Mon monde a toujours été un monde de silence car une chose est sure, je suis incapable de parler. Tout juste si je suis capable de pousser quelques espèces de cris bizarre. En somme, je vis en devant constamment me faire comprendre autrement, ce qui est loin d'être facile avec Léto. Je l'aime bien Léto, pourtant, je sais parfaitement qu'entre lui et moi, ça restera une amitié basique, jamais aussi forte que celle qui me lié à ma jumelle. Serahna me manque, sa capacité à lire mes pensées aussi. Combien de fois a t-elle pu traduire tout ce que je voulais dire ? Ça fait déjà deux ans qu'elle est morte et dans mon cœur, il existe toujours cette plaie béante qui me donne l'impression d'être déchirée en deux morceaux mais de n'avoir le contrôle que sur l'un des deux. Aujourd'hui pourtant, je suis revenu au village, où plutôt, à ce qu'il en reste. Le berceau cristallin est visible de là où je suis, et à l'est, je vois la forêt enneiger dans laquelle je chassais quand tout est arrivé.

- Nous voilà de retour chez toi.

Je penche la tête vers Léto, avant d'esquisser un bien faible sourire. Oui, il a raison, nous sommes de retour. Je regarde les ruines de ce qui a été mon chez moi, il y a une silhouette humaine plus loin mais je n'ai pas le temps de m'en préoccuper car quelqu'un que je ne pensais jamais revoir surgit en bondissant autour de moi. Je vois son sourire, ses cheveux noir qui flotte au vent, sa joie contagieuse. Ma sœur ! Lto casse le silence en traduisant la seule chose qu'elle semble répété en boucle.

- Neyra ! C'est bien toi !

Je regarde Léto et je me met à sourire gaiement, il penche la tête sur le côté avant d'ajouter paisiblement, comme si jouer les perroquets ne lui faisait rien.

- Je me trompe pas hein, c'est un esprit qui répète ça sans cesse ? Et a voir ta tête, ce doit être ta sœur non ? Je t'envie presque de voir les esprits tiens ...

Je hoche vigoureusement la tête, moi je l'envie de pouvoir parler et de pouvoir entendre Serahna. Je la regarde qui danse sa joie avant que mon attention ne se détourne sur la personne que j'ai vu un peu plus tôt, il me semble d'ailleurs qu'elle approche. Je fronce les sourcils malgré moi, me demandant qui peut-elle bien être. Mais je n'ai pas trop le temps de m'en occuper car Serahna, bien que visible de moi seul, ne cesse de s'agiter. Elle est si heureuse que je regrette de ne pas être plus doué. Mais je ne suis chaman que depuis un quart de lune, enfin, une semaine quoi. Denka m'a dit que petit a petit je pourrai entendre les esprits, mais pour le moment, c'est trop tôt et puis, je dois trouver mon esprit compagnon. Même si je pense l'avoir sous le nez. Léto pour sa part marmonne quelque chose que je comprends à peine, en dehors du mot croire et chaman.

- Je ... crois ... chaman.

J'ai envie de lui crier de répété mais j'en suis incapable alors je hausse les épaules avant de regarder la silhouette bien vivante qui s'avance. Si c'est un chaman, peut-être pourra il m'aider avec ses histoires de fusions car l’imbécile que je suis a, dans sa hâte, délaisser son maître pour revenir ici. En somme, je ne sais même pas quoi faire.

Dire qu'il pensait être seul, et pouvoir profiter pleinement du village en ruines, du silence qui en découlait et du paysage merveilleux qui s'étalait devant lui... Et bien c'était raté, à en croire les exclamations de voix que le vent lui amenait et les traces de pas sur le sol mouillé et les restes de neige. Fini sa journée de repos tranquillou à contempler la forêt et à roupiller contre une pierre à l'abri, et pourtant, il avait bien fait exprès de se perdre au fin fond d'un trou pour être sûr de passer sa journée en solitaire !

Maugréant à voix basse et soupirant inlassablement, Devaraj s'approcha alors des maisons ruinées, scrutant sans aucune gêne le trio anodin qu'il avait sous les yeux. Des retrouvailles touchantes et un peu singulières cela semblait être à première vue... Entre un alfar, une esprit autant débordante de joie que Khaal l'était de mauvaise humeur, et un jeune chaman qui n'avait pas bien l'air de savoir quoi faire.

Peut-être que c'étaient des originaires de la région ? Il ne voyait pas d'autres solutions possibles, à moins que ces trois-là aient eu le même besoin de solitude et d'éloignement que lui et qu'ils aient choisi de venir au même endroit exactement le même jour, ce qui honnêtement, semblait peu probable.

-"Bonjour." finit-il par lâcher au bout de longues minutes, remettant ses mèches blondes derrière ses oreilles pour ne pas manger ses cheveux. Geste qui en soit, s'avéra être totalement inutile puisque le vent se chargea de les remettre en plein milieu de son visage quelques secondes après.  Il se rendit compte qu'il ne devait pas avoir l'air très avenant à les dévisager sans rien dire, et se força tout de même à esquisser un sourire neutre et lança un regard en coin à Khaal derrière lui pour que l'esprit en face de même.

Il fallait voir le bon côté des choses. Même en compagnie involontaire, il était en pleine nature, il faisait frais, Driel et Cendres devaient être en train de vagabonder joyeusement dans les bois et lui, il était de retour à la montagne. Certes, ce n'étaient pas ses montagnes natales, mais ça restait quand même un lieu où il se sentait incroyablement bien, surtout après avoir passé autant de temps à cramer dans le désert. Il avait ressentit le besoin viscéral de prendre de la hauteur et marcher dans de la neige glacée... et le voilà donc comblé.

Mettant donc de côté son insociabilité et retrouvant de force sa bonne humeur initiale, le chaman soupira une dernière fois et s'assit nonchalamment sur une pierre mousseuse, comme s'il s'apprêtait à écouter une longue histoire. Il posa son sac et s'emmitoufla dans sa cape, sortant la gourde de ses affaires pour en boire quelques gorgées. Finalement, il était plutôt curieux de savoir ce que ces trois-là faisaient ici.
-"Vous êtes chaman ?" demanda-t-il alors en regardant le jeune homme du trio.
Question dont il pensait déjà connaître la réponse et qu'il avait plus posé plus pour lancer la discussion qu'autre chose...

