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 [Quête] Course contre la montre [Djinshee/Scott D. Adams]

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Lun 20 Avr 2015, 11:33

Djinshee se dirigeait d’un pas lent vers la fameuse forteresse. Elle était plutôt sceptique, face à cette invitation. Quelques jours plus tôt, elle avait reçu une lettre de la gouvernante de la forteresse ensorcelée lui expliquant qu’elle était invitée à une grande réception. Pourquoi ? Elle n’en avait aucune idée… Elle ne savait pas qu’elle intéressait tant les Vampires. Et à l’inverse, elle se fichait totalement de ces créatures glaciales. Elles ne lui avaient pas causé de tort pour l’instant. Toutefois, il était plus prudent de s’en méfier. Du moins, c’est ce qu’on lui avait dit.
   C’était la fin d’après-midi, et le soleil rougeoyant n’allait pas tarder à disparaître. Il commençait à faire un peu frais, ce qui importait peu, puisqu’elle pouvait se réchauffer quand bon lui semblait. Elle commença à maîtriser ses pouvoirs. Le feu était devenu son meilleur allié, talonnant Enderah. D’ailleurs, elle avait décidé de ne pas l’emmenée et l’avait laissée à la maison. Comment aurait-elle été reçue, accompagnée d’une bête aussi imposante ? Certainement moins bien que si elle était venue seule, en tout cas.
   L’Elémentale voyait l’immense édifice se dresser devant elle. Elle se devait d’avouer que c’était très impressionnant. La forteresse était entourée d’enceintes imprenables, et il semblait qu’une espèce de brouillard s’élevait tout autour d’elle. Elle décida d’accélérer le pas pour voir tout ça de plus près. Elle se rendit alors compte qu’un grand ravin la séparait du bâtiment, et que seul un pont reliait les deux bouts de terre. Pont qui n’inspirait pas du tout confiance. Djinshee regarda aux alentours avant d’inspirer profondément. Le seul passage semblait être celui-ci. Elle fit apparaître une petite flamme au bout de ses doigts puis s’engagea sur le pont. Le brouillard était épais et ne permettait pas de voir bien loin. Il n’y avait plus le moindre bruit. Seulement celui de ses pas lents sur la pierre humide.
   « Au pire, si je tombe, j’ai ma télékinésie. »
   Elle ignorait si elle serait capable de supporter son propre poids, mais elle compterait sur son instinct de survie pour décupler ses forces. Lorsqu’elle eut enfin traversé le pont, elle leva la tête. Les murs et les donjons étaient magnifiques : tout était finement sculpté, dans les moindres détails, des motifs que Djinshee avait du mal à discerner. Elle décida de continuer son chemin. Elle ne savait pas quelle heure il était, mais qu’elle soit en retard ne l’étonnerait pas. Elle ouvrit les grandes portes de bois massif et de pierre, et écarquilla les yeux. Elle avança dans l’immense jardin.
   « Je me demande vraiment ce que je fous là… »
   Des fontaines, des labyrinthes de haies, des arbres de toutes sortes et des fleurs multicolores aux parfums divers, tout était fait pour montrer la richesse et l’importance du lieu dans lequel elle se trouvait. Il y avait des allées en tous sens, mais une, plus large que les autres, laissait deviner le passage régulier de carrosses ou autres voitures. Elle préféra ne pas quitter cette allée. Se perdre dans un tel jardin serait assez embarrassant. Surtout lorsqu’on était invité et qu’on ne savait pas trop ce pourquoi on était là. La jeune femme avança vers la façade du palais, tout en regardant la végétation luxuriante tout autour d’elle. Il y avait même des animaux ! Cela l’étonnait, de la part de Vampires, mais après tout, elle les connaissait surtout de nom. Elle entra enfin dans la forteresse. Le hall dans lequel elle se trouvait était totalement désert, et elle n’entendait aucun bruit provenant d’autres pièces. Contrairement au jardin, la décoration était beaucoup plus sobre, ici, mais tout aussi riche. Tout était en marbre noir et en velours rouge. Djinshee se sentit tout de suite mal à l’aise. Elle ne savait pas pourquoi. Peut-être parce qu’elle s’était attendue à voir du monde ici ? Ou parce qu’il régnait un silence de mort ? Possible. Au fond se trouvaient d’autres portes. Elle alla pour les ouvrir, mais à peine eut-elle fait trois pas qu’elle entendit un grand claquement derrière elle. Elle se retourna d’un coup. Les portes d’entrée s’étaient fermées… Toutes seules ?! Elle resta figée quelques secondes avant de continuer sa route. Elle ouvrit les secondes portes et se retrouva dans un grand salon richement décoré. Des tableaux, des sculptures… C’était peut-être même un peu trop chargé à son goût. Encore une fois, elle se demanda où elle était tombée. Seul un souverain pouvait posséder autant de richesse ! L’Elémentale soupira en constatant qu’il n’y avait toujours personne. Enfin si, juste une.
   Un homme lui tournait le dos. Il regardait un bout de papier voler. Djinshee fronça les sourcils et alla doucement le rejoindre. Il y avait quelque chose d’écrit dessus.

   -Qu’est-ce que c’est ? Dit-elle à son oreille.

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Ven 24 Avr 2015, 01:56

La lettre arriva aux heures du matin, glissée sous la porte par un destinataire inconnu. Les yeux plissés, avec de minces cernes noires qui les contournaient, causé par la fatigue matinale, et les sourcils froncés, je me penchai vers l’enveloppe, lentement, avant de la prendre entre mes doigts. J’étais sceptique. Habituellement, je ne recevais jamais de missive, dû au peu de connaissances susceptibles de m’écrire et mes liens familiaux coupés depuis deux ans. La dernière fois où une lettre était entrée ici, en-dessous de ma porte, elle avait été écrite par la main de l’ancienne Impératrice qui n’avait que demandé une démonstration de mes capacités, sous l’apparence d’une mission pour le grand marché de la cité. Depuis, plus rien. La reine, d’après ce que j’en savais, était toujours portée disparue et, désormais, le peuple vivait sous la tutelle d’un nouveau roi qui n’avait jamais essayé de prendre une quelconque forme de contact avec moi. Je n’étais qu’un enfant à ses yeux, sans aucun doute, mais je ne serais pas le premier qui irait se plaindre devant lui. Je poussai un soupir et déchirai le papier de l’enveloppe sans réellement porter d’attention à son destinataire. Il n’y avait qu’une simple note à l’intérieur, ou plus précisément, une invitation à une soirée organisée à la Forteresse ensorcelée, un domaine de Vampire à proximité du Berceau cristallin. Immédiatement, les questions commencèrent à fuser dans ma tête. Pourquoi recevais-je une invitation, moi, alors qu’il y avait d’autre personnes plus aptes à participer à ces soirées en Aeden? C’était parfaitement légitime. Je n’étais pas connu d’une majeure part de la population, je n’avais jamais tenté de me faire un nom. Alors pourquoi?

Je serai les dents. Le meilleur moyen de le savoir, c’était d’y aller directement. Mais, d’un autre côté, je n’avais pas envie de me promener chez les Vampires, autant par désintérêt que par méfiance. Pourtant, j’aurai pu brûler cette lettre, là, ici même et l’oublier, mais la curiosité de découvrir ce qui en découlait était aussi forte et irrésistible que les pensées qui essayaient de me convaincre de ne pas y mettre un seul pied. « N’y va pas. » La voix de l’Ange résonna par-dessus mon épaule, alors que ses pupilles noisettes parcouraient la lettre, lisant les quelques mots inscrits à l’encre avec une finesse exceptionnelle. « N’y va pas. », me répéta-t-elle, le ton aux accents inquiets. Je me demandai sérieusement ce qui justifiait un comportement aussi étrange le matin. « Tu ignores tous des risques que tu coures en allant « visiter » ces créatures de la nuit. » Je ne connaissais rien sur eux, je ne m’en étais jamais vraiment intéresser. Je ne pouvais pas les juger réellement, mes connaissances s’arrêtant principalement sur les bases que la majorité, c’est-à-dire les buveurs de sang qui ne sortaient qu’une fois le soleil couché. De ce fait, je n’avais aucune raison valable de les détester, mais encore moins de les aimer. Mon avis sur les Vampires demeurait toujours objectif, son peuple n’ayant jamais montré une quelconque hostilité à moi ou à Aeden – d’après ce que j’en savais du moins. Cependant, la jeune femme semblait plus calée que moi sur le sujet, alors je la laissai poursuivre ses explications sans l’interrompre, intrigué par les mots qui sortiraient de sa bouche. « Si tu veux mon avis, ils organisent cette fête pour masquer une partie de chasse dans laquelle tu as été sélectionné au hasard pour participer. Les Vampires sont presque tous comme ça. » Était-ce par connaissance personnelle que son ton restait sans appel ou par connaissance plus générale?

Je déposai la lettre sur la table. Un sourire se dessina sur mes lèvres, amusé. « Je ne suis pas un gibier facile à attraper, mais quand tu dis « presque tous », c’est qu’il y a des exceptions, non? Je suis quand même curieux. » Le regard que me lança Brethil n’était composé que d’une peur féroce, primitive, qui glacerait le sang à tous ceux qui n’y étaient pas préparés. Sa main de porcelaine s’agrippa brusquement sur mon poignet. « Non, tu n’iras pas. Ce… ce n’est pas un jeu tu sais? Ils sont vraiment dangereux. » J’haussai des épaules. « Pas autant que les Démons. » Ma rencontre avec l’une de ses créatures me l’avait bien appris et ce, sans qu’il n’y eut de douceur ou de ménagement. C’était une réplique contre laquelle l’Ange ne pouvait rétorquer aussi aisément. Simplement parce qu’elle savait que j’avais raison. Cependant, je n’eus pas besoin de croiser son regard pour comprendre qu’elle désapprouvait mes décisions. Nos avis divergeaient plus régulièrement que ce qu’on était porté à croire, mais je n’appréciais pas la laisser dans ces conditions. À ses yeux, comme aux yeux de tous, je ne valais guère plus qu’un gamin, un jeune enfant ayant encore besoin de rester sous la protection de ses parents. Mais, ils sembleraient que tous oubliaient que je savais me défendre et me débrouiller sans l’aide d’un regard adulte, ayant passé deux ans à mener une vie de voleur au Contient du matin calme, ignoré des yeux de ma propre mère. Cependant, ça, personne ne pouvait le deviner aussi facilement. De mes souvenirs, je n’en avais parlé qu’avec une seule personne et cette personne, n’était pas celle qui se tenait debout devant moi, les bras croisés.

« Tu as pris la mauvaise habitude de voir le mal partout hein? Je sais me défendre, je sais me battre. Je survivrai face à cette petite communauté de Vampires. » Armé d’une paire de couteau et d’une simple griffe en métal, certes, mais je me gardais bien de lui avouer en pleine figure. « Les limites de ton orgueil ne cesseront jamais de me surprendre, mais qu’importe ce que je dirai, tu trouveras une façon de fourrer ton nez là où tu n’as pas besoin de renifler. » Vaincue, l’Ange poussa un soupir. Le sourire victorieux que je voulus afficher s’effaça de la commissure de mes lèvres, adoptant une expression aussi neutre que possible. Je gagnais toujours à ce jeu, mais il était inutile, de mon avis, de lui offrir sur un plateau d’argent l’argument qui la mènerait à vouloir se joindre à moi. « Fais ce que tu veux. Je ne choisirai pas pour toi. Mais attention : reviens ici blesser et tu entendras parler de moi encore bien longtemps. » Elle tourna les talons en n’oubliant pas de me lancer la besace magique posée sur la table et quitta la pièce pour poursuivre ses pratiques de luth qui ne cessaient jamais de s’allonger. Je me dirigeai vers la direction opposée, jouant avec le sac au contenu illimité entre mes doigts. Je poussai la porte d’entrée et marchai dans les rues de la cité encore endormie en ses heures si matinales et fit route jusqu’au portail de la  ville, qui me guida directement au Berceau cristallin, lieu avoisinant cette fameuse forteresse Vampire.

~~~

Le temps avait joué contre moi. Les fortes rafales de vent m’avaient fouetté durement au visage, sifflant dans mes oreilles et créant un environnement aussi bruyant que dérangeant autour de moi. La brume s’était levée. Il y en avait tant que mon chemin fut, sur toute sa durée, obstrué par ce voile opaque qui m’empêchait de distinguer les obstacles à plus de deux mètres devant moi, mes flammes n’ayant été que d’un mince secours pour percer le dense brouillard. Une fine pluie m’était tombée sur les épaules, glaciales, et tant même bien si son intensité n’avait été que de moindre, je fus accompagné par ses caprices sur l’ensemble de la route jusqu’à finir entièrement trempé dès mon arrivée sur les lieux, qui à mon plus grand étonnement, étaient vides. Il n’y avait aucune trace de ce qui pouvait présager une quelconque soirée. Je ne pouvais même pas savoir le temps qui s'était écoulé depuis mon arrivée. Ma langue claqua sur mon palais, agacé. Était-ce une mauvaise plaisanterie? Je fis un pas de plus dans la demeure sans réellement y réfléchir et la porte se referma à mon passage d’un coup sec et précis, avant de disparaître dans le décor. Génial, complètement génial. Plus les secondes défilaient, plus je nourrissais la frustrante impression que Brethil avait sans doute vu juste, à la différence près que l’ambiance se rapprochait davantage à une maison hantée qu’à une véritable partie de chasse vampire. Je sentais déjà la fureur des flammes qui se joignaient au bouillonnement de mon sang dans mes veines. Je fermai les yeux pour me ressaisir légèrement et calmer ces pulsions instinctives qui brimait toute réflexion décente, puis passai les yeux sur l’intérieur de la Forteresse aux attraits de château, sans rien découvrir de concluant sur un moyen de m’échapper de l’habitation.

