprit que chacune des pertes qu'elle avait eu à subir n'était que le fruit des choix de ses proches et des siens, mais qu'aucun de ceux qu'elle aimait et regrettait ne l'avait par pitié... Que sa culpabilité, elle était la seule à se l'infliger et qu'elle était certes réelle mais qu'elle ne dépendait qu'elle...

Quand elle reprenait pieds dans la réalité, dans cet endroit lugubre où l'on tenait enfermés les pires esprits de ce monde derrière des barreaux, elle avait entendu la réponse mais avait encore bien du mal à la comprendre. Le retour à ce monde, brutal, était des plus désagréable et perdait son esprit dans une foule de questions, de sentiments qu'elle tournait vers l'enfant, son expression seule tenant lieu de question à son égard.

- " Tu as le choix, de poursuivre ta vie comme tu le souhaite en subissant ta culpabilité, nocive ou au contraire en la faisant taire mais sache qu'il te faudra la combattre chaque jour si tu t'engage sur cette voie... Ou tu peux décider de suivre une route plus douce qui ne te soumettrait pas à ces épreuves... "

- " Mais ce ne serait pas la mienne... "

Un sourire lui répondit puis un baiser posé du bout des lèvres enfantines sur son front.

- " Ton choix est fait, tiens toi libre, toujours et tu ne cesseras de grandir. Pars maintenant, tu as une longue route à parcourir. "

Elle doutait qu'il parle de son voyage mais comprenait plutôt qu'il s'agissait de son destin, de sa vie, elle n'avait pas choisit la plus simple, certes, mais désormais, elle se sentait bien plus armée pour l'affronter.

- " Merci de m'avoir libérée. "

La jeune femme, désormais sereine, rejoignait Siran qui la fixait, perplexe.

- " Tu ne lui propose pas de l'aider à sortir d'ici ? "

- " Il a choisi. "

- " Tu es certaine ? C'est un enfant, lui as-tu seulement proposé?! " Il s'offusquait, il n'avait rien vu de leur échange et pourtant, il la sentait changée, comme si le garçon lui avait apporté quelque chose de si rare, de si puissant mais aussi de si secret qu'il fallait en être investi pour savoir ce dont il s'agissait à son tour... Comment pouvait-elle lui être si indifférente désormais ? Mais le banjee qu'il se trompait quand elle posait son front contre son encolure et lui octroyait une caresse plus douce que jamais.

- " Inutile, il ne bougera pas d'ici avant d'en avoir prit la décision que sa présence soit plus nécessaire ailleurs qu'en ces lieux, c'est comme lorsque Caelum m'a proposé de rester à ses côtés. Il estime qu'il a un rôle à jouer ici, tout comme j'estime que mon rôle est de vaincre ceux qui nous ont fait du mal pour libérer tous les nôtres. "

Siran finissait par hocher la tête, comprenant un peu mieux, du moins il pensait, mais il avait bien du mal à admettre la douceur et la détermination mêlées dans la voix de sa compagne de route. Jusqu'à présent, la détermination ne lui avait jamais fait défaut mais la douceur ? Elle qui avait été motivée par la douleur, la rancune, la culpabilité, la vengeance... Elle n'avait pas employé ce mot, mais l'action de libérer les leurs. Il avait l'impression que sa force de caractère bien que moins tourmentée était encore plus puissante désormais... Surprenants êtres qu'étaient les rehlas...

Sans avoir le moindre besoin de se concerter, ils repartirent comme ils étaient venus pour reprendre leur périple vers l'antre des damnés, portant fort bien son nom.

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