Je regarde l'homme qui viens vers nous et je réalise qu'il n'est pas tout seul, en fait, Léto à raison, il m'a tout l'air d'être un chaman car la femme avec lui ressemble à un esprit. Mais comme d'habitude, je suis incapable de répondre et je me contente de les saluer d'un mouvement de tête, ce qui est compliqué car Serahna ne cesse de tenter de s'accrocher à moi. En soit, ma sœur à l'air d'une pure débile car, en tant qu'esprit, elle me passe pratiquement aux travers toutes les deux secondes. Je regarde l'homme s’asseoir, Léto a pour sa part décidé de détourner le regard et de paraître dans son petit monde. Heureusement, je sais que ce Nain's silencieux est à l'écoute et qu'à la première occasion, il répondra pour moi. C'est peut-être le plus agaçant d'ailleurs, de ne pouvoir parler pour moi-même. A la question qu'il me pose, j'agite la tête avant de donner un coup de coude à Léto qui répond avec un manque d'empressement total.

- Neyra est effectivement un chaman, sauf qu'il est aussi muet qu'une carpe et que, d'après ce que j'ai compris avant qu'il ne m’entraîne ici, il doit fusionner avec un esprit pour en être vraiment un.

Je fusille Léto du regard et je ne me gène pas pour lui écraser violemment le pied avec le mien, il recule en me jetant à son tour un regard sombre. J'attrape une de mes épées vivement, ce qui fait bondir Serahna qui s'écarte instinctivement. Léto ne peut toujours pas la voir mais à sa grimace, je devine qu'elle a pousser un joli cris de stupeur. Mais loin de vouloir agresser quelqu'un, je regarde la neige devant l'homme et sans réfléchir, j'écris à même la neige en usant de ma lame.

"Mon nom est Neyra, lui c'est Léto. Et voilà ma sœur, Serahna. Je suis devenu chaman dans l'espoir de la retrouver mais ..."

J'hésite à continuer d'écrire, au lieu de ça, je détourne la tête, gêné de devoir expliquer que je ne sais pas du tout comment faire pour faire de ma sœur jumelle mon esprit-compagnon. Bien sur, Denka m'a parler de la fusion mais comme un imbécile, je n'ai pas du tout écouter toutes ses explications car j'avais bien trop envie de revenir ici. Je fini par détailler l'homme sous mes yeux et j'écris un peu plus loin, espérant que cet inconnu puisse être l'aide dont j'ai désespérément besoin.

"Tu es toi aussi un chaman ?"

Je suis presque certain de la réponse, une chance pour moi à vrai dire. En fait, j'espère que les tatouages sous ses yeux sont comme l’Ouroboros à mon poignet, le symbole de notre race. A moins que je ne me trompe complètement et que je finisse ma vie ici. A cette idée, je ferme mes yeux gris et soupir faiblement. J'en ai trop fait pour mourir comme ça, maintenant. Ma seconde main glisse sur la garde de mon épée instinctivement, je refuse que tout finisse ici. Mes yeux se rouvre pour découvrir Serahna sous mon nez, main dans le dos et tête penché sur le côté. Un instant, j'ai presque envie de lui tirer la langue mais je me contente d'un regard hautain qui semble la faire rire. Comme ce son me manque. Léto en revanche a décider de l'ouvrir.

- Si ce mec est un chaman Neyra, faudra qu'il me dise si je suis fou ou si j'entend bel et bien quelqu'un rire là.

Je fusille Léto du regard, ce mec est parfaitement incapable de comprendre que Serahna est bel et bien là. En fait, je ne lui en veux pas autant que je semble le faire penser. Il entends seulement les esprits et ses derniers jours, il a eu bien du mal à me croire quand j'écrivais pour lui dire que des esprits étaient bel et bien là. En fait, les esprits sont partout, ce qui en soit est peut-être flippant. C'est même très flippant, moi-même j'ai bien du mal a me faire à l'idée alors que ça fait des jours que je vois des morts errer, fantôme invisible à tout les autres.

Mais c'est qu'ils avaient l'air experts en communication ces trois-là... Et ce n'est pas avec Devaraj que les choses allaient s'arranger. Ce dernier se contenta de continuer à les examiner un par un, attendant patiemment que quelqu'un veuille bien lui répondre, si réponse il y aurait.

Et quand il attendit une réponse de l'un, ce fut l'autre qui daigna délier sa langue pour parler au nom de son camarade et lui expliquer la situation. Malgré le manque de détails donnés, Devaraj comprit quand même que le jeune muet ne devait pas encore avoir effectué sa première fusion et qu'il devait être chaman que depuis peu. Ses yeux suivirent alors la suite de l'histoire au fur et à mesure qu'elle se traçait dans la neige. Peut-être que le jeune homme était muet, mais au moins il était plus précis que son collègue...
-"Mais quoi ?" finit par lancer Khaal d'une voix froide derrière lui, alors que la dernière phrase était laissée en suspens.

Observant leur petit manège avec une lueur d'amusement dans les yeux, Devara finit par se retourner vers Léto, supposant que ce dernier devait avoir la faculté d'entendre les esprits. D'ailleurs en le voyant de plus près, il s'aperçut aussi que ce n'était pas un alfar mais... un être d'une race inconnue à ses yeux.
-"Tu entends bien quelqu'un rire, mais ça ne veut pas dire pour autant que tu ne sois pas fou... Et oui je suis bien un chaman." susurra-t-il, un demi-sourire sarcastique peint sur les lèvres.
-"Bon si j'ai bien tout comprit, tu cherches à faire ta première fusion c'est ça ?" rajouta-t-il en reprenant son sérieux à grande vitesse, tournant son attention vers Neyra.

Voilà qui allait être compliqué. Lui avait fait ses premières fusions parce qu'il était dans une situation risquée, qu'il avait simplement voulu éviter de se faire couper la tête et que son seul moyen d'augmenter ses chances était de fusionner. Le déclic était venu avec son instinct de survie -pour le peu qu'il en avait- et il était totalement incapable d'expliquer comment il s'était débrouillé, à part en lançant un inutile "Bah c'est naturel, voyons. " Les premières fois avaient été quelques peu houleuses, déstabilisantes et fatigantes, mais il commençait maintenant à trouver un brin d'harmonie avec Khaal. Mais ce phénomène restait encore en partie hors de sa portée et mystérieux à ses yeux.