Il n’y avait aucune fenêtre par laquelle je pouvais passer et la porte d’entrée s’obstinait à demeurer condamnée. Le reste n’était que du mobilier, des dizaines et des dizaines de tapis richement ornés, une bonne vingtaine de portes identiques et des escaliers menant aux étages supérieurs. Je soupirai. Je n’avais plus d’autre choix mis à part progresser vers l’avant et essayer de trouver une autre sortie, avant que les malheurs et la malchance me tombent tous dessus. Je m’engageai vers la première porte qui me tomba sous le nez et l’ouvrit brusquement sans me soucier du bruit épouvantable que les grincements créèrent par la suite. La pièce dans laquelle je venais de pénétrer était un immense salon, décoré avec de grandes richesses que peu possédaient les moyens de s’approprier mais ce qui attira davantage mon attention fut le petit bout de papier qui lévitait dans les airs. Je plissai les yeux, me dirigeant lentement vers la feuille de parchemin et la coinçai du bout des doigts pour débuter la lecture de ces phrases écrites à l’encre, la même écriture que sur l’invitation froissée dans le creux de mes poches. J’avais à peine commencé à lire qu’une voix, toute proche de mon oreille, me murmura : « Qu’est-ce que c’est? » Que mon corps s’embrasa par lui-même, réduisant la note en tas de cendres noires fumantes.

Je fis un pas vers l’arrière, tournai mon corps vers l’inconnu, prêt à attaquer tout adversaire. C’était une jeune femme qui se tenait devant moi, droite, avec une expression troublée qui me faisait légèrement songer à la mienne lors de mon arrivée en ces lieux. Cependant, ses airs ne furent pas suffisants pour que je puisse baisser délibérément ma garde face à elle. Mon corps continuait de dégager de puissantes flammes. Mes yeux rouges ne reflétaient qu’une immense méfiance à son égard. « Qu’est-ce que ça peut faire hein? Qui êtes-vous pour commencer? », m’exclamai-je d’un ton cassant, décidé à passer à l’offense. Mais un meuble qui se précipita soudainement dans notre direction me coupa net dans mon élan, avant que je puisse esquisser le moindre geste. J’évitai de justesse la petite table ornée de décorations simples, qui, dans son sillage énergique, avait laissé une note identique à celle qui s’était enflammée flotter au-dessus du sol. Je lançai un bref regard par terre. Le tas de cendre avait disparu.

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Ven 01 Mai 2015, 18:02

L’homme prit subitement feu, mais Djinshee ne sursauta pas. Au contraire, un léger sourire apparut sur ses lèvres. Elle avait affaire à un Elémental de feu, comme elle. Elle en était presque certaine. Brûler d’instinct n’était pas courant chez les autres races. Son sourire s’effaça juste après, quand elle s’aperçut qu’il avait brûlé la note. Elle était certainement importante pour se trouver là, en lévitation dans un château désert.
   Il était en position d’attaque, lorsqu’il se retourna vers elle. Ses orbites en feu ne laissaient paraître que de la méfiance. Le ton de sa voix était sec, agressif. Comme si la jeune femme venait de le frapper. Elle resta impassible. Mine de rien, il la rendait nerveuse. Ce château était suffisamment étrange à lui-seul… A peine eut-elle pensé cela qu’un meuble fonça dans leur direction. Djinshee sauta en arrière et faillit perdre son équilibre. Elle regarda consécutivement l’homme et la petite table. Etait-ce lui qui avait fait ça pour la déstabiliser, ou ce meule était-il vivant ? Lui, ne s’occupait même plus du meuble. Il regardait plutôt devant lui. Elle suivit son regard. Une note semblable à la première flottait dans les airs, à la même place. Elle n’avait pas compris ce qu’il venait de se passer. En était-ce une autre, ou bien la même ? Djinshee s’approcha et attrapa le morceau de papier. Elle lut à haute voix :
 
A l’intention de mes très chers invités,
Je vous souhaite la bienvenue dans mon humble demeure qu’est la forteresse ensorcelée. Je me doute bien que vous vous demandez ce que vous faites ici, puisqu’il n’y a personne, comme vous l’aurez remarqué. En effet, il n’y a pas de réception ; ce n’était qu’un prétexte pour vous amener ici. En réalité, vous avez tous deux eu la chance et le grand privilège d’être sélectionnés pour participer à un petit jeu que nous organisons régulièrement ! Le but de ce jeu est très simple, et il vous permettra, si vous y parvenez, de gagner une grosse somme d’argent : vous avez exactement vingt-quatre heures pour sortir de mon domaine ! Je n’ai plus qu’à vous laisser découvrir ce qui vous attend… Bonne chance !
Bien amicalement,
La gouvernante.
 
   Elle releva doucement la tête et chiffonna le morceau de papier. Elle ne savait que penser. Elle était en colère, mais elle n’arrivait pas à croire qu’elle s’était laissé avoir par un de ces Vampires. Elle jeta la note par terre et tenta d’ouvrir les deux grandes portes qui menaient au hall. Impossible. Elles étaient scellées. Peut-être pouvait-elle les brûler ? Ses flammes léchaient le bois sans pour autant le noircir. Elle poussa un cri de colère puis se tourna vers l’homme. Elle ne lui faisait pas plus confiance que lui avec elle, mais ils allaient être contraints de passer quelques temps ensemble.
   -Si ça peut répondre à ta question, je suis une Elémentale de feu dans le même panier que toi.
   Djinshee n’allait pas en dire plus. Du moins, pas pour le moment. Ce n’était pas parce qu’il maîtrisait le feu qu’ils allaient être amis. Et cet homme avait l’air aussi méfiant qu’elle, voire agressif, or les colériques, très souvent se détestaient.
   La jeune femme alla reprendre la note. Elle voulait la relire pour être certaine d’avoir bien compris. Elle la déplia et la mit à plat sur une table. Etrangement, les plis du papier avaient disparu… le texte aussi ! A la place, des chiffres s’y étaient inscrits : 23 h 56. Le six du 56 disparut doucement pour laisser place à un cinq. Djinshee contourna la table et se dirigea vers l’une des nombreuses portes du salon. Elle en ouvrit une au hasard. La porte à sa droite s’ouvrir en même temps. Devant elle, un immense salon, semblable au premier et tout aussi vide. A la seule exception qu’elle pouvait y voir l’homme, à la même place. Intriguée, elle passa la porte. Elle ressortit par celle de droite.
   « Ne me dis pas qu’on est coincés dans un cercle vicieux… »
   Elle claqua la porte derrière elle et serra les poings. Tout cela devenait de plus en plus stressant. Elle fit lentement les cents pas. Le silence était assourdissant.
   « Ce château est un labyrinthe… »
   Mais il y avait forcément une solution, non ? Il y en avait toujours une. Et si on leur avait lancé le défi de sortir d’ici, c’est que c’était possible. Sauf si cette soi-disant gouvernante était d’une perversité incroyable. Djinshee rouvrit la porte. Une bibliothèque. N’y avait-il pas eu un salon quelques secondes plus tôt ? Si. Elle resta muette. Elle ne comprenait rien à ce jeu pourtant simple.
   Elle entendit des battements. Ils étaient de plus en plus nombreux et de plus en plus forts. Elle passa la tête dans l’encadrement. Des dizaines de livres piquèrent soudainement sur elle, comme des rapaces. Surprise, la jeune femme poussa un cri et tomba en arrière. Ils étaient des centaines, et le salon ne tarda pas à être envahi. Elle tendit ses mains devant elle et en incendia quelques-uns. Elle ne savait pas ce que faisait l’homme, mais peu lui importait. Pour l’instant, il fallait qu’elle se débarrasse de ces bouquins qui se prenaient pour des oiseaux. Il pleuvait des cendres, l’empêchant de garder les yeux ouverts. Mais malgré tout ce qui brûlait, le bruit de battements restait constant. Djinshee mit fin au brasier. Autour d’elle, un épais matelas de cendres avait couvert le marbre. Elle se laissa souffler. Une légère brise se leva. Elle tourna sur elle-même. D’où ça venait ? Les livres avaient cessé de passer la porte, et il y en avait un peu partout dans la pièce : par terre, sur les tables, les meubles, en équilibre sur des dossiers de chaises et de fauteuils, et même sur le plafond. Ils s’étaient arrêtés en même temps, comme un énorme groupe de chauves-souris. Le courant d’air fit s’élever les cendres, qui tourbillonnèrent. Lentement, elles formèrent plusieurs fines plaques rectangulaires, qui s’assemblèrent entre elles pour redonner vie aux dizaines de volumes qu’elle avait détruits.

   Elle n’en croyait pas ses yeux. Et tout cela la rendait très nerveuse. Elle se résuma la situation. Elle était coincée dans un labyrinthe magique en forme de château avec un inconnu, et les objets se réparaient tout seuls et les agressaient. Sans oublier qu’un temps leur était imparti pour sortir d’ici…

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Ven 08 Mai 2015, 01:51

« Tu m’en diras tant… », rétorquai-je d’un ton froid, les dents serrées, aux premières paroles qui quittèrent ses lèvres, à la fin de sa lecture rapide de la note et de ses vaines tentatives à forcer les portes menant au hall principal à s’ouvrir. Son cri de colère résonnait encore dans la demeure, tel un écho qui refusait de s’effacer, de disparaître, tandis que mon attitude contrastait aux importantes vagues de rage de cette femme Elémental. Les flammes qui léchaient les pans de mes vêtements sans les brûler perdaient leur puissance d’antan, étaient coupées de l’énergie magique qui leur offrait une chance de vivre, de se manifester dans le monde réel. Je ne m’épuisais pas, je ne faiblissais pas. Simplement, je ne voyais plus l’intérêt de poursuivre leur alimentation. La surprise était passée. Je pouvais me permettre de calmer un tant soit peu mes ardeurs instinctives et impulsives qui me faisaient agir de la sorte, respirer avec lenteur, avec sérénité. Pour mieux réfléchir sur le problème, pour mieux songer aux méthodes qui puissent nous aider à foutre le camp de ce manoir rocambolesque, étrange. Quitte à devoir accepter une confiance inexistante et illusoire avec la femme de Feu qui ne cessait d’engendrer méfiance et soupçons. Les personnalités semblables possédaient le don de s’attirer mutuellement, indéniablement. Mais dans certains cas, l’effet que cela produisait était le parfait opposé de ce qui était supposé être. Comme deux Elémentals de Feu qui ne réagissaient qu’à l’appel des flammes mordantes qui les habitaient.

Ça ne pouvait que mal se terminer.

Elle reprit la note en boule entre ses doigts, démêla le morceau de papier froissé qu’elle avait transformé sous les effluves de sa colère et l’étala de tout son long sur une table de la pièce pour y relire l’ « invitation » de la gouvernante à son jeu de mauvais goût. Je ne pris pas vraiment la peine de regarder par-dessus l’épaule de la femme, ennuyé par les tournures que prenait la soirée naissante à la Forteresse ensorcelée, énervé de m’être fait piéger comme l’avait prédit les mots de la jeune Ange, comme un imbécile qui avait été aveugler par une folle idée que la soirée se révélerait être amusante, divertissante. Comme un enfant naïf, incapable de comprendre la cruauté du monde dans lequel il évoluait, trop innocent pour en déchiffrer ses rouages, sa complexité. Je serrai les poings. En colère, bouillonnant d’une rage primitive, instinctive. Je sentais le Feu s’agiter. J’entendais ses appels, ses ordres graves et autoritaires de le laisser se manifester comme auparavant, en toute liberté, dépourvu de la moindre entrave que je lui imposais. Je n’avais pas besoin de me rappeler que je n’étais qu’un simple adolescent de quinze ans dont la vie lui avait été volé deux ans plus tôt, qui ne voyait que les malheurs à l’instar du bonheur, qui vivait dans le noir au lieu de se tourner vers le blanc. C’était pathétique. Mais le pire, c’était que j’en étais parfaitement conscient.