Se voyant donc mal s'improviser en professeur, il tenta quand même de trouver quelques indications.
-"Il faut d'abord que l'esprit accepte... même si ici c'est plutôt évident." remarqua-t-il inutilement sur un fond d'ironie.
-"Et ensuite il faut que tu te concentres et utilises tes pouvoirs pour que vos deux esprits fusionnent dans ton corps." finit-il en haussant un sourcil.
C'était assez obscur à décrire en réalité. Il n'y avait pas de rituel ou d'invocation précise, et il était de plus quasiment certains que les sensations différaient entre chaque chaman ou esprit.
-"Le bon côté des choses, c'est que vous avez l'air de bien vous connaître... Ce sera plus facile d'être en harmonie de cette façon-là." supposa-t-il, posant ses yeux sur les deux semblables.

L'esprit qui accompagne le chaman assis devant nous me semble aussi aimable qu'on pu l'être les bêtes sauvage que j'ai parfois découper avec mes épées, ce qui n'est pas souvent arriver, certes. Mais bon, elle me semble bien plus proche du serpent, dangereux et froid, que de Serahna. En somme, les esprits sont bel et bien les fantômes des gens et même si je le sais depuis un moment, voilà que je réalise vraiment ce qu'il m'arrive. N'importe qui paniquerait, se jetterai par terre en hurlant peut-être même. Mais pas moi, je me contente de rester figer, comme si voir les morts étaient la chose la plus naturelle au monde. Si j'en avais été capable, je me serai moquer de Léto, lequel se contente d'un regard froid envers notre inconnu chaman. Bon au moins, maintenant il va peut-être me croire quand je lui dit que les esprits existent bel et bien et qu'il n'entends pas des voix. Je pose mes yeux gris dans les yeux vert de l'homme et j'hoche positivement la tête.

Serahna a pour sa part décider d'écouter avec le plus grand sérieux, chose qui ne lui arrive pas si souvent. Enfin, ne lui arrivait car maintenant qu'elle est morte, je ne sais pas si je peux toujours penser ainsi. Évident ? C'est un bien petit mot, ma jumelle est mon double depuis notre naissance non ? Même si je doit reconnaître que s'était parfois assez insupportable d'être l’aîné et de dépendre d'elle pour simplement m'exprimer. Mais elle m'a tellement manquer que pour moi, c'est une évidence que c'est elle qui doit devenir mon esprit compagnon. En revanche, je crains un peu la fusion, je ne sais pas du tout à quoi m'attendre. Je ferme les yeux, mes pouvoirs ? Jusque là, j'étais un humain, en sommes la créature la moins magique qu'il soit donc cette notion me perturbe assez. Autant que l'étrange sensation qui parcoure mon corps chaque fois que j'y pense. Si seulement Serahna avais pu m'expliquer ce qu'elle vivait quand elle utilisait la magie. Mais c'est le genre de truc inexplicable je crois.

- C'est pas un peu léger comme explication ?

Même si je pense comme Léto, je me retiens de le dire, de toute façon a part le dessiner dans la neige, je ne pourrai le dire alors. Ma jumelle a quant à elle décider de reprendre sa bonne humeur car elle sourie vraiment bêtement. Je range mon épée avant de m’asseoir a même la neige, ce qui ne me dérange nullement car je suis né ici après tout. Je soupir pourtant, voilà qui ne va pas être facile. Ma sœur ne cesse qui plus est de bondir de tout côté, comme elle le faisait jadis. Je lui lance un regard désespérer avant qu'elle ne vienne s'accroupir devant moi et me touche le front du bout des doigts en souriant. Elle faisait déjà ça enfant, mais là, le plus déstabilisant c'est que, si je vois ses doigts, je suis presque insensible à son contact. Elle est parfaitement éthérée.

Je me décide quand même à essayer de ressentir mes pouvoirs, je ferme les yeux et l'espace d'un instant, je ressens une sorte de courant électrique dans mon corps. Mais la voix de Léto me perturbe et je rouvre les yeux, cessant de regarder ma soeur pour le fusiller du regard.

- Et il y a pas un moyen plus rapide pour qu'il comprenne comment ça marche ?

C'est décider, je ne suis pas prêt d'y arriver si je doit en plus faire abstraction de ses commentaires. Même si malheureusement, je doit reconnaître que Léto a raison. Je ne sais pas du tout quoi faire ni comment m'y prendre vraiment.

Devaraj grimaça en entendant la remarque de Léto. Voilà qu'en plus d'être le seul de l'équipe à communiquer oralement, il était grand'gueule lui ? Et bien comme ça ils allaient être deux !
-"Parce que tu as une meilleure façon d'expliquer peut-être ?!" répliqua le chaman en lui lançant un regard noir plein de sarcasme, puis en levant les yeux au ciel. Parce-que les gens ils croient que c'est facile d'exprimer des sensations pareilles peut-être ! Nom de dieu.

-"Si si ya un moyen, déjà ça serait qu'il puisse se concentrer correctement."
-"Dans le silence." appuya-t-il en alourdissant son regard qui pesait déjà depuis un moment sur Léto. Parce qu'à moins d'être un moine expérimenté ou d'avoir une parfaite maîtrise de soi, il ne voyait pas comment le jeune allait réussir à faire sa fusion si sa perception extérieure était sans cesse interrompues par des jérémiades inutiles...

Enfin bon. Maintenant qu'il avait commencé à l'aider, il n'allait pas s'en aller avant d'avoir réussi. Tête de mule jusqu'au bout des doigts qu'il était, quand il prenait les choses au sérieux.
Il se releva pour s'accroupir devant Neyra, laissant sa cape traîner dans la neige.
-"Commences par t'habituer à ressentir ce flux de magie en toi... En regardant les esprits autour par exemple, ou en fermant les yeux simplement. Persuade-toi que ce n'est pas quelque chose d'étranger à ton corps, mais au contraire une sensation tout à fait normale. A tel point qu'elle doit faire partie intégrante de toi, comme ta main, ton pied ou tes jambes." Neyra devait forcement percevoir que quelque chose avait changé en lui, surtout s'il était humain avant de devenir chaman. Il fallait qu'il dompte cette affluence de magie pour la faire sienne et s'y accoutumer totalement. Une fois que les sentiments ressentis deviendront plus machinaux et moins déconcertants, il pourra apprendre à s'en servir avec plus de facilité.
-"J'ai des bien des bijoux d'oreilles que je ne sens pas, à moins de mettre la main dessus, et bah là c'est pareil." conclut-il en se relevant pour s'éloigner un peu et le laisser réfléchir tranquillement, préférant regarder le paysage et se perdre dans diverses contemplations.

Il ne voulait pas trop s'avancer à décrire des sensations précises, trouvant cela trop objectif. Peut-être que certains ressentaient l'affluence de magie et la fusion comme une vague de chaleur pendant que d'autres y voyaient plus un choc électrique ? Allez-savoir... La seule chose de sûre, c'est que les premières fois donnaient l'impression d'avoir fumé de l'herbe, et pas de la mauvaise ! Etre deux esprits dans un seul corps n'était chose facile...

-"Peut-être que si je fusionne devant toi tu comprendra quelque chose ?" déclara-t-il enfin, après avoir passé silencieusement en revue chaque arbres, pierres, fleurs enneigées et petits oiseaux environnants, leurs laissant un temps fou pour méditer au problème.

Je me retint de sourire, Léto veux certes se rendre utile et m'aider, mais le chaman a raison, expliquer les choses n'est jamais simple. Serahna n'a elle non plus pas perdu un seul mot des répliques et elle ne se gène pas pour en rire ouvertement, s'agitant joyeusement. Mais si les paroles de Léto me perturbe, retrouver ma sœur si, pleine de vie ne quelques sortes, me fait l'effet d'un bon bain chaud. Je regarde soudainement l'autre chaman qui est venu se planter directement devant moi. De près, je doit reconnaître qu'il me ferait presque peur, sans doute est ce parce que nous ne sommes qu'à un souffle ou presque l'un de l'autre. Assez prêt en tout cas pour voir parfaitement le grain de peau et la moindre imperfection qui peut y être lié. Je comprends pleinement ce qu'il me dit et j'hoche la tête en esquissant un bien faible sourire pourtant.

Je regarde ce dernier s'éloigner avant de respirer profondément, calmement. Peu à peu, je retrouve cette sensation qui m'effraie autant, je frémit, je déteste ça. Mais je sens que j'ai mis le doigt sur quelque chose, enfin, façon de penser. Je refuse pourtant de faire corps avec cette sensation désagréable, c'est encore trop récent trop, étrange ? Mais la voix de moçn nouveau maître, même si ce n'est que temporaire, me coupe de mes pensées et je pose sur lui mes yeux gris avant de me relever et de reprendre mon épée, traçant dans la neige un simple "oui"

- Une fusion, au moins ça mettra les choses au clair ... Aie !

Mon coude est venu se planter dans les côtes de Léto qui me foudroie du regard, mais, l'espace d'un instant, je décide de me comporter comme un vrai gamin et je lui tire purement et simplement la langue. Puis, bien décidé à ne pas lui laisser le temps de réagir, j'attrape ma seconde épée et je virevolte jusqu'à me placer a un bon mètre de lui, Serahna servant de bouclier. Sauf que Serahna est invisible pour Léto. Mais je reprend mon sérieux dans la seconde qui suis, rivant mes yeux gris sur Devaraj, dont j'ignore en vérité le nom et qui n'est pour moi rien d'autre que "le chaman". Je lui offre donc sans hésiter toute l'attention qu'il mérite. Même si en revanche je ne peu cacher un certain malaise, la sensation repoussé un peu plus tôt est de nouveau la, formant une magnifique chair de poule sur mes bras. Je décide pourtant de la laisser de côté pour observer le Chaman, espérant sans doute comprendre là cette dites sensation lié à ce que j'ai encore du mal a nommé. La magie.

Observant d'un air totalement détaché le manège du trio, le Chaman attendit de capter l'attention de Neyra avant de se retourner vers Khaal. Cette ancienne alfar dont il ne connaissait rien encore et dont la façon d'être était remplie d'amertume et de mépris dédaigneux... Pourtant malgré leurs différences respectives, Devaraj avait commencé à comprendre qu'ils devaient bien avoir un seul et unique point commun, même s'il n'en connaissait pas encore la nature. Sinon elle n'aurait jamais accepté d'être son esprit compagnon et de le suivre, et il n'aurait jamais pu supporter sa pénible présence jusque-là.

Et plus ils apprendraient à se comprendre l'un et l'autre, mieux marchera leur fusion. Il sourit faiblement en scrutant la forme grisâtre éthérée, et tendit la main pour la toucher du bout des doigts. Evidemment elle n'était pas palpable, mais il était toujours fasciné par cette apparition fantomatique, bien qu'il y soit largement habitué maintenant... Pour fusionner il avait toujours eu besoin de sentir cette proximité matérielle avec l'esprit. Alors il ferma les yeux pour mieux sentir la magie qui coulait dans ses veines et se concentra sur cette sensation. Quand il eut l'impression de pouvoir presque la palper et la rendre malléable, il se prépara mentalement à fusionner. S'il devait utiliser une autre expression pour décrire ce processus, il aurait dit " laisser une place". Il devait laisser une place à Khaal pour qu'ils puissent partager le même corps. C'était une façon pour elle de revivre et pour lui de devenir plus fort, un compromis qui jusque là n'avait pas eu de failles... L'étape finale était de concentrer toute la magie qu'il ressentait en un point précis de son corps, comme le coeur par exemple. C'était comme faire chauffer une boule de feu jusqu'à explosion. Tout en gardant en tête l'idée qu'il allait partager son corps, il faisait donc affluer sa magie près de son coeur. Parfois cela ne prenait que quelques secondes, sur un violent coup de stress ou un réflexe de détresse. Au contraire cela pouvait prendre plusieurs minutes s'il était fatigué, mal concentré ou très détendu...