Je levai la tête, en symbiose aux sons qui résonnèrent soudainement dans la pièce, semblables aux battements de milliers d’ailes de petites créatures. La femme n’était plus là où je l’avais aperçu la dernière fois. Un hurlement de peur retentit. Aigu et strident, il bourdonna dans mes oreilles comme une tempête déchaînée, accompagné par ces bruissements d’ailes qui ne cessaient d’accroître la puissance de leur bruit jusqu’à atteindre les limites du supportable. Je n’entendais plus rien, j’étais devenu sourd. Je ne voyais plus que des dizaines et des dizaines de reliures poussiéreuses passant à toute vitesse devant mes yeux, animés par la folie, animés par des désirs de nous distraire, de perturber nos sens. Je ne réfléchis pas plus de deux secondes avant d’agir : Mon corps s’embrasa à nouveau, le feu plus fort, plus puissant que jamais. Les reflets rouges sang des flammes brillaient devant mes iris. Leurs étincelles léchaient les pages de ces livres, les brûlaient jusqu’à la dernière miette pour ne laisser dans leur sillage que des tas de cendre noires fumantes, odorantes. Une épaisse fumée emplissait la pièce, rongeait  la moindre parcelle d’oxygène qui était contenue sur les lieux. Cependant, rien ne m’arrêtait. Je ne me souciais peu de mes difficultés grandissantes à respirer, je ne remarquais même plus la régénération accélérée des livres volants ou la soudaine immobilité de la femme à mes côtés. Je ne pensais plus qu’à tout brûler, à tout réduire en cendres, à tout détruire.

Jusqu’à ce que mes poumons alertent mon cerveau du manque d’air. Mes yeux me piquaient. Des larmes perlaient sur le coin de mes paupières. Je ne voyais que les flammes maintenant, que du rouge pure, incandescent. La chaleur me laissait de marbre, les chatouillements du Feu ne faisaient que me rassurer. Mais la fumée allait me tuer si je ne me décidais pas à partir maintenant, sous les assauts des livres ou non. Étrangement, tout dans la salle semblait brûler : des flammes grimpaient sur les meubles, sautaient de bois en bois mais, rien ne voulait disparaître en cendres. Les tables demeuraient intacts, peu importait l’importance de la force des flammes. Les poils des tapis s’obstinaient à rester debout, les murs refusaient de s’écrouler, de tomber et les portes n’étaient tout bonnement pas touchées par l’incendie qui grandissait à une vitesse alarmante. Le feu était simplement l’ennemi des ouvrages qui nous attaquaient.

Je ne m’attardai pas plus que nécessaire sur ces détails. La fumée prenait de l’ampleur, plus rapidement que je le croyais et, sans même hésiter une seconde, fonçai vers la première porte venue et l’ouvrit brutalement en entraînant la femme avec moi, les doigts collés sur son poignet. Je refermai la sortie en toussant à quelques reprises, avant de regarder autour de moi, observant l’endroit dans lequel je nous avais emmenés.

Nous étions retournés dans le hall d’entrée.

Je retins de justesse un juron. « C’est pas vrai… » Les portes qui menaient à l’extérieur étaient toujours manquantes. Le grand escalier nous surplombait de toute sa hauteur, comme s’il nous larguait, nous lançait le défi de le gravir. Je m’avançai vers les marches et débutai l’ascension, fatigué par tous ce qui me tombait dessus, épuisé par ce jeu stupide dont les vingt-quatre heures s’étaient à peine entamées. Je montais, je montais. Sans jamais atteindre le haut, le second étage. J’étais prisonnier au milieu de cet escalier qui, pourtant, n’était pas si grand lorsque nous étions à ses pieds. Ce petit manège ne finissait plus. Peu importait la vitesse à laquelle je montais ces marches, je n’accéderais jamais à l’autre étage.

Énervé, je descendis rejoindre la femme. Je fracassai mon poing contre la rambarde de bois, les lèvres pincées, les dents si fortement enfoncés sur elles qu’un mince filet de sang me coula sur le menton. Je ne pus empêcher les étincelles de jaillir de ma paume en harmonie avec le geste de frustration que j’avais esquissé. Je m’essuyai le coin de ma bouche du revers de la main et plantai mes iris rouges dans ceux de l’Elémental. « T’as une idée pour foutre le camp d’ici? » C’était dur à admettre mais, pour ma part, ma tête faisait chou blanc. Ma rage brouillait toutes réflexions calmes et stratégiques. Ma colère m’empêchait de réellement me focaliser sur les événements, de déceler les failles dans le jeu de la gouvernante de ce nid à Vampires. Je n’avais plus trop le choix : je devais m’appuyer sur les plans de cette femme. Dans le cas où elle n’en aurait pas, nous finirions bien par réussir à créer un trou dans le mur avec un peu d’acharnement.

Je n’étais pas contre cette idée-là.

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Sam 09 Mai 2015, 11:03

Elle voulut prendre une grande inspiration mais regretta tout de suite son geste. La fumée avait envahi le plafond, et tout était devenu opaque. Elle fut prise d’une quinte de toux et les larmes perlaient sur ses joues. Jamais elle n’avait pleuré, jusqu’à présent. Bien qu’elle ne considère pas ces larmes comme le fruit de ce qu’était véritablement « pleurer ». Mais une chose était sûre, elle détestait cela. Elle aurait préféré que ses yeux la piquent atrocement plutôt que de sentir ce liquide entrer en contact avec elle. Son poignet fut violemment saisi. Djinshee se laissa faire. Elle fut comme projetée sur le sol lisse et glacial du hall. Il y eut un claquement de porte, puis, plus rien. Haletante, elle cligna plusieurs fois des yeux et sécha son visage du revers de sa manche. La voix du jeune homme résonna. L’Elémentale se releva et examina la pièce dans laquelle ils venaient d’atterrir. C’était exactement le même hall que celui de l’entrée, à l’exception que les deux grandes portes menant à l’extérieur étaient manquantes. Simplement un grand escalier de marbre noir, d’une largeur monumentale. Il s’y tenta le premier. Jusqu’à la moitié, il ne rencontra pas la moindre difficulté, mais ensuite, les marches semblaient descendre d’elles-mêmes, si bien qu’il n’avançait plus d’un pas. L’impatience ne tarda pas à le gagner et il la rejoint rapidement.
   Sa question était à la fois normale et idiote. Il était évident qu’elle n’en savait pas plus que lui. Mais ils auraient besoin d’espoir pour sortir de là, et il était certain que s’ils ne parvenaient pas à trouver une solution d’ici quelques heures, ils en deviendraient fous. Il fallait donc trouver une solution tout de suite.
   -Je n’en sais pas plus que toi sur les Vampires et leur château, si on peut appeler ça ainsi, mais il me semble que la solution pour sortir d’un labyrinthe, c’est de longer un seul et même mur et de passer par la première porte que l’on voit. On ne peut pas monter, donc je suppose qu’on devrait repasser par cette porte et continuer avec cette technique… Il n’y a rien à perdre, de toute façon.
   Djinshee n’attendit pas sa réponse. Elle prit la poignée en or et la tourna lentement. Elle entra dans la nouvelle salle qui les attendait en prenant grand soin de garder la porte ouverte. Elle ne voulait pas que celle-ci se referme toute seule et la sépare de son « coéquipier ».
   C’était un bureau. Des étagères et des armoires d’ébène orné d’or cachaient presque la totalité des murs, et un immense tapis rouge, à la fois doux et chaleureux couvrait le sol. Au centre, un imposant bureau et dans un coin, un secrétaire richement décoré. Il y avait également deux grands tableaux de chaque côté de la pièce, chacun complétant le mur du sol jusqu’au plafond. Sur le mobilier central, de nombreuses feuilles s’agitaient, se tournaient et volaient en tous sens, comme si chacune avait un rôle à jouer. Deux magnifiques plumes de paon griffonnaient sur certaines d’elles, qu’elles soient en l’air ou sur le bureau. Après ce qu’il venait de se passer avec les livres, cette vision n’était pas très rassurante, au contraire. Les feuilles et les parchemins semblaient pouvoir attaquer à tout moment, même dans cette valse silencieuse.  
   La jeune femme longea les étagères sur sa droite, ses doigts caressant les reliures des gros manuels, les sculptures du bois et les vitrines. Son pas était lent. Le régulier bruissement du papier dictait sa marche. Sa main ne rencontra le vide que quand elle arriva à la hauteur du premier tableau. Elle l’observa. Il était sombre. C’était une immense scène, représentant plusieurs personnes. Des Vampires, c’est certain, mais elle n’aurait pu en dire d’avantage. C’était la nuit, et ils étaient dans une forêt, ou un bosquet, quelque chose comme ça. Son attention fut particulièrement centrée sur une femme. Les cheveux noirs, et de grands yeux plutôt… Verts, mais aux lueurs étranges. La femme semblait la fixer, elle aussi. Djinshee s’approcha. Elle aurait presque parié qu’elle était vivante. Ou bien l’auteur de cette œuvre était un véritable artiste. La femme souriait, et plus elle s’approchait, plus elle semblait sourire. Enfin, quand leurs visages ne furent plus qu’à quelques centimètres l’un de l’autre, elle lui fit un clin d’œil. L’Elémentale sursauta. Elle n’avait pas rêvé. Cette toile était vivante. Lentement, elle tendit le bras devant elle et en toucha la surface. C’était pourtant tout à fait normal. Rugueux. Et les sillons du pinceau étaient clairs.
   -Il est impoli d’abîmer l’œuvre de quiconque, dit une petite voix.
   Elle se retourna brusquement. C’était une voix de femme. Et mise à part elle, il n’y avait qu’un homme ici.
   -Vous n’êtes pas que deux, ici.
   Elle remit son attention sur le tableau. La femme souriait de toutes ses dents, un petit air sarcastique dans son regard ne présageait rien de bon.
   -Enfin voilà de nouvelles gens, continua-t-elle, peut-être pourriez-vous m’aider ?
   -… Nous n’avons pas le temps, nous ! Et puis qui êtes-vous ? Et qu’est-ce que… 
   Elle avait l’impression de devenir folle. En moins d’une heure ?...
   -Je suis le portrait de la gouvernante… Et sa famille, ajouta-t-elle en levant les yeux au ciel, mais peu importe.
   -Nous n’avons pas de temps à perdre avec de la peinture.
  La gouvernante ressemblait donc à cela. C’était la seule information utile, pour l’instant. Mais elle ne voulait pas s’attarder à régler les problèmes de personnages sur lesquels elle devait délirer toute seule. Djinshee se remit à marcher, toujours en longeant le mur. Elle arriva au pied de la porte, en face de celle par laquelle ils étaient entrés. Elle tourna la poignée, en vain. C’était verrouillé, et aucune serrure ne permettait de la crocheter. Elle marmonna un juron. Derrière elle, elle entendit des objets tomber par terre. Une sorte de panique s’empara d’elle lorsqu’elle découvrit l’immense bureau voler juste au-dessus de l’endroit où il était censé être. Il resta ainsi quelques secondes, avant de brusquement charger en sa direction. Aussitôt, elle plongea et se retrouva à plat ventre. Elle ne put retenir un petit cri. Non seulement à cause de la surprise, mais aussi parce qu’elle s’était cognée. Son épaule la faisait souffrir. Elle ignorait quelle était la nature exacte du choc. Elle se remit sur pieds, sa main droite couvrant son épaule gauche. Quelques flammes dépassèrent de ses doigts. Elle n’avait pas le don de soigner, mais les flammes amélioreraient déjà l’état de son futur hématome.
   -Il y a et se passe beaucoup de choses derrière le dos de chacun, dit la petite voix.
   -Vous vous foutez de nous, ou bien c’est une énigme ? Gronda Djinshee.
   Ils perdaient du temps, c’était surtout ça qui la dérangeait dans cette histoire de bureau sans issue. L’imposant meuble était réapparu à sa place d’origine, comme si de rien n’était.
   -C’est à vous de le découvrir…
   C’était donc une énigme. Elle soupira. Ce n’était pas le moment… Ca ne devait jamais l’être, d’ailleurs, dans cette forteresse. Elle balaya la pièce des yeux. Elle perdait patience, elle aussi. Elle était trop nerveuse pour réfléchir. Elle fixa l’homme, puis pointa soudain son doigt vers la « gouvernante » pour en faire sortir un jet de flammes.
   -Nous n’avons pas de temps à perdre ! S’exclama-t-elle.
   Le sourire du Vampire s’envola avec les cendres. Le feu dévorait la toile sans aucun remord, sans aucune difficulté. Elle détruisait la peinture de l’intérieur vers l’extérieur, découvrant ce qu’il y avait derrière. L’Elémentale se figea. Il n’y avait pas de mur, mais plutôt une planche de bois. Ce n’était pas non-plus une porte. Les flammes avaient presque atteint le cadre doré du tableau, quand elles firent lentement marche arrière. A présent, elles semblaient redonner vie à la scène. La gouvernante réapparut. Son sourire était toujours le même.

   -Ce n’était pas si compliqué, dit-elle.

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Dim 10 Mai 2015, 19:15


La réponse qui franchit les lèvres de la femme ne me convenait pas. Les mots qu’elle avait prononcés n’étaient pas ceux que j’attendais, que je souhaitais entendre. Auparavant, j’avais été confronté à un dédale identique où les créatures et pièges pleuvaient à toutes les intersections, enfermé dans cette tour maudite qui m’avait mené plus d’une fois à être confronté à la mort. Ce lieu ne m’avait laissé aucune chance, n’avait montré aucune parcelle de pitié. Sa structure intérieure, semblable à un immense labyrinthe, n’avait suivi que le cours de sa volonté, guidant mes pas là où l’entité manipulatrice et dominante avait bien voulu m’emmener, qu’importaient les directions que j’avais choisi. Un couloir de la droite menant à une pièce que j’avais déjà visité, un passage de gauche revenant indéniablement à celui de la droite… Nous ne pouvions pas s’échapper de ces lieux en suivant les règles conventionnelles, en logeant en simple mur de brique pour trouver une quelconque sortie. Si j’avais raison, la forteresse vampire fonctionnait sans doute comme la Tour inconnue. Sous le joug de la gouvernante, c’était elle qui imposait les règles, pas l’inverse. Sa passion démesurée pour le jeu, pour l’amusement l’empêcherait de nous laisser partir aussi aisément alors qu’une heure s’était à peine écoulée. Je détestais être celui qui se faisait manipuler, mené par le bout du nez. C’était la deuxième fois qu’une situation pareille me tombait sur les épaules et, sérieusement, j’en avais marre. Je n’avais pas envie de continuer, de participer aux moindres jeux tordus. Mais avais-je vraiment le choix de décider ce que je voulais faire ou non? Non, bien évidemment. Je n’avais pas mon mot à dire. Je devais me contenter de suivre le mouvement, de faire exactement ce que la note nous demandait. Sans rechigner, sans se rebeller. Fuir,  s’échapper. C’était tout ce qui comptait.

Ou du moins, essayer.

Avant que les vingt-quatre heures s’écoulent, que nous échouions. Mais que se passerait-il lorsque le temps imparti viendrait à s’écouler? Je croisai les bras. À vrai dire, je ne voulais pas le savoir. Je n’en avais pas besoin. Car je comptais sortir d’ici avant que le jour se lève à mon nez et à ma barde. L’Elémental de feu ouvrit la porte sans attendre mon avis et passa sous l’encadrement d’un pas rapide. Je soupirai mais, aucune plante ne sortit de ma bouche. Était-ce important de lui rabattre les oreilles sur la prudence maintenant? Sans doute que non. Je suivis son mouvement sans me poser plus de question, pénétrant dans une pièce où un immense bureau de bois trônait fièrement en son centre. Il n’y avait plus aucune trace du salon, des flammes ou de l’épaisse fumée opaque. Il n’y avait que des gros livres rangés proprement sur plusieurs bibliothèques, immenses, dont la hauteur atteignait presque le plafond. Et puis, il y avait le tableau. Accroché sur l’un des murs, il représentait un paysage, finement peinturé de la main d’un artiste de talent. C’était d’un bois aussi sinistre que la Forêt des murmures.

C’était un endroit si sombre, peu accueillant. Mais à la fois hypnotisant et magnifique. Mes doigts effleurèrent le cadre de la toile. « Il est impoli d’abîmer l’œuvre de quiconque. » Je sursautai. La voix aux accents féminins ne m’était pas familière. Elle n’avait rien de semblable à celle de l’Elémental qui m’accompagnait. Je pivotai sur moi-même, faisant soudainement face à une seconde immense peinture murale, un portrait de ce qui ressemblait fortement à une grande communauté vampire. En son centre, une jeune femme. Ses lèvres bougeaient au fil de sa discussion avec l’Elémental, les yeux pétillants d’amusement. Elle avoua être la représentation de la gouvernante, que les autres Vampires peinturés à ses côtés n’étaient que les membres de sa grande famille. Ma « coéquipière » ne cessait de répéter que nous manquions de temps, que nous n’avions pas à se préoccuper des problèmes de cette femme. Un bruit sourd résonna soudain dans la pièce. C’était le bureau. Il tremblait, s’agitait dans toutes les directions, fou. Puis, il fusa vers l’Elémental, renversant une étagère de livre qui manqua de m’écraser. Je fis un saut en arrière, percutant une peinture avec mon dos. Qui tomba sur le sol dans un craquement épouvantable. Le cri que poussa la jeune femme retentit, tel un écho de désespoir alors que la gouvernante riait, en fixant d’un œil amusé toutes les emmerdes qui nous tombaient dessus.

Elle commença à parler dans un langage semblable à celui que l’on employait pour une énigme, paroles que la jeune femme voulut avoir la confirmation qu’il s’agissait d’une stupide devinette. La réponse du portrait ne fit que confirmer nos soupçons. Tandis que la femme laissait ses flammes lécher la peinture murale, prise d’une soudaine fureur, un hurlement sourd et puissant couvrit le son des crépitements des flammes, sorti de je-ne-sais-où. « Qu’est-ce… » Sur la toile de la forêt était apparue une créature. Je rejoignis à toute vitesse l’Elémental, présageant une mauvaise surprise. Quittant le décor de la forêt, la bête informe, énorme s’avançait vers nous. À pas lourds, à pas lents. Ses puissants cris résonnaient à travers l’ensemble de la pièce, même s’il ne l’avait pas encore rejoint. La gouvernante fut plongée dans un fou rire, incapable de contrôler les tremblements qui la secouaient. « Ne vous avais-je pas prévenu de ce qui pouvait se cacher derrière votre dos? » La créature était déjà à moitié sortie. Je réagis au quart de tour : un projectile de feu explosa sur le bras de la bête, crépita sur son corps, le rongea. Mais de ses blessures coulèrent un liquide épais, de plusieurs couleurs différentes. Qui n’était pas du sang. « De la peinture. », murmurai-je entre mes dents. La peinture ne tarda pas à se réassembler, à reboucher le trou pour lui redonner à son bras son apparence d’antan.

Je parcourrai la pièce du regard, cherchant une porte par laquelle nous pourrions fuir. Mais il n’y avait rien. À part les étagères remplis à craquer de livres et le bureau revenu à sa position initiale, comme s’il ne s’était jamais déplacé. Les éclats de rire de la gouvernante redoublèrent d’intensité. « m*rde… » Le monstre géant s’était extirpé de son tableau et nous toisait de toute sa hauteur, sans cesser de grogner. Il prenait presque toute la place dans cette petite pièce. Mon cerveau carburait à toute vitesse, à la recherche d’une solution. Jusqu’à ce que mes yeux croisent la toile de la forêt sombre, à quelques mètres de notre position. Juste derrière l’énorme bête. J’inspirai un grand coup, incertain quant à l’efficacité du plan que je commençais à peine à échafauder. « Je sais que tu ne me fais pas confiance mais je crois avoir un plan. » Je plantai mes iris dans les siens. « Arranges-toi simplement pour foncer vers le tableau là-bas. », lui dis-je en pointant la toile du menton. Sans attendre une quelconque réponse de sa part, je débutai une course effrénée, évitant de très peu les griffes de la Sirène, détruisant le poing géant de la créature à l’aide des flammes. Sous une pluie de peinture verte foncée, presque noire, qui me recouvrit la tête, les cheveux, les vêtements et un peu le visage.

Avant de bondir dans la toile qui me projeta dans la forêt de la peinture.

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Sam 16 Mai 2015, 18:46

Elle retomba sur ses genoux. Elle n’avait pas encore réalisé ce qu’il venait de se passer. Un monstre était apparu dans l’autre tableau. Et ce fou rire. Le rire glaçant de la gouvernante. Il lui avait semblé assourdissant.
   Elle revînt à la « réalité » lorsqu’elle remarqua l’humidité de la terre noire sous elle. Elle se releva brusquement puis regarda autour d’elle, tâchant de garder son calme. C’était une sorte de panique furieuse qui tentait de l’envahir. Mais surtout de la fureur. Et de l’impatience. Ils étaient dans une forêt. Exactement la même que celle du tableau, sauf qu’ici, il n’y avait personne. Ou bien les personnages étaient partis… Djinshee se tourna vers l’homme. Derrière lui, un cadre, ou plutôt, une sorte de fenêtre menant au bureau. La masse noire de la créature s’avançait lentement vers le cadre, vers eux.
   « Il y a une sortie, au moins ?... »
   Elle hésitait. Le monstre allait certainement les tuer s’ils ne faisaient rien. Et le premier coup de la part de l’homme, leur avait indiqué qu’il était très coriace. Son bras s’était régénéré quelques secondes après sa destruction. La jeune femme n’aimait pas ça, mais ils allaient devoir fuir. D’un autre côté, elle n’avait pas envie de s’enfoncer dans cette forêt et risquer de se perdre.
   L’ennemi se glissa à son tour dans la toile. Elle lui envoya un rayon incandescent dans la tête. Le liquide épais coula sur le sol et se reconstitua aussitôt.
   -Ok, on court.
   Elle se précipita vers les grands conifères, se retourna une ou deux fois pour être certaine que son coéquipier suivait. De la forêt, il n’y avait que ça. Les troncs aux teintes parfois étranges s’enchainaient et elle aurait parié que ça ne finissait jamais. Ce paysage nocturne était irréel. Même le ciel arborait des couleurs louches. Elle entendait les grondements rauques de la bête derrière elle, à une trentaine de mètres. Djinshee s’essoufflait de plus en plus. Elle ne savait pas où elle les avait emmenés.
   « On ne sèmera jamais cette chose… » Pensa-t-elle.
   C’était vrai. Techniquement, une peinture ne pouvait pas s’essouffler. Il fallait donc user de la ruse. Ce n’était pas la première fois qu’elle se retrouvait dans cette situation. Mais elle avait toujours fini par s’en sortir, notamment grâce à son contrôle des ombres. Elle manipulait suffisamment bien ce don pour pouvoir se camoufler. L’Elémentale plongea subitement à droite et poussa l’homme à l’aide de sa télékinésie. Elle rampa jusqu’à un arbre et les couvrit de l’ombre. Il ne restait plus qu’à espérer que le monstre n’ait pas d’odorat, ou autre chose du genre. Ce dernier passa devant eux, puis s’arrêta. Il fit demi-tour, toujours en grondant, ses griffes démesurément longues prêtes à déchiqueter leurs proies. Ses yeux sans pupilles étaient aussi rouges que le sang. En fait, il ressemblait vaguement à un humanoïde, mais avec des griffes et des pattes arrières de félin. Aucun être vivant ne répondait à ces caractéristiques.
   Malgré le camouflage, il les avait repérés. Il se rua sur eux. Djinshee se leva et dégaina son épée double. La lame lui transperça la poitrine. Elle le poussa avec son pied. Elle maniait son arme avec souplesse et sans difficultés. Elle sa fit tourner et décapita son adversaire. La finesse de l’acier ne rencontra aucune résistance. Le corps tomba mollement sur le sol, tandis que la peinture coulait de plus en plus abondamment. Bientôt, le corps ne ressembla plus à rien. Il n’y avait plus qu’une flaque, visqueuse, un mélange de couleurs sombres se mêlant à la terre humide et friable. La jeune femme rengaina son épée, satisfaite. C’était un souci de moins à régler. Elle ignorait pourquoi il était mort maintenant et non les fois précédentes. Peut-être parce qu’elle avait utilisé une arme ?
   -On ferait mieux de retrouver le cadre à présent.
   Elle retint de justesse un cri de surprise. Quelque chose glissait à ses pieds. Le liquide épais les cachait. Il glissait sur le sol et montait petit-à-petit sur ses jambes. L’Elémentale s’enflamma aussitôt, mais ça ne semblait pas l’arrêter. Elle prit le risque d’y planter son épée. Le liquide s’écarta quelques secondes de la lame, et reprit son ascension. Elle ne pouvait plus bouger. Ses pieds étaient collés au sol.
   -Puta*n c’est quoi ça ? S’énerva-t-elle.

   Cette boue ne lui rappelait que l’eau. Ca n’en était pas, mais c’était tout aussi froid et… glissant. Ses genoux étaient paralysés. La chose avait comme déteint vers le noir et s’aventurait rapidement vers sa taille, puis vers ses épaules. Djinshee suffoquait presque. Elle se débattait du mieux qu’elle pouvait, tentant d’arracher cette enveloppe. En vain. Liquide, la peinture rampait or de ses mains pour prendre d’assaut ses bras. Elle s’enflamma encore, maintenant une température bien supérieure à ce à quoi elle avait l’habitude. Ses forces s’épuisaient plus rapidement ainsi. Elle craignait de le regretter plus tard, mais pour l’instant, tout ce qu’elle voulait c’était de se débarrasser de cette chose. Elle commençait à avoir mal à la tête. Un rire retentit de nulle part. Un rire glacial. Le rire de la gouvernante.