Quand la chaleur magique atteint son summum et qu'il se sentit atteindre ses limites, la fusion s'effectua. La forme blanche de Khaal se rapprocha violemment du chaman, qui disparu dans une sorte de nuage blanc l'espace d'un battement d'oeil. L'instant d'après, l'esprit n'était plus visible et il sentait son étrange présence dans sa tête, dans son corps, partout. Ils étaient deux à marcher avec les mêmes jambes, deux à parler d'une même voix et deux à penser avec le même cerveau.
-"Voilà mon cher..." murmura le chaman en écartant les bras avant de les recroiser sur sa poitrine, plantant son bâton dans la neige pour se libérer les mains.

Maintenir la fusion complète était une entreprise dure et fatigante. Il gardait sa magie active en se forçant à la faire affluer dans tout son corps. Avec plus d'entrainement, il arrivera sûrement à reléguer cette lourde tache au fin fond de son esprit et à garder le reste pour s'occuper d'autre chose, mais c'était pour l'instant difficile. L'avantage était que même s'il devait se concentrer sur sa fusion, toutes ses capacités augmentaient largement et il devenait plus facile de se battre, de réagir au taquet ou d'avoir de la force, et même des nouveaux pouvoirs. Mais comme il n'avait pas lieu de se battre ici, il cessa donc vite la fusion. Pour cela il suffisait d'utiliser le flux magique pour expulser l'esprit et ensuite de relâcher toute la tension.

Khaal réapparu aux côtés de son maître en étouffant un soupir de lassitude qui en disait long sur son ennui, et Devaraj se rassit sur sa pierre tout en regardant la petite troupe.
-"Alors ?" demanda-t-il, voulant savoir si tout cela avait servi à quelque chose.
-"Peut-être que tu devrais aussi prendre en compte que fusionner permettra à ta sœur de revivre l'espace d'un instant. Si tu acceptes et rassembles ta magie en cherchant à atteindre ce but, ce serait plus facile ? proposa-t-il alors, attendant que les choses avancent à leur rythme du côté du jeunot.

Je regarde le chaman faire avec une certaine fascination, devinant autour de lui comme un halo invisible mais pourtant bien présent. Est-ce là mon imagination ? Quelque chose pourtant me dit que non et je reste figer, attendant de comprendre plus en profondeur ce qu'il se passe entre ses deux êtres. Tout va ensuite si vite que j'esquisse un mouvement de recul, et je ne suis d'ailleurs pas le seul car Léto a carrément bondit en arrière, manquant de tomber le cul dans la neige. Cette scène manque presque de m'amuser mais je suis bien trop accaparé par ce que j'ai sous les yeux pour m'en défaire. Seule Serahna tape joyeusement dans ses mains. Je ne vois aucune différence physique chez le chaman mais je ressens comme un malaise. Au fond de moi, je comprends que c'est le fait d'avoir vu l'alfar disparaître. Revoir les deux êtres ensuite me fit un choc moins grand cependant et j'écoutais avec attention, hochant la tête pour signaler que je comprenais ce qu'il essayait de m'expliquer.

Serahna se tourna alors vers moi et sentir, ou plutôt voir son visage si près du mien me figea un instant le sang dans les veines. Ce qu'elle m'avais manquer. Sans réfléchir d'ailleurs, je plante mes épées dans la neige avant de tendre une main incertaine vers ma jumelle. Ses doigts viennent à la rencontre des miens mais alors qu'elle entrelace nos mains, je ne sens qu'un froid vide. C'est loin d'être agréable et quand je relève la tête, mon regard inquiet croise celui de ma sœur. Elle souri joyeusement et est si optimiste que je peine à cacher la panique qui s'empare de moi. Et si jamais j'échoue ? Je repousse cette idée le plus loin possible, ignorant Léto qui, de nouveau debout, me toise d'un air incertain.

Puis soudain, c'est là, arc électrique invisible entre nos doigts, du moins, c'est la sensation que j'ai, c'est douloureux et pourtant, ça me rassure presque. Je ferme les yeux, inspirant profondément afin de me faire à l'idée que je vais peut-être partager l'esprit de ma sœur. Elle a toujours sus lire dans mes pensées mais à présent, c'est à moi d'accepter l'inverse. Je suis on ne peu plus terrifié à cette idée et en même temps, excité. J'ai tant donné pour avoir peut-être cette chance ! Léto pousse une acclamation de surprise et quand je rouvre les yeux, je vois ma jumelle prendre presque, de la consistance. Elle est toujours immatérielle mais elle est moins, transparente ? L'instant d'après pourtant, autour d'elle et moi, je vois une forte concentration de gris et puis, soudain, elle n'est plus là et moi, je suis étalé dans la neige, le souffle coupé.

- Qu'est ce que ...

Je porte la main à ma bouche à toute vitesse, je n'ai pas rêver, je parle ! L'esprit furibond de ma sœur me hurle soudain dans le crâne que c'est elle qui parle grâce à moi et mon corps entier refuse de m’obéir, alors que je pars d'un grand éclat de rire. Pourtant, je refuse de la laisser me dominer et même si je ressens comme un grand feu de joie, sa joie, je ne peux m'empêcher de songer que je doit garder le dessus, du moins, en partie. C'est une drôle de sensation car dans ma tête, j'entends ses pensées qui se mêle aux mienne. Elle me parle d'apprendre à partager et puis, au moment ou je suis presque apte à me relever, je sens comme une immense fatigue sur mes frêles épaules. Le hâlo grisâtre se reforme et l'instant d'après, ma sœur est de nouveau debout face à moi, le regard inquiet. Et moi, j'ouvre la bouche comme une carpe, de nouveau muet. C'est presque frustrant et en même temps, c’est enivrant cette sensation que j'ai eu quand elle était moi. Ou plutôt, en moi.

- Ça va Neyra ?
- Je ne suis pas fou, elle est bien apparue de nul part tout à l'heure et Neyra a même parler ...

Nos regard se tourne un instant sur Léto qui est aussi blanc que la neige qui nous entoure, mais aussitôt, mes yeux reviennent sur ma sœur. J'ai pourtant les paupières lourde et toute les peine du monde à me relever. Mais je réalise que je l'entends, qu'elle est visible bien plus que les autres esprits que j'ai pu croiser et ma tête qui se fait d'autant plus lourde me fait comprendre que s'en est presque trop. Ma soeur, comme par le passé, se remet à parler à toute allure.