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Jeu 21 Mai 2015, 01:55

Par dizaines, les tentacules de peintures – ou de liquide boueux d’une couleur si sombre, semblable à de la terre noire qui orne les bois – s’attaquèrent aux chevilles de la femme. Aussi agiles que des serpents, elles grimpaient sur ses jambes à une vitesse effroyable, poursuivant leur progression sans broncher face aux flammes qui illuminaient son corps en entier, aussi ardente qu’une pierre volcanique. Elle tenta de se libérer, échapper à l’emprise que ces lianes de peinture exerçaient sur elle. Puis, la femme essaya le tout pour le tout. Son épée se leva, sa lame plus étincelante qu’auparavant au-dessus de ses jambes prisonnières. Elle abattit, brutalement, le métal contre son membre, évitant de justesse de se blesser, dispersant provisoirement le liquide qui montait. Leur progression en fut arrêtée pour une durée d’à peine une poignée de quelques secondes, tout au plus.  Les tentacules reprirent leur chemin, sans plus sourciller à la seconde inflammation de l’Elémental, grimpant contre la peau de sa gorge, son visage. Je la voyais se débattre, tenter de respirer à travers les couches noires qui envahissaient sa personne, alors que mon cerveau tournait à plein régime, plus fou que mon rythme cardiaque perturbé, apeuré. Je réfléchissais, pensais à tous les moyens de la sortir de sa prison de noirceur, sous les rires glaciaux de la gouvernante, tonnant comme des échos dans ce monde de peinture à huile. Je réunissais toutes les informations que je détenais sur les forces, les faiblesses de ce liquide, ancienne créature avide de sang. Les armes, ou peut-être seulement l’acier et le fer, affectaient réellement cette étrange substance qui n’avait que, dans son instinct, les pulsions de se disperser lorsqu’une lame se fracassait contre elle. Je pouvais me servir des couteaux qui traînaient dans la besace magique pour foncer, attaquer la peinture de front – aussi bizarre que ce terme puisse paraître – mais les risques que je blesse l’Elémental prisonnière s’augmentaient dramatiquement, à un tel point que j’hésitais à bouger, refusais d’agir alors qu’une réaction immédiate ne lui serait pas de refus. Je ne possédais pourtant pas mille et une solutions. C’était l’unique plan qui parvenait à se créer dans ma tête, l’unique plan avec lequel je pouvais garantir certains résultats concluants pour la sortir de ce merdier.

Je fermai les yeux, une seconde, deux secondes. Je sentis les manches de la paire de couteaux entre mes doigts, le contact du bois. Mes paupières s’ouvrirent à nouveau, face à la masse de peinture qui poursuivait sa marche sur le corps de la jeune femme. Je ne voulais pas la blesser, causer un trop grand nombre de cicatrice sur sa peau. « J’espère que tu ne m’en voudras pas mais, je vais devoir commencer à découper. » J’ignorais si ma voix était parvenue à atteindre ses oreilles ou si elle faisait simplement attention à ce que je lui disais. Après tout, elle livrait un autre combat, avait une préoccupation plus importante qu’une prévention contre mon offensive prochaine. Je fis virevolté les couteaux dans les airs, les rattrapai avec une certaine dextérité, les serrai dans les paumes de mes mains. Mon pied droit recula doucement sur le sol, ma jambe gauche s’arqua, prête à foncer. Je voulus propulser mon corps vers l’avant mais, une force inconnue me garda cloué, de telle sorte que je manquai terminer cette « course » tête première sur le sol. Je baissai les yeux, surpris par cette résistance à mes pieds. C’était d’autres tentacules de peinture, aussi noires que celles qui recouvraient le corps de l’Elémental. Mon corps réagit avant même que mon cerveau ne puisse analyser la situation dans son ensemble, mes bras allant et venant de gauche à droite pour permettre aux lames de mes couteaux de trancher ces épais fils de peinture qui m’empêchaient d’avancer. Le liquide se dispersa rapidement, relâchèrent leur emprise sur moi. Je n’attendis pas une meilleure occasion pour bouger : je me précipitai à toute vitesse vers la femme, ignorant du mieux que je pouvais les tentacules qui revenaient à la charge. Je fracassai le tranchant de mes couteaux sur la paroi de peinture, les rires de la gouvernante reprenant soudainement de plus belle. Je les ignorai, concentré uniquement par la tâche qui avait toutes les priorités.

« Allez, allez… », murmurai-je entre mes dents, incapable de remarquer l’avancement de la coupure de ses entraves. Derrière mon dos, la substance folle continuait de progresser, de plus en plus vite. Le temps jouait contre moi, contre nous. Bientôt, très bientôt, nous finirions prisonniers tous les deux. Je notai la présence de l’épée entre les mains de l’Elémental et, abandonnant rapidement un de mes couteaux dans ma besace magique, lui prit entre les doigts sans lui véritablement demandé son  avis. « J’te l’emprunte quelques secondes. » L’arme était plus lourde que je l’aurais pensé. Son poids me faisait basculer, les muscles de mes bras criaient leur douleur, leur souffrance. Mais l’efficacité de sa lame n’avait rien à envier à mes couteaux, dispersant cette masse boueuse et informe à une vitesse incroyable. Ses jambes et ses pieds furent libérés plus tôt que mes prédictions. « Tiens. », lui lançai-je en lui tendant son arme, sans même faire attention à ses blessures, si tant elle en avait. « Maintenant, on court. » Avec une certaine agilité, je commençai la course en faisant un détour, passant à côté de la peinture folle, laissant mes pieds me transporter là où ils le désiraient. Je n’avais qu’un seul et unique objectif dans la tête : sortir d’ici le plus rapidement possible. Mais j’avais beau regardé, faire pivoter mes iris partout où je le pouvais, je n’arrivais pas à distinguer le cadre de la toile. Il n’y avait que les arbres peinturés qui se répétaient, encore et encore. Parfois, un groupe de tentacule s’interposaient sur notre route et nous étions forcés de les contourner. Pourtant, si je me fiais aux souvenirs liés à notre fuite dans le tableau, nous n’avions pas parcouru une si grande distance pour échapper au monstre. Alors pourquoi, pourquoi ne parvenais-je pas à distinguer le cadre de bois dans l’environnement peint?

Les minutes s’écoulaient, la fatigue se gagnait mais, toujours aucunes traces de la sortie. Seulement des arbres, des arbres et encore des arbres. J’étais complètement déconcerté. Mais, par-dessous tout, énervé par ce petit jeu. Combien de temps avions-nous perdu en tournant en rond, en échappant à la masse informe de peinture? D’ailleurs, il y avait quelque chose que je ne comprenais pas, un détail qui me glissait entre les doigts. Si la peinture qui avait composé le monstre était obnubilée par notre anéantissement, par notre mort, pourquoi le reste de la toile qui nous avait emprisonnés ne nous attaquait pas? Il n’y avait plus rien à y comprendre. La course folle pour s’échapper du manoir à Vampires s’était transformée en survie au cœur d’une œuvre sombre, décidée à nous tuer pour le bon-vouloir de ce jeu. Et le plaisir personnel de la gouvernante de ces lieux. Je m’arrêtai en face d’un rocher gris, examinai chaque recoin de notre entourage. Ne voyant rien qui puisse indiquer un quelconque danger, je profitai de ce bref moment de répit pour m’appuyer contre un tronc d’arbre et reprendre mon souffle. Je levai les yeux vers la jeune femme, les iris brûlant de colère. « Génial, maintenant, on est bloqués.» Je fis un pas à l’avant mais, mon bras fut happé vers l’arrière, empêchant toute autre forme d’avancement. J’eus à peine le temps de me remettre de la surprise, de ressentir un grand étonnement, que mon corps se fit tiré en arrière, projeté contre l’écorce de l’arbre qui s’ouvrit. Pour me jeter dans le bureau que nous avions quitté pour échapper à la créature. À quatre pattes sur le plancher, je toussai, crachai la peinture qui était parvenue à s’infiltrer dans ma bouche.

Lorsque je me redressai, je croisai immédiatement les yeux rieurs de la gouvernante, qui me toisait en silence. Je m’approchai de la porte et ce fut, à ce moment, que la Vampire choisit d’ouvrir la bouche, aussi joyeuse qu’une enfant. « Quelle prestation mes chéris! Mais ce jeu commençait à m’ennuyer. » Elle lâcha un bâillement, tandis que je tentai de forcer la porte pour qu’elle s’ouvre. Mais rien ne faisait : la porte demeurait inlassablement fermée. Je reculai de deux pas, lâchant un juron. Avant de tourner sur moi-même pour découvrir si la jeune Elémental avait été touché par le même phénomène que le mien. La gouvernante laissa échapper un second rire, faussement désapprobateur. « Vous ne pouvez pas sortir de cette salle les enfants. » Elle marqua une légère pause, le sourire aux lèvres. « Enfin, tant que vous n’aurez pas répondu à ma petite énigme. » Son ton était si doux. Ça en devenait presque trop écœurant. « Allez, amusons-nous! »

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Lun 25 Mai 2015, 18:03

Djinshee ne respirait presque plus. Et il lui était impossible d’entendre ce que l’homme disait. Elle sentait des coups, mais rien de très efficace, contre cette peinture qui enveloppait la quasi-totalité de son visage. Il tentait de l’extirper, c’était une bonne chose, mais bientôt elle allait perdre connaissance et peut-être même se « noyer ». Tous ses muscles étaient tendus. Elle avait depuis longtemps abandonné l’idée de se débattre pour ne pas gaspiller son oxygène. Elle ferma les yeux. Son épée glissa de ses mains crispées. A nouveau, des coups s’abattirent sur elle. Elle voulut gémir plusieurs fois. L’acier allait parfois trop loin.
   « Je vais sortir de là labourée. »
   Néanmoins, la technique semblait porter ses fruits. Par endroits, sa peau rencontrait la fraîcheur de l’air, ses membres devenaient plus souples. Ses genoux faillirent sous son poids. L’Elémentale prit une grande et bruyante inspiration. Son compagnon de galère lui tendit son épée-double, qu’elle prit lentement avant de se remettre sur pieds. Il fallait courir. Elle tremblait de tous ses membres et haletait toujours, mais il fallait courir. Fuir cet enfer dans l’enfer, ce tableau labyrinthique dans le labyrinthe vivant. Elle le suivait. Ils allaient tout droit, traçaient comme des lapins. Des tentacules barraient parfois le chemin, et ils devaient faire un détour. Mais le paysage restait le même malgré leurs efforts. Comme quoi l’auteur de ce tableau avait une passion infinie pour les arbres… Djinshee perdait rapidement des forces. Trop rapidement. Elle faisait pourtant abstraction de ses blessures et de l’environnement, mais rien ne marchait. L’homme s’arrêta près d’un rocher, cherchant une issue. Il était en colère. Difficile de savoir contre qui. A bout de souffle, elle le fixait. Elle ne voulait pas regarder ses blessures, si tomber par terre sous prétexte qu’elle n’en pouvait plus. Du sang coulait doucement le long de ses jambes et de ses bras. Un frisson parcourut son dos. Sa tête tournait. Elle ferma les yeux. Elle se sentit soudainement aspirée vers l’avant et se retrouva face contre terre.
   La jeune femme leva la tête sans comprendre ce qu’il venait de se passer. Elle était dans le bureau. Une voix enjouée retentit. Elle s’enflamma quelques secondes avant de se remarquer que celle-ci lui était familière. Au moins ça lui avait permis de refermer superficiellement ses blessures. Elle fit face à la gouvernante. Apparemment, elle commençait à s’ennuyer de leur « prestation »… L’Elémentale aurait adoré la calciner par son regard, mais elle était aussi la seule personne capable de les faire rapidement sortir d’ici. Ils étaient coincés dans cette pièce et elle leur proposait de sortir… En échange d’une réponse… A une énigme. Djinshee ne cacha pas son mécontentement. En revanche, le Vampire semblait se délecter de cette petite scène. Elle laissa ses yeux vers pétillants passer d’elle à l’homme.
   -Et c’est quoi cette énigme ? S’impatienta la rousse.
   Elle prenait son temps, et c’était particulièrement énervant.
   -Très bien mes chéris, j’ai décidé d’être raisonnable, alors la-voici : Sans cesse se nourrir il doit, / Car c’est lorsqu’il mange qu’il croit ; / Aux risques et périls s’il boit !
   « Super… »
   La jeune femme fit le tour du bureau central à pas lents. Elle demanda à la gouvernante de répéter, mais à la place, elle disparut en lâchant un :
   -Bonne chance mes chéris !...
   Djinshee cracha un juron. Le sifflement d’un courant d’air traversa la salle, puis se termina par un « toc ». Elle se retourna. Sur la porte d’en face s’étaient gravées de grands chiffres : 22h43. Elle écarquilla les yeux.
   -Nous avons passé près d’une heure dans ce foutu tableau ?!
   C’était à la fois long et court. Etait-ce l’adrénaline ou la magie qui avait fait passer le temps si vite ? Probablement les deux. Elle s’adressa à son compagnon.
   -Tu as une idée de la solution à cette énigme ?
   Elle fit le point dans sa tête : ils n’avaient aucune idée de si ce « il » était une personne ou un objet. Il devait tout le temps manger pour grandir mais surtout pas boire au risque de mourir. A première vue, cela pouvait sembler facile, mais Djinshee n’était pas une adepte des énigmes à vrai dire. Qu’est-ce qui grandissait lorsqu’il mangeait ? Techniquement, tout. Les plantes, les animaux, les humanoïdes quand ils sont enfants… Mais tous devaient boire. Tout être-vivant doit boire. C’était donc un objet… Mais aucun objet de mange ni ne boit. Elle s’appuya sur le bureau et observa les feuilles rangées en tas. Toutes étaient remplies de notes et d’informations quelconques. Elle en prit quelques-unes dans l’espoir de trouver des indices. Rien. Elle prit ensuite un livre au hasard dans l’une des bibliothèques : « L’Histoire des Vampires ». Rien à voir… Elle chercha encore. Elle s’obstinait de penser que la solution était quelque part, écrite ou gravée. L’image de la toile revînt dans son esprit. Elle chercha la gouvernante peinturlurée des yeux. Disparue. Ils n’étaient que deux. Les feuilles et les plumes étaient immobiles, comme si elles n’avaient jamais bougé depuis que leur propriétaire les avait laissées là. « … j’ai décidé d’être raisonnable ». C’était ce que le Vampire avait dit. Il y avait alors deux options : soit elle se foutait littéralement d’eux – ce qui était très probable – soit l’énigme était réellement simple et le stress jouait contre elle.
   Djinshee prit une grande inspiration et recommença à zéro. Elle plaqua ses paumes contre le bois massif du bureau, fixant de nouveau les feuilles. Qu’est-ce qui ne pouvait pas boire ? Et boire quoi ?
   « La seule chose qui déteste boire ici c’est moi… »

   Mais elle ne mourrait jamais pour autant. A moins que…

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Sam 27 Juin 2015, 22:48


Patience et sang-froid ne faisaient pas partie de mon vocabulaire. J’avais dépassé les limites de mon endurance face à toutes ses c*nn*ries qui me tombaient sur les épaules : le jeu auquel nous étions entravés m’ennuyait, profondément. Je détestais les énigmes, je détestais les obstacles qui s’imposaient sur notre route et, plus que tout, j’ haïssais la mimique suffisante collée sur le visage de la Vampire qui éveillait une colère noire, une rage incontrôlée envers son existence elle-même qui me pourrissait également la mienne, jusqu’à alimenter de violentes pulsions sanguinaires, une folie, peut-être passagère, qui excitait, toutefois, irréfutablement mes flammes. Elles me hurlaient de lâcher prise, d’abandonner toute retenue et modifier cette facette que j’affichais sereine pour relâcher la rage naissante, destructrice, telle une petite voix intérieure aux murmures alléchants, envieux, qui m’égarait progressivement.  Mais la réalité finit par me frapper de plein fouet au visage, m’ouvrant soudainement les yeux, malgré les envies de semer un chaos – que je voyais désormais comme insensé – qui mènerait aux portes d’un cuisant échec. Je fermai les yeux, sans toutefois abandonner ses idées ou cesser la propagation de mes impulsions colériques : je réfléchissais également à la solution de cette stupide devinette, animé par une volonté si forte de sortir de la pièce que je surprenais même mes propres pensées, avant de commencer à souffrir de claustrophobie, enfermé dans ce bureau sans fenêtre. Qu’est-ce qui mangeait pour vivre dans ce monde sans tenter de boire sous la peine de mourir? Je serrai la mâchoire, grinçant des dents par frustration. Assurément, je pouvais éliminer chaque être vivant de ces potentielles réponses, car nous avions tous besoin de boire ET de manger à la fois pour seulement atteindre toutes les bases de la survie et les objets inanimés ne valaient pas la peine de s’inclure au travers de cette énigme. Alors, que me restait-il parmi les choix qui s’offraient désormais? Un sourire étira les commissures de mes lèvres. La gouvernante avait décidé de son gré « d’être raisonnable. » Ses mots se répercutaient dans ma tête, tels des inlassables échos alors que tout prenait finalement son sens, l’évidence se dévoilait devant mes yeux plongés de haine. Elle s’était carrément fichue de nous.

Lorsque je levai les yeux pour les planter dans les siens, son sourire s’agrandit, moqueur, presque aussi rageant et désagréable qu’un stupide Mage Noir. Mon ressentiment s’accroitrait, lourd, épais, comme des énormes poids qui s’écroulaient sur mon dos. Je la haïssais, je la détestais tellement, terriblement. Ma voix se fit dure, glaciale, quand j’ouvris la bouche. Mes iris aux teintes orangées renvoyaient des éclairs, crépitant en symbiose au Feu qui brûlait en leur milieu, plus déchaîné que jamais auparavant. « C’est le feu non? C’est ça, ta réponse? » Aussi muette qu’une poupée de cire, ses pupilles joyeuses ne se détachaient plus des miennes. Elle prenait amplement son temps. Ses doigts quittèrent la surface plate du tableau, jusqu’à toucher, du bout de ses ongles fourchus, le chronomètre qui défilait, lentement. Au contact de sa peau peinte, le compteur des minutes s’affola et ainsi, nous perdîmes trente minutes sous nos yeux ébahis. « Ceci, dit-elle en portant sa main à sa bouche, étouffant à grand peine son fou rire, est pour votre insolence et manque d’élégance. Chaque pénalité vous coûtera trente minutes. » La gouvernante laissa son rire éclater lorsqu’elle croisa mon regard furibond. Mon corps manqua de s’enflammer sous l’impulsion de la colère et de la rage. « C’est quoi cette nouvelle règle? » - « Oh, c’est simplement pour mon plaisir mes choux. Ne le prenez pas trop personnel. » Je la détestais. Les flammes fusèrent brusquement de mes mains, folles et dangereuses, frappant le visage illuminé de la Vampire contre la toile. Je savais que ce geste était inutile. Le tableau commençait déjà à se restituer, lentement, morceau par morceau. Mais la vague de satisfaction qui s’en suivit balaya toutes mes pensées rationnelles, englouties par ses désirs incontrôlables. Le rire cristallin de la gouvernante résonna, tandis que son visage se recréait une nouvelle fois.

« Quelle spontanéité! Les jeunes de nos jours sont épatants. », lança-t-elle en replaçant l’une de ses mèches peintes. Pivotant sur moi-même, mes pas me rapprochèrent de la porte – notre unique sortie. Je donnai un coup de pied contre son bois dur avant de plaquer mes mains contre la poignée, essayant de l’ouvrir sans qu’elle ne bouge d’un millimètre. « Mais ils manquent tous un peu de sagesse. » - « J’ai trouvé la réponse à ta fichue énigme! », hurlais-je  abruptement en faisant volte-face. « Ouvres la porte bordel! » La Vampire poussa un soupir désapprobateur, une fausse moue boudeuse étant figée sur ses traits. « Une réponse sans raisonnement n’en est pas une mon chou. Le temps tourne pour vous, mais moi, j’ai toute ma journée. Tic, toc! », s’enquit-elle joyeusement. « Alors maintenant, exprimes-toi : qu’est-ce qui te pousse à croire que le feu est effectivement la solution à mon énigme? » J’inspirai, doucement, lentement, pour essayer de calmer mon esprit en ébullition. Elle jouait toutes les cartes qu’elle possédait pour nous faire perdre le plus de temps possible ou du moins, nous faire oublier l’objectif principal de son jeu. Nous devions sortir d’ici avant que les heures ne tombent en poussière. Je ne voulais plus lui offrir la satisfaction de me voir réagir comme elle s’y attendait, prenant largement sur moi-même pour calmer ma colère. Le Feu qui avait brillé entre mes doigts s’éteignit en petites étincelles. Mon souffle qui sortit de mes lèvres fut doux et distrait. Elle souhaitait une justification? Alors elle l’aurait. « C’est simple : le feu a impérativement besoin d’air pour naître et vivre. L’eau l’éteint, donc il ne peut pas boire sans risquer de mourir. » La Vampire éclata de rire, frappant ses mains l’une contre l’autre, bruyamment. « Satisfaite? », crachais-je presque à son visage. « Comme toujours. » Soudainement, la porte grinça, répercutant le son strident dans la pièce. Avant de sortir, je lançai un vif coup d’œil au chronomètre qui s’écoulait, tranquillement.

21h59.

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Ven 03 Juil 2015, 19:13

   Le feu. Oui, c’était ça. Djinshee avait laissé faire la conversation. Son camarade était suffisamment énervé, et la gouvernante suffisamment ch*ante. Elle trouvait donc plus sage d’écouter. Elle aussi perdait patience. Avec cette stupide pénalité… Elle prit une grande inspiration pour ne pas se jeter sur la Vampire ou bien prendre part à l’incinération impossible de la toile. C’était dur. Très dur, de ne pas pouvoir évacuer sa colère. Elle gratta le bois lisse du bureau avec ses ongles. Son opération était vaine également, mais c’était mieux que rien.
  Tout semblait aller au ralentit. La gouvernante prenait tout son temps. Elle voulait des explications pour cette réponse… Mais c’était évident ! L’Elémentale tapa violemment du poing, prête à cracher sa futile justification. Mais l’homme fut plus rapide qu’elle.
   Il leur restait un peu moins de 22 heures lorsqu’elle daigna enfin ouvrir la porte. L’homme la passa sans hésitation. Elle le suivit précipitamment. Elle en avait assez de ce foutu bureau. De ces toiles. De cette gouvernante ! Elle regrettait un peu, maintenant, de n’avoir rien dit, bien qu’elle sache qu’au fond elle avait fait le bon choix. Cela les aurait certainement pénalisés d’une autre demi-heure. Or, ici, chaque minute comptait, car ils n’avaient aucune idée de quand ils trouveraient la sortie… S’ils la trouvaient.
   Le changement de salle s’accompagna d’un changement brutal d’atmosphère. Djinshee sentit tous ses muscles se crisper.
   -Quelle garce ! Hurla-t-elle.
   Son corps s’enflamma aussitôt, comme une armure face à toute cette humidité. Les bains… Elle n’aurait pas pu espérer mieux… Elle se retourna pour rouvrir la porte, mais celle-ci s’était verrouillée. La jeune femme balaya la pièce du regard. Il n’y avait pas d’autre porte. Elle ne put empêcher un second cri de rage de sortir de sa bouche. Un petit rire retentit.
   -Je suppose que cette insulte t’as échappée ma chérie ?
   -Je vous interdis de m’appeler comme ça !
   Cette réplique ne fit qu’intensifier les rires de la gouvernante. Rires qui ricochaient sur les murs, provoquant un écho insupportable.
   -Ouvrez cette porte !
   Le stress ne faisait qu’augmenter la température de ses flammes et commençait à la fatiguer.
   -Comme je le disais, les jeunes sont épatants ! Ils sont rapides. Mais ils ne prennent pas le temps de faire quoi que ce soit, oui, ils manquent de sagesse… Tout doit aller vite. Ils ne veulent pas perdre une seconde et pourtant c’est ainsi qu’ils les gaspillent. Quel gâchis… Eh bien, je crains que cela ne fasse disparaitre une autre demi-heure ! Hi hi hi !
   Il semblait que cette femme se permettait de plus en plus de les importuner. Les enfermer dans un manoir était une chose, mais tenter de les tuer avec un monstre de peinture, les enfermer dans une toile, les pénaliser pour enfin les emprisonner dans des bains… C’était trop. Comme l’homme à côté d’elle, elle bouillonnait. Ce qu’elle aurait préféré éviter. Mais l’eau… Les deux bassins prenaient les trois quarts de cette pièce qui était pourtant immense – et que seule la gouvernante devait utiliser.
   Dix secondes après, les échos du rire rebondissaient encore sur les murs carrelés et richement décorés. Djinshee serra les poings et s’avança lentement entre les deux bassins. Une petite allée argentée, d’une largeur d’environ un mètre les séparait. Elle était toujours enflammée. Elle jugeait de toute façon impossible de ne pas l’être dans un endroit pareil et aussi humide. Il était pénible de respirer avec toute cette vapeur. A droite, l’eau émit un petit clapotement, attirant l’attention de la jeune femme. A la surface se dessinèrent des chiffres : 21 h 27. Elle s’empêcha de lâcher un juron. Ils n’avaient que trop perdu. Mais la frustration de ne pas avoir le dernier mot occupait la moitié de sa pensée, l’autre allant pour sa phobie. Elle tourna la tête vers le bassin de gauche. Mais de ce côté, il n’y avait pas l’air d’avoir grand-chose.  
   Sa marche se termina de l’autre côté de la salle, où deux grand miroirs étaient accrochés au mur. Par réflexe, Djinshee les toucha du bout des doigts. Permettaient-ils d’aller dans un autre monde eux aussi ? Non. Ou du moins, pas à première vue. Elle tenta de les porter, mais ils devaient être collés. Sa télékinésie ne lui avait rien permis. Elle poussa un cri de rage et les enflamma. Comme toujours, c’était inutile. Elle le savait, mais que pouvait-elle faire d’autre ? Où était la solution ? Les flammes qu’elle projetait rebondissaient contre la paroi et s’éparpillaient dans toute la salle. Les plus petites s’éteignaient. Les plus grosses flottaient dans l’air, une sorte de valse avec la vapeur, donnant à l’eau une couleur orangé. Plus ou moins défoulée, l’Elémentale regarda ce surprenant phénomène. Cela n’avait rien de naturel. En même temps, cette forteresse empestait la magie.