- T'as réussi ? Hein, c'est ça monsieur el chaman, il a réussi ? J'étais dans sa tête, enfin je veux dire, youhou s'était tellement génial de se sentir vivante à nouveau. Même si ça a vraiment pas durer longtemps. Hé Neyra, t'es sur que ça va ? Faut pas s'endormir dans la neige hein !!

Je ferme les yeux, esquissant un fin sourire, Serahna est là, de nouveau et ses discours sans fin eh bien .... ils m'avaient manquer finalement. Mais là ce qu'il me manque, c'est un bon lit douillet et je me redresse avec autant de souplesse qu'un vieil homme qui a de l’arthrose. Je me sens entre l'euphorie la plus total et la fatigue la plus extrême, d'ailleurs, je vacille légèrement, épuisé.

Le chaman esquissa un demi-sourire en voyant l'air de surprise peint sur le visage de Neyra. "Eh bah c'est pas trop tôt !" qu'il avait envie de dire, mais il se retint et se rassit sur sa pierre. Quelque part il était fier d'avoir réussi à enseigner une part de ses connaissances, même si le jeune devrait sûrement continuer à s'entraîner un bon nombre de fois avant d'arriver à faire quelque chose de concret et d'utile avec la fusion.
-"Oui il a réussi." répondit-il à sa sœur d'un air un peu indifférent à la scène. Maintenant qu'il avait réussi sa mission, il n'avait littéralement plus rien à faire avec eux. Mais bon vu qu'ils étaient tous les cinq coincés dans un trou paumé en pleine montagne, autant profiter de la compagnie... Haussant les sourcils en voyant Neyra s'écrouler dans la neige, il fouilla dans son sac pour en sortir une bouteille de gnôle. A la base il avait prévu de la boire seul, en contemplant les paysages enneigés, dans la paix et le silence, mais le hasard avait choisi autre chose apparemment.
-"Tiens ! Tu ferais mieux de boire un coup et faire une sieste avant de repartir si tu veux mon avis... " Tout en parlant, il lança la bouteille en direction du jeune chaman, et replongea à nouveau ses mains dans son sac pour en ressortir de quoi manger. Parce-qu'après tout, son voyage avait été affamant.

Alors qu'il s’apprêtait à engloutir son morceau de fromage, un gros craquement se fit entendre à l'orée du bois, suivi d'un bruit de course. Quelques secondes après, Cendres se jetait sur son maître, le pelage plein de neige et de boue. Le lion faisait la même taille que le chaman assit, ce qui rendit l'impact assez douloureux pour ce dernier, qui grimaça avant de rigoler stupidement. Devaraj entoura le cou de l'animal avec ses deux bras et fourra sa tête dans sa crinière.  
-"Au fait, c'est peut-être un peu tôt pour toi, mais tu prévois d'entrer dans une tribu plus tard ?" demanda-t-il, par curiosité, relevant la tête pour regarder Neyra derrière l'épaule du lion.
Le jeune n'y avait probablement pas encore pensé. De toute évidence, il était devenu chaman pour des raisons personnelles, ou du moins, c'était ce qu'en avait déduit Devaraj.  Pourtant, lui même commençait à y réfléchir sérieusement. Car s'il avait d'abord eu envie de découvrir le monde par lui-même, il avait fini par trouver qu'entrer dans une tribu serait un moyen plus efficace pour agrandir ses connaissances. Voyager se révélait certes passionnant mais aussi coûteux en monnaie et en temps... Il avait envie d'un apprentissage plus consistant et rapide pour assouvir sa soif dévorante.

Méditant à tout cela, il finit son repas et s'avachit dans la neige en se servant de Cendres comme énorme oreiller. Finalement, il ne regrettait pas d'être venu ici, même si c'était pour se retrouver par imprévu entouré d'étrangers. M'enfin il était toujours plus enclins à rencontrer d'autres chamans plutôt que des gens d'autres races à vrai dire... C'était toujours intéressant de discuter avec eux, même si Neyra ne s'était pas encore rendu compte entièrement de l'étendue du monde qui venait de s'ouvrir à lui. Devaraj lui-même avait mit plusieurs mois à s'en rendre compte, et il n'était encore qu'un débutant en la matière...

J'écoute d'une oreille tout sauf attentive, Serahna elle est comme un lion qu'on sors de cage, et l'entendre remuer dans tout les sens me fatigue peut-être bien davantage encore. Mais je souris tant je suis heureux, nous avons réussi ! Même si cette victoire à un goût amer. Elle est morte, elle n'est plus qu'un esprit et il n'y a qu'en fusionnant que je lui offrirais un peu du bonheur de vivre. Pourtant, malgré ce constat désagréable, j'ai la sensation qu'elle n'a pas changer, comme si elle était la même dans la mort que ce qu'elle était dans la vie. Un désagréable frisson remonte le long de ma colonne vertébrale et je le chasse en ouvrant les yeux pour observer Léto. La surprise a laisser place à son calme habituelle et il est de nouveau aussi fermer qu'une huitre, ce qui me fait sourire davantage alors que je me rassois avec toute les peines du monde. Juste a temps pour attraper la bouteille que lui envoyait l'autre chaman.

- Pas d’excès hein Neyra, l'alcool c'est pas bon pour la santé !

Mes yeux gris se rivent sur Serahna et je lui tire malicieusement la langue avant d'avaler une longue gorgée qui, non contente de me brûler la gorge, à l'avantage de me remettre d'aplomb. Ou du moins, de me donner cette impression. Pourtant, loin de profiter du calme, je tourne la tête vers la forêt, me figeant en apercevant un lion. Pas du tout son territoire de prédilection normalement. Serahna se place instinctivement devant moi alors que Léto recule d'un pas, sur ses gardes. Mais la tension diminue au moment même où le fauve choisis l'autre chaman pour cible, révélant que ses deux là se connaissent depuis longtemps. Je ferme les yeux un instant avant de me relever, hésitant à rendre la bouteille à son propriétaire alors que le gros matou est là. Finalement, je tend quand même cette dernière, non sans jeter un coup d’œil à ma jumelle qui a croisé les bras et qui a plus qu'envie, apparemment de montrer sa joie à tout l'univers. La question me fige dans mon geste et je penche la tête sur le côté avant d'esquisser un regard vers Serahna, laquelle m'observe un moment avant de répondre pour moi.