   Elle alla rejoindre son coéquipier, passant une seconde fois sur cette allée d’argent. Elle était fatiguée, mais elle avait aussi peur de tomber. Ainsi, elle resta attentive.
   Un reflet lui fit tourner la tête. Le fond du bassin de gauche – à sa droite maintenant – brillait. La rousse s’arrêta net et plissa les yeux pour y voir plus clair au travers des douces ondulations de l’eau. Il y avait… Comme une dalle en argent bien plus grande que ses voisines… Comme… Une trappe ?
   -Je crois avoir trouvé. Dit-elle d’une voix grave.
   « Et j’espère que ce n’est pas ça. »
   Si c’était bien ce à quoi elle pensait, elle allait devoir plonger.

   Elle tenta de calmer les palpitations de son cœur. Jamais encore elle ne s’était retrouvée dans une telle situation, et elle craignait sa réaction. Ses précédentes « mises à l’épreuve » avaient été… horribles. Elle se rappela sa « renaissance », son premier contact avec le monde et la pluie. Ce qu’elle avait ressenti était à jamais resté gravé dans sa mémoire, et le resterait, au-delà même de l’amnésie. Une douleur intense, insupportable. La brûlure. La pire qu’elle aurait pu connaître. L’ironie du sort. Cette douleur, elle en était presque certaine, était dû au fait qu’elle était en cours en transformation, mais une question se répétait tout de même dans sa tête : pouvait-elle physiquement supporter cet élément ? 


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Lun 13 Juil 2015, 23:10

Tss…« Génial. » Je roulai des yeux, partagé entre l’exaspération et la colère bestiale qui serrait mes entrailles comme dans un étau, prêts à imploser aux moindres gouttes d’eau qui tomberaient au creux du vase déjà rempli jusqu’à rebords, tandis que mes pupilles enflammées louchaient contre l’eau du bain, sombres et vides. Remémorant lentement, les dents grinçant l’une sur l’autre, les premières pensées qui avaient germé aux tréfonds de ma tête, je me rappelais de l’humidité qui m’avait collé à la peau, pesante au sein de l’atmosphère, et qui, instinctivement, m’avait fait reculer d’un pas de géant, écoutant d’une oreille distraite, pour ne pas dire sourde, les jurons qui avaient afflué de la bouche de l’Elémentale, insensible – ou plutôt que je n’y en avais pas fait grand cas – de la température ambiante qui augmentait en conséquence du Feu qui avait enduit la silhouette de la jeune femme, si tant je l’avais réellement remarqué. Il y a trop d’eau. Ces mots qui énonçaient le fait tonnaient toujours dans mon esprit troublé, comme un désagréable écho qui s’obstinait à s’accrocher sur les parois de mon crâne, aussi agaçantes qu’ils étaient effrayants, immobilisant mon corps comme une statue de roches. Un fort ressentiment, plus nourri qu’il y avait à peine quelques minutes, s’éveillait, lentement, mais inexorablement, envers cette sale garce de gouvernante que j’imaginais sans mal secouée par un fou rire, moqueuse. Mes poings se serraient et se desserraient, tandis que les flammes commençaient à rugir, oppressées par le poids de la pénible présence d’Eau, grimpant avec raideur sur les pans de mes vêtements, également stimulées par les folies de mes émotions qui s’égaraient peu à peu dans tous les sens, se transformant en rage de bête assoiffée par l’odeur d’une vengeance et d’un règlement de compte qui trottait dans ma tête depuis peu.

Je me sentais comme un pion que l’on bougeait au gré d’un plaisir morbide qui faisait ressurgir des sensations primitives, comme une vulgaire et ridicule marionnette : et rien de plus délectable que d’enfermer deux Élémentals de Feu à bout de patience au centre d’une pièce gorgée d’Eau – notre ennemi naturel. Auparavant, je n’aurais jamais trouvé plus lamentable qu’un homme puisse avoir peur de ce liquide translucide, de ce qui était simplement une part des besoins vitaux des vivants mais, depuis ma transformation, je ne me voilais plus la face. Je buvais… parce que c’était une nécessité à ma survie. Cependant, l’on pouvait d’avance jeter aux oubliettes les baignades à la place et les voyages à bord d’un navire me rendaient malade. Et lorsque je m’attardais davantage sur mes souvenirs des gestes de cette femme une fois que nos pieds avaient atteint l’intérieur, ça paraissait être encore pire pour elle, telle une torture que l’on lui infligeait et, dans ce cas-là, je la voyais mal se proposer de plonger tête première là-dedans, arrivant à la seule conclusion où j’étais contraint d’accomplir ce boulot pénible. Mais en suis-je réellement capable? Après tout, il n’y avait qu’un seul moyen d’obtenir la réponse : c’était en essayant, sachant que trop bien que je ne voulais pas le faire. J’étais tétanisé. Le Feu s’opposait si violemment à cette décision que je ne pouvais faire autrement qu’à part regarder la surface réfléchissante sans bouger d’un millimètre.

Cependant, il y avait un autre problème qui me fit froncer les sourcils, arrêtant net mon mouvement de recul. « Et comment on est supposé ouvrir ce truc? » La trappe n’avait pas de poignée. Comme une dalle ordinaire et sans un quelconque intérêt… Pourtant, si cette tuile se distinguait si aisément de toutes ses voisines, c’était qu’il devait y avoir quelque chose à exploiter de ça. Mais quoi? La rage noire embrouillait mes réflexions, refreinant ainsi la vitesse caractéristique de mes pensées, comme un voile noir qui camouflait l’évidence la plus simple – à moins que ce ne soit qu’un moyen employé par cette Vampire pour nous dérouter. J’observai du coin de l’œil les miroirs un peu plus loin sur le chemin, intrigué par leurs présences en ces lieux, sans m’y focaliser davantage, penchant doucement mon corps au-dessus de l’eau. Mon cœur manqua plusieurs battements tandis que je déglutissais péniblement ma salive, jurant intérieurement contre la Vampire manipulatrice, soudainement aussi silencieuse qu’une tombe. D’un autre côté, malgré l’étrangeté de cette attitude, je ne serais pas celui qui se plaindrait de son mutisme, me rappelant  à quel point son rire m’énervait et n’arrangerait en rien l’état de mon esprit en ce moment. Je pris une grande inspiration en me relevant, tout en figeant mes iris dans ceux de l’Elémentale. Je camouflai ma nervosité sous un masque impassible, lançant haut et fort : « Enfin, peu importe, quelque chose doit bien être fait. J’me lance! » Avant de plonger habilement dans l’eau sans me fatiguer à enlever mes vêtements, sachant que je pourrais les sécher quand je le voudrais à l’aide de mes flammes, frissonnant en son contact infernal, sensation qui n’y allait qu’en se dégradant indéniablement. Quelle journée de m*rde! Dire qu’il n’y avait rien de mieux pour décrire une chose pareille…

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Mar 21 Juil 2015, 18:33

 Djinshee se décala sur sa droite et manqua de tomber en arrière. Mais cela ne l’empêcha pas d’être éclaboussée. L’eau émit un « tsshh » au contact de ses flammes, flammes qui l’enveloppaient toujours. Elle regarda l’homme faire. A première vue, il était plutôt à l’aise dans l’eau, ce qu’elle admirait secrètement, car elle savait que ce ne serait jamais son cas, et ce malgré ses efforts pour y parvenir. Tout au plus, elle pourrait boire sans la moindre gêne. Les ondulations de l’eau déformaient sa silhouette qui se dirigeait vers le fond. Elle regardait la scène, mal à l’aise. Elle aurait aimé être plus utile, et comme si cela ne suffisait pas, son orgueil lui hurlait de sauter. L’Elémentale ne retînt pas plus longtemps sa frustration et lâcha un cri de rage. Si elle ne pouvait rien faire, elle devait au moins réfléchir. Au fond du bassin, l’homme cherchait un moyen de faire bouger la dalle. Il avait beaucoup d’apnée. Djinshee était presque certaine qu’elle ne tiendrait pas dix secondes à sa place. Elle ferma les yeux et se concentra sur son élément. Pour commencer, elle devait retrouver sa forme normale. Chose particulièrement difficile mais à laquelle elle parvînt. Un frisson terrible la parcourut lorsque sa peau entra en contact avec toute cette humidité, qui avait augmenté à cause de la chaleur.
   « Aide-le au lieu de te focaliser sur l’eau ! » Pensa-t-elle.
  Son camarade ne semblait pas réussir à bouger cette plaque. De la surface, elle était aussi lisse que du verre, et aucune poignée n’était visible. Il était donc probable qu’elle ne s’ouvre qu’à l’aide de magie. Alors, la jeune femme se focalisa un maximum sur cette dernière et imagina une main, une force invisible s’en emparer, et la tirer vers le haut. Evidemment, elle commença par résister, mais Djinshee sentait qu’il était possible de la soulever. Elle plaça ses mains devant elle et les leva doucement. Bien souvent, cela lui permettait d’être plus efficace, même si elle évitait de le faire, maintenant. La dalle bougea, et il y eut une légère vibration qui fit frémir l’eau, en plus des vaguelettes que faisait l’autre Elémental. Elle était lourde. Très lourde. Beaucoup plus que Djinshee ne l’avait imaginé. Elle réussit tout de même à la retirer de son trou, et la fit glisser à côté. Puis, haletante, elle laissa ses bras retomber le long de son corps et fronça les sourcils. L’eau n’avait pas bougé. Le niveau n’avait pas baissé. Agacée, elle chercha un angle de sorte à ce qu’elle voit parfaitement le trou. C’était rouge, et parfois brodé d’or, selon l’angle, comme un tapis dans une autre pièce. Pourtant, l’eau ne coulait pas. Elle fouilla dans l’une de ses poches et en sortit une pièce d’or. Il n’y avait rien dans cette salle, et elle voulait être assurée d’une chose : ce trou qui les séparait de l’autre salle était-il bouché par du verre, ou était-ce simplement la magie qui empêchait l’eau de tomber ? La jeune femme visa le large trou carré et lança la pièce. Celle-ci tomba à plat sur la surface de l’eau avant d’entamer sa lente chute en zigzag et de disparaître brutalement. Elle avait donc affaire à de la magie. Ce qui n’était pas étonnant.
   Conclusion : pour sortir d’ici, il fallait forcément plonger… Djinshee serra les poings.
   -Ca ne doit pas être si terrible… Chuchota-t-elle.
   Pour la seconde fois de sa vie, elle avait peur. La première était sa renaissance. Quant aux autres et incalculables fois où elle avait fait face à l’Eau, ce n’était rien. Ici, tout devenait plus qu’insupportable, et l’ironie voulait qu’elle ait l’impression d’être brûlée à vif à chaque fois.
   Elle regarda le trou, puis la surface de l’autre bassin : 21 h 21. Il était temps de sauter. Elle devait sauter. Elle compta une première fois jusqu’à trois dans sa tête, mais ne broncha pas. Elle se résigna alors à prendre de l’élan, mais ça n’avançait à rien ; elle s’arrêtait toujours au bord du bain. Elle répéta le mouvement une première fois, puis une deuxième et une troisième. Sans succès. Ce n’est qu’au bout de la cinquième fois qu’elle sauta, les yeux fermés pour ne pas voir son « ennemi ».
   -C’est de la lave ! S’exclama-t-elle juste avant.
   Ce n’est qu’une fois en l’air qu’elle regretta son acte, et une fois dans l’eau qu’elle le regretta encore plus. Tout son corps fut parcouru d’un frisson en même temps qu’elle soufflait, prise de panique. Le contact était désagréable. Djinshee se sentait brûler, son cœur battait si fort dans sa poitrine qu’elle était persuadée qu’elle l’entendait. Elle rouvrit les yeux et se dirigea comme elle le pouvait vers le trou. Elle manquait cruellement d’air, mais elle savait que si elle remontait, elle n’arriverait pas à remettre la tête sous l’eau. Ses bras en avant, elle essayait d’attraper le bord du trou. Mais sa notion des distances était comme faussée. Elle battait des jambes du mieux qu’elle pouvait et parvînt finalement à se hisser vers le bas, vers l’air. La jeune femme prit une grande et bruyante bouffée d’oxygène tandis qu’elle tombait par terre. Elle ne put retenir une exclamation lorsque son dos toucha le sol. Son corps s’enflamma instantanément. Elle laissa faire. Elle était soudainement fatiguée, mais surtout essoufflée.

   -Où sommes-nous ? Articula-t-elle. 