- Il ne sait pas encore.

Pour une fois, elle n'épilogue pas et je réalise qu'elle ne peux plus lire dans mes pensées comme elle le faisait avant. Ce qui en soit, me dérange car je m'étais fait à l'idée qu'elle était ma voix, quand bien même je ne pouvais malheureusement plus rien lui cacher. J'hausse les épaules pour toute réponse, de toute façon, étant muet je ne saurai m'exprimer davantage. Oui, peut-être que je rejoindrai une tribu, à condition d'en apprendre davantage sur elles. En fait, je suis bien conscient d'être partie trop vite pour venir ici. Ma jumelle était ma seule priorité et maintenant qu'elle est là, face à moi quoi que à peine visible, je ne sais plus très bien que faire. Sans doute vais-je prendre le temps de voyager un peu, de comprendre la fusion aussi. Car il est indéniable que nous n'irons pas loin si je ne la maîtrise pas davantage. Enfin, ce sera une affaire à comprendre à deux. Et puis, j'ai aussi envie d'aider Léto, il a beau se montrer par moment joyeux, je sais qu'il renferme, comme moi, de lourdes blessures. J'ai seulement eu une chance qu'il n'a pas. Ma moitié naturelle est là, elle. Finalement, je croise les bras, observant le paysage qui, il n'y a pas si longtemps, représenter mon chez moi. J'aurai tout temps de réfléchir plus tard, pour le moment, j'ai simplement envie de profiter du temps présent, la horde d'esprit en moins. Car si j'en ai déjà vu beaucoup, ici, ils semblent se cacher un peu plus, ce qui n'est pas plus mal.

Effectivement, ce n'était pas étonnant que le jeune chaman n'ai pas encore prit de décision au niveau des tribus. Après tout, il avait tout son temps devant lui. Esquissant un sourire et hochement de tête compréhensif, Devaraj rattrapa la bouteille et en but quelques gorgées brûlantes avant de la ranger soigneusement dans son sac. Il poussa un long soupir de satisfaction et continua de grattouiller le museau de Cendres, qui semblait être l'animal le plus heureux sur terre.
-"Avec un peu de pratique et beaucoup de patience, tu arriva à parler à travers son esprit, n'est-ce-pas ?" dit-il en désignant la soeur de Neyra. Ne voulant pas se montrer décourageant, il évita de préciser que ça n'allait pas être pour tout de suite. Concrètement parlant, il n'était lui même pas encore capable de faire entendre Khaal aux autres. Enfin bon, peut-être que Neyra saura se montrer plus doué et rapide que lui. Après tout, chacun avait sa propre évolution et façon de devenir plus fort.
-"En tous cas, quand tu auras réussi, tu pourras venir me montrer le résultat. Je vais aller traîner quelques temps dans l'Antre des marais. Ce sont là-bas que se trouvent les deux tribus et si tu veux laisser un massage, elles sauront où me trouver." avança-t-il en souriant malicieusement.

Il ne savait lui pas vraiment pourquoi il lui racontait tout cela, mais bon, maintenant qu'il s'était engagé à l'aider, autant aller jusqu'au bout des choses, sinon ça servirait à rien. C'était idiot de ne pas aller jusqu'au bout de son idée. Sur cette lancée, il continua ses explications tout en donnant son avis sur la chose.
-"Et puis tu tardera pas à considérer tous ses esprits autour de nous comme quelque chose de totalement normal. Faut pas hésiter à leur parler, y'en a même qui sont bien sympas, bien plus que certains vivants... Et ils pourront t'apprendre des choses que personne ne sait. " conclut-il en s'allongeant, se servant de Cendres comme un vulgaire oreiller. Lui, il aimait bien entendre l'histoire des esprits. Évidement, ça finissait rarement bien, mais parfois c'était intéressant. Bon après, c'était mieux de se faire discret quand on discutait avec un esprit... A moins de vouloir volontairement passer pour un fou furieux à parler tout seul à voix-haute.
-"C'est pas tout le monde qui a la chance de discuter avec des personnes qui sont mortes il y a des siècles !" Au final, ils n'avaient que l'embarra du choix. Même si une bonne partie des esprits résidait dans l'Au-Delà, il y avait quand même beaucoup qui peuplait encore les continents, et à sa connaissance, ils étaient encore trop peu de chamans pour pouvoir s'occuper de tous les esprits restants. Il ne s'était pas rendu compte tout de suite de cet état des choses, mais commençait sérieusement à prendre conscience de l'étendue de leur tâche.

-"Enfin bref... Tu as encore le temps pour t'accoutumer à tout ça. Et maintenant, si tu le permets, je vais faire une petite sieste. Tu peux discuter avec Khaal si tu veux avoir plus de détails." Et sur ces paroles, il ferma les yeux pour s'endormir. Il ne craignait pas grande chose de la part du trio, et puis de toute façon, Cendres et Khaal étaient là pour veiller sur lui.

J'écoute le chaman sans vraiment le faire, il est la plus comme un bruit de fond, du moins, c'est ce qu'il me semble durant un instant. En fait non, j'ai beau être épuisé, je suis parfaitement attentif à ses mots, mon regard croise celui de Serahna et les mots forment peu à peu leur chemin dans mon cerveau. Parler à travers elle ? C'est grosso-modo ce que nous faisions enfant, en réalité, cette façon de voir les choses me rassure et en quelques secondes, me voilà comme revigoré. Bien que je soupçonne l'alcool d'y être aussi pour quelque chose. Si la magie peut réalisé une tel prouesse, alors j'ai hâte. J’acquiesce à ce qu'il me dit ensuite. Lui laisser un message quand moi et Serahna parviendront à nous faire comprendre ? Parfait. Finalement, cette journée est plus fructueuse que ceux en quoi je m'attendais. Mes espoirs ce sont vu couronné et il semble que je viens de rencontrer un ami. Et alors que je rêvasse la voix du chaman, dont j'ignore toujours le nom, blaireau que je suis, raisonne encore. Léto c'est rapproché de moi, silencieux comme le serait un chat, il attends. Serahna elle est assise à me^me la neige, sa forme éthérée semblant insensible au froid, ce qui me fait un tant sois peu la jalouser. Mais j'ai d'autres esprits à fouetter, le mien pour commencer qui part dans tout les sens et a bien du mal à se concentrer plus de quelques secondes sur ce qu'il se passe ici.

Je fini par étirer un large sourire avant de désigner d'un doigt moqueur mes lèvres, sceller dans le silence depuis ma naissance. Je suis muet alors parler aux esprits, ça va être le truc de ma sœur. Léto les entends, ce qui est déjà pas mal mais comme il ne les voit pas, il hésite à se croire fou. En somme, on forme un trio tellement atypique que cette histoire semble sortir d'un mauvais conte pour enfant.

- Oui enfin, la folie, on en est jamais bien loin ...

Je tourne instinctivement la tête vers Léto qui, s'il n'a pas vu de fantôme, semble pourtant dans le même état que si s'était le cas. A moins qu'il ne soit tout simplement pas encore remis du choc d'avoir vu Serahna apparaître sous son nez ? Laquelle est en train de faire un monologue de son côté en baragouinant que parler, dans mon cas, c'est comme demander à un poisson de voler. Bien que je pense que les poissons volants sont bien plus probable. L'état de fusion ressentit plus tôt me manque un peu, au moins, même si ça n'a pas durer, j'ai pu parler. Certes, ma voix n'était pas tout à fait humaine, un peu comme sortie d'outre-tombe mais c'est comme quand j'ai rencontrer mon maître. Une vieille femme qui m'a appris que l'impossible existe. D'ailleurs, je ne suis plus humain, en voilà la preuve. Je laisse le chaman s'endormir avant de fouiller les environs du regard. Finalement je trouve une branche et je vais faire face à Khaal, laquelle me semble d'une amabilité inexistante.

"Au fait, quel est son nom ?"

Les mots se trace dans la neige puis je désigne le chaman qui s’endort. Il est quand même plus que temps que je me renseigne à ce sujet. De vague souvenirs remontent, très jeunes, avant que mes parents comprennent que j'étais muet, il me disait souvent que j'étais stupide, lent d'esprit. Et c'est exactement comme ça que je me sens, là maintenant en fait. Ma jumelle est quant à elle en train de faire le papillon dans la neige, ce qui est navrant c'est qu'elle ne laisse aucune trace. Léto en profite pour examiner le phénomène, et je réalise que si Khaal est vraiment aussi froide qu'elle me le paraît, et je parle d'un esprit, donc d'une morte donc côté froid, elle est en plein dedans. Et bien dans ce cas, je vais peut-être me retrouver dans la discutions la plus silencieuse qui soit. Mon seul réconfort venant du fait que je ne suis pas mauvais dans le fait de garder le silence, expérience oblige.

Si cette rencontre inattendue avait déjouée ses plans pour la journée, il n'en avait pas moins passé un bon après-midi, finalement. Repu et savourant une dernière gorgée d'alcool, il laissa un long soupir de satisfaction franchir ses lèvres et ferma les yeux. Il n'avait pas eu son petit moment de solitude, mais la compagnie du trio était quand même agréable et assez amusante...

Khaal observa avec un désintérêt évident son chaman roupiller, allongé contre Cendres. Manger, dormir et marcher, voilà tout ce qu'était capable de faire Devaraj de sa jeunesse. A son âge, elle était déjà une combattante fière et aguerrie elle ! Qu'il se noie dans son alcool tiens ! Il ne manquerait plus qu'il se déniche une poulette pour que le tableau soit complet. L'esprit étouffa un soupir fantomatique et préféra promener son regard ailleurs que sur cet imbécile. Quand elle avait accepté de devenir son esprit compagnon, elle avait eu en face-d'elle un gamin innocent et plein d'espoir, qui s'émerveillait sur tout et n'importe quoi. Mais elle avait vite réalisé qu'il allait changer, grandir, devenir un adulte à part entière... Et ce qu'il l'inquiétait, c'était de savoir quel genre d'adulte il allait bien pouvoir devenir. Bien qu'elle se voie mal abandonner le chaman, elle n'avait pas envie de servir un faiblard, ni d'obéir à un maître dénué d'intelligence.

Silencieuse et immobile, elle regarda Neyra tracer des mots dans la neige, tout en restant aussi expressive qu'une statue de pierre. Peu à peu elle déchiffra la question du muet. Mais c'était qu'il n'avait pas l'air bien malin celui non plus ! Elle se retint de lever les yeux aux ciel et finit par répondre lentement. "Devaraj", finissant sa phrase aussi abruptement qu'elle l'avait commencé. Comme s'il elle allait prendre la peine de discuter avec ces gamins ! L'autre avait un peu trop bu en lui reléguant la tache de répondre aux possibles questions du jeune chaman ! Ne ressentant aucun besoin de prendre à nouveau la parole, l'ancienne alfar se leva pour aller se promener dans la forêt.

"Hmm désolé, elle n'est pas très aimable...aha..." lança alors le chaman, quand il se réveilla plusieurs minutes plus tard et se rendit compte que Khaal était partie. Effectivement, il avait légèrement oublié ce détail quand il s'était endormi... "Enfin bon, elle n'est pas méchante dans le fond. Il faut comprendre que certains esprits sont un peu aigris par leur mort. Ce n'est pas une étape facile pour tout le monde après tout !" rajouta-t-il en se relevant.

Il en profita pour admirer un dernier moment les paysages étincelants de neige, et rangea minutieusement toutes ses affaires. "Bien... Je repars avant que la nuit arrive. Ce fut un plaisir de t'avoir aidé ! Et je ne doute pas que nos routes se recroiseront sûrement. " conlut-il avec un sourire amical. Driel et Khaal le rejoindront sur la route, mais il aimerait bien trouver un abri où dormir pou la soirée avant qu'il ne fasse trop sombre. Il salua le trio, avant de tourner les talons et de redescendre par un petit chemin dégagé, accompagné par Cendres qui gambadait à coeur-joie dans la neige.