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Mar 29 Déc 2015, 23:21

Dès que mon corps entra en contact avec l’eau, je ressentis des frissons désagréables, froids, venir descendre la courbe de mon dos. S’infiltrant comme du poison dans mes veines, mon malaise face à cet élément semblait se resserrer autour de moi, m’emprisonnant, me pétrifiant complètement sur place. Mais le temps comptait : je ne pouvais pas gaspiller les secondes qui s’écoulaient à ne rien faire, à me laisser dominer par ce sentiment d’angoisse. Je voulais bouger, je devais bouger cependant mes pensées s’entremêlaient avec cette nervosité qui s’immisçait en moi, perdant contrôle sur mon jugement de la situation qui faiblissait petit à petit. Mon instinct hurlait carrément aux oreilles, criant de plus en plus fort dans mon esprit, se cognant sur les parois de mon crâne au point que j’en avais mal. Très mal. Assourdi par la tempête qui semblait faire rage, par les flammes qui commençaient à devenir folles, je vis des étincelles qui, grésillant sur ma peau exposée au liquide, s’étouffaient dans l’eau du bain en n’y laissant qu’une mince colonne de fumée s’élever vers la surface, impuissantes. Désespérément, inconsciemment, j’essayais de me défendre contre ce nouvel ennemi en me servant de mon élément sans réussir à comprendre que je ne faisais que gaspiller mes forces, gaspiller mon énergie à travers une entreprise déjà perdue d’avance, me débattant vainement contre une chose que je ne pouvais pas affronter. La dalle que je devais atteindre était juste là pourtant : pile devant mes yeux. Je serrai et desserrai les poings, la mâchoire crispée, soudain pris par de rage face à mon immobilisation, face à mon incapacité à poursuivre cette simple petite tâche. Je sentais l’oxygène sortir de mes poumons sans toutefois revenir, je sentais que mon corps s’affaiblissait de plus en plus, que les secondes tombaient, mais je ne parvenais pas encore à bouger, comme si des chaînes me retenaient.

J’avais pourtant presque cessé de m’agiter dans tous les sens, mes mouvements n’étant plus que des gestes paresseux des bras et des jambes qui m’amenaient lentement vers le fond.  Je devais continuer. Maintenant. Avant qu’il ne soit trop tard, avant que je finisse par manquer d’air. Le temps filait dangereusement. Trop dangereusement. Seconde par seconde, mon souffle se faisait de plus en plus faible alors que des cris – de survie cette fois-ci – s’embarquaient sur les plaintes furieuses du feu qui grondait dans ma tête jusqu’à finir par vraiment les étouffer, les réduisant à de simples murmures qui me parurent soudainement si lointains. Cette nouvelle alarme qui tonnait dans mon esprit me poussa à reprendre mon avancée, d’abord très lentement, avant que je finisse par saisir la cadence, transformant mes mouvements mécaniques en gestes plus fluides et rapides alors que la dalle semblait se rapprocher de moi. L’air s’échappait de mes poumons à une allure inquiétante : mes mains tremblaient comme des feuilles au moment où je réussis enfin à toucher le morceau de céramique du bout des doigts. Je tentai de le faire glisser sur le côté, mais la dalle, plus pesante qu’elle n’y paraissait au premier coup d’œil, refusa de bouger d’un millimètre, s’obstinant à rester ancré sur son socle malgré tous ces efforts que je m’évertuais à déployer. Comme si elle me narguait. J’ignorais si c’était à cause de mon manque de force ou mon affaiblissement que je ne parvenais pas à la faire bouger, mais je commençais à m’impatienter. L’oxygène me manquait, l’angoisse revenait à la charge : après plusieurs autres tentatives qui ne se soldèrent que par des échecs, je fus forcé d’admettre que je ne tirerais rien de cette méthode. Mais que pouvais-je faire d’autre?

Mon seul moyen restant était, évidemment, de faire appel à la magie. Cependant, prisonnier dans un tel état de nervosité et de peur, je doutais que je puisse vraiment me montrer efficace sur ce coup. Sauf qu’il n’y avait pas d’autre façon, non? Je pouvais déjà sentir les dernières traces d’air quitter mon corps, mes poumons brûler, propageant une douleur aigüe à travers l’ensemble de mon corps. Les battements de mon cœur se saccadaient, semblaient être sur le bord de l’explosion. Je n’avais également presque plus de sensation sur le bout des doigts et des pieds, je parvenais à grand peine à soutenir le poids de mes vêtements mouillés contre moi. Les incertitudes n’avaient plus leur place ici : je devais agir, maintenant. Toisant profondément la dalle, je me servis de la télékinésie pour la forcer à se déplacer, imaginant son mouvement de côté avec une clarté impressionnante. Je faisais tout mon possible pour oublier les souffrances qui pesaient sur ma cage thoracique, d’ignorer le tic-tac imaginaire des secondes qui défilaient, de l’oxygène qu’il y avait en moins dans mes poumons, entièrement concentré à faire bouger cette saleté de pièce en céramique, à un tel point que je remarquai à peine la magie qui se joignit à la mienne, n’écoutant que le grondement de la dalle qui glissait de son socle. Puis, il eut un bruit sonore lorsque la dalle tomba et immédiatement, je sentis un courant d’air s’échapper de l’ouverture, m’attirant inexorablement vers ce qui me semblait être une source d’oxygène. Et je chutai.

Rapidement, je percutai une surface dure tandis que l’air traversait de nouveau mes poumons, me faisant recracher l’eau qui s’y était accumulé. Je restai en position assise pendant plusieurs secondes durant lesquelles je tentais de calmer le rythme effréné de mon cœur, observant les environs d’un œil curieux. C’était un salon où le rouge et l’or dominaient toutes les autres couleurs, enveloppant les lieux d’une atmosphère presque royale. Une pièce d’or traînait également à mes côtés : j’ignorais d’où elle pouvait bien sortir, mais il y avait autre chose qui m’intriguait plus que ce truc. Je baissai les yeux. Au plancher trônait une ouverture : je pouvais clairement distinguer les mouvements de l’eau et apercevoir les dalles qui recouvraient le fond du bain mais j’avais beau essayé, ma main ne parvenait pas à s’y enfoncer. Je fronçai les sourcils. C’était de la magie, ça ne faisait aucun doute. Je me relevai lentement, écartant du revers de la main des mèches rebelles mouillés qui me cachait la vue. Mes vêtements semblaient peser des tonnes sur mes épaules tremblantes, mes muscles me faisaient un mal de chien à chaque fois que je les bougeais et mon crâne souffrait légèrement le martyr mais, en excluant tout ceci, j’allais plutôt bien.  Je perçus une sorte de bruit étrange retentir dans mes oreilles et, me retournant sèchement pour voir de quoi il s’agissait, tomba presque nez à nez avec l’Elémentale dont le corps entier était parcouru par les flammes. Je reculai d’un grand pas, légèrement surpris par sa soudaine apparition devant moi, avant de me rendre compte qu’elle venait de poser une question. « J’en sais rien. », répondis-je en croisant les bras. Sur le plancher, à la place exacte où le trou se situait, apparurent les heures restantes: 19h37. La Vampire s’amusait avec nous, réduisant exprès le temps que nous avions – les minutes avaient semblé s’écouler si lentement lorsque j’avais plongé, mais je doutais fortement que ma perception du temps ait été autant faussée. Je serrai les poings, agacé et furieux, laissant échapper des flammes sur mon corps. Ce petit jeu m’énervait au plus haut point…« Mais on n’a qu’à le découvrir, et rapidement. », poursuivis-je les dents serrées. « Car Le temps tourne plus vite que prévu. »

1 231 mots.

Désolée pour mon loooong retard! XD J’espère que ma réponse te convient :)
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Mer 06 Jan 2016, 18:40

L’eau s’évaporait doucement, son corps et ses vêtements redevenaient secs. Elle ne s’éteignit que quand ses muscles se détendirent. Elle tremblait encore de ce terrible plongeon. C’était comme la première fois où elle s’était retrouvée sous la pluie : une atroce sensation de brûlure, un manque d’air permanent, un corps qu’elle peinait à contrôler avec des muscles qui se contractaient et se détendaient sans grande logique, des cris d’effroi qui rebondissaient inlassablement sur les parois du crâne.

   Son acolyte baissa les yeux. Elle suivit son regard, presque apeurée. De l’eau. Encore de l’eau. Même si elle conclut en même temps que lui qu’il ne s’agissait que d’une illusion, elle ne pouvait que craindre cette vision. Elle n’arrivait pas à maîtriser ses tremblements, qui étaient tout de même assez violents. Elle vit l’heure se refléter à la surface. Elle ne comprit pas tout de suite. Ils ne pouvaient pas avoir perdu autant de temps ! C’était tout simplement impossible ! Cette sale Vampire se moquait d’eux et les utilisait comme de vulgaires marionnettes. Djinshee détestait cela. Elle jouait avec sa phobie. Elle le paierait tôt ou tard. L’Elémentale la tuerait un jour pour ses affronts. Elle lui ferait regretter. L’homme annonça qu’ils devaient se dépêcher. Comme si ça ne tombait pas sous le sens… Mais elle garda sa remarque, consciente qu’ils n’avaient pas intérêt à discuter. La jeune femme fit le tour d’elle-même. Il y avait deux portes de part et d’autre du salon ainsi qu’une fenêtre, cette fois-ci en plein milieu du mur d’en face. Djinshee marcha jusqu’à elle. Ses jambes semblaient faillir à chaque pas. C’était à peine si elle les sentait. Elle s’approcha jusqu’à voir suffisamment l’extérieur. La fenêtre surplombait l’immense jardin du domaine. C’était beau, mais anormal à la fois. Trop… Superficiel, trop parfait.

   Elle se surprit à penser qu’elle adorerait briser cette vitre et descendre. Elle aurait au moins l’occasion d’être à l’extérieur, et donc d’avoir plus de chances de sortir d’ici rapidement. Bien que maintenant qu’elle avait vu de ses propres yeux de quoi ce manoir était capable, elle se doutait bien qu’il devait y avoir un nombre incalculable de pièges et de plantes mobiles. Certes, mais elle commençait à avoir la migraine. Ce lieu était oppressant, et puait la magie à plein nez. C’était un comme un parfum dont quelqu’un aurait abusé : il y en avait tellement qu’elle suffoquait. Elle passa un doigt sur le verre voir. De la buée se forma autour, puis disparut au fur et à mesure qu’il avançait. Elle eut soudain l’impression de percevoir une ondulation. Elle cligna des yeux.

   Une force invisible la tira vers l’avant, avalant son bras, suivit de la tête, puis de tout le reste de son corps. La sensation oppression s’intensifia, puis disparut presque totalement, laissant place au froid de la nuit. Djinshee retomba à plat ventre, les mains plaquées contre le sol, qui avait été changé en terre humide. A ce contact, elle se releva puis s’enflamma encore. Elle garda sa paume allumée afin d’y voir plus clair et fit le tour d’elle-même. Elle était dans un jardin, complètement différent de celui qu’elle avait vu de la fenêtre. Celui-ci était bien plus petit, car encadré par quatre murs de pierre et bordés par des plants de roses rouge sang. Au centre, un arbuste, une petite fontaine et un banc noir et doré. Un chemin gravillonné faisait le tour du jardin.

   « J’espère que mon jardin intérieur est à la hauteur de vos attentes. »


   C’était la gouvernante. Elle rit doucement. Sa voix se dissipa, donnant ses derniers échos. Djinshee poussa un cri de rage. Et en plus, l’autre n’était pas avec elle ! Elle devait le retrouver, et vite. Ils n’avaient pas de temps à perdre avec les bêtises d’une stupide Vampire, qui n’agissait que pour son plaisir. Elle avait décidément un égo démesuré… Sur les quatre qui lui étaient présentées, l’Elémentale se dirigea vers la porte qui se trouvait à sa droite. Elle l’ouvrit violemment, bien décidée à en finir. Elle en avait sérieusement marre. Elle balaya la pièce froide de sa main, l’examinant à la lueur des flammes. C’était une cave. Elle s’avança à pas lents. Cet endroit était franchement louche, en particulier dans l’obscurité. Elle descendit les quelques marches grossièrement taillées. La porte claqua derrière elle. Elle se tourna vivement et tenta par tous les moyens de l’ouvrit. En vain. Elle était enfermée ici, et allait devoir trouver une autre sortie. Prudemment, elle fit le tour de la petite salle, cherchant le moindre passage, le moindre couloir qui pourrait se cacher derrière un meuble. Mais il n’y avait rien. Absolument rien. Elle eut beau faire tomber les étagères remplies de verreries et d’antiquités sans nom, soulever les objets qui traînaient par terre, rien. Au bout de longues minutes de recherche intensive, elle se força à s’assoir sur les marches de l’entrée. L’évidence voulait qu’elle soit enfermée. Cependant, elle était persuadée qu’il y avait quelque chose, n’importe quoi. Elle ne put contenir sa colère plus longtemps. D’un geste de la main, elle fit projeter les vieilleries des étagères sur le mur d’en face, puis lança une boule de feu, qui percuta la pierre comme une explosion, mais sans la détonation, ni l’effet dévastateur. Elle regarda les flammes se disperser dans l’air et mourir, découvrant le mur noirci. Toujours rien. Elle lâcha un soupir, cacha son visage dans ses mains et posa ses coudes sur ses genoux. Si ça se trouvait, elle allait devoir attendre que son acolyte la retrouve…  

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[Quête] Course contre la montre [Djinshee/Scott D. Adams]